dimanche, 17 février 2013
Un homme perché sur une grue
Il a suffi qu’un type grimpe sur une grue dans le port de Nantes, un autre à Strasbourg, un autre à Saintes, pour qu’après toutes les conneries entendues à propos des double parents gays, on s’intéresse à présent au sort des pères : après avoir légiféré sur le statut des uns, Ayrault le héros s’apprête donc à réfléchir au sort des autres. On se demande comment il va s’y prendre, vu que cela revient à faire tout et son contraire.
Car ces pères revendiquent une paternité que la loi qui protège les mères depuis des décennies leur a, certes, dérobée. Cependant les mères en question vivent rarement seules, mais avec un compagnon voire une compagne, c'est-à-dire selon le sociétal un parent 2. A l’heure du tout culturel, voilà nos fins raisonneurs condamnés au cas par cas. Le cas par cas, dans la société égalitaire, cela donne qui s’occupe le mieux ou qui est le plus riche ou encore qui est le plus entouré d’une famille. Quand sociétal et culturel se mêlent, le cas par cas entretient une armée d’avocats, de pédopsychiatres, de juges et d'assistantes sociales. Le cas par cas est un marché, qui place chacun en compétition contre chacun, et chacune contre chacune. C'est son unique projet égalitaire.
On ne se posait pas, il y a encore peu, de si étranges questions. Et chacun d’entre nous n’avait, selon l’ordre naturel, que deux parents qu’il connaissait ou non, son père et sa mère.
D’autres peuvent aimer mieux, c’est évident, qu’un père ou qu’une mère.
Evidemment. Et c’est heureux.
Mais nul ne peut aimer à la façon d’une mère ou d’un père, en engageant la mémoire naturelle d’une lignée, d’une race, la mémoire des ancêtres, des morts.
L’amour d’un père, l’amour d’une mère, c’est sexué sans être sexuel, et cela inscrit un enfant non seulement dans une société, mais dans l’humanité, ses vivants et ses morts. Tout ce que les temps actuels cherchent à détruire en chacun d’entre nous jusqu'à faire de nous des barbares.
Et ça résiste au temps, à la honte, à la révolte, à l’enlisement, à l’oubli.
Face à cette liberté légitime de l’Etre, des êtres, se dressent la Loi, ses lobbys, ses jurisprudences, les intérêts des uns, des autres.
Face à la liberté de l'Etre, il y a l’Etat.
L’Etat qui, dans sa volonté de tout renommer, refondre, refonder, définir et contrôler, ne peut qu’être de plus en plus totalitaire.
Je ne connais rien du passé, de Serge Charnay. L’histoire de Serge Charnay n’est qu’un cas, ne m’intéresse pas.
Mais elle dit la nature, la démente et sereine nature. Voilà les réflexions que m’inspire ce soir un homme perché sur une grue.
21:18 | Lien permanent | Commentaires (49) | Tags : serge charnay, nantes, ayrault, paternité, france, société, mariage pour tous |
samedi, 16 février 2013
Le langage redoutable
C’est ma grand-mère qui m’a appris à prier. Elle me faisait réciter chaque soir : « Petit Jésus, faites que je sois bien sage. Bénissez ma maman, ma mémé, et tous ceux que j’aime ». Oh, ce n’était pas d’un catéchisme très évolué, je le concède. Un catéchisme de bonne femme, ni plus, ni moins. Suffisant malgré tout pour concevoir qu’on puisse s’adresser à plus haut que soi et que quiconque, et que ce plus haut fût aussi tout petit. De la prière qu’elle m’enseigna, elle avait par ses soins exclus le mot papa. Une rouerie de bonne femme, que j’ai depuis pardonnée, malgré le tort considérable qu’elle me causa longtemps.
Un catéchisme plus officiel me fut enseigné plus tard, dans un immeuble de soyeux de la rue Alsace Lorraine, par une catéchumène âgée du premier arrondissement de Lyon. Son discours allégorique et convenu entrait si violemment en contradiction avec celui de l’instituteur communiste de l’école primaire, vindicatif et sûr de tout, que j’eus du mal à admettre la concurrence des deux. Ici, on ne parlait que de Dieu, là, jamais de lui.
Coexistaient alors le clan des lecteurs de Tintin et celui des lecteurs de Pif le Chien ; on est, à cet âge-là si avide d’explications du monde : J’aurais pu choisir l’une contre l’autre et comme beaucoup devenir soit catho soit laïcard, rassuré par l’une ou l’autre certitude. La fatuité de ces adultes qui voulaient comprendre et expliquer toute chose me semblait pathétique, et j’éprouvai une sorte de tendresse à l’égard de leur insuffisance à y parvenir.
De cette tendresse qui aspirait à demeurer vivante naquit une égale antipathie envers le discours scientifique, politique et théologique, et ceux qui masquent derrière une connaissance ou une foi trop affirmées pour être honnêtes, qui son ignorance, qui sa peur, qui son doute.
C’est à cette époque que je tombais amoureux de l’imperfection du langage. Par les sentiers de la littérature, je partais en chasse des érudits véritables et des authentiques saints. Espèces rares.
Commencèrent à s’ouvrir alors les pages des livres.
11:14 | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : littérature, langage, lyon, culture, tintin, pif le chien |
mercredi, 13 février 2013
Femen propagande
D’où sortent ces femmes ?
Quel lobby organise leurs commandos anti-catholiques ?
Qui paye les amendes (troubles de la voie publique, attentats à la pudeur…) que provoque chacune de leurs récurrentes sorties ?
Qui met sur pied leur communication, facilite leur médiatisation, provoque les points presse ?
Qui les protège, jusqu’au plus haut sommet de l’Etat ?
Quelle cause mortifère, derrière cette propagande ?
Qui est derrière ces actrices porno recyclées en pseudo-militantes ?
Qui conduira l'enquête ?
A lire ICI le billet de Nauher sur le sujet
A lire ICI l'article de Roger-Petit
16:21 Publié dans Sur le vif | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : fement, france, notre-dame, propagande, provocation, mariage gay, politique |
lundi, 11 février 2013
Vulgarité inouïe de François Hollande
Alors que Benoit XVI présente non pas sa démission, comme on a pu le lire sur tant de sites, mais sa renonciation, que le président américain, évoque le rôle crucial que joue l'église catholique aux Etats-Unis et dans le monde en ajoutant : « De la part des Américains partout dans le monde, Michelle et moi-même souhaitons offrir nos remerciements et nos prières à Sa Sainteté le pape Benoît XVI », vulgarité inouïe du « président » français qui déclare comme entre deux portes « je n’ai pas de commentaire particulier sur cette décision qui est éminemment respectable et qui fera que euh un nouveau pape sera choisi mais euh La République salue le pape qui prend cette décision mais elle n’a pas à faire davantage de commentaires sur ce qui appartient d’abord à l’Eglise »
Antipathie devant ce fonctionnaire à bésicles aussi inélégant qu'étroit d'esprit, qui assume si mal le passé éminemment catholique du pays qu’il prétend diriger, rage devant cette culture de l’ENA sans panache, sans noblesse d’âme, sans compréhension du langage symbolique, répulsion profonde devant cette république maçonne, si bêtement autoritaire et stupidement fière de sa propre décomposition.
Ah quelle joie eût-ce été d’entendre, plutôt que la nouvelle de la renonciation de Benoit XVI, celle de la démission de ce clown, quelle tristesse de devoir endurer encore ça durant quatre ans.
19:20 Publié dans Sur le vif | Lien permanent | Commentaires (46) | Tags : renonciation benoitxvi, france, religion, protocole, obama, hollande |
dimanche, 10 février 2013
Un homme qui dort
Pour n'accorder que ce qu'elles méritent aux non-couleurs de l'époque, revoir longuement les noirs et blancs somptueux de Pérec :
15:43 Publié dans Là où la paix réside | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : georges pérec, bernard queyranne, un homme qui dort, paris, noir et blanc |
vendredi, 08 février 2013
Everest
Nino d’Introna nous a habitués à la finesse d’exécution de ses mises en scène. Avec Everest, sa toute dernière création au TNG, il ne déçoit pas son public.
A l’origine, la commande d’un texte traitant du thème du père, que Nino d’Introna proposa à Stéphane Jaubertie (1). Ce dernier inventa un huis-clos à trois, un père, une mère, un fils. Une famille pauvre, chez qui l’on mange des oignons et des mini-saucisses, où on ne prit jamais le temps d’écouter sa « demande intérieure » ni, « jusqu’au plus loin de nos ancêtres » celui d’ouvrir un livre.
Entre le père qui s’évade régulièrement dans la forêt (« ma cathédrale à ciel ouvert », dit-il) et la mère qui sait ce qu’elle veut (« une chaudière neuve et qui vous change la vie », dit-elle), le fils unique qui grandit est le principal récitant du spectacle (« mes parents n’étaient pas méchants. Ils me faisaient du mal, mais gentiment », dit-il). Toute la mise en scène se construit autour de son point de vue, à travers des variations très subtiles de la taille de ses parents, qui alternativement diminuent et grandissent, par la grâce du théâtre d’ombres et de marionnettes.
L'action se déroule sur et autour d’une table de cuisine, laquelle s’encombre peu à peu de livres. Car sans dévoiler le fantastique de l’intrigue, on peut dire qu’Everest est avant tout un apologue sur la nécessité de la littérature, « des sommets de la littérature », qui seuls permettent de retrouver dans un univers miniaturisant une taille d’homme et tout ce qu’elle représente métaphoriquement. La figure du père est donc plurielle puisque derrière lui se cachent celles des auteurs de la littérature universelle.
Sur le plateau, derrière un voile qu’animent des jeux de lumière, l’arrière plan, le hors-champ : la chambre nuptiale où le fils rêve de dormir, la salle de bains où la mère va pleurer, la forêt où le père se fait piquer par le serpent, la banque qui refuse de prêter l’argent, la maison du voisin où se déroule l’adultère, l’Everest, enfin, que le fils devra un jour conquérir.
Everest est un pari audacieux qui mêle la légèreté et la cruauté du conte initiatique pour suggérer en creux les menaces qui pèsent sur notre époque. Car le texte de Stéphane Jaubertie, non sans faire courir à la scène le risque d’un pesant didactisme, formule au fil des tableaux de multiples questions : la plus singulière aventure est-elle intérieure ou extérieure ? L’homme se doit-il plus à l’amour ou à la forêt ? Aux autres ou à lui-même ? Est-ce l’homme qui fait l’enfant, ou l’enfant qui fait l’homme ? C’est le talent de Nino d’Introna de créer à partir de ces thèmes généraux des visuels poétiques, avec le souci du détail dans les enchainements et le raffinement de la mise en espace qu’on lui connaît, non sans la précieuse collaboration de Patrick Nejean pour la musique et d’Andrea Abbatangelo pour la lumière.
© : Cyrille Sabatier
Everest, de Stéphane Jaubertie, mise en scène de Nino D’Introna, avec : Angélique Heller, Cédric Marchal, Gabriel Hermand-Priquet en alternance avec Alain-Serge Porta
TNG, jusqu’au 22 février.
1 C’est la troisième fois qu’il travaille avec lui, après, Yaël Tautavel et Jojo au bord du monde
15:58 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, théâtre, tng, stephane jaubertie, nin d'introna, cedric marchal, everest, lyon, culture |
jeudi, 07 février 2013
Rapport sur moi
Grégoire Bouillier est un écrivain attachant. Il a publié chez Allia successivement Rapport sur moi (2002) et L’invité mystère (2004). C’est ce premier texte que Matthieu Crucciani vient de représenter auxthéâtre des Ateliers, en ouverture du festival Sang neuf, qui se prolonge jusqu’au 9 février
« J’ai vécu une enfance heureuse » Ouverture d’un récit, qui se clôt quelques 150 pages plus tard par un « c’est encore heureux », lâché par le narrateur, à qui sa mère vient d’expliquer qu’elle a raté son suicide. Le spectacle est de bout en bout tenu par un Pierre Maillet éblouissant de justesse, de drôlerie et parfois de réserve, pour donner vie à ce texte a priori difficile. Car il s’agit d’un texte autobiographique, dans lequel Grégoire Bouillier raconte sans concession ni pour lui ni pour les siens ce que furent les moments fondateurs de son enfance, et ce qu’il en fit.
Parler longtemps de soi, dans un monde comme le nôtre qui bannit le lyrisme et l’exaltation du moi, n’est possible que sur le registre nuancé de la fausse candeur ou celui de la dérision, et presque sur le ton de l’excuse. Maillet, qui jouait avec bonheur le curé dans l’Entêtement de Spregelburd il y a peu à la Croix-Rousse, manie fort bien ces tonalités, pour raconter les douleurs et les tentatives d'évasion du personnage, ses illusions, ses soumissions et ses déceptions.
Crucciani a retenu les moments nodaux du récit de Bouillier sans céder à la facilité, et on peut l’en remercier. Y compris les plus difficiles, comme celui où l'écrivain (que fascine Joyce) évoque le personnage d’Homère. « C’était comme si j’offrais mon visage au soleil », lâche alors dans un sourire le comédien, avant d’expliquer qu’en filigrane, comme un certain Bloom ou un certain auteur de théâtre dans le Mépris de Godard, « les aventures d’Ulysse se révélaient les miennes, non pas identiques mais reprises ». C’est le moment où se délivre à la fois la clé du récit et la clé du spectacle, le moment où « comme le Roi-Soleil entouré des quatre femmes qu’il avait aimé », le personnage se donne presque naïvement comme « un inédit d’Ulysse », faisant de la fiction en tout cas un rempart contre la réalité decevante.
Le fil de la narration est entrecoupé de séquences musicales puisque la scène est en réalité un moment de répétition entre trois musiciens des Klongs, joués par Eléonore Du Bois -Jouy et Mathieu Desbordes, remarquable batteur, qui servent un peu trop souvent de simples oreilles bienveillantes à Pierre Maillet lorsque ce dernier ne brise pas le quatrième mur en s’adressant directement au public. Là réside la faiblesse de cette mise en scène, qui ne va pas jusque au bout du parti pris proposé en se refusant à établir des rapports significatifs entre les musiciens. Mais elle garde le mérite de restituer fidèlement l’univers singulierement générationnel de Bouillier, et pour cela, le spectacle vaut le déplacement.
Photos © Jean-Antoine Raveyre
Les Ateliers de Gilles Chavassieux, qui traversent actuellement une passe difficile avec le récent départ de Simon Délétang, proposaient ce spectacle dans le cadre d'un festival consacré à des formes innovantes, qui s'achevera le 9 février, Sang Neuf. A suivre ici les principaux renseignements sur les autres spectacles.
05:47 Publié dans Des pièces de théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théâtre, les ateliers, grégoire bouillier, rapport sur moi, littérature, lyon, matthieu cruciani, pierre maillet, récit, autobiographie, culture |
mercredi, 06 février 2013
Les enfants de la zone
Cessons donc de dire père et mère. Pénétrons avec nos tripes entières dans la novlangue orwelienne. C’est la langue du pouvoir, celle des Lumières et du progrès. Ne sommes nous pas gens lumineux, les post-modernes ? Le mot gay qui date de 1970 en fait partie, comme non-voyant et technicienne de surface. Le système en a besoin de techniciennes de surface, tout comme il a besoin des sbires de la PMA. Gays de tous les pays, unissez-vous, et faites les faire en chœur, les enfants du système. En chœur et en éprouvettes. Soyez leurs parents 1, leurs parents 2, 3, 4. N'est-il pas d'ailleurs croustillant de voir David et François,les deux sales gosses de Thatcher et Mitterrand, faire passer la meme loi au meme instant ? Cela devrait clore le bec à tous les fanatiques qui dans l'hexagone affirment que c'est une loi de gogoche, tu vois...
Pour leur bonheur futur, faites sur le berceau des enfants de la zone le ménage parmi tous ces vieux mots discriminants. Et que le numérique ardent règne sur vos ébats. La langue de Molière pue trop le fascisme des temps odieux. Ne parlons pas de celle de Rabelais, dont la gaité ordurière est désormais inaudible aux oreilles procédurières des enfants de la zone...
06:38 Publié dans Aventures post-mortem de la langue française | Lien permanent | Commentaires (8) |
mardi, 05 février 2013
Père
Le chemin vers la dissémination lui semblait encore long
Tant la poussière, les crachats, s’accrochaient aux talons
Il parcourut d’un regard fier la rondeur des collines
Que striait jusqu'au soleil le tracé droit de sa route
Tu les retrouveras, songea-t-il,
Ta femme,
Ton fils,
Ton travail,
Ta maison,
Ta lignée,
Ta race.
Lorsqu’il s’étendit contre le fer,
Il ressentit la douceur de l’édredon
Imprégnant toute sa chair
Son sexe comme au premier éjaculat
Se fit poignard, immense de chaleur
Et brûlant de lumière.
Il ne parvint à rien contenir
De la joie limpide qui flambait
De violence natale.
Un monde né d’un tel coup de reins
Qui pourra le démembrer, se dit-il,
Des votes de l’assemblée sénile
Ou des fioles folles des laboratoires marchands?
Alors, éclat de bonheur
Ivre et comme fondu de durée,
Il terrassa d'un geste le travestissement odieux de leur monde
En répandant ces mots.
04:19 Publié dans Des poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poème, littérature, pma, père |