Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

dimanche, 26 février 2012

L'âge des gens

Je ne retiens jamais l’âge des gens. Indélicat. Mouvant. Et puis, ça ne sert à rien. Qu’à blesser ceux et celles qui s’imaginent « qu’on a en réalité l’âge de son cœur », jamais celui de ses artères… Des idéalistes, tout ça, hein. Bien compris qu’on n’a en réalité que l’âge de ses artères. Ou plutôt, qu’elles ont le nôtre.

En revanche, je retiens toujours l’année de naissance des gens. Leur point de départ dans l’histoire et la génération. Parce qu’on ne peut pas tricher avec son point de départ,  feindre d’être né en 80 quand on est né en 70. L’année de naissance ne change pas. Il y a ceux qui sont nés en 29, en 34 (avant guerre) en 47 (début du baby-boom), en 55 (fin du baby-boom) en 65, (avant 68) en74 (après 68)  en 91 (encore le vingtième) en 2003 (déjà le vingt-et-unième)… Beaucoup plus authentique ; on sait en gros ce qu’ils ont vécu, pas vécu, de quoi ils ont été dupes, et selon quelle archéologie ça s’est organisé dans leur esprit.

Somme d’expériences, ce que nous sommes. Expériences personnelles, qu’on croit. On oublie à quel point les expériences perso dépendent de l’Histoire collective. Qui qu’on fut, ce n’est pas la même expérience personnelle d’être né dans l’Empire Français ou dans la France d’après la décolonisation, avant ou après la pilule, ou l’abolition du service militaire. Nos expériences intimes sont truffées d’Histoire, bourrées de collectif. Voilà pourquoi un bon historien, c’est aussi un bon flic.

Arnaque, que cette catégorisation de l’humanité en âge de la vie. Du boulot de sociologue, c’est tout dire. On n’est pas le même jeune aujourd’hui qu’il ya quarante ans. Ni le même vieux. Voilà pourquoi ça ne  sert à rien de s’encombrer l’esprit avec l’âge des gens. Ils n’ont pas d’âge. Que des dates de naissance, comme pour les caler dans un coin du temps.  D’ailleurs, c’est cette date-là qu’on retiendra tout au final. Auprès d’une autre, sur du marbre.

Mais celle-là, mieux vaut la garder secrète. Le plus longtemps…

00:38 Publié dans Là où la paix réside | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : littérature, histoire, société | | |

Commentaires

C'est étrange , vous n'avez pas cité la guerre d'Algérie ,événement avec la guerre du Vietnam, autrement plus importante que Mai 68, à mon avis. Question de date naissance, sans doute :)

Écrit par : patrick verroust | dimanche, 26 février 2012

N'est-elle pas " dite" dans la décolonisation...
Ce qui est étrange, aussi, c'est la façon selon les générations,dont un même évènement est perçu comme de l'histoire ou a été vécu comme une actualité.

Écrit par : solko | dimanche, 26 février 2012

Magnifique texte Solko. Quelle justesse. L'année de naissance oui. 1950, le milieu du baby-boom, entre 1947 et 1955 :)
Je me rappelle Pierre Bergounioux né en 1949, disant à son frère Gabriel né en 1954 que ce dernier lui paraissait presque d'une autre génération...

Écrit par : Michèle | lundi, 27 février 2012

Texte absolument juste.
A ce propos, il faudrait enfin expliquer aux pontes qui nous dirigent, ainsi qu'aux directeurs de maisons de retraite de ce pays (maisons et pontes qui semblent figés ad eternam dans la vision d'une vieillesse archétypale qui fait toujours naître tout le monde en 1910) que les septuagénaires d'aujourd'hui ne sont pas ceux d'hier, qu'ils ont à voir avec les motos des fifties et pas avec les tractions des 30's, qu'ils n'ont pas assisté à la construction de la Tour Eiffel mais à Hendrix mordant sa guitare à Woodstock, enfin bref, qu'on n'a pas affaire aux même gens qu'avant.

Écrit par : Sophie K. | lundi, 27 février 2012

Bien parlé SophieK ! Magistrale illustration !

Sophie encore : je suis toujours en train de lire "Le vent pleure Marie" (je reste dans le sujet, hein, puisque vous parlez d'Hendrix) : d'une part parce que c'est un pavé qui fait réfléchir, que je prends des notes pour ne pas m'y perdre, et puis parce que j'ai toujours plusieurs chantiers à la fois...

Écrit par : Michèle | lundi, 27 février 2012

@ Michèle et SophieK : J'ai aussi commencé la saga familiale et me la suis mise de côté pour l'été (sous les pavés,la plage...)...

Écrit par : solko | lundi, 27 février 2012

:0)
Ne vous inquiétez donc point, tous les deux. Le temps est fait pour être pris dans nos bras - et les livres se dégustent (ou se refusent) comme il plaît.
(Et c'était "aeternam", ce me semble, et pas "eternam", je me corrige.)

Écrit par : Sophie K. | mardi, 28 février 2012

Les commentaires sont fermés.