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samedi, 12 avril 2014

Sous le ciel d'avril

Le cimetière de Loyasse était désert, quand j’y suis passé hier. Sous le ciel d'avril, le printemps ne fait pas de différence entre le séjour des vivants et celui des morts. Ça pépiait dans les arbres, et la lumière baignait les chapelles avec la même abondance que les toits de la ville en contre bas, sur lesquels flottait une  nuée de pollution. J’ai arraché l’herbe en trop - la mauvaise dit-on, sur la tombe de ma mère.  J’ai déplacé les vasques pour nettoyer les traces de terre sur le  marbre noir. Il va falloir changer les fleurs en tissu, dont la couleur des pétales a passé sous le soleil. Je rachèterai des jaunes. Elle aimait particulièrement les tulipes jaunes.

A chaque fois que je me recueille devant sa tombe, je regarde avec étonnement ce chiffre, 1980.  Dans quelques mois, trente quatre ans, déjà ! Il n’y a rien de très linéaire dans le temps. Je ressens cela aussi quand je lis un auteur ancien, dont la vigueur de la pensée me saute aux yeux, fraîche, contemporaine. Les disparus nous habitent, quoi que nous en pensions avec, tantôt la force de l’instant, tantôt celle de la durée.

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intérieur Loyasse, photo Itinéraire bis

Je suis redescendu de Loyasse en passant par la chapelle de Fourvière, où j’ai placé un cierge pour son repos.  Sur les bancs, moins de fidèles qu’une main n’a de doigts, c’est dire. Je suis resté un instant à contempler la Vierge Noire qui trône au centre de l’autel baroque et doré, cette Vierge à qui le conseil municipal au grand complet, -monsieur Collomb en sa tête-, vient offrir un cierge et un écu chaque huit septembre. Je suis resté devant elle un moment, paisible et silencieux. Sur l’esplanade de la basilique, au-dehors, il y avait beaucoup plus de monde pour contempler la plaine urbaine, dans le bleu vilainement grisailleux de la pollution. 

12:15 | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : lyon, loyasse, fourvière, littérature, avril | | |

Commentaires

Je me souviens qu'avec Frasby nous devisions sur le cimetière de Loyasse... Je n'ai à ce jour pas encore pris mon bâton de pèlerin...

Vous étiez jeune quand vous avez perdu votre mère. Je ne crois pas qu'on se remette jamais d'une telle perte. On apprend à vivre avec. C'était il y a longtemps et c'était hier... Mais vous le dites très bien.

Merci pour ce texte.

Écrit par : Michèle | samedi, 12 avril 2014

On passe son temps plus à perdre qu'à gagner, en vivant dans un tel monde. Nos pertes comme nos gains font partie de ce qui nous constitue en êtres uniques, bien plus que nos chromosomes. La perte d'une mère en pleine jeunesse a quelque chose de terminal et de fondateur, qui fige pour toujours une époque dans du gel et en même temps vous projette pour jamais dans un autre temps.

Écrit par : solko | samedi, 12 avril 2014

Pensées, cher Solko.

Écrit par : Sophie K. | lundi, 14 avril 2014

Votre texte me touche en profondeur... Ces gestes essentiels, silencieux, solitaires de remettre des vasques en place et de changer les fleurs...
J'accompagne souvent D sur la tombe de son père sauté dans le "Grand Peut-être" en 2008... Et, moi aussi, Solko, j'entends des oiseaux qui gazouillent dans les arbres.
Comme si de rien n'était. La continuité, l'éternel retour...

Écrit par : Bertrand | lundi, 14 avril 2014

J'étais déjà vieille quand ma mère est morte. Elle ne vivait plus qu'à peine, un corps sans âme depuis plus de deux ans et pourtant j'ai ressenti un vide immense quand elle est partie. La première pensée qui m'est venue est :"je ne dirai plus jamais maman". Je n'ai pas le droit de me plaindre, ma soeur est morte à vingt six ans en laissant deux enfants qui ont à peine eu le temps de la connaitre. L'esprit relativise, raisonne, mais le coeur n'en est pas capable.

Écrit par : Julie | mercredi, 16 avril 2014

ma maman est partie pour le grand voyage en 1981, mon papa en 1984, il y aura 30 ans dimanche de Pâques, c'était Pâques aussi ; aujourd'hui j'ai fait comme vous, nettoyer le marbre, acheter des fleurs, entendre le silence et le chant des oiseaux sous le soleil d'avril, et j'ai pensé, pensé...merci pour vos billets
jos une amie de Sophie

Écrit par : jos | mercredi, 16 avril 2014

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