mardi, 30 juin 2015
Des pensées humaines...
Canicule annoncée, terrorisme et crise grecque : cette fin de mois de juin fait vivre les populations dans un climat d’accablement et d’impuissance exacerbés, qui rend tout simplement absurde la simple idée de partir en vacances. Comme si où que chacun allât, nous étions tous enfermés dans un même lieu, une sorte de fournaise collective dont rien ni personne n’émerge, une nuée de laideurs communément partagées, une confusion des valeurs et une inversion des aspirations les plus nobles, bref, dans ce mal informel et avare d’originalité auquel le divertissement sociétal nous livre ; ce mal qui attriste et salit le monde, ce magma de « pensées humaines », dont nous ne demanderons jamais assez d’être à jamais affranchis, « sed libera nos a malo »…
Saint Thomas d’Aquin, dans son commentaire de l’oraison dominicale, explique nettement combien cette dernière demande du Pater Noster, «libère-nous du mal », ne peut être une fin en soi. Mais un simple moyen pour que la première demande, « Que ton Nom soit sanctifié » (« sanctificetur nomen tuum » qui est, elle, la seule finalité de la prière) arrive.
Que les hommes soient délivrés du Mal pour demeurer entre eux dans leurs vaines pensées, à quoi bon en effet, si le Nom de Dieu n'est pas sanctifié par tous ?
Mais cela, comment nos bons humanistes [qui ne voient plus que l’homme partout, l’homme et ses valeurs, l’homme et sa démocratie, l’homme et sa science, l’homme et sa survie, l’homme, ses Droits, ses œuvres et ses pensées] pourraient-ils encore l’entendre, le souhaiter et le murmurer, agenouillés devant un autel ?
Eux qui, dès qu’ils se trouvent confrontés au Mal dans sa version extrême, poussent des cris d’orfraie et engagent des dissertations aussi inutiles que ridicules sur ce que doit être ou non une civilisation ? Ah, la ronde Aubry et sa « brillante civilisation arabo-musulmane », Valls, Bush père et fils et tutti quanti, quelle rigolade !
Comment ces bons humanistes qui ont oublié une bonne fois pour toutes le visage du Dieu venu racheter, sur l’arbre de la Croix, le Mal qu’ils sont eux en essence, comment seraient-il capables de le prier ? Tout ira de mal en pis, c’est certain, car ils ne veulent être délivrés du Mal que pour eux-mêmes, et sont déjà perdus.
Hier et aujourd’hui, pendant ce temps-là, l’Eglise fête ses deux apôtres, Pierre et Paul.
En mémoire vive de ses deux colonnes principales, l’Eglise doit plus que jamais ne pas être confondue –même s’ils sont admirables – avec les bâtiments qui partout la composent. Même si, à peine béni pour avoir reçu cette révélation « non de la chair et du sang, mais du Père qui est dans les Cieux » (Mathieu XVI – 17), Saint Pierre se retrouve, par le Christ lui-même, traité de Satan [« car tu n’as pas d’intelligence des choses de Dieu, tu n’as que des pensées humaines » (Mathieu, XVI, 23…)], son corps mystique demeure une assemblée de pécheurs repentis autour de l’hostie, participant d’un combat commun contre le même ennemi. C’est la raison pour laquelle le Christ a dit que « portae inferi non praevalebunt adversus eam » (les portes de l’enfer ne prévaudront pas contre elle). Et dans la fournaise humaine dont il était question plus haut, cela reste in saecula saeculorum d’une cuisante actualité pour nous tous…
Giotto, Saint François d'Assise chassant les démons
02:29 Publié dans Sur le vif | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : giotto, saint-françois d'assise, grèce, attentats, canicule, christ, religion, france, enfer, saint paul, saint pierre, actualité, littérature, christianisme |
mardi, 06 janvier 2015
Le mangeur de fèves
D'une certaine façon, bien plus que l'euro qui plonge à nouveau, Michel Houellebecq qui publie Soumission, ou Adjani qui refuse de jouer dans l'adaptation du récit de Trierweiler, c'est lui le héros du jour, l'anonyme du moment, comme on dit sur certaines chaines. Il trône dans la salle de l'apothéose du palais Colonna, col ouvert et coude levé. Si dorées et croustillantes que scintillent à votre œil les galettes des vitrines de janvier shootées à l'appétant, vous n'engloutirez jamais en un mois autant de fèves que lui en un repas. D'ailleurs nous, nous les recrachons, les fèves de notre temps, lorsque le bout de la dent s'y heurte au détour d'un malaxage prudent. Parait même qu'aux États-unis, la fève s'achète séparée de la galette, par crainte des procès que le client qui s'y casserait les dents pourrait entreprendre. De fèves, les figurines de l'Épiphanie ne conservent donc que le nom, comme bien des ustensiles de notre monde faux. Petits tacots, instruments de musique, personnages de comics, objets surprises en tous genres pour fabophiles de tout crin : ce qu'on risque de trouver dans une galette est aussi varié que la fève d'antan était banale, comme si le signe avait pris sur lui l'intérêt de la chose qu'il représentait : les trois Rois se sont démultipliés en autant de citoyens depuis que les couronnes en papier de Melchior, Balthazar ou Gaspard emplissent les cartons de, nos pâtisseries. Suceurs et non plus mangeurs de fèves, nous pouvons tirer les rois tant qu'on veut, une fois, deux fois, trois fois, en famille, au boulot, et ce jusqu'à la fin du mois, tant l'unique se démultiplie sans vergogne dans cette société qui se prétend en crise, et qui l'est bel et bien, mais peut-être pas par le bout, le coin où elle le prétend.
Annibale Carracci, le mangeur de fèves, 1583, galerie Colonna, Rome
12:13 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : melchior, balthazar, gaspard, épiphanie, fabophile, houellebecq, adjani, france, culture, actualité, fèves, palais colonna, carracci |
mardi, 25 novembre 2014
François au parlement
Cela fait un peu comme Martine à la plage, mais c'est moins drôle. Moi, un pape qui invoque les grandes utopies, en appelle aux valeurs humanistes, cause multipolarité et transversalité, quand il dispose d'une réflexion théologique vieille de deux millénaires je me méfie. Quand de Rome Jean Paul II criait France qu'as-tu fait de ton baptême ? François crie à Strasbourg Europe, qu'as-tu fait de tes valeurs ? On mesure le glissement sémantique. Une partie des catholiques de gauche se réjouit de la bonhomie et de la jovialité de ce jésuite qui ressemble un peu à Fernandel, houspille la technocratie et s'inquiète du sort des malheureux. Et me diront que je n'ai pas à donner des conseils au pape, certes, certes. Comme Mélenchon - mais pour de toutes autres raisons - j'irai cependant m'étonnant que, de passage à Strasbourg, il n'ait pas fait un détour par la sublime cathédrale où Marie a dû, stupéfaite, l'attendre en vain, et le Christ s'inquiéter de l'entendre si souvent parler de "l'Europe, l'Europe" (ce grand machin, pour paraphraser De Gaulle ) et si peu de son Royaume.
Il ne faut pas s'étonner que les bancs des églises se vident inexorablement depuis Vatican II. Quand une religion, en matière d'absolu, n'a plus à offrir qu'un point de vue sur le monde et la sauvegarde de grandes utopies désincarnées, on comprend que la plupart des vivants se détournent d'elle, principalement des jeunes. On comprend le pullulement des sectes depuis un demi-siècle, jusqu'à celui de ce DAESH dont les vidéos prolifèrent sur le web sans que personne parmi les citoyens lambdas ne soit en mesure de déterminer jusqu'à quel point elles sont ou non un montage. Croire : dans cette société globalisée, médiatisée, mondialisée, il faudrait croire naïvement en une Parole qui se limiterait à la parole des chefs d'État, les Obama, Merkel, Schulz, Juncker, Hollande parmi lesquels il n'est pas prouvé que le vicaire du Christ ait sa place - en tout cas en tant que prédicateur.
Pie XI, dans l'Encyclique de 1925 Quas Primas, qui faisait l'objet du billet précédent, tenait un tout autre discours, dont voici quelques brefs extraits :
«Quand les Juifs, et même les Apôtres, s'imaginent à tort que le Messie affranchira son peuple et restaurera le royaume d'Israël, il détruit cette illusion et leur enlève ce vain espoir; lorsque la foule qui l'entoure veut, dans son enthousiasme, le proclamer roi, il se dérobe à ce titre et à ces honneurs par la fuite et en se tenant caché; devant le gouverneur romain, encore, il déclare que son royaume n'est pas de ce monde. (...)
Néanmoins, tant qu'il vécut sur terre, il s'est totalement abstenu d'exercer cette domination terrestre, il a dédaigné la possession et l'administration des choses humaines, abandonnant ce soin à leurs possesseurs. Ce qu'il a fait alors, il le continue aujourd'hui. Pensée exprimée d'une manière fort heureuse dans la liturgie : Il ne ravit point les diadèmes éphémères, celui qui distribue les couronnes du ciel »
A Méditer
17:20 Publié dans Sur le vif | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : françois, strasbourg, pape, christianisme, actualité |
mercredi, 06 novembre 2013
Tranche de vie en France hollandaise
Je ne m’inquiète pas pour le sort de cette désormais grande bourgeoise de Taubira, politicienne rouée autant que rompue aux coups. Elle a été nommée par le pingouin pour jouer le chiffon rouge et exciter les militants les plus radicaux du FN dont la montée, croit le pingouin, devrait lui assurer une risible réélection digne de celle de Chirac en 2002. Cet homme est un expert dans les mauvais remake, il a sa revanche de petit acteur de seconde zone à prendre, c'est terrible ! Je ne m’inquiète pas parce que la Christiane fait le job, tout simplement, comme le Manuel à l'autre coin de la cheminée, et ma foi assez joliment. Faut dire aussi que le job est bien payé. Sauf que le coup de l’antiracisme, on nous l’a déjà fait, et ça ne prend plus.
Ça ne prend plus d’ailleurs auprès de beaucoup de gens, fort heureusement. Je m’inquiète davantage pour l’état de la société placée aux commandes des manœuvres politiciennes du pingouin et de ses sbires sans scrupules. Pour preuve, cet incident : nous rentrions dans l’autobus, deux profs, assez fatigués d’une journée de cours, comme d’autres travaillant dans divers secteurs, claqués aussi. Soudain, une bande de jeunes arabes assis au fond fout le bordel, parle fort, lance de la musique, donne des coups dans une banquette, interpelle tout le monde. Une femme un peu plus âgée (vingt-cinq ans) leur demande d’arrêter. Ils ont l’air de se connaître, encore que ça ne soit pas sûr. Début d’une altercation qui demeure uniquement verbale, même s’il me semble voir voler un chewing-gum qu’on lui colle dans les cheveux.
C’est de la bonne racaille. Des pros. Ils viennent de se lever, partent en virée dans les bus la nuit tombée. En forme, quinze à vingt ans, coupe mi-nazis, mi gigolos, même air d’ailleurs de petits jouisseurs vides. Pratiquants sans doute de sports de combat dans des salles de sport bien équipées, avec l’argent de l’économie parallèle des cités. Tout le monde se sent bien con, sa journée dans les pattes. Personne n’a envie d’intervenir, heureusement la femme est partie, et l’incident semble clos.
Entre eux, ils commencent à se traiter, comme ils disent, l'air con, s’envoyer des coups sur la tête mutuellement, tant que ce n’est qu'entre eux se dit tout le monde... Soudain, le bus est à l’arrêt, voilà qu'ils s’en prennent à la porte, la secouent, en se crachant dessus les uns les autres, en poussant des cris. La porte ne ferme plus. Mollards dégoulinant sur la vitre. Tous s’en vont, il y a dégradation de matériel, ça craint. Des animaux.
Pas de flics à l’horizon. Quand bien même il y en aurait, que risquent-ils ? Deux d'entre eux réinvestissent le bus. Un homme, excédé, leur dit ce qu’il pense. Les injures fusent. Bientôt les autres rappliquent, le temps que le chauffeur ferme le bus. On traite l'homme qui est intervenu de bâtard, il réagit, le ton monte. Les têtes se couvrent de cagoules. Tout ça se réglera dehors.
Nous sommes deux à rentrer du lycée, nos cartables à la main. Nous descendons au même arrêt que l'homme. Il y a un tunnel pour piétons. Désert. Il l’emprunte en courant devant nous. La nuit est tombée. La racaille contourne le tunnel par la route pour le coincer à l'autre bout. Le mec a le temps de rentrer dans un café, les autres n’ont pas le temps de le rejoindre. Qu’aurions-nous pu faire, à deux, seuls, s’ils l’avaient tabassé à sept devant nous ? Tout ça se passe à Lyon, ville jadis civilisée.
Et pendant ce temps là, l’Assemblée des Impuissants continue à prendre des airs de vieille fille outragée ! Pauvre Christiane, traitée de singe par une dangereuse tête de liste du FN ! Elle a déjà le soutien de Leonora Miano, le récent prix Fémina. Mais que tout ce beau gratin se souvienne qu'on ne changera pas aussi facilement les gens qui vivent loin des paillettes : Christiane a fait du bon boulot et ça marche. Marine a gagné 20% d’électeurs dans le bus, ce soir, au bas mot. Le pingouin cependant devrait faire attention. Machiavel volait à une autre hauteur que ses cheveux teints et ses bésicles de travers. Sa stratégie nulle, ses manœuvres bas de gamme, risquent bien non pas de lui assurer une réélection, mais de lui coûter la fin anticipée de ce lamentable quinquennat en cours. C'est ce que je finis par espérer. Et ce ne sont pas les incantations des deux B qui changeront grand-chose à la valse des faux-culs....
20:31 Publié dans Aventures post-mortem de la langue française | Lien permanent | Commentaires (39) | Tags : léonora miano, valls, taubira, sécurité, le pen, france, socialisme, politique, actualité |
vendredi, 01 février 2013
Conférence sur Francis Popy
Si les Croix-Roussiens connaissent le parc Popy, la plupart ignorent que Francis Popy fut un compositeur de la Belle Epoque qui connut son heure de gloire, avec notamment l’une des valses qui furent jouées lors du naufrage du Titanic, Sphinx.
Né au 7 place commandant Arnaud, le 1 juillet 1874, Popy fait donc partie du patrimoine musical de Lyon, avec également de multiples pièces pour piano, dont une polka des petits minets dont le titre est comme resté dans son jus. Le 20 février prochain, L’Esprit Canut propose une conférence sur ce compositeur oublié qui porta beau la moustache, et dont tous les spectateurs du film de James Cameron entendirent quelques notes. Faites passer le mot, et venez nombreux (toutes les infos sur l'affiche, cliquez pour agrandir)
13:37 Publié dans Bouffez du Lyon | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : lyon, croix-rousse, esprit canut, popy, titanic, sphinx, musique, actualité, belle époque, james cameron |
mercredi, 26 septembre 2012
Sur le racisme anti-blanc
Si drôle, et tellement consternant, cette défiance de la gogôche et de la droâte bien pensante, à l’égard du racisme anti-blanc. Le racisme serait une invention de la colonisation, une invention des blancs ? Les gens de couleurs, comme on le dit pudiquement, ne le ressentirait pas, entre eux et à l'égard des blancs ? Foutaise ! Car il est partout, le racisme, c’est évident !
Me souviens d’une amie black avec laquelle j’attendais en vain un jour à Hong-Kong qu’un taxi s’arrête. Hong-Kong : Allez voir si les «faces de citrons» de là-bas aiment les «nègres», ce qu’ils en pensent, ce qu’ils en disent… Mais ça fonctionne dans tous les sens, le racisme, et dans beaucoup de pays de manière bien plus forte qu'en France. Tous les voyageurs qui ont cessé un jour de lire Libé dans un aéroport le savent.
Nier qu’il y ait chez certains arabes ou certains asiatiques un racisme anti-français ne relève même pas de l’angélisme mais de l’idiotie. Ou de l’inconscience. Ou de l’aveuglement dû à certains comptes en banque. Car le racisme c’est d’abord un truc de pauvres. D’arabes pauvres et incultes comme de blancs pauvres et incultes, de chinois pauvres et incultes ou de noirs pauvres et incultes : quand le pognon est là, quelle que soit la couleur de la peau, ça arrondit certains angles. Le pognon, ça force la civilité. Vérité de tous temps.
Mais dans les cités, les collèges, entre pauvres on se fait la guerre. Et ça passe, n’en déplaise aux classes dominantes et à leur représentation policée du monde, par ce sentiment ou cette sensation dont il ne suffit pas de dire qu’elle est haïssable pour la voir s’envoler comme au cinéma, quand les violons surgissent et que les héros se roulent un patin grandeur panoramique.
Oui, un racisme anti-blanc s’exerce en certains lieux. Bien sûr. Et, oui il peut être violent. Et bien sûr que c’est dangereux de le nier, surtout quand on prétend être responsable et proche du terrain (on ne dit plus proche du peuple dès que la campagne électorale est terminée, z’avez remarqué ?).
Quant à l'Histoire, elle nous apprend assez qu'il n'y a d'anges nulle part, que tous les peuples se sont mis en servitude ou en esclavage les uns les autres dès qu'ils en ont eu les moyens, et que tous ces psaumes d'auto-flagellations conduits par une classe politique blanche, veule et irresponsable tiennent bien souvent plus du révisionnisme et du lieu commun que de la vérité.
Ce qui demeure le plus consternant dans ce type de polémiques, c'est qu'elles ne servent qu'à masquer les enjeux économiques ou nourrir de part et d'autre des stratégies politiciennes (SOS racisme et la petite main de Jacques Pilhan furent, de ce point de vue, une des plus percutantes mais pernicieuses trouvailles des stratégès en communication politique de ces dernières années, ).
Touche pas... Qu'importe le complément, pouvu qu'on ait l'injonction...
23:10 Publié dans Sur le vif | Lien permanent | Commentaires (20) | Tags : copé, estrosi, racisme anti-blanc, société, actualité |
lundi, 03 septembre 2012
Moon K.O par pneumonie
Le révérend Moon est mort d’une pneumonie. On peut considérer que c’est une bonne nouvelle, puisque ça fait un escroc nonagénaire de moins sur Terre. En même temps, des milliers de disciples (qui le considéraient comme leur Vrai Parent) en pleurs sont tout prêts à adorer sa sacrée dépouille en son mausolée. Si l’homme est enfin out, le guru, lui, subsiste. Enfants de Dieu, Témoins de Jéhovah, Hare Krishna, Moon furent, dans les années soixante-dix, les principaux prédateurs sectaires à fleurir en toute liberté alors que de multiples discours mondialisant se faisaient entendre ça et là. « Le monde, chantait Graeme Allwright , se prépare à un grand changement », tandis que les Beatles donnaient benoitement dans la méditation transcendantale du Maharishi Mahesh Yogi. Des sectes d’inspiration bouddhistes, hindous, christiques pullulaient à chaque coin de rues ; celles qui n’ont pas très vite fait faillite sont devenus des PME prospères, voire des trusts internationaux, tel celui de Moon, le milliardaire qui a avalé ce jour son extrait de naissance.
Il parait difficile d’expliquer à un adolescent d’aujourd’hui, confronté à un discours vieux de quarante balais sur la crise et à ses effets ravageurs tant sur l’économie que sur la vie de l’esprit au sens le plus large du terme, comment de tels imposteurs ont pu s’imposer à une population pourtant cultivée. Habilement, tous ont su surfer sur un vide spirituel béant à l’époque, provoqué à la fois par une Eglise catholique vidée de son substrat par Vatican II, une idéologie républicaine peinant déjà à trouver ses marques face aux désordres du monde, des idéologies comme le communisme à bout de souffle. Et même si le phénomène sectaire s’est en quelque sorte banalisé depuis, il a diffusé dans la société un certain état d’esprit que les marchands du libéralisme n’ont pas manqué d’exploiter : celui du « développement personnel », notamment, constitué d’une certaine abdication de la mémoire devant le culte de l’instant, un renoncement profond au collectif au profit du culte de soi, un laxisme matiné de permissivité face à tout ce qui relève de la tradition. Cet esprit sectaire a contribué à créer un monde sans émerveillement ni ressentiment, un monde à la spiritualité molle et diversifiée, quand elle n'est pas absente ou usurpée, où des individus, faciles à abuser sont déclarer tout-puissants et égaux entre eux, quand jamais ils n’auront été livrés aussi démunis aux feux de la propagande et de la manipulation. Moon est mort, oui. Pas son sale esprit, ni le terreau funeste, les terres destructurées sur lesquels il essaima.
21:23 Publié dans Des inconnus illustres | Lien permanent | Commentaires (19) | Tags : moon, sectes, actualité |
mercredi, 04 juillet 2012
78,4 % (Lisbeth)
C'est un classique du mois de juillet pour les étudiants et lycéens : l'attente des résultats. Nous avons tous connu cette sensation mitigée, faite de certitude et de doute, d'espoir et de crainte, d'envie de faire autre chose et d'incapacité à penser à autre chose justement, bref. Les résultats du bac cette année sont le 6 juillet. Plus que deux jours à poireauter.
En attendant, histoire de prendre un peu de recul, et d'en rire, je republie ce petit croquis qui depuis 2009 demeure d'actualité :
78,4 % de réussite au bac du premier coup. Les 80 % qu'ambitionnait le ministre Chevènement à la fin des années quatre-vingts seront bientôt atteints. Alléluia. Moi qui ne connait qu'un dixième seulement des tripatouillages administratifs et des petits arrangements pédagogiques à l’origine du phénomène (mais un dixième, c’est suffisant pour avoir une idée approximative de l'ensemble), je garde raison et ne m’enflamme pas : l’humanité, dans sa version occidentale (et plus spécifiquement franchoullarde) n’est pas soudainement devenue plus intelligente, plus spirituelle, plus cultivée - si tant est que l’obtention du bachot ait jamais été un symptôme d’intelligence, de spiritualité et même, osons le mot, de culture. Et tous les petits Français ne sont pas des génies, loin s'en faut. Mais le chiffre est séduisant et brille sur le papier de tous les quotidiens : 78,4%... Et on se dit : qu'en sera-t-il après le fameux rattrapage ?
Tout à l’heure, j’étais dans un bar tenu, disons, par Lisbeth. Lisbeth est aussi volumineuse que son mari est long et sec. Lisbeth est vive, autant que son mari parait éteint. J’aime bien leur bar, parce qu’ils ne servent pas de repas à midi, ne font pas chier les gens ni avec de la musique ni avec la radio, ne demandent pas à être payés dès la consommation posée sur la table et savent encore, comme les gens d’un siècle désormais enfoui dans l'ère pré-technologique, rester tranquilles en silence ou en papotant discrètement derrière leur comptoir. Bref Lisbeth et son mari sont des gens, disons, normaux.
Mais aujourd’hui, grand émoi.
La fifille à Lisbeth vient d’avoir son bachot.
Lisbeth, elle ne tient donc plus en place et le clame à la terre entière, par portable interposé.
Elle fait, semble-t-il, le tour des mères des copines et des copains de Fifille, laquelle s’est déjà barrée, entre parenthèses, pour une semaine sur les bords d’un lac suisse, en raison de cet exploit remarquable. Laquelle, à entendre sa mère s’épuiser en longs récits, s’est déjà saoulée toute la nuit avec des poteaux. On la sent, Lisbeth, en pleine communion spirituelle avec Fifille, qu’elle voit déjà, débordante de vanité filiale et d'espoirs middle-class, sur les bancs d’HEC.
Seulement voilà.
Lisbeth découvre, au fil des appels, que tous les rejetons & rejetonnes des copines à qui elle annonce la bonne nouvelle ont aussi gagné le gros lot. Les bourgeons s'embourgeoisent.
Au début, elle est vachement contente pour eux, ça se voit aux petits gloussements de dinde qu’elle émet. Et de partager leur expérience commune de mamans ravies. Quand même, on n'est pas si mauvaises que ça !
Une fois.
Deux fois
Trois fois.
Quatrième fois, une ombre se glisse dans la joie jusqu’alors limpide du visage grassouillet de Lisbeth.
Ah bon, il a eu son bac aussi ? Avec mention AB aussi ? Ah bon ? Les traits se figent.
Ah bon !
Elle se retourne vers, disons Robert, l’air dépité : T'entends ? ( non, il entendait pas, Robert. Il trainait son pas lent derrière le comptoir, un torchon sur le polo Lacoste, et pensait on sait pas trop à quoi, d'ailleurs... ) Cédric Machin l’a eu aussi, qu’elle gueule. Tout le café en profite.
Et ce n’est pas tout.
Voilà qu’elle apprend, non c’est pas possible, elle a toujours été nulle, que Charlotte Truc aussi a décroché le pompon, que l’autre idiot de Guillaume Bidule, aussi, et Magali, et Thomas, et Virginie, bref, tout le quartier a eu son bac, le bac à Fifille, "incroyable", qu'elle finit par lancer à son mari, c’est affreux …
Lisbeth, vaniteuse et décomposée se pose sur une banquette.
Bon, dit-elle à la dernière de ses interlocutrices, je fais quand même l’apéro prévu la semaine prochaine, le bac, ça reste le bac qu’elle fait, hein, euh…
78,4… De toute façon, croyez-moi, et c’est sans doute pas plus mal, ce Bac Big-Bazar vit probablement ses dernières années : un contrôle continu suffira bientôt pour faire la circulation routière dans les voies sinueuses de l’orientation scolaire.
Mais quel bon connaisseur du genre humain a dit un jour : « C’est important d’être heureux, à condition que les autres ne le soient pas ?
13:54 Publié dans Sur le vif | Lien permanent | Commentaires (19) | Tags : bac, bachot, baccalauréat, éducation nationale, lisbeth, politique, éducation, actualité, société |
mercredi, 11 avril 2012
Gazette de Solko n°24
12:36 | Lien permanent | Commentaires (26) | Tags : solko, hollande, politique, actualité |