vendredi, 21 juin 2013
La fête du silence
Je me demande ce que ça donnerait : une journée entière durant laquelle l’humanité s’engagerait sur les cinq continents à ne produire aucun son : à ne pas crier, hurler, taper sur des tambours ou frotter sur des cordes tendues. Une journée durant laquelle on éteindrait tous les moteurs, fermerait tous les appareils, poserait tous les outils, mettrait fin à toutes les parades et ne prononcerait aucun mot.
C’est vrai, n’importe qui, n’importe quoi à sa journée, sa fête, sauf lui. Le silence. On ne serait pas pour autant triste, vide, inoccupé, solitaire, haineux ou malheureux. Au contraire.On pourrait s'aborder sans imiter les grands singes, les oiseaux criards ou les fauves aboyeurs. On l’appellerait tout simplement la journée du silence.
08:58 | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : fête de la musique, société |
mardi, 21 juin 2011
Fête de la musique
Dans sa naïveté, il espérait qu’ils en auraient tous marre un jour. Qu’ils comprendraient que cette fête qu’ils honoraient depuis trente ans n’était qu’une fête nationale aussi conne qu’une autre, que celles qu’ils critiquaient par ailleurs, une fête qui n’avait plus rien ni de festif ni de subversif, destinée à soutenir l’ordre en place. Comme les autres. Comme toujours.
Dans sa naïveté, il se disait qu’ils finiraient par ne plus vouloir ressembler à leurs mères et leurs pères qui déambuleraient cette nuit-là encore comme chaque année en troupeaux dans les rues, au milieu du vacarme des villes. Qu’ils se diraient enfin que, la musique, oui, mais pourquoi tous ensemble, pourquoi cette nuit-là, pourquoi en troupeaux, entre des barrières de CRS ?
Quel nom déjà, ce ministre qui avait si bien su brouiller tous les repères culturels des gens, et continuaitn déplumé, à faire le bellâtre à la télé ? Faites de la musique ! Tout ça pour un bon mot à la con... Ils en étaient là...
Dans sa naïveté, il se répétait qu’une fête ne pouvait ainsi se perpétuer sur commande, qu’il y aurait bien forcément un jour ou l’autre un mouvement d’Indignés contre çà aussi, tout ce bordel municipalement organisé à dates fixes par toutes les mairies de l’Hexagone, dans les provinces de l’Empire...
Qu’il suffisait peut-être de laisser passer encore un peu de temps…
09:58 Publié dans Sur le vif | Lien permanent | Commentaires (25) | Tags : fête de la musique, politique, france, empire |
dimanche, 21 juin 2009
Suceurs de micros
Le podium est installé sur la place. Pour quelques instants encore, il est permis d’entendre encore le frémissement du vent dans le feuillage des platanes. Quelques secondes seulement. Le groupe Mabite et Moncul va procéder à ses essais sonores pour la fête ordinaire de la musique. Une fête d’Etat : Dans ses opuscules de propagande distribués aux citoyens soumis, la mairie dit que c’est un événement exceptionnel.
L’un des chanteurs est arrivé. Entre les baffles, il prend un air d’importance pour tapoter d’un doigt sur son micro. « Test, test, test… » dit-il, d’un air de singe inspiré. Quand il ne répète pas « test », il répète « eh ! eh ! eh ! » Original ? Le voici dans son univers. Ou plutôt dans son fantaaaasme : quand il était petit, il voyait déjà ses grands cons de pères faire ça à la télé. Inspiré, à voir sa gueule, il l’est effectivement avec, pour lui, l’élégance du bermuda flottant autour de hautes quilles. A ses côtés, quelques femelles commencent à se trémousser du cul en levant les bras. Exceptionnel ? Quand elles étaient petites, elles voyaient déjà à la télé leurs conasses de mères faire à peu près ce genre de truc, en bans soumis, soudés. Rien de plus banal que tout ça. Quel boucan ! Tout juste vingt-huit ans que ce genre de conneries perdure. A présent, tous les pigeons, toutes les corneilles se sont barrés à tire-d’aile. Les chats de la place rampent sous les voitures et cherchent une planque. Ce soir, ce sera rempli d’humains mutants, pressés les uns contre les autres, tous sapés avec le même goût. La jeunesse qui ne fait au fond que ce que les plus vieux ont voulu qu’elle fasse, la jeunesse qui imite non plus ce qu’elle a pu lire, mais ce qu’elle a vu à la télé. Super.
« Il viendra un temps où naitront aux hommes des enfants qui n’atteindront que l’âge de dix ans. Et avec ces hommes, des filles de cinq ans seront fertiles. La terrible insignifiance de cette culture des hommes de dix ans, déjà un peu partout perceptible, pourrait être symbolisée par un juke-box à pile atomique, car l’appareillage scientifique et technique le plus avancé y est au service des pulsions infantiles de l’humanité »
C’est Lewis Mumford qui a écrit cela, dans Les Transformations de l’homme » (1956), essai réédité l’an dernier par l’Encyclopédie des Nuisances. Dans l’avant-dernier chapitre (« La culture Mondiale »), il rappelle un mot de Wells : « L’esprit est au bout du rouleau ». Eh oui ! On ne saurait mieux dire.
La Culture Mondiale, c’est le règne des suceurs de micros, (comme les appelait ma vieille mère-grand). Et pour ces epsilons là, sans technologie, il n’est pas, même dans la fête, de salut.
Ne parlons plus d’esprit…
Sur ce, moi, je me barre.
12:10 Publié dans Aventures post-mortem de la langue française | Lien permanent | Commentaires (25) | Tags : musique, fête de la musique, politique, littérature, actualité, société |
samedi, 20 juin 2009
Fête de la musique (1)
La mairie de Lyon se fout de la gueule de qui ? Je reçois hier une « lettre » signée d’elle, et se présentant comme la coordinatrice de la fête de la musique ; après avoir rappelé bêtement le caractère bon enfant de cette pseudo-fête organisée en plein air dans toute la ville (mâchon musical, stands d’association, ludothèque, spectacle de danse et pour finir concert festif) un peu à la façon d’un voisin indélicat qui va fêter son anniversaire à la con et prévient les voisins, elle (la mairie) poursuit en s’excusant : « cette manifestation, nous en sommes conscients, est susceptible de générer des nuisances sonores pour les habitations du voisinage. Nous vous prions en conséquence de nous en excuser par avance pour les désagréments occasionnés et comptons sur votre compréhension à l’occasion de cet événement exceptionnel. »
Quelques remarques :
-La mairie parle « des habitations du voisinage » alors que le boucan sera partout et, après leurs manifestations musicales, va se poursuivre jusqu’à l’aube, dans des débordements qui ne seront bien évidemment pas encadrés et laisseront les rues du centre dans un état indescriptible (voir le billet « fête de la merde » ( qui date de 2006) en lien.
-La mairie parle d’un événement exceptionnel alors que rien ne l’est moins que cette "fête" banale, répétitive et désormais programmée dans le calendrier, au même titre qu’une autre (on croule sous l’ordinaire des fêtes). Cette fête, qui obéit à la politique de divertissement populaire préconisée par la Trilatérale est suivie les doigts sur la couture par toutes les municipalités pour, dit-on, le bien et la liberté des populations.
La mairie clôt sa lettre en disant : « nous vous prions d’agréer, madame, monsieur, l’expression de notre sincère considération ».
La mairie se fout de la gueule de qui ?
21:36 Publié dans Aventures post-mortem de la langue française | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : musique, fête de la musique, politique, lyon, mairie de lyon |