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vendredi, 20 mars 2009

Polémique papale

« Si on n'y met pas l'âme, si on n'aide pas les Africains, on ne peut pas résoudre ce fléau par la distribution de préservatifs : au contraire, le risque est d'augmenter le problème. »   Première version : « au contraire on augmente le problème).

Dans les deux cas, si je sais lire, cela signifie : on ne peut réduire la lutte contre le Sida à la distribution des préservatifs. La proposition conditionnelle marquant clairement que l'extinction du fléau ne saurait être réduit à un seul geste technique (« si on n'y met pas de l'âme... »). Ceux qui attendent que le garant d'un dogme séculaire se plie à une idéologie actuelle évidemment l'entendent d'une autre oreille. Mais aucun pape ne peut ouvertement parler comme le chef d'une ONG ou d'un service sanitaire.

On comprend pourquoi Nicolas, Ségolène et autres consorts réduisent leurs déclarations à des propos type sujet/verbe/complément..., à une syntaxe et à un vocabulaire indigents, n'emploient plus ni conditionnel, ni subjonctif, etc... « Tous ensemble, tous ensemble », au moins, tout le monde comprend... Même si ça ne veut plus rien dire.

De l'aveuglement syntaxique à la mauvaise foi idéologique, il n'y a qu'un pas !

 

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10:28 Publié dans Des nuits et des jours... | Lien permanent | Commentaires (35) | Tags : sida, religion, benoit xvi, christianisme | | |

jeudi, 12 mars 2009

La vierge de Mimerel

Le 12 mars 1643, les échevins de Lyon, désespérés devant la progression de l'épidémie de peste, placèrent officiellement la ville de Lyon sous la protection de la Marie. L'épidémie ayant cessé, on décida qu’« une reconnaissance annuelle », sous la forme d’une procession fixée le 8 septembre de chaque année, jour de la Nativité de la Vierge, serait la manifestation de cette dévotion « plus qu’à l’ordinaire ». Les échevins iraient donc chaque année ouïr la sainte messe à Fourvière et offriraient à Marie, en forme d’hommage,  "la quantité de sept livres de cire blanche en cierges et flambeaux avec écusson aux armes de la ville, propres au service de ladite chapelle, ainsi qu’un écu d’or" L’offrande de ce vœu fut, de 1643 à 1789, régulièrement consignée dans les comptes de la ville. Supprimé en 1790, il fut réhabilité en 1843, lorsque le cardinal de Bonald, à l’occasion de la célébration de son deuxième centenaire, consacra la ville à la Vierge. Et c’est sous l’épiscopat du cardinal Gerlier, au milieu du vingtième siècle, que les élus ont repris le chemin annuel de Fourvière. Lucien Bégule réalisa, pour l’ancienne chapelle, le vitrail ou l’on voit les échevins entourant le cardinal Alphonse de Richelieu, archevêque de Lyon de 1629 à 1653

C’est tout naturellement en des points stratégiques de la ville que les échevins du dix-septième siècle s’engagèrent à élever deux statues de la Vierge en marbre blanc. L’une devait être placée sur la place du Change, l’autre, précisément, au milieu de ce pont de Saône que tout un chacun empruntait, « sous un petit dôme triangulaire composé de trois petites arcades de la largeur de trois pieds sur six de hauteur », et qui fut remplacé au dix-neuvième siècle, puis détruit au vingtième.

Le monument commémoratif du Pont de Saône fut commandé le 23 janvier 1659 et édifié en 1662 « sur l’avant-bec de la quatrième pile du côté de Saint-Nizier, où précédemment il existait une croix en pierre indiquée sur les plans de Simon Maupin de 1625 et de 1659" (1)

Les circonstances de la disparition de la Vierge du pont de Saône et de son transfert dans l’église de l’Hôtel-Dieu, où elle passe pour miraculeuse, sont mal connues. Grisard rapporte une légende, selon laquelle la Vierge elle-même aurait décidé de son nouvel emplacement :

« La statue de la Vierge qui était sur le pont de pierre de Saône ayant été fracturée, on en plaça les débris sur un chariot attelé de deux bœufs, pensant les faire disparaître en les transportant au loin. Mais arrivé devant l’entrée de l’Hôpital, l’attelage refusant d’avancer malgré les efforts de son conducteur, on crut voir dans ce comportement le désir exprimé par la Mère de miséricorde pour faire admettre sa statue dans l’asile réservé au malheur et à la souffrance, et sur le champ, sans autrement délibérer, on transporta le chargement dans l’intérieur de l’Hôtel-Dieu ».



(1) J.J. Grisard, Le Vœu des échevins de la ville de Lyon, Lyon, Pitrat, 1888

21:48 Publié dans Là où la paix réside | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : vierge de mimerel, voeu des échevins, lyon, religion | | |

dimanche, 28 décembre 2008

Le sens des Innocents

A la fin du chapitre qu'il consacre à Saint Etienne, Jacques de Voragine (La Légende dorée) réfléchit à l'organisation du calendrier liturgique qui, juste après la Nativité, place la célébration de trois martyres : ceux d'Etienne, de Jean, des Innocents. Voici ce qu'il rappelle :

"L'église a eu deux raisons pour organiser ainsi les trois fêtes qui suivent Noël. 

La première, c'est de rassembler ses compagnons autour de l'Epoux et du Chef. En effet, le Christ époux, en naissant, a conduit vers l'Eglise trois compagnons, dont on dit dans le Cantique : Mon bien-aimé est clair et vermeil, il est insigne plus que dix mille.  Clair est Jean l'Evangéliste, confesseur éclatant; vermeil est saint Etienne le protomartyr; insigne plus que dix mille est la multitude vrginale des Innocents.

La seconde raison est la suivante : l'Eglise réunit ainsi, selon leur degré de dignité, tous les genres de martyres dont la naissance du Christ martyr a été la cause. Or il y a trois types de martyre : le premier consiste en une volonté et un acte, le second en une volonté non suivie d'acte, le troisième en un acte et non une volonté. Le premier type se réalisa en saint Etienne; le second en saint Jean et le troisième dans les Innocents."

Voilà ce qui s'appelle créer de la signification. Ce que les sociétés dans lesquelles nous nous trouvons ne savent absolument plus faire. A un point qui a même cessé d'être consternant. D'où leur nullité. Et leur agonie. Loin, fort loin des Innocents.

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Rubens, Massacre des Innocents 1621

 

samedi, 27 décembre 2008

Etienne,le lapidé

Ce que les païens appellent les fêtes de Noël cela dure longtemps, s'étire, s’éternise jusqu'à la plus absolue nausée, au mensonge le plus absolu, au dégoût véritable. Aussi cuvent-ils sous le sapin, couverts de guirlandes, prêts à enchaîner avec la Saint-Sylvestre et hop la boum, champagne et lumières multicolores, Aspégic et corbeilles d'huitres béantes, volailles dodues digérées ou pas, smac-smac et pouêt pouêt. Pendant ce temps, l'Eglise a déjà quitté la Nativité pour s'intéresser au Martyre. Le martyre d'Etienne, annonciateur de celui du Christ. "Seigneur, reçois mon esprit" s'écria Etienne, lapidé, sous les yeux de Saul. Et il rajouta, à l'Imitation de Jésus : "Ne leur compte pas ce péché". Dans une primatiale presque vide, le Recteur de Saint-Jean Baptiste à Lyon tentait donc d'expliquer, hier soir, par quel mystère inconnu de la fête des Lumières, inaccessible à l'intelligence humaine, une naissance peut n'être, tout-soudain, que l'envers d'un martyre, et demeuré malgré tout une fort bonne nouvelle. En l'écoutant, je pensais à Vassili Grossman qui disait à peu près la même chose, mais en termes plus littéraires, dans un texte que j'avais déjà cité sur ce blog et que je replace en lien, car on n'en aura jamais, nous autres, fini de ne pas comprendre ces terribles choses-là : d'ailleurs, disait le Recteur, c'est pourquoi ce sont des mystères...

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Statue de Saint-Etienne, entrée du choeur, oeuvre d'un certain BLAISE (c'est écrit sur le socle) 1776

Il se trouve que l'autre dédicace de la cathédrale de Lyon (magnifique, cette cathédrale, oh, ce n'est pas Chartres, bien sûr, mais comme Louis Guilloux le disait de celle de Saint-Brieuc, cette cathédrale, c'est la mienne, c'est ma paroisse), l'autre dédicace de l'église de Lyon, c'est celle de Saint-Etienne, le lapidé. C'était donc un peu la fête de la cathédrale de Lyon, hier soir. Nous n'étions vraiment qu'une poignée, mais pas de raisons pour ma part d'en être désolé : Moins on est de fous, parfois, mieux on rit.

 

Aujourd'hui, samedi 27 décembre, c'est la Saint Jean. Non, pas celle de Jean-le-Baptiste, mais celle de Jean, l'Apôtre et l'Evangéliste. Je lisais l'autre jour sur un blog ami que les saints avaient disparu du calendrier des PTT cette année. Comment quiconque peut-il comprendre quoi que ce soit à la religion catholique, si on supprime les saints du calendrier ? Mais sans les saints, nul ne sait plus quel jour il habite, c'est un peu comme si on supprimait les numéros des rues, comment s'y repérer ? Ah, ils savent bien ce qu'ils font, car le saint du jour, c'est ce qui donne son humanité, sa couleur, sa senteur, sa mémoire, sa religion à une journée. Mais quel saint, de toute façon, le calendrier terne de notre époque sans mystère peut-il conserver en mémoire ? Le calendrier païen est bâclé par paquets de deux ou trois semaines, allez, voilà pour les beaufs les fêtes, les jeux olympiques, le téléthon, la saint-Valentin, tsoin-tsoin..., les départs en vacances...  Les vacances d'hiver, par paquets de trois, et ceux de Pâques itou, avec la ribambelle à suivre des fêtes des mères, pères, grand mères, grandes sœurs, petits cousins et vilaines tantes....  L'Eglise est plus studieuse, bien plus subtile, plus appliquée, et tant plus généreuse, aussi : Le 28 décembre, ce sera les Innocents, le 29 décembre, Saint Thomas Becket (première chapelle installée à Fourvière)...  Mais hier, 26 décembre, c'était la fête non pas de tous les Etienne, comme le dit en accompagnant d'un sourire fort niais son discours une présentatrice de la météo, mais d'un seul, aussi incompréhensible qu'Œdipe, le Grec énucléé, c'était la fête d'Etienne, le chrétien, lapidé.

01:49 Publié dans Là où la paix réside | Lien permanent | Commentaires (26) | Tags : religion, christianisme, saint-étienne, saint-jean, lyon, culture | | |

lundi, 15 septembre 2008

N'ayez pas peur

N'ayez pas peur : le slogan est en passe de devenir un mot magique, une sorte de "sésame ouvre-toi de la popularité". Testée une première fois par Jean-paul II le jour de son intronisation, il a été martelé par Benoit XVI à l'occasion de son passage en France. D'abord, sur le parvis de Notre Dame ; puis aux Invalides : "N'ayez pas peur de donner votre vie au Christ." En 2007, déjà, Robert Hossein en avait fait le titre d'un spectacle. Etrange formule, a priori, par laquelle celui qui parle présuppose l'existence d'un grand méchant loup rodant à quelque pas de celui qui l'écoute.  Etrange formule, qui offre, par ailleurs, le privilège de conférer une autorité à celui qui la prononce face à ce péril suggéré - une autorité à la fois bienveillante & rassurante-. Formule ambiguë, car il semble qu'il faille ne pas avoir peur de celui qui la prononce malgré le danger qu'il édifie lui-même. Formule qui laisse un COI dans l'implicite (mais de quoi devrions-nous ne pas avoir peur ?). N'ayons pas peur des mots, justement, et reconnaissons que la formule, manipulatoire, est politique au moins autant que religieuse : On se souvient que Sarkozy l'avait piquée, lui aussi, à Jean Paul II dans son discours aux jeunes du 18 mars au Zénith. N'ayez pas peur de la mondialisation, du libéralisme, de ma propre personne : je suis là et j'ai changé. N'ayez pas peur : De la place Saint-Pierre au Palais des Sports, du Palais des Sports au Zénith, du Zénith au Parvis de Notre-Dame, de Notre-Dame aux Invalides, des Invalides à Lourdes, la formule a fait mouche. Et ce n'est pas fini, si on songe à sa carrière déjà avancée dans le marketting et la pub.  Il serait donc intéressant de savoir qui en fut réellement l'initiateur.

7cb978416c80f3c5f66c7b6798aeb56e.jpgOr il se trouve qu'en fouillant les textes, on s'aperçoit que celui qu'aurait prononcé la Vierge elle-même à Mélanie et à Maximin à la Salette commence précisément par cette douce injonction : Avancez, mes enfants, n'ayez pas peur, je suis ici pour vous conter une grande nouvelle. (Pour la suite et la totalité de ce texte peu connu, suivre le lien). Dans ce texte cher à Léon Bloy, la "Dame de Lumière" accuse l'Eglise de son Fils d'être devenue "un cloaque d'impureté"; elle traite les prêtres qui la servent de "chiens", et annonce, faute d'un redressement spectaculaire de la Foi des Chrétiens, une série de catastrophes sans fin s'abattant sur le pauvre monde. Or l'Apparition de la Salette (19 septembre 1846) précède de deux ans la première apparition de Lourdes à Bernadette (février 1848). On sait à quel point Lourdes a, par la suite, occulté La Salette, non sans arranger d'ailleurs autant la politique de Napoléon III que celle de l'Eglise. On peut en tout cas penser que c'est dans ce discours, qu'il connaissait fort bien, que Jean Paul II a puisé la formule magique, reprise par Sarkozy en campagne électorale, reprise par son successeur aujourd'hui. Décidément, il n'y a pas que la comique Ségolène qui se prend pour une Madone : Quelle époque aurait dit ma mère-grand !

20:38 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : benoitxvi, pape, apparition, actualité, religion, politique, notre dame de la salette | | |

vendredi, 02 novembre 2007

La fête des morts

 
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JOUR DES MORTS :

"Enfin ! Nous voilà au cimetière ! Le Paradis Terrestre ! Quelle paix ! Quelle douceur ! Qui pourra dire le rafraîchissement procuré par la vue des tombes ? Ceux qui les habitent, grâces à Dieu ! n'en sortiront pas à leur gré pour tourmenter, une fois de plus, ceux qui ont encore à mourir!  "

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 Magnifique Léon Bloy, dont la formule trouvée dans Petits poèmes en prose ("Novembre") ramasse et restitue l'essentiel de ce qu'un promeneur peut ressentir dans les travées d'un cimetière. C'est aujourd'hui la fête des morts, et nous interrompons pour quelques jours le feuilleton des canuts. Cela ne nous empêche pas d'avoir une pensée pour toutes les victimes de 1831, 1834.  "Hélas, fit écrire sur sa tombe la comtesse de Noailles, je n'étais pas faite pour être morte". Soit ! Et pourtant elle l'est, comme ils le furent et comme nous le serons, sommes nous tentés de dire. L'humanité compte, on le sait, plus de morts que de vivants. Belle consolation, n'est-ce pas ! Le piquant Brassens se vantait de posséder "des cimetières en abondance", qu'il pouvait visiter le Jour des Morts. Moi, je n'en ai pas tant que ça.  Pour ceux qui, par malchance, n'en auraient aucun à visiter, et seraient donc obligés de passer la journée d'aujourd'hui en compagnie  des vivants, plutôt que de vous fader les programmes TV, je conseille en tout premier lieu  ce site sur le Père Lachaise à Paris, . Là, vous apprendrez l'histoire du plus beau cimetière de la capitale et vous pourrez vous exclamer devant votre écran "Paris à nous deux" sans avoir l'air trop ridicule. Autre promenade très bien orchestrée dans le cimetière de Montparnasse , lequel mérite lui aussi un détour, ne serait-ce que pour Proudhon (1809-1865), Littré (1801-1881),Baudelaire (1821-1867), Tzara (1896-1963), Laval (1893-1945), Sartre et Beauvoir (1905/1908-1980/1986).

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La province recèle, en matière de cimetières de véritables trésors. Voici celui d'Ouessant, celui de Vichy où vous attend Valéry Larbaud, celui de Toulouse, celui de "Mouille-Cul où Mitterand repose à Jarnac. Sur ce site, vous pourrez rendre de virtuelles visites à bon nombre de célébrités disséminées un peu partout sur le territoire.

A Lyon, le cimetière de la Loyasse, sur la colline de Fourvière, offre plusieurs curiosités : une vue sur le mont Thou, magnifique, de nombreux monuments (oubliez celui, stalinien en diable, d'Edouard Herriot), le "jardin des prêtres", une spécificité que je n'ai rencontrée nulle part ailleurs, et qui appartient à l'évéché... Enfin, à tout seigneur tout honneur, vous achèverez cette tournée des cimetières par celui de Sète qu'un de ses illustres habitants a rendu, à jamais, pour le pire comme pour le meilleur, éternellement marin.


 

mercredi, 15 août 2007

PRIMATIALE

 1. Dans sa Dédicace de la cathédrale de Lyon, Sidoine Apollinaire ( Vème siècle) a sans doute composé les lignes dont l’autorité demeure définitive sur la cathédrale Saint-Jean-le- Baptiste de Lyon :  « La forêt de pierres couvre une espace médian : Ici la colline résonne, là la Saône renvoie l’écho ; d’un côté se réfléchit le bruit du piéton, du cavalier et du conducteur de chars grinçants, de l’autre le chœur des rameurs courbés élève vers le Christ le chant rythmé de la rivière, tandis que les rives répondent en écho alléluia. Chante, chante ainsi, matelot ou voyageur, car c’est ici le lieu où tous doivent se rendre, le lieu où se trouve la route qui mène au salut ».  Les vaguelettes de la Saône ne viennent plus lécher son chevet, sur le quai Romain Roland strié de voitures. Pourtant son emplacement, entre la colline (désormais coiffée de la basilique) et la Saône , (toujours limpide malgré la pollution) son implantation entre ce qui passe et ce qui demeure, bref, son existence reste toujours aussi stratégiquement symbolique. Et l’axe que constitue la primatiale avec la basilique demeure un repère pour tout le monde à Lyon, qu’on soit autochtone ou nouveau-venu, athée ou croyant. .

2. « D’un geste d’épouvante, Salomé repousse la terrifiante vision qui la cloue, immobiles sur les pointes ; ses yeux se dilatent, sa main étreint convulsivement sa gorge (…) Sous les traits ardents échappés de la tête du Précurseur, toutes les b3b5885acd7e062c575e048999954edd.jpgfacettes de joailleries s’embrasent ; les pierres s’animent, dessinent les corps de la femme en traits incandescents ; la piquent au cou, aux bras, aux jambes, de points de feu, vermeils comme des charbons, violets comme des jets de gaz, bleus comme des flammes d’alcool, blancs comme des rayons d’astre. L’horrible tête flamboie, saignant toujours, mettant des caillots de pourpre sombre aux pointes de la barbe et des cheveux… »  La description de l’aquarelle de Gustave Moreau L’apparition par Huysmans dans A Rebours (1884), sept ans après Flaubert (Hérodias- 1877), vingt ans après Mallarmé (Hérodiade -1864) : (« Et ma tête surgie / Solitaire vigie / Dans les vols triomphaux / De cette faux »), consacre une figure presque païenne de Jean-Baptiste, à travers l’épisode de Salomé et de la décollation. Une figure on ne peut plus fin de siècle, décadente… Et pourtant, là encore, bien qu’il soit réduit à son seul chef, Jean Baptiste, encore, désigne, pointe,  montre, comme si c était, là, de toute éternité sa mission : « Celui-là n’était pas la lumière, mais il avait à rendre témoignage à la lumière » (Jean, Prologue)

 

3. La dédicace de la primatiale à Jean-Baptiste a, paraît-il, toujours étonné les historiens. Il semble pourtant que le culte du Précurseur n’était pas rare à Lyon puisque, d’après J.F.Reynaud (Lugdunum Christianum, DAF, Paris, 1998), l’église de Saint Irénée lui a été également primitivement dédiée. A l’entrée du chœur sur le côté droit, le marbre du patron 095efff2e1da8322c095e18f0ffd091a.jpgdate de 1780. C’est l’œuvre d’un certain Barthélémy Blaise (Lyon, 1738 – Paris,1819), un petit maître responsable également, quatre années plus tôt, du Saint-Etienne qui lui fait pendant à gauche. L’abside actuelle date du XIIème siècle ; la façade du XVème. La chapelle des Bourbons, malgré la laideur des vitraux bleus placés en remplacement de ceux qui se sont effondrés lorsque les nazis ont bombardé le pont Tilsitt en 1944, demeure la partie la plus illustre de l’édifice. Celle où les souvenirs perpétués jusqu’à nous par les chroniques (de multiples conciles, dont le plus célèbre reste celui de 1274, en présence de Thomas d’Aquin et de Bonaventure, concile qui réunit provisoirement les églises d’Orient et Occident, exposition de la dépouille mortelle de Saint Louis de retour de Tunis en 170, mariage de Henri IV avec Marie de Médicis en1600 ), celle où la mémoire et l’imaginaire peuvent le mieux prendre corps parmi la pénombre.

 

4MARGERITE DE NAVARRE (1492-1549) : Simplicité d’une vieille qui présenta une chandelle ardente à Saint-Jean de Lyon et l’attacha contre le front d’un soldat qui dormait en un sépulcre. (Heptaméron, nouvelle 65)

c7ada8d45f261f1edd3bf9ddecb58285.jpg"En l’église Saint-Jean de Lyon y a une chapelle fort obscure et, dedans, un sépulcre fait de pierre à grands personnages élevés comme le vif : et sont à l’entour du sépulcre plusieurs hommes d’armes couchés. Un jour, un soudard se promenant dans l’église au temps d’été qu’il fait grand chaud, lui prit envie de dormir. Et regardant cette chapelle obscure et fraîche, pensa d’aller garder le sépulcre en dormant comme les autres, auprès desquels il se coucha.  Or advint-il qu’une bonne vieille fort dévote arriva au plus fort de son sommeil et, après qu’elle eut dit ses dévotions, tenant une chandelle ardente en sa main, la voulut attacher au sépulcre. Et trouvant le plus près d’icelui cet homme endormi, la lui voulut mettre au front, pensant qu’il fût de pierre. Mais la cire ne put tenir contre la chair. La bonne dame, qui pensait que ce fût à cause de la froidure de l’image, lui va mettre le feu contre le front pour y faire tenir sa bougie. Mais l’image, qui n’était pas insensible, commença à crier, dont la bonne femme eut si grand peur que, comme tout hors de sens, se prit à crier miracle, tant que tous ceux qui étaient dedans l’église coururent, les uns à sonner les cloches, les autres à voir miracle. Et la bonne femme les mena voir l’image qui était remuée ; qui donna occasion à plusieurs de rire, mais les plusieurs ne s’en pouvaient contenter, car ils avaient bien délibéré de faire valoir ce sépulcre et en tirer autant d’argent que du crucifix qui est sur le pupitre, lequel l’on dit avoir parlé. Mais la comédie prit fin pour la connaissance de la sottise de la bonne femme."

 

5. Emile Baumann, ami lyonnais de Léon Bloy, à propos de la primatiale, dans Lyon et le Lyonnais :

« Quand l'office est achevé et la foule partie, je me plais à circuler un moment le long des nefs et du transept. La chapelle du Saint Sacrement, à droite, très obscure, où la lampe suspend comme une ampoule de sang embrasé est dominée au fond par un vitrail : la Vierge en manteau bleu sombre soutient sur ses genoux son Fils mort, entre deux anges qui s'inclinent, deux anges aux ailes d'argent, aux robes d'émail. Je ne sais pourquoi, détachée sur le fond noir de la chapelle, cette image d'un coloris assez lourd, me paraît, plus que nulle autre semblable, envelopper un mystère douloureux comme si, derrière elle, le monde était une nuit sans étoile. »

 

6.Ma prière à Jean le Baptiste :

 Jean-Baptiste ! O grand saint, maintiens toujours en vie ma jeunesse, ma vitalité et ma virilité spirituelles, mon désir d’entreprendre, de vaincre et d'être heureux. Ce qui est destructeur pour mes proches et pour moi, en mon cœur ou en ma pensée, ôte-le. Fais de moi un constant arbre de vie. Protège mon baptême que tout menace, en ruisseau comme en lumière, saint Jean-Précurseur. Amen. »

 

09:20 Publié dans Là où la paix réside | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : christianisme, lyon, religion, tourisme, eglises, saint | | |

samedi, 11 août 2007

Sainte Trinité d'Anzy-le-duc

On revient du Brionnais, ivre de châteaux et d'églises romanes. Bien que de dimensions modestes, la priorale d’Anzy-le-Duc, dont le haut clocher à trois étages  octogonal domine le petit village et le paysage paisible de cette partie verdoyan28da53fe3a8fd406381d5fcbef9378c7.jpgte de la Bourgogne, est un petit joyau en calcaire doré, qui date du IXème siècle  La nef de l’église se compose de cinq travées flanquées de bas-côtés. On peut la dater de la fin du onzième siècle. Noble ancêtre...  Les portails valent le détour. Celui qui se trouve à l'ouest de l’église, des environs de l’an 1100 ; le tympan montre un Christ en majesté entre deux anges,  entouré par les apôtres du linteau et par les Vieillards des chapiteaux et des voussures. Dans l’enceinte du prieuré, près de la grande tour qui conserve encore ses baies romanes, se trouve un deuxième portail, où on admire l’Adoration des Mages et la tentation d’Adam et Eve sur le tympan, au-dessus du ciel et de l’enfer du Jugement Dernier. Les 40 chapiteaux de la nef montrent des scènes historiés admirables, des animaux fantastiques et des feuillages entremêlés. Les chapiteaux du chœur sont plus archaïques avec leurs lions et aigles. Autre merveille, les fresques du douzième siècle, qui  décorent l’abside et les absidioles, avec entre autres des scènes de la vie de Saint-Jean-Baptiste.

Une c4f090d76d5a0ea0485cc1d050f8a7833.jpghose pour achever de nous ensorceler, nous autres, urbains dont l'existence n'est que tapage, incessant, braillage, boucan, tumulte  et vain bruitage :  si la priorale d'Anzy-le-Duc  recèle un trésor, c'est bien le silence absolu qui règne dans la crypte du Bienheureux Hugues de Poitiers, qu'on rejoint par un petit escalier ( si la porte en bois est ouverte) sous le chœur. Je n'ai pas "entendu" un tel silence depuis des siècles.

Une envie folle, d'y revenir un soir,  avec un duvet,  et de s'y laisser enfermer pour une toute une année... Une année loin des hommes, dans le silence.

 

 

 


08:45 Publié dans Là où la paix réside | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : christianisme, église, religion, art roman, brionnais | | |

jeudi, 19 juillet 2007

La plus belle église de Paris

Saint Sulpice

 On dirait qu'il y a, dans cette église, plusieurs églises.

C'est pourquoi pas un détour par Paris ne se fera jamais plus sans au moins une station devant la chapelle de la Vierge, devant celle des Ames du Purgatoire ou devant celle de Saint-Jean Baptiste. Lorsque Delacroix a peint le plafo67044bc54fb6af43ce8f11a91872d564.jpgnd de la chapelle des Saints Anges (Combat de Jacob avec l'ange), Baudelaire nota dans ses curiosités esthétiques le contraste entre l'homme naturel "incliné en avant comme un bélier et bandant toute sa musculature" et l'homme surnaturel, "se prêtant complaisamment au combat, calme, doux, comme un être qui peut vaincre sans l'effort de ses muscles" (Salon de 1859)

Nul besoin, de toute façon, de l'alibi culturel de Baudelaire, ni de celui, touristique, du Da Vinci Code, pour aimer Saint-Sulpice.

L'église est simplement vivante, l'une des plus vivantes de la capitale. Il suffit, pour le ressentir, d'y passer quelque temps, assis sur un ou l'autre de ses bancs. Il suffit d'écouter en soi-même l'homme naturel et l'homme surnaturel qui s'éveillent. Pas forcément pour engager une lutte aussi romantique que celle que peignit Delacroix.

Cela peut survenir pour le temps bref d'un simple conciliabule. Le regard de l'un, le ressenti de l'autre, de toute façon, trouvent toujours de quoi s'emplir, tant ce que Saint-Sulpice offre aux sens de l'homme naturel comme à la prière de l'homme surnaturel a de facettes et de ressources.

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A suivre : Le cent francs Delacroix ...

16:45 Publié dans Là où la paix réside | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : eglise, christianisme, religion, catholicisme | | |