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mardi, 16 juin 2015

Compatibles ?

Pour le maçon Manuel Valls, la France et l’Islam seraient donc pleinement compatibles. On est si habitué à écouter ses âneries qu'on pourrait à la limite ne pas s'arrêter sur celle-ci. Pourtant une affirmation aussi péremptoire demande qu’on la considère quelques minutes.

L’Islam ? Valls souhaite, « en faire jaillir au grand jour ce qu’en est la réalité ». Manuel, le grand mage de l’esprit du 11 janvier veut-il connaître la réalité de l’Islam ? Il n'a qu'à écouter Dalil Boubakeur, président sortant du Conseil français du culte musulman, qui s’empresse alors de la lui dévoiler en déclarant qu’il serait envisageable de transformer « les églises abandonnées » en mosquées… La France de 2015, sous le président Hollande…. Triste, sordide déclin. Délitement.

 « C'est le même Dieu, », ose donc affirmer l’impayable Boubakeur devant le déiste Valls, balayant d’un revers de main  la Trinité, la Passion, et des siècles de théologie autrement plus subtile et raffinée, que ce genre de slogan pour décérébrés républicains. Ignorant, pour le coup, des siècles d'histoire et de culture. Car de deux choses l’une : soit le Dieu de l’Islam et Celui du Christianisme sont les mêmes, et le Christ étant mort pour la conversion des pécheurs pénitents, tous les musulmans de France n’ont plus qu’à se convertir pour rencontrer leur propre Dieu et être justifiés. Soit Il n’est pas le même, et dans ce cas-là, Valls et ses sbires sont encore en train de mentir et devraient de toute urgence relire les épitres de Paul, celle « aux Musulmans » restant bien sûr à déduire de toutes celles adressées aux Romains, Ephésiens et autres Galates. « Vous n’êtes pas sous la Loi, mais sous la Grâce » dit l’Apôtre ; et il leur explique que le vieil homme, celui qui n'a que la Loi, a été crucifié avec Lui. Oui, crucifié, afin d'être justifié.

Selon cette logique, qui est la logique du christianisme, déclarer identiques des lieux où se célèbre l’Eucharistie et d'autres lieux où se revendique la pré-éminence de la Loi qui lui est antérieure, comparer les deux comme des lieux où se célèbreraient deux mêmes rites, cela relève donc du pur blasphème.

Or « ce sont des rites qui sont voisins et fraternels », rajoute Boubakeur, énonçant une scandaleuse contre-vérité théologique. Car il n’y a rien de voisin ni de fraternel dans une religion qui nie totalement depuis des siècles ce qui fait l’essence et la raison d’être de l’autre, à savoir la Passion et la Divinité du Christ. Ce qui n’empêche évidemment pas chrétiens et musulmans de s’aimer fraternellement dans leur humanité, mais cela ne peut s'étendre au domaine religieux sans tomber dans la pure hérésie, ce que Valls, Boubakeur et tous les réformateurs zélés au plus haut de l’Etat (comme peut-être dans certains cas au sommet de l'Église) font mine d’ ignorer, ce qui constitue un aveu.

Et, rajoute Boubakeur, «  Je pense que musulmans et chrétiens peuvent coexister et vivre ensemble ». Curieuse conception du vivre ensemble que celle qui consiste à se substituer à, et qu’on voit à l’œuvre dans d’autres parties du monde.

 

La question que tout cela pose crument à chaque Français est finalement celle de sa propre apostasie : à chacun de se demander s’il est prêt à abandonner purement et simplement la religion de ses pères. Sinon, il peut toujours retourner aux églises, et la question de savoir si elles peuvent ou non être légalement et publiquement transformées en mosquées ne se posera plus.

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vendredi, 05 juin 2015

Les saints de Turin

Turin partage avec Prague et Lyon la redoutable réputation d’être l’une des portes de l’Enfer.  C’est pourquoi, tout comme les deux autres villes, elle bénéficie d’une protection divine spécifique. Lyon fut placée sous la protection de la Vierge par un vœu de ses échevins en 1643, Turin fut en 1453 le théâtre d’un miracle eucharistique dont la ville célébrera demain l’anniversaire, et dont on reparlera ici.

La capitale du Piémont conserve pieusement les corps incorruptibles de nombreux bienheureux ou saints qu’on rencontre dans ses églises en y faisant halte

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Maria Mazzarello (basilique di Santa Maria Aussiliatrice)

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Valerico  ABATTE (Sanctuaire della Consolata) )

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Catherine de Sienne (église san Dominico)

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 Et bien sûr, Don Bosco

 

Ces saints firent face, de leur temps, à de nombreux maux : épidémies, guerres, ignorance. De leurs vivants, nombreux furent ceux qui entrèrent en conflit avec eux, pour les contester. Mais il semble que le plus inconditionnel des athées gardât en son for intérieur quelque estime pour leurs actes, quelque considération qui rendait possible le dialogue avec eux. Le siècle actuel a produit un mal contre lequel j'ignore quelle aurait été leur recommandation : le divertissement. Car le divertissement ne cherche pas à contrer ni à détruire les saints, ils les laisse dormir, tout simplement, il ignore leurs œuvres pour concentrer sur d'autres énergies et d'autres efforts l'attention de ceux qu'il retient et guide par le bout du nez. Pascal, jadis, écrivit sur le divertissement, mais les libertins à qui il s'adressait pouvaient encore le considérer tel un interlocuteur, car ils parlaient la même langue. Du divertissement qui fait rage & dévaste avec minutie le monde aujourd'hui, que dirait-il ? Et que préconiseraient les beaux saints endormis de Turin ?

 

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vignette de Don Bosco n°13, Turin

 

jeudi, 04 juin 2015

Le suaire et le sacré.

On n’approche pas commodément du Saint-Suaire à Turin.  La réservation s’opère par Internet. Des milliers de bénévoles (« les blousons violets ») venus des diverses paroisses de la capitale du Piémont accueillent les visiteurs dans la zone du Dôme, depuis le commencement du parcours liminaire dans les Jardins Royaux jusqu’à la salle des confessionnaux et aux marchands de souvenirs sur le parvis de la cathédrale Saint-Jean Baptiste, Piazza Castello. On franchit tout d’abord un portique, comme dans les aéroports, ce qui montre à quel point notre civilisation est placée constamment dans une certaine ligne de mire. Il est vrai qu’un fou d’Allah parvenant à s’infiltrer dans les tunnels en toile qui conduisent durant plus de 800 mètres jusqu’à l’entrée de la chapelle serait assuré de faire le buzz sur le champ. Les tunnels d’accès sont donc garnis de caméras. Nous habitons bien au XXIe siècle.

Le pèlerin est ensuite introduit dans une salle où un bref film vidéo lui dépeint ce qu’il s’apprête à voir en détail. Toutes les parties du corps de l’homme au suaire sont successivement zoomés et agrandis. Un commentaire en plusieurs langues insiste sur les traces de coups de fouets, de trous d’épines et de lances. Étrange exhibition mortuaire, devant une assemblée silencieuse où se découvrent toutes sortes de gens.

La question de l’historicité de l’homme dont l’image frontale et l’image dorsale se joignent par la tête n’a ici plus guère d’intérêt. Comme Benoit XVI l’a dit un jour, cet « icône écrite avec le sang » est surtout un émouvant miroir de la Passion. Le sacré, ici comme ailleurs, n’a nullement besoin d’être breveté par l’historicité. Sinon pour les manants.

Elle est d’ailleurs suffisamment présente, l’histoire, la belle et triste histoire humaine, sous la forme de cette poignée de quidams en casquettes et tee-shirts, pantacourts et autres tenues de p.à.p, le smartphone à la main, foule mixte de touristes ou de pèlerins, ou les deux à la fois, mi-pèlerins, mi-touristes, immobilisés dans le noir face à l’image qui se reflète de l’image sacrée offerte à cette foule même qui passe, telle un miroir d’un moment de l’histoire – cet aujourd’hui faits d'eux tous  défilant, profanes, devant lui, le sacré.

Car la voici enfin, entre deux sentinelles en costumes historiques, immobiles comme au musée Grévin. La voici la châsse le portant, puis le suaire lui-même, derrière des glaces de sécurité multicouche ; en rangs, trois rangs, les spectateurs du moment contemplent un instant le tracé d’un corps dans lequel chacun lit ce qu’il peut, ce qu’il veut, ce qu’il sait et ce qu’il ressent de ce qui lui est offert ou non dans le silence de cette confrontation avec un autre Monde. Car c’est bien d’un autre Monde qu’il s’agit, l’Antiquité, le Dénuement, la Mort, la Cruauté des hommes acharnée contre ce corps en ostension, la Religion,  la voici, la Passion. Au-delà du spectacle (car il demeure là encore, le spectacle -  certains même tentent un fois de plus de photographier, [et tu te dis qu’à l’instant de rendre l’âme, tenteront-ils encore, les sots, les stupides, de photographier la mort qui venant à eux leur arrachera des mains leur foutue richesse ? ] ) chacun ne reçoit que ce qu’il amène, dans cette cité terrestre qui, comme le dit Saint-Augustin, prétend tout dominer, et se trouve elle-même soumise par l’esprit de domination (1)

 

A cette image de Dieu dont la Charité ravive jusqu’au cœur de la société du Spectacle ces quelques traces perceptibles du Saint-Golgotha, nous amenons donc un cœur gonflé de sanglots et de peines, et notre honte d’appartenir à cette espèce si vaine et si folle, et notre ferveur aussi, notre espérance et notre Joie toutes deux faites de larmes invisibles et de limon silencieux; et puisqu’ici, chaque sacrement est une réconciliation, nous nous souvenons un instant de Joseph d’Arimathée qui, de Béthanie, emporta le sang du Christ jusqu’en Cornouailles, tel un Ulysse ou un Enée de la Cité de Dieu à bâtir sans cesse, de la Chrétienté dont nous sommes les ultimes et insuffisants rejetons. 

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Extérieur de la cathédrale Saint-Jean-Baptiste de Turin

1 - Saint-Augustin, Cité de Dieu, livre 1

mercredi, 27 mai 2015

Nous ne sacrifions rien (3)

Rien, donc, nous ne sacrifions rien, du moins en sommes-nous persuadés. Rien de notre temps, de notre santé, de notre plaisir et de nos porte-monnaie. De temps en temps, pour quelques bonnes causes estampillées République, nous nous fendons de quelques pas, serrés les uns contre les autres pour faire peuple ou image, tels des aveugles. Et l’on se croit forts. Et l’on fait des selfies. Et l’on pense avoir accouché d’un esprit, comme les pygmées autour de leur chaman, dansant au centre de leur village. L’esprit de la République… A l’occasion des rassemblements autour de Charlie,  un repaire de folliculaires qui, devenus millionnaires, finiront par s’entretuer, ce fut la dernière trouvaille des nains nantis qui occupent les palais français entourés de journalistes ou de starlettes, et ne méritent même plus qu’on gâche de la salive à leur sujet. De toutes ces marches, de toutes ces messes, la véritable religion est absente, parce que nous ne sacrifions rien, ni de nos mains ni de nos têtes vides, et nous le sentons tous, puisque rien de ces simagrées ne perdure aussitôt que la dure réalité nous étreint de nouveau la gorge. Chimère, que cette religion maçonnique, laïque et républicaine.

Nous ne sacrifions rien, pas même de la matière grise… Et pourtant : en cherchant à nous fourguer leurs valeurs, en les imposant à tous à coups de bombes dans le désert, de congrès dans les zéniths ou de procès dans les médias, ceux qui nous dirigent, les chamans du Veau d’Or,  continuent d’organiser un bel enfer dans la cité. Quant à nous, à force de ne sacrifier qu’à leur consommation et à leur divertissement, nous sommes vidés de nos âmes, rien de moins. C'est notre liberté réelle que nous leur offrons. Notre égalité naturelle. Notre fraternité véritable. Nous sacrifions l’Eglise, du moins notre place en Elle car Elle, Elle est garantie ; le murmure de nos faibles vies, pas. C’est du moins ce que nous assurent deux mille ans d’histoire chrétienne. Face à cela, les valeurs républicaines dont se gargarisent ministres et députés ne sont qu’une contrefaçon, vidée par d’habiles manœuvriers du précieux sang du Christ, une vulgaire contrefaçon des vertus authentiquement catholiques qui firent notre civilisation. Une contrefaçon, ça ne vaut rien. Qu’on ne s’étonne pas que l'enthousiasme des foules ne dure pas pour des tels esprits ! L’Eglise est millénaire, la République a vécu ses derniers feux au bout de quelques décennies d'un pouvoir illusoire dans un siècle traversé par deux guerres mondiales, étranglée par l’ogre américain de Maastricht, avec la bénédiction d’un président prostatique, lui aussi obsédé par certaines forces de l’Esprit… La République véritable, le bien commun, appartenait au peuple et était censée s'occuper au mieux des affaires de l'Etat et de la nation. Elle a failli à sa mission triplement, d'une part en bradant la nation, d'autre part en privatisant l'Etat, et dorénavant en singeant une religion panthéiste de je ne sais quels Droits qui seraient universels de l'Homme, droits divinisés à coups de rhétorique pour branquignols comme seuls les empereurs romains savaient le faire de leurs abstractions de pierre quand il s'agissait de se faite porter en triomphe par des imbéciles. Incapable de faire régner la discipline dont elle se réclame, elle ne peut qu'imposer à coups de décrets son ordre factice, parce que vide de tout sacrifice, même piteusement symbolique. Ce faisant, elle se jette d'elle-même dans le discrédit, nouant autour de son propre cou un fil, et le tirant de toutes ses forces un peu plus chaque jour, tandis qu'un peu partout, la colère des peuples jetés dans le vide gronde, avide de futurs et forcément sanglants sacrifices...  

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Kermit, les forces de l'esprit...

mardi, 26 mai 2015

Que sacrifions-nous ? (2)

Tout en surveillant une épreuve de BTS dans un bâtiment en préfabriqué dont même la Bulgarie des Soviets rougirait, je me plongeais dans les livres de Samuel que je n’avais pas relus depuis  des décennies. L’histoire de Samuel, celles de Saül et de David, celle enfin de son fils Salomon sont traversées par un même souffle narratif, un magnifique lyrisme historique dont le cœur poétique, l’établissement de la royauté d’Israël par Yahvé Sabaot, irradie pleinement chaque péripétie, comme en témoigne une phrase comme celle-ci : « Remplis ta corne d’huile et va. Je t’envoie chez Isaï de Bethléem, car j’ai vu parmi ses fils le roi que veux ». La cithare de David ainsi me berçait, me faisant oublier l’indigne servitude des candidats qui m’entouraient et ma propre servitude plus indigne encore parmi eux, dans ce lieu à mi chemin entre le hangar, l’entrepôt et la salle d’examen, en quoi se résumaient à mon sens toute la tristesse et la duplicité de cette rouée et veule République. Le souffle épique des guerres de David, le murmure si spécifiquement doux de ses prières m’emportaient, tandis que les heures s’écoulaient. Au début du livre des Rois (2,2) David mourant dit à son fils Salomon : « Je m’en vais par le chemin de tout le monde ». « De toute la terre », traduit Augustin Crampon. Ou encore «  de tous les hommes ». L’Ecclésiaste prolongera l'hymne en soufflant un peu plus tard dans ces pages sublimes: Vanité, vanité, tout est vanité et poussière au vent…

A quoi en effet  sommes-nous tous en train de perdre notre vie ? Que sacrifions-nous ?  A la source de toute chose, bonne ou mauvaise, David voyait Dieu. Dieu le comblant de grâce ou le laissant se morfondre dans le péché. Je me disais qu’assurément, ni lui ni Salomon ne comprendraient les mots, les gestes des créatures qui m’entouraient, ni à quoi la société des hommes exigeait qu'ils appliquassent leur attention. Assurément, ces rois antiques ne comprendraient rien à notre goût pour les droits de l’homme, notre science, notre technologie, les prétendues valeurs de notre infirme raison. Nada. De cela nous pouvons être sûrs, et pour certains d’entre nous, fiers jusqu’à la plus glaçante des terreurs. Mais nous ? Que comprenons-nous encore de leur parole ? de leur foi ? Gavés d’idioties contemporaines, nous irons pourtant à notre tour « par le chemin de tout le monde ». Qu’aurons-nous sacrifié à nos médiatiques idoles, aux stupides politiciens qui s'engraissent à nos frais ? Le meilleur de nous-mêmes, j’en ai bien peur,  notre foi, notre espérance, notre charité, dans les débats stériles des démocraties modernes où tout est si diaboliquement inversé, dans la lutte pour la survie existentielle de chacun, dans l’affirmation hautaine de nos vaines opinions ?

« Distinguez ma cause du milieu d’une nation infidèle, de l’homme injuste et fourbe, délivrez moi » : c’est ce que chantait David, une supplique du dehors et du dedans, c’est ce que le prêtre chante au bas de l’autel avant le saint sacrifice, et c’était comme un baume de pur grâce répandu dans la précarité significative de ces bâtiments en préfabriqués où s'édifient les servitudes de demain…

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David, église Notre Dame à Boulogne sur Mer

10:54 Publié dans Là où la paix réside | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bible, david, salomon, saül, france, culture, éducation, république | | |

lundi, 25 mai 2015

Que sacrifions-nous ? (1)

Toute l’Antiquité s’est construite et a vécu à partir du sacrifice du tragos, le bouc émissaire innocent appelé à contenter les dieux. Ici, c’est Iphigénie, sauvée in extremis par Artémis,  là c’est Isaac, dont le  « cruel Dieu des Juifs », comme s’exclame Athalie, feint d’exiger la vie. L’incontestable génie du christianisme fut de rendre caduque et d’abolir le rite antique du sacrifice humain – et même animal, Dieu présentant à l’humanité incrédule le sacrifice de son propre fils – celui-ci mené à terme de manière consentante à travers la Passion. Le Dieu chrétien, ce faisant, révèle à quel point son amour est plus grand que l’amour humain, parce qu’il est Père, Fils et Saint-Esprit à la fois, quand la créature n’est qu’elle-même. Ce faisant, il renvoie l’homme aux bornes de sa raison qui sont ses propres limites, sa cruauté, sa superstition, sa stupidité. Il rend caduque l’observation de l’ancienne Loi  reposant sur des sacrifices. « Si vous vous faites circonscrire, le Christ ne vous servira de rien, lance Paul aux Galates trop soumis aux judaïsants. Vous tous qui cherchez  justification dans la Loi, vous êtes déchus de la Grâce. Nous, c’est de la foi, par l’Esprit que nous attendons l’Espérance de la justice.»

Cette insoumission à la Loi du sacrifice, tant juive que romaine, les premiers Chrétiens la payèrent de leur vie ; en réalité, ils furent persécutés non pas parce qu’ils étaient chrétiens, mais parce qu’étant chrétiens, ils ne reconnaissaient de juste que le sacrifice du Christ et refusaient de pratiquer ceux exigés par l’Empereur. D’une certaine façon, les temps modernes commencent avec Constantin. Et nous sentons tous que ce sont ceux-là même que l’Islam radical, par ses égorgements ritualisés, tente d’abolir dans les terres chrétiennes du Proche Orient.

L’Occident, lui, s’est construit à partir d’un autre sacrifice, un sacrifice saint, celui de la messe, que le fourbe Luther détesta tellement qu’il l’abolit de son nouveau Temple. Notre guerre de Troie, c'est la Queste del Saint Graal, que nous ne savons aujourd'hui que caricaturer lamentablement. « Le nombre est infini des prétendus catholiques qui ne savent pas que la communion quotidienne est une suite rigoureuse de l’Oraison dominicale : Panem Quotidianum. Les chrétiens qui n’en veulent pas sont forcés de recommencer à leur insu l’effrayante Méchanceté de Bethléem :- J’étais étranger, dit le sage, et vous ne m’avez pas donner l’hospitalité. », nota Bloy un jour de mars 1901. C’est Bloy qui,  il y a environ cinq ans de cela, me ramena durant quelques mois quotidiennement à l’autel. J’étais victime des préjugés de mon temps, au premier lieu duquel celui du ressenti comme gage de la sincérité. Bloy me rappela les vertus de la simple obéissance au Christ. Vous ferez ceci en mémoire de moi. Pour ce qui est du ressenti, je renvoie mon lecteur à la citation de Green ci-dessous (1), qui dit assez à quel point le sacré et le sentiment sont choses profondément antagonistes, et à quel point vouloir les réunir comme un certain œcuménisme angélique cherche à le faire relève de l’imposture. La sainte messe n’est sacrée que parce qu'elle dépasse et la raison et le sentiment de la créature, inutile de chercher autre cause. Et là encore, elle dépasse la simple prière ou la méditation que proposent en effet toutes les autres religions, lesquelles ne sont que des activités humaines.

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L'Européen le plus moderne, c'est vous, empereur Constantin

[1] Les personnes qui viennent à la Messe parlent et rient ; elles croient qu'elles n'ont rien vu d'extraordinaire. Elles ne se sont doutées de rien parce qu'elles n'ont pas pris la peine de voir. On dirait qu'elles viennent d'assister à quelque chose de simple et de naturel, et cette chose, si elle ne s'était produite qu'une fois, suffirait à ravir en extase un monde passionné. Elles reviennent du Golgotha et elles parlent de la température. Si on leur disait que Jean et Marie descendirent du Calvaire en parlant de choses frivoles, elles diraient que c'est impossible. Cependant elles-mêmes n'agissent pas autrement. On dirait que ce que les yeux ne voient point n'a pas d'importance ; en réalité il n'y a que cela qui est et il n'y a que cela qui existe. Elles ont été 25 minutes dans une église sans comprendre ce qui se passait. Elles entendent la Messe tranquillement, sans larmes, sans commotion intérieure. Si elles pouvaient s'étonner, elles seraient sauvées, mais elles font de leur religion une de leurs habitudes, c'est-à-dire quelque chose de vil et de naturel. C'est l'habitude qui damne le monde.

Julien Green (1900-1998), sous le pseudonyme de Théophile Delaporte, Pamphlet contre les catholiques de France, paru dans les Cahiers du Rhône, 15 (54), Neuchâtel, 1944.

mercredi, 22 avril 2015

La terre de la Croix

Le premier ministre Valls (1) explique que les « terroristes » ciblent « la France, pour nous diviser ». Non. Les « djihadistes » visent « « les Juifs et les Chrétiens »  de France et d’ailleurs, essentiellement d’ailleurs pour l’instant, comme en témoignent les décapitations atroces des Chrétiens coptes en Lybie et éthiopiens la semaine dernière. Quiconque a vu les vidéos de ces décapitations de Chrétiens sur des plages africaines a entendu la déclaration de guerre de ces fous du Prophète, adressée, couteaux brandis,  à la « Terre de la Croix ». Telle est la propagande islamiste, rien de plus et rien de moins que cela. 

En Orient, quand les églises sont visées, tous les gens vont à la messe le dimanche suivant, afin de montrer qu'ils ne sont nullement impressionnés et qu'ils n'ont pas peur.  

(1) Ce soir, Valls a corrigé son jugement, affirmant "que s'en prendre à une église, c'est s'en prendre à l'essence de la France".  Ce qui pour moi signifie que ce n'est pas à l'Etat de protéger les églises : mettre un militaire devant chaque église, c'est aberrant. C'est tout simplement à vous, à moi, à ceux qu'on appelle les laïcs, d'y faire corps...

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13:43 Publié dans Là où la paix réside | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : christianisme, attentats, églises, france, djihadisme, politique | | |

vendredi, 03 avril 2015

L'inconnu de la rue saint-Jean

L’enterrement  achevé, nous  nous sommes réunis autour d’une table, puis nous nous sommes tous quittés vers quinze heures. J’étais triste, fatigué, troublé.  Je suis descendu à pied jusqu’à Trion, de là en funiculaire jusqu’à Saint-Jean. Je me suis assis sur un banc au fond de la primatiale et j’ai dû m’y assoupir  un long moment. En ressortant, j’ai trouvé le parvis légèrement humide, et c’est alors que mon regard l'a croisé.

Avec un peu de technicité, cela pourrait former une nouvelle fantastique. Mais je n’ai pas envie de jouer avec cela. Il ressemblait vraiment au mort que je venais de quitter là-haut, dans l’ancien cimetière de Loyasse. Vraiment. Tel un sosie allant tranquille.  Il portait un pantalon de velours, une veste, une écharpe, la même calvitie que lui ramenée six ou sept en arrière, Il vaquait lentement, d’un pas de touriste très posé, contemplant la façade de la primatiale d’un air dubitatif, présent à ce sur quoi son regard se posait,  absent à tout le reste, vraiment, songeur,  les mains derrière le dos.

Un sosie : le même visage, tout comme LUI à six ou sept ans de ça en arrière,  et l'exacte même stature d'avant sa maladie : je l’ai dépassé, j’ai fait semblant de nouer un lacet pour l’observer mieux.  Le nez levé, lui détaillait le moindre détail des immeubles Renaissance, très engagé dans chacun de ses regards, et toujours comme flottant, la mine à la fois intriguée par le lieu qu’il découvrait et indifférente aux gens qui l’entouraient, le pas calme et aérien, le dos droit, inclinant parfois la tête pour vérifier qu'il marchait bien sur du sol.

J’ai beaucoup d’imagination, j’aime depuis toujours douter de ma raison, ma vieille et pauvre raison si répétitive dans son fonctionnement, car rien ne m’ennuie autant qu’une certitude surtout lorsqu’elle est rationnelle, mais à cet instant…  J’ai réprimé l’envie d’aller lui parler, car m’adresser à lui, c’était chercher la preuve qu’il n’était pas une apparition, ni une hallucination vivante. Personne d’autre que moi ne faisait attention à lui, ce qui renforça mon trouble. Il paraissait invisible d’eux tous,  de toute façon, me disais-je, qui s’intéresse aux vieillards, dans une rue ?

Personne, nous le savons tous.  Je me suis malgré tout saisi de mon smartphone et je l’ai photographié de dos. Puis j’ai vérifié presque fébrile que la photo, elle aussi, fût bien réelle, que je n’étais pas en plein rêve éveillé. La rue Saint-Jean calme, sur son pavé gris il faisait bon. Je l’ai alors doublé, presque rassuré. J’ai pressé le pas.

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Un nouveau doute, cependant. Devant la loge du Change, je me suis accroupi, faisant mine de m’intéresser aux travaux, mais guettant sa lente progression. J’ai pu détailler longuement son visage aux traits si semblables à celui de mon parrain mais à l’expression différente de toutes celles que je lui avais connues, comme s’il découvrait chaque pierre de ces immeubles et d'un regard, leur donnât tout leur prix, absorbé totalement et sans aucune autre expression que cet air autant neutre que contemplatif, si contemplatif que j’en ai eu le frisson. J’ai songé à nouveau à aller lui demander son nom, comme pour quémander sa réalité, mais je n’ai pas osé. La raison qui est en moi m’a fait sentir que c’était aller trop loin dans sa remise en cause, une entreprise de démolition, et pourtant…

Nous vivons dans des enclos intellectuels sans reliefs, nous ne connaissons quasiment rien de fiable à 100% n'en déplaise à tous nos prix Nobel, sinon qu’un jour nous serons morts : Et de cette évidence, tout ce que nous faisons, pensons, désirons  cherche à nous en divertir au sens le plus strictement pascalien quand mourir, ce n’est peut-être rien d’autre que passer ainsi d’un monde à l’autre, le pas tranquille, se laisser glisser sans peur, paisible et lumineux vers un lieu dont nous ignorons tout, dans l'approche duquel il faudra placer un jour toute notre attention.

jeudi, 02 avril 2015

Le parrain

En sortant de la messe chrismale hier soir les gens se comptaient, « revigorés », disaient certains. L’amphithéâtre principal et toutes les salles attenantes emplies, c’est vrai que l'Eglise de Lyon avait repris des couleurs !  Atavique ce besoin -et ce qui que l’on soit - électeurs, fans, abonnés, clients, groupies, de se compter.  Me rends compte combien j’ai toujours été solitaire, n’aimant rien de moins que les messes de Fourvière à sept heures du matin, ou celles, anticipées du samedi soir à Saint-Denis. Un lien, peut-être avec la dislocation de ma famille, antérieure déjà à ma naissance, comme un goût de péché originel ou de malédiction antique.

On enterre ce jeudi mon parrain qui n’a pas voulu de messe – tout le paradoxe d’une France entière qui n’a plus de contact avec sa religion historique que culturel, et encore, en cette seule phrase -  et voilà qu’à la messe chrismale, tout à l’heure, oui je dis bien la messe chrismale, cet homme qui m’a porté jadis aux fonts baptismaux avant d’égarer sa foi dans la folie du siècle, cet homme avec son apparent déni de Dieu flotta en ma compagnie ou moi en la sienne, je ne sais plus, tandis que le cardinal Barbarin sur écran géant –nous n’avions pu entrer dans la salle et nous nous contentions du relais video – parlait de saint-Chrème, de baptême et d’extrême onction.

Et moi, fou, je demandai à Dieu tel un autre signe qu’il nous envoyât pour porter l’hostie dans ce hall gigantesque où tout le monde attendait, debout ou assis à même le sol,  un prêtre connu de moi parmi la multitude qui se trouvaient autour de lui, et ce fut le recteur Cacaud lui-même, le recteur même de la primatiale saint-Jean qui vint par devers nous. Etait-il, ce parrain, comme une amie me le suggérait hier soir, dans l’amour implicite de Dieu, « plus proche de Dieu, en effet, que bien des bigots » ? C’est en effet ce que je ressentais, dans cet instant de communion.

Il sera enterré ce jeudi. Un jeudi saint.

Requiescat in pace.

08:24 Publié dans Là où la paix réside | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : louis carlier, lyon, france | | |