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dimanche, 28 juin 2009

Jules Janin, Lyon et le lieu commun du rêve

L’écrivain stéphanois Jules Janin, né en février 1804 est surtout connu pour l’Ane mort et la femme guillotinée. En 1838, alors qu’il s’apprête à partir à Venise, il consacre à Lyon quelques lignes, au lyrisme à la fois académique et désuet. On y retrouve tous les clichés romantiques que les écrivains de la Monarchie de Juillet puis du Second Empire, illustres ou inconnus, au premier rang desquels il faut citer Lamartine, Michelet, Stendhal, Baudelaire, développèrent tour à tour à propos de la capitale rhodanienne : ceux de la cité laborieuse, ceux de la ville songeuse. Lyon, ville « antithèse », avec ses deux fleuves et ses deux collines, celle qui travaille (Croix-Rousse) et celle qui prie (Fourvière). J’ai déjà publié le texte de Jules Michelet sur « les deux collines », celui de l’Illustration, journal parisien, qui est un chef d'oeuvre du genre . Certes, le cliché peut finir par énerver, lasser. Néanmoins, ceux qui ont souvent promené leur ennui dans cette ville ont peut-être remarqué qu’il est aussi de teneur architectural : ne trouve-t-on pas  trace aussi de ce labeur de « bêtes de somme » dans l’architecture, la pierre des quais, des façades ou le fer des grilles ? Et  dans ce qui demeure des fleuves et des vergers ou des ruines gallo-romaines dans la cité actuelle, ne pioche-t-on pas encore trace du rêve enfoui d'un berger virgilien ?

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Gravure : Confluent du Rhône et de la Saône, (Coste - Part-Dieu)

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14:51 Publié dans Bouffez du Lyon | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : littérature, lyon, voyage à venise, jules janin, saône, rhône, poésie | | |

mercredi, 24 juin 2009

Maurice Moissonnier

Il était né le 26 juin 1927 ; il est mort le 24 juin 2009, à deux jours de son anniversaire. Les lyonnais  connaissaient surtout Maurice Moissonnier en raison de son travail d’historien sur le mouvement de 1831 des canuts. Après un mémoire de fin d’études sur La Commune à Lyon, il a fait paraître successivement Les Canuts, Vivre en travaillant ou mourir en combattant, Joseph Benoit, confessions d’un prolétaire et surtout  La révolte des canuts (Editions sociales, 1975) qui, à la suite des ouvrages de Fernand Rude (Le mouvement ouvrier à Lyon – 1944 et C’est nous les canuts )  a fait autorité en la matière. Il a collaboré à de multiples revues, écrit de nombreux articles, participé à la rédaction de la France Ouvrière (Ed de l’Atelier, 1995) et aux publications de l’Institut CGT de l’Histoire sociale Rhône Alpes.

Maurice Moissonnier a été une figure fidèle du PCF français. Agrégé d’histoire, il a enseigné, au lycée Antoine Charrial, dans ce 3ème arrondissement de Lyon, à l’époque bien plus populaire qu’à présent. Son dernier ouvrage, inachevé, comprend deux tomes parus aux éditions Aleas (Lyon) : Tome I – Le front populaire ; Tome II, Déclin et mort du Front populaire. En raison de sa maladie, il a dû interrompre la rédaction des tomes suivants initialement prévus (Guerre et occupation, résistance et Libération). Je me souviens de Maurice Moissonnier comme d’un homme chaleureux, ouvert, passionné par le débat et la controverse : Pensées à sa femme Henriette, et à ses enfants.

 

 

22:11 Publié dans Là où la paix réside | Lien permanent | Commentaires (23) | Tags : maurice mossonnier, lyon, histoire, mémoire ouvrière, esprit canut | | |

samedi, 20 juin 2009

Fête de la musique (1)

La mairie de Lyon se fout de la gueule de qui ? Je reçois hier une « lettre » signée d’elle, et se présentant comme la coordinatrice de la fête de la musique ; après avoir rappelé bêtement le caractère bon enfant de cette pseudo-fête  organisée en plein air dans toute la ville (mâchon musical, stands d’association, ludothèque, spectacle de danse et pour finir concert festif) un peu à la façon d’un voisin indélicat qui va fêter son anniversaire à la con et prévient les voisins, elle (la mairie) poursuit en s’excusant : « cette manifestation, nous en sommes conscients, est susceptible de générer des nuisances sonores pour les habitations du voisinage. Nous vous prions en conséquence de nous en excuser par avance pour les désagréments occasionnés et comptons sur votre compréhension à l’occasion de cet événement exceptionnel. »

Quelques remarques :

-La mairie parle « des habitations du voisinage » alors que le boucan sera partout et, après leurs manifestations musicales, va se poursuivre jusqu’à l’aube, dans des débordements qui ne seront bien évidemment pas encadrés et laisseront les rues du centre dans un état indescriptible (voir le billet « fête de la merde » ( qui date de 2006) en lien.

-La mairie parle d’un événement exceptionnel alors que rien ne l’est moins que cette "fête" banale, répétitive et désormais programmée dans le calendrier, au même titre qu’une autre (on croule sous l’ordinaire des fêtes). Cette fête, qui obéit à la politique de divertissement populaire préconisée par la Trilatérale est suivie les doigts sur la couture par toutes les municipalités pour, dit-on, le bien et la liberté des populations.

La mairie clôt sa lettre en disant : « nous vous prions d’agréer, madame, monsieur, l’expression de notre sincère considération ».


La mairie se fout de la gueule de qui ?

mardi, 16 juin 2009

Ulysse a 105 ans

Très honoré d'apprendre, grâce au toujours attentif et précieux  Monsieur Photon qu'aujourd'hui 16 juin 2009, c'est l'anniversaire de Léopold Bloom !  Pour peu, j'enragerais d'être né d'hier, tiens !  Vous vous rendez compte un peu ? Naître un 16 juin ? Naître le jour qu'Ulysse déambula fictivement dans Dublin ? Y'a de quoi plus savoir où on habite, non ? Car c'est bien le 16 juin 1904, il y a tout juste cent-cinq ans, que Léopold Bloom, à la page 81 de mon édition (c'est en folio) se lève et commence sa journée. Alors pour fêter ça, on devrait tous marcher dans la ville où on habite, un exemplaire à la main, et se la refaire à nouveau, cette journée de mille pages : 1000 pages !  vraiment, quel "moderne" ou "post-moderne", quel "avant-gardiste" ou quel "nouveau romancier" des années cinquante fit mieux que James Joyce ? De pâles brouillons, à côté de cette radicale remise en cause de la narration. De ce système d’échos, de phrase en phrase, toujours juste, et tellement significatif : Ulysse, c’est un univers.

Pour preuve, deux débuts de chapitres, deux débuts d'une même journée : celle de Dedalus (première partie), celle de Bloom (deuxième partie): le fils, le père, Ulysse, Télémaque…

« - Majestueux et dodu, Buck Mulligan parut en haut des marches, porteur d'un bol mousseux sur lequel reposaient en croix rasoir et glace à main. » (Dédalus le considère avec froideur)

« - M Léopold Bloom se nourrissait avec délectation des organes des mammifères et des oiseaux

Mettez les deux en relation, la croix qu'on contemple (ici faite d'ustensiles prosaïques) et les entrailles dont on se nourrit (rognons, gésier, tranches de foie...), et ce système d'échos ensorcelant, dont aucun lecteur n'est à ma connaissance sorti  indemne, commence, et vous obtenez déjà un début de retrouvailles, c'est à dire de sens, entre les deux.

J’ai lu Ulysse durant plusieurs nuits, des nuits interminablement denses, il y a longtemps, alors que je travaillais à l’hôpital. Lyon, Dublin, où habitais-je alors ? Lug est celte, d'ailleurs, Lug d'où jaillit la capitale des Gaules. Je me souviens qu'alors je voulais être écrivain, que cela seul comptait, que partout où je passais, l’usine, le bureau, l’hôpital, l’atelier,  il me semblait que j’étais, et si insouciamment, en repérage. Et voilà que tout à coup, quelqu’un était soudain devant moi, dressé. Un maître. Pas un petit maître. A jamais devant moi, je lisais ce roman de ce type qui était déjà mort, de cet ainé irrémédiable, et je verrai ce dos qui marcherait devant moi, et j’aimais ce type, ce maître, et je le détestais de m’avoir, comme ça, coupé l’herbe sous l’pied. C’était James Joyce. Genre de rencontre dont on se remet mal, fort mal, je vous assure. On a beau faire son malin ...

 

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09:18 Publié dans Des Auteurs | Lien permanent | Commentaires (17) | Tags : ulysse, bloom, 16 juin 1904, james joyce, littérature, lyon, dublin | | |

dimanche, 14 juin 2009

Caniculaire

On annonce 33°. Lyon reprend ses habits de chaleur et sera aujourd’hui à nouveau la ville la plus chaude de France avec Grenoble (34°). C’est alors que dans l’immense espace d’une cuvette sèche et polluée, l’air enflammé se réverbère sans complaisance, figeant semble-t-il le déroulement des heures dans une attente du soir. Les fleuves et leur fraicheur filent entre les quais, rances et sans profondeur, comme vaincus, comme absents. Dans le silence des rues, on a soudain l’impression que la pierre des immeubles se dresse contre le ciel afin de protéger la chair des hommes de la trop brûlante malédiction solaire. L’ombre et la verdure même paraissent capituler. Toute la ville prend un air d’acier et, comme suspendue entre le ciel et le trottoir, toute vie attend l’orage. Il se lèvera. Il se lève toujours.

 

 

C’est d’abord une fraicheur vive et soudaine, prélude au tintamarre des gouttes de pluie ; le souffle alpin, tournoyant dans les rues pentues, balayant la pierre italienne de bourrasques, comme pour la laver du mal d’être habitée. Et la luisance soudain révélée de l’asphalte : dans l’humidité translucide de sa pierre, la ville, l’instant de quelques éclairs, retentit alors d'une histoire dont elle se montre riche autant que jalouse. Dans la noirceur extrême de l’orage, les puissants jets de Lug éclairent le sanctuaire de Marie, tandis que le reste de la ville, sur un tapis obscur, suspend son souffle.

Sur chaque boulevard, dans chaque rue, des gouttes drues comme des colonnes dressent une muraille infranchissable et joyeuse : je reçois à pleine gorge la violente chute du salut. Jusqu’à ce que, toutes pierres et toute chair fécondées par le ciel, l’aveuglant jet du couchant s’éclipse avec la dernière foudre, comme avalé par l’effondrement lointain de sinistres fondations : elle redevient grise et hautaine comme la nuit électrifiée, cette cité dans la nuit, armée.

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21:43 Publié dans Des poèmes | Lien permanent | Commentaires (23) | Tags : lyon, canicule, météorologie, actualité, orages | | |

mardi, 02 juin 2009

Ecrivains de la fabrique

J’ai découvert un peu par hasard, il y a une vingtaine d’années de cela qu’il avait existé à Lyon un ensemble de romans structurés autour de la fabrique de la soie, des années 1870 à 1930. Quand je dis par hasard, c’est en réalité en fouinant chez des bouquinistes. Et petit à petit, les écrivains lyonnais ont trouvé place en mes rayons. La plupart ne sont que pittoresques. Certains sont vraiment attachants. Quelques-uns furent des maîtres dans leur domaine. Je songe à Henri Béraud, bien sûr, mais aussi à Gabriel Chevallier, à Nizier du Puitpelu.

 Bernard Poche, qui avait déjà publié Lyon tel qu’il s’écrit (Presses universitaires de Lyon – 1990) propose chez Permezel (un éditeur courageux que je salue au passage) un « Dictionnaire bio-bibliographique des écrivains lyonnais – 1880-1940) : l’universitaire y a recensé plus de trois cents noms d’écrivains ayant, de 1880 à 1940 entretenus avec Lyon « un rapport significatif ». Parmi eux, ceux que j’appelle les écrivains de la fabrique, qui composèrent un jour un roman de mœurs, de sentiments  ou de caractère ayant pour siège une maison de soierie, et participèrent ainsi à un témoignage entre réalisme littéraire et journalisme sociologique sur le Lyon de la Belle Epoque. Poche a retrouvé aussi la trace de nombreux poètes ou nouvellistes, conteurs et chroniqueurs. L’ouvrage a le mérite de rappeler la ferme volonté de décentralisation intellectuelle qui, jusqu’à 1940, a présidé dans l’esprit de plusieurs générations d’écrivains lyonnais. Le seul reproche qu’on lui pourrait faire, c’est que la recherche bibliographique a souvent pris le pas sur celle, biographique : sans doute parce que la première est plus simple à réaliser que la seconde, le monde et son labyrinthe étant plus vaste et hasardeux qu’une bibliothèque et ses rayons. Et que nombreux sont, parmi ces auteurs, ceux qui disparurent ou sombrèrent dans l’anonymat.

Je recopie une notice qui a tout particulièrement attiré mon attention, parce qu’elle est particulièrement emblématique, peut-être, et que j’ignorais tout de cet écrivain  :

« BARDOT Henri (Lyon  …- ….)

La totale ignorance dans laquelle on est de la vie d’Henri Bardot est d’autant plus surprenante que L’Autre Rive publié en 1917 mais qui reflète une certaine ambiance du Lyon des dernières années de l’avant-guerre, est peut-être l’expression la plus achevée du roman lyonnais de cette période et figure très honorablement à côté des œuvres antérieures d’Esquirol, d’Hennezel et de Rogniat. Les quelques échos que l’on recueille à son sujet laissent entendre qu’après la guerre il avait sombré dans la bohême et l’alcoolisme : l’amère misogynie de l’essai qu’il publie en 1920 se rattache aisément au pessimisme de son roman. Ses projets ultérieurs ( "pour paraître prochainement ») n’ont évidemment pas abouti. Aucune trace ne semble, apparemment, demeurer de ce naufrage. 

L’Autre rive, P.Jouve, 1917 ; L’art de mal vivre et de bien mourir, ou maximes sans prétention suivies de quelques histoires également profitables, par Henri BARDOT, lyonnais, ill. Combet-Descombes, Ed de la Revue Fédéraliste, Trévoux, imp. Jeannin, 1920 »

 

Et je cite quelques patronymes (ou pseudonymes) de ces illustres oubliés, outre les maîtres que furent Clair Tisseur, Vingtrinier, Béraud ou Chevallier :

Alexandre Arnoux, Louis Aurenche, Emile Baumann (admirateur et ami de Léon Bloy, auteur de très beaux Mémoires), André Billy, Auguste Bleton (pour plaire à Marcel Rivière), Magali Cabanes (auteure d'un joli Masque de Lyon), Georges Champeaux (dont j'ai déjà beaucoup parlé pour le roman d'un vieux groléen), David Cigalier, Henry Clos-Jouve, Max André Dazergues (un pur Delly de Lyon !!!) , Jean Dufourt ( et son Calixte), Charles Fenestrier (co-singataire, avec Béraud, des Marrons de Lyon), Albert Giuliani, Marcel Grancher (qui mit en selle Frédéric Dard et son San Antonio et écrivit avec La Soierie se meurt un bouleversant témoignage de la faillite de Lyon en 1930), Henri d’Hennezel, Charles Joannin (pour Périssoud, militant lyonnais), Joseph Jolinon (voir mes billets sur trois de ses romans dans la rubrique : la bibliothèque est en feu), monseigneur Lavarenne (spécaliste de Guignol), Claude Le Marguet (pour Myrelingues la Brumeuse), Edmond Locard, Amédée Matagrin,  Louis Pize (poète injustement oublié), Xavier Privas (prince des chansonniers), Léon Riotor (Léon de Lyon),  Pierre Scize, Louisa Sieffert (une poétesse elle aussi injustement oubliée), Joséphin Soulary, Tancrède de Visan (Sous le signe du Lion) … 

 

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Illustration de couverture :
salle de lecture du lycée Ampère à Lyon

20:42 Publié dans Des inconnus illustres | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : bernard poche, permezel, littérature, romans, lyon, écrivains lyonnais | | |

dimanche, 31 mai 2009

La fabrique d'un quartier

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L'histoire des pentes de la Croix-Rousse et de leur architecture en conférence ...

 

vendredi, 22 mai 2009

Le silence de la nuit

Les nuits sonores : je ne sais quel est l’idiot qui a inventé ce concept oxymorique. Depuis, avec la bénédiction des stupides autorités culturelles municipales de la ville de Lyon, une partie des impôts locaux des citoyens passe à planter un peu partout dans la ville pendant quatre jours, autour de quelques lieux payants, des podiums où d’autres abrutis censés être à la pointe de la vie culturelle se livrent impunément à du tapage diurne et nocturne, institutionnalisé. Les riverains un peu partout se plaignent de ces concerts autoritairement imposés à leurs fenêtres. On parle de nuisances sonores. C’est peu dire tant le vacarme est assourdissant. Pour ma part, je m’interroge sur cette détestation du silence qui est la marque de toute une société marchandifiée autant que déshumanisée, celle des enfants de la télé. Je me souviens avec émotion de l’époque où une grille signalait à tous les énergumènes la fin des hostilités, et qu’il était temps d’aller se coucher.  Une mire que voilà.

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Et je suggère à M. Kepenékian, premier adjoint à la culture de la ville de Lyon, soit d’installer l’an prochain tous ces concerts irrespectueux sous ses propres fenêtres, soit de proposer, un peu comme Marcel Duchamp le fit en 1917 avec sa délicieuse fontaine, cette silencieuse mire à tous ses administrés en guise de nuit sonore : tout le monde resterait immobile et silencieux, en un happening révolutionnaire pour le coup : voilà qui serait un geste vraiment progressiste, vraiment dada, vraiment en rupture avec l’académisme collet-monté et le conformisme décrépi de l’époque : vraiment culturel, donc.

Sinon, au lieu de prendre en otage la population, qu’il construise des salles, et qu’il fasse payer les entrées à tous les epsilons de la société du spectacle qui se réjouissent de tout ce boucan technologique et asservissant. Je rappelle au passage cette belle définition du tittytainment  de J.C. Michea, dans L'enseignement de l'Ignorance (Climats, 1999) : "Entertainment signifie divertissement et tits, en argot américain, les seins. Par ce mot, il s'agissait de définir un cocktail de divertissement abrutissant permettant de maintenir de bonne humeur la population frustrée des villes". Pour les autres, pour les vrais amoureux de la nuit, voici une fable de La Fontaine de circonstance, hymne (entre autres), au beau silence de la nuit.

 

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jeudi, 14 mai 2009

Roger Planchon

Belle mort, que celle de Roger Planchon, finalement. Une crise cardiaque foudroyante, pour en finir avec un monde en train de perdre la boule. Jadis, dans un autre siècle, c’est-à-dire dans les années cinquante, il y a eu une véritable «folie Planchon », dans un ancien atelier de serrurerie au 3bis rue des Marronniers, à Lyon, avec Jean Bouise et sa bande d’enragés. La folie s’est ensuite peu à peu institutionnalisée, labélisée. Mégalomanisée, disent les acides. Jusqu’à ce que le TNP devienne un lieu pour abonnés, au sens le plus trivial et le plus désolant du terme. Un lieu scolaire. L’aventure des CNP en toile de fond.

A Villeurbanne, Planchon, dont le nom-même désignait  la vocation, était devenu une sorte de guru irascible ; mais au fond, comment pouvait-il en être autrement ? On peut reconnaître ce mérite à Roger Planchon, d’avoir maintenu vivante une tradition qui venait de loin, de Charles Dullin et de Jacques Copeau au moins autant que des plateaux de son Ardèche originelle la sciure du bistrot paternel. Et qui, après être passée par Jean Vilar et le théâtre étudiant des années soixante, s'était certes figé peu à peu entre ses mains vieillissantes : Mais n'est-ce pas aussi ce qui est arrivé au pays lui-même ?

Christian Schiaretti, plusieurs fois moliérisé il y a quelques semaines, a repris ce flambeau. Fidèle et sage continuateur de ce qu'on appela un jour la décentralisation populaire et critique. Le TNP est actuellement en travaux, « hors-les-murs » comme on dit. A sa réouverture, à l’heure de couper les rubans, l’une des salles qu'on aménage actuellement portera sans doute le nom de son ancien directeur. Une rue de Villeurbanne, non loin de là, également.  

 Ce qui est justice, car Planchon, qu’on n’aime ou pas, emporte avec lui un style et une époque. Une dimension également. C'est cela sans doute qu'on regrettera le plus.


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09:11 Publié dans Des pièces de théâtre | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : théâtre, tnp, villeurbanne, roger planchon, répertoire, actualité, lyon | | |