vendredi, 06 novembre 2009
Un conseil épatant
« Les maîtres et les maîtresses querellent communément les domestiques de ce qu’ils ne ferment pas les portes après eux ; mais ni les maîtres ni les maîtresses ne réfléchissent qu’il faut ouvrir ces portes avant de les fermer, et que fermer et ouvrir les portes, c’est double peine ; le meilleur donc, le plus court et le plus aisé, est de ne faire ni l’un ni l’autre. Mais si vous êtes si souvent tourmenté pour fermer la porte qu’il vous soit difficile de l’oublier, alors poussez-la en vous en allant avec tant de violence que la chambre en soit ébranlée et que tout y tremble, afin de bien faire voir à votre maître ou à votre maîtresse que vous suivez ses instructions. »
Jonathan Swift, Instructions aux domestiques (1731)
16:58 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : jonathan swift, littérature |
jeudi, 05 novembre 2009
Onze, pas un de plus
Quelle est la nécessité d’un tel livre ?
Un mauvais rébus (rebus)...
Une farce pour cuistres et pour académiciens.
Les Onze…
Une écriture sèche, nous en parlions à l’instant,
Le livre de trop qu'aura écrit Michon.
J’ai noté page 123 : « Les douze pages de Michelet sur Les Onze dans le chapitre III du seizième livre de l’Histoire de la Révolution Française, ces douze pages extraordinaires… »,
Suis donc allé dans ce chapitre III du seizième livre...
Chapitre qui se clôt par une allusion au fameux décret Lyon n’est plus,
Seule chose qui m’ait fait rire (sourire plutôt).
C’est peu.
Comment se fait-il que cette époque aille s’enticher de ce genre de livres, canular d'un potache vaguement érudit, rien de plus...
Où s'est perdue la littérature ?
22:12 Publié dans Sur le vif | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : pierre michon, les onze, littérature |
Au bal des ardents
Le jeudi 5 novembre
à partir de 18 heures,
la Librairie le Bal des Ardents
accueille
Serge Rivron et Pierre Autin-Grenier
les deux derniers lauréats du prix Léo Ferré
pour une rencontre et une lecture autour de leurs textes.
Librairie Le Bal des Ardents
17, rue Neuve / 69001 LYON
tel : 04 72 98 83 36
La librairie Le Bal des Ardents est située sur la Presqu'île, entre la Place des Terreaux (métro Hôtel-de-Ville) et les Cordeliers (métro Cordeliers).
Le prix Léo Ferré est décerné par la ville de Grigny.
Pierre Autin Grenier l'a obtenu en 2007 pour Un cri
et Serge Rivron pour La Chair en 2008.
07:33 Publié dans Des Auteurs | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : lyon, littérature |
mercredi, 04 novembre 2009
Bienfaits et méfaits d'une même solitude
« Je ne sais comment vous avez fait ; mais depuis que vous vivez dans le séjour des talents, les vôtres paraissent diminués ; vous aviez gagné chez les paysans, et vous perdez parmi les beaux-esprits. Ce n’est pas la faute du pays où vous vivez, mais des connaissances que vous y avez faites ; car il n’y a rien qui demande tant de choix que le mélange de l’excellent et du pire »
( J.J. Rousseau - de Julie à Saint-Preux – La Nouvelle Héloïse, II, 27)
15:44 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : la nouvelle héloïse, rousseau, littérature |
mardi, 03 novembre 2009
Mes Goncourt...
Je me suis amusé à dresser la liste des lauréats du Goncourt que j’avais lus, et je m’aperçois que sur la liste entière (que j’ai empruntée à Wikipédia), je n’en ai lu que douze (ou treize car 1922 et 1951 posent problèmes). Les voici ;
Le Feu (1916), A l’ombre des Jeunes filles en fleurs (1919), Le Vitriol de Lune et le Martyre de l’obèse (1922), Raboliot (1925), La Condition humaine (1933), L’Araigne (1938), Le premier accroc coûte 200 francs (1944),Le rivage des Syrtes (faut-il le compter ? – 1951), Le roi des Aulnes (1970), Rue des boutiques Obscures (1970), Les égarés (1983), Les Champs d’Honneur (1990), Je m’en vais (1999).
Oui je sais, Romain Gary et Duras on me le dit souvent, mais que voulez-vous ? Quand ça tombe des mains, ça tombe des mains….
Dans toute cette liste, le fait qu’ils aient été couronnés n’a été déterminant que deux fois (1983, 1999). J’achèterai donc celui de cette année dans dix ans (si on en parle encore)
PS. Pour tenir ce calendrier, peut-être devrais-je mettre mon nez dans Ingrid Caven : si quelqu’un qui l’a lu passe par là ...
13:12 Publié dans Des inconnus illustres | Lien permanent | Commentaires (23) | Tags : prix goncourt, lecture, littérature |
Le cimetière des chiens
Léon Bloy est mort un 3 novembre, celui de cette terrible année 1917 dont Louis Guilloux fit l’année du Sang Noir. Terrible rencontre, quand on y pense, que celle qui aurait pu se produire entre Cripure et Léon Bloy, « morts » à quelques semaines d’intervalles, finalement.
Voici un extrait du Sang du Pauvre, que Bloy écrivit de janvier à mars 1909.
A propos de cet extrait, il écrivit dans son Journal (Le Vieux de la montagne) le 16 mars 1909 : « Visité le cimetière des chiens à Asnières en vu d’un chapitre pour le Sang des Pauvres. Recueilli quelques notes quelques inscriptions bouffonnes ou odieuses. Là, plus que partout ailleurs éclate le mépris absolu du pauvre. Je reviens documenté, inexprimablement dégoûté et vomissant »
_____________________________________________________
« Un certain effort n’est pas inutile pour s’habituer à cette pensée d’une nécropole de chiens. Cela existe pourtant à Asnières dans une île autrefois charmante de la Seine. Oui les chiens ont un cimetière, un vrai et beau cimetière avec concessions de trois à trente ans, caveau provisoire, monuments plus ou moins somptueux et même fosse commune pour les idolâtres économes, mais surtout, on le suppose, pour que les pauvres appartenant à l’espèce humaine soient mieux insultés. (…)
La monotonie des « regrets éternels » est un peu fatigante. La formule de fidélité, plus canine que les chiens eux-mêmes : « Je te pleurerai toujours et ne te remplacerai jamais » surabonde péniblement. Néanmoins le visiteur patient est récompensé.
« Ma Ponnette protège toujours ta maîtresse. – Kiki, trop bon pour vivre. – Drack, il nous aimait trop et ne pouvait vivre. – Linda morte d’attachement, de fidélité d’intelligence et d’originalité (au-dessous de deux niches). - Sur ton corps le printemps effeuillera des roses.- A Folette, O ma mignonne tant aimée De ma vie, tu fus le sourire. – La brutalité des hommes a mis fin à notre amour. »
Et celle-là oh ! Celle-ci : « Mimmiss, sa mémère à son troune-niouniouse… »
On est forcé de se demander si la sottise décidément n’est pas plus haïssable que la méchanceté même. Je ne pense pas que le mépris des pauvres ait jamais pu être plus nettement, plus insolemment déclaré. Est-ce l’effet d’une idolâtrie démoniaque ou d’une imbécilité transcendante ? Il y a là des monuments qui ont coûté la subsistance de vingt familles ! J’ai vu en hiver, sur quelques-unes de ces tombes d’animaux, des gerbes de fleurs dont le prix aurait rassasié cinquante pauvres tout un jour ! Et ces regrets éternels, ces attendrissements lyriques des salauds et des salaudes qui ne donneraient pas un centime à un de leurs frères mourant de faim. « Plus je vois les hommes plus j’aime mon chien », dit le monument à Jappy, misérable cabot bâtard, dont l’ignoble effigie de marbre crie vengeance au ciel. La plupart de ces niches sans abois sont agrémentées, pour la consolation des survivants d’une photographie du pourrissant animal. Presque toutes sont hideuses, en conformité probable avec les puantes âmes des maîtres ou des maîtresses. « Les attractions, a dit Fourier sont proportionnelles aux destinées. »
Je n’ai pas eu le bonheur d’assister à un enterrement de 1ère classe. Quel spectacle perdu ! Les longs voiles de deuil, les buissons de fleurs les clameurs et les sanglots de désespoir, les discours peut-être. Malheureusement, il n’y a point de chapelle. Avec un peu de musique, la Marche Funèbre de Beethoven, par exemple, il m’eût été facile d’évoquer le souvenir des lamentables créatures à l’image de Dieu portées, après leur mort, dans les charniers de l’Assistance et enterrées à coups de souliers par des ivrognes.
Toute caisse contenant un animal mort dit l’article 9 du règlement sera ouverte pour vérification à son entrée au cimetière. Ce très sage article a sans doute prévu le cas où quelque putain richissime y voudrait faire enterrer son père. »
Le sang du Pauvre, « les deux cimetières » (chapitre XIX), 1983 réed. Mercure de France
12:35 Publié dans Des Auteurs | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : littérature, cimetière des chiens, sang du pauvre, léon bloy |
Billets rêvés
« La monnaie des pays que l’on veut connaître et comprendre en dit bien souvent plus que les peuples eux-mêmes sur leurs chefs, leurs aventures, leurs aspirations, leurs soucis, leur orgueil. La monnaie, c’est l’histoire qui court les rues, c’est un témoignage involontaire des pensées secrètes et communes, que les hommes se passent de main en main»
(Henri Béraud, Ce que j'ai vu à Rome -1929)
Rêveries autour de billets
- Charles Péguy & le premier billet de cent francs
- Les vingt-cinq francs de Flaubert
- Pour cinq mille balles de mythologie
- Arthur Rimbaud et le square de la préfecture
- Françoise Sagan et Georges Pérec
- Taille douce d'une star du muet
- L'empereur du faux-monnayage
- Vingt--cinq francs et des faux-monnayeurs
- Stasiuk et les zlotys de son enfance
04:43 Publié dans Les Anciens Francs | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : billets français |
lundi, 02 novembre 2009
Les Jours des Morts de Léon Bloy
1894 - 1917 : A travers ses journaux (Le Mendiant Ingrat, Mon journal, Quatre ans de captivité à Cochons-sur-Marne, L'invendable, Le vieux de la Montagne, Le Pélerin de la Montagne, Au seuil de l'Apocalypse La Porte des Humbles) Léon Bloy, qui vit le tournant du siècle et La Belle Epoque dans une misère quasi totale, consigne ses sentiments presque chaque 2 novembre de chaque année. Florilège :
2. Novembre 1894 :
La seule vraie dévotion c’est la pitié pour Jésus c’est-à-dire la compassion pour Marie.
Cimetière Montparnasse. La foule heureusement n’est pas trop compacte. Mais cette visite annuelle des parisiens à leurs morts est si banale que je recueille dans l’air ambiant, l’idée que voici : Pourquoi une agence de publicité n’exploiterait-elle pas les tombes, comme on exploite les parois des urinoirs ou les plafonds des omnibus ? On lirait ainsi l’annonce d’un chocolat nouveau ou d’un dentifrice américain sur les dalles tumulaires, et les murs disponibles des édicules manifesteraient les quatre-vingt mille guérisons récentes, obtenues par l’emploi de tel pharmaque dont l’éloge n’est plus à faire, etc etc…
Une chose pourtant n’est pas ridicule. C’est l’illumination des petites chapelles. N’ayant jamais visité aucun cimetière, le Jour des Morts, j’ignorais cette coutume. Si on ne fermait pas les portes, quelle promenade, en priant les rues solitaires et illuminées de cette ville des âmes qui souffrent, des âmes qui ne peuvent pas parler et qui sont ainsi des âmes enfants !
Sortis de là et assis dans un café, nous sommes environnés d’êtres soi-disant humains, venus aussi des cimetières, et qui nous paraissent moins vivants que les dormientes qui nous ont émus tout à l’heure. Mannequins affreux, sous les hardes qui leur donnent une apparence d’humanité.
2 Novembre 1895 :
Lu dans Le Journal une interview, par correspondance, de plusieurs personnages importants à qui on demande ce qu’ils pensent de la mort. ( !!!) Je ne me souviens pas d’avoir lu rien de plus médiocre de plus abject. La seule bonne réponse je crois est celle de Gérôme disant que la mort a, du moins, ceci d’agréable qu’elle délivre de toutes les crapules avec qui on est forcé de prendre contact.
Jeanne me dit : -La nature humaine est telle qu’on ne peut pas ne pas craindre la mort. Mais quand ce moment redoutable sera passé, on se dira : Combien c’était simple ! et comment avons-nous pu ne pas voir combien c’était simple
2 Novembre 1897 :
Merveilleuse gredinerie du propriétaire assassin qui ayant abusé de la situation lamentable d’une veuve paralytique ignorante et terrifiée, pour lui soutirer des signatures, la dévalise maintenant et la cambriole en sécurité sous l’œil de la juste loi. De notre côté impuissance et cauchemar. Ce démon que j’ai essayé de peindre dans un de mes livres passe ici pour la crème des honnêtes gens.
2 Novembre 1899
La misère des morts en un siècle privé de foi est un arcane de douleur dont la raison est accablée. Il m’est arrivé, pourquoi ne le dirais-je pas, d’être réveillé par les morts, tiré de mon lit par les morts – par des morts que je connaissais et par d’autres que je ne connaissais pas. Une pitié terrible me précipitait, me maintenait à genoux les bras en croix, dans les ténèbres, et, le cœur battant comme une cloche sourde, je criais vers Dieu pour ces âmes…
2 Novembre 1901
Jour des Morts. J’apprends la mort de Julien Leclercq. Nouvelle extrêmement pénible, dont je suis assommé. C’était un de mes rares amis. Où est-il maintenant, ce pauvre malheureux Quelle effrayante pensée ! Mais il n’était pas un méchant et j’espère qu’il a trouvé miséricorde. Qui priera pour lui excepté moi seul, peut-être ?
2 Novembre 1902
Jour des Morts. Les conséquences du mal qu’on a fait retournent continuellement à leur source – tourment des âmes des damnés et des âmes du Purgatoire – à moins qu’on ait interrompu le courant et coupé le câble en devenant un saint.
Les esprits n’ont pas de lieu. Cependant on peut dire que certaines âmes sont enfermées dans un certain lieu, le Purgatoire, par exemple. Mais il faut entendre cela au spirituel, à savoir que certaines choses indispensables leur sont cachées. Leur ignorance constitue leur captivité.
2 Novembre 1905 :
Jour des Morts. Entendu à la Basilique, le plus misérable sermon. Je songeais au discours à faire sur ces mots de la liturgie : « Vita mutatur non tolitur, Apprenez, mes frères, que vous ne devez pas mourir »
Je pense que ce sera la punition des riches de ne pouvoir pas donner. Je me figure ainsi l’enfer et je vois les riches cherchant partout, jusque dans les plus puantes cavernes et les recoins les moins accessibles de leur âme désespérée, quelque chose à donner. Mais ils seront épouvantés de ne trouver que du fumier, un fumier palpable mais sans cesse évanouissant, et qu’ils ne pourront même pas -étant immatériel et qualité toute pure-, avoir la ressource de vendre au poids. Mais une si épouvantable stérilité est nécessairement éternelle puisque dans leur vie, ils n’auront jamais cessé de ne vouloir pas donner.
2 Novembre 1907 :
Jour des Morts – A 6 heures réveillé par un cri horrible que n’avait proféré aucun vivant. Je voudrais que Dieu fit brûler mon cœur
( le lendemain, 3 novembre, Bloy consigne : « Lettre de faire part de la mort de Alfred Jarry, auteur de Ubu Roi, décédé à l’hôpital de la Charité à l’âge de 33 ans. Les obsèques auront lieu à Saint-Sulpice. Bien, mais comment est-il mort, et après quelle vie ? Je pense au cri affreux entendu hier, et qui m’a jeté en bas de mon lit.
2 Novembre 1912 :
On m'envoie une feuille bordelaise, Sports, où je lis ce titre : La Toussaint sportive ! Blasphème dans l'inconscience et la stupidité absolues
2 Novembre 1914 :
Brou vient me voir. Il a un terrible emploi chiennement retribué d'ailleurs à la mairie de son arrondissement, service des allocations, où il voit défiler du matin au soir les plus affreuses misères. On se réjouit comme on peut de la déconfiture désormais probable des Allemands.
2 Novembre 1915 :
Journée de lecture.
Le soir vers 6 heures, visite agréable de Henri Boutet qui me trouve en meilleur état et se réjouit d'apprendre que mon livre sera édité. Commencé aujourd'hui la lecture quotidienne de l'office des morts, ayant décidé de le lire tous les jours de ce mois.
2 Novembre 1916 :
Lettre de Termier m'envoyant une somme de la part d'un ami qui veut demeurer anonyme. Dès le commencement de leur mois, les morts semblent se déclarer en ma faveur.
A Termier : J'ai reçu avec émotion ce que les défunts m'ont envoyé par lui... Je suis depuis longtemps en commerce avec eux et, bien souvent, ils m'ont secouru...
Le 2 novembre 1917 : Léon Bloy n'a rien écrit, son journal s'interrompant à la date du 20 octobre 1917 sur ces mots : "Après-midi, mandat de 50 francs envoyé par Lamoureux. Jeanne lui répond."
Léon Bloy est mort le samedi 3 novembre 1917, à 6 heures 10 (du soir) très exactement aux dires de sa femme Jeanne. Selon sa propre expression parlant de son fils André, il avait l'air, écrit-elle "d'un Capitaine des Anges"...
15:34 Publié dans Des Auteurs | Lien permanent | Commentaires (15) | Tags : jour des morts, littérature, léon bloy, alfred jarry |
dimanche, 01 novembre 2009
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20:53 Publié dans Bouffez du Lyon | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature lyonnaise |