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samedi, 27 décembre 2008

Etienne,le lapidé

Ce que les païens appellent les fêtes de Noël cela dure longtemps, s'étire, s’éternise jusqu'à la plus absolue nausée, au mensonge le plus absolu, au dégoût véritable. Aussi cuvent-ils sous le sapin, couverts de guirlandes, prêts à enchaîner avec la Saint-Sylvestre et hop la boum, champagne et lumières multicolores, Aspégic et corbeilles d'huitres béantes, volailles dodues digérées ou pas, smac-smac et pouêt pouêt. Pendant ce temps, l'Eglise a déjà quitté la Nativité pour s'intéresser au Martyre. Le martyre d'Etienne, annonciateur de celui du Christ. "Seigneur, reçois mon esprit" s'écria Etienne, lapidé, sous les yeux de Saul. Et il rajouta, à l'Imitation de Jésus : "Ne leur compte pas ce péché". Dans une primatiale presque vide, le Recteur de Saint-Jean Baptiste à Lyon tentait donc d'expliquer, hier soir, par quel mystère inconnu de la fête des Lumières, inaccessible à l'intelligence humaine, une naissance peut n'être, tout-soudain, que l'envers d'un martyre, et demeuré malgré tout une fort bonne nouvelle. En l'écoutant, je pensais à Vassili Grossman qui disait à peu près la même chose, mais en termes plus littéraires, dans un texte que j'avais déjà cité sur ce blog et que je replace en lien, car on n'en aura jamais, nous autres, fini de ne pas comprendre ces terribles choses-là : d'ailleurs, disait le Recteur, c'est pourquoi ce sont des mystères...

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Statue de Saint-Etienne, entrée du choeur, oeuvre d'un certain BLAISE (c'est écrit sur le socle) 1776

Il se trouve que l'autre dédicace de la cathédrale de Lyon (magnifique, cette cathédrale, oh, ce n'est pas Chartres, bien sûr, mais comme Louis Guilloux le disait de celle de Saint-Brieuc, cette cathédrale, c'est la mienne, c'est ma paroisse), l'autre dédicace de l'église de Lyon, c'est celle de Saint-Etienne, le lapidé. C'était donc un peu la fête de la cathédrale de Lyon, hier soir. Nous n'étions vraiment qu'une poignée, mais pas de raisons pour ma part d'en être désolé : Moins on est de fous, parfois, mieux on rit.

 

Aujourd'hui, samedi 27 décembre, c'est la Saint Jean. Non, pas celle de Jean-le-Baptiste, mais celle de Jean, l'Apôtre et l'Evangéliste. Je lisais l'autre jour sur un blog ami que les saints avaient disparu du calendrier des PTT cette année. Comment quiconque peut-il comprendre quoi que ce soit à la religion catholique, si on supprime les saints du calendrier ? Mais sans les saints, nul ne sait plus quel jour il habite, c'est un peu comme si on supprimait les numéros des rues, comment s'y repérer ? Ah, ils savent bien ce qu'ils font, car le saint du jour, c'est ce qui donne son humanité, sa couleur, sa senteur, sa mémoire, sa religion à une journée. Mais quel saint, de toute façon, le calendrier terne de notre époque sans mystère peut-il conserver en mémoire ? Le calendrier païen est bâclé par paquets de deux ou trois semaines, allez, voilà pour les beaufs les fêtes, les jeux olympiques, le téléthon, la saint-Valentin, tsoin-tsoin..., les départs en vacances...  Les vacances d'hiver, par paquets de trois, et ceux de Pâques itou, avec la ribambelle à suivre des fêtes des mères, pères, grand mères, grandes sœurs, petits cousins et vilaines tantes....  L'Eglise est plus studieuse, bien plus subtile, plus appliquée, et tant plus généreuse, aussi : Le 28 décembre, ce sera les Innocents, le 29 décembre, Saint Thomas Becket (première chapelle installée à Fourvière)...  Mais hier, 26 décembre, c'était la fête non pas de tous les Etienne, comme le dit en accompagnant d'un sourire fort niais son discours une présentatrice de la météo, mais d'un seul, aussi incompréhensible qu'Œdipe, le Grec énucléé, c'était la fête d'Etienne, le chrétien, lapidé.

01:49 Publié dans Là où la paix réside | Lien permanent | Commentaires (26) | Tags : religion, christianisme, saint-étienne, saint-jean, lyon, culture | | |

Commentaires

Juste un mot : merci !

Écrit par : Zabou | samedi, 27 décembre 2008

C'est un très beau billet; qui d'ailleurs me fait mieux comprendre le commentaire que vous avez laissé chez moi hier au soir ! Tout s'éclaire !

Écrit par : Pascal Adam | samedi, 27 décembre 2008

Oui merci, tout ce qui éclaire ma foi balbutiante est un cadeau de la Providence. C'est une sensation très étrange je dois dire de fêter la Nativité parmi les siens et de se sentir avec eux vraiment et en même temps si séparés d'eux. Et c'est dangereux d'ailleurs, car ce que je n'ai pas dit, peut-être le pensaient-ils aussi, sans même avoir les mots pour l'exprimer.

Je le disais à Pascal chez lui, comment penser à la Nativité, la penser sans penser à la Crucifixion? Cela n'a aucun sens. Et justement j'aimerai savoir où se cachent ces pensées-là, comme on voit où se meuvent défigurées celles qui échoient à la Bonne Nouvelle...

Merci en tout cas Solko.

Écrit par : Tang | samedi, 27 décembre 2008

Très beau billet et très émouvant. Même si j'ai plus d'attachement à Saint-Irénée, ma paroisse (comme dirait Guilloux !) moins impressionnante que la cathédrale...
Pour moi ce serait plutôt le martyr de Jean-Baptiste qui annoncerait celui du Christ mais pourquoi pas Etienne.
J'ai l'humeur facétieuse ce soir et j'ai envie de vous provoquer : cette admiration pour Saint-Etienne irait-elle jusqu'à vous faire dire "Allez les Verts !"

Écrit par : Rosa | samedi, 27 décembre 2008

Tang, la Crucifixion mais aussi la Résurrection : c'est curieux aujourd'hui cette tendance à oublier la Résurrection qui est porteuse d'Espérance.
D'autre part mon cher Tang toute foi véritable est balbutiante car il faut redouter la foi triomphante.

Écrit par : Rosa | samedi, 27 décembre 2008

@ Zabou : Merci aussi pour les votres, de billets. J'ai toujours du mal avec ce compte Google que je n'arrive pas à ouvrir pour laisser un message chez vous.A bientôt.

Écrit par : solko | samedi, 27 décembre 2008

@ Pascal : Tout s'éclaire, oui. Bon travail d'écriture à vous.

Écrit par : solko | samedi, 27 décembre 2008

@ Tang : Ah la famille ! Joyce a eu ce mot extraordinaire, à propos des parents : "un mal nécessaire". Cela dit, passez de bonnes fêtes en leur compagnie, puisque vous y êtes. Ce qu'on apprend du temps qui passe, c'est qu'ils ne sont pas immortels.

Écrit par : solko | dimanche, 28 décembre 2008

@ Rosa : L'Eglise n'a pas de regard chronologique sur l'Histoire. Avec elle, Etienne le lapidé de 32 annonce la crucifixation de l'an 0. L'annonce d'un moment qui ne cessera plus d'être, en effet, attendu, célébré.
Jean Baptiste, lui, est plus considéré comme un prophète (le dernier, le Précurseur) que comme un martyr, non ?
Enfin, c'est ce que dit l'Eglise.

Écrit par : solko | dimanche, 28 décembre 2008

Solko, pas de chronologie, -votre billet m'a éblouie hier matin- et
cet éblouissement + au début du billet cette pointe acerbe envers les païens -vous êtes dur quand même!- et aussi la pensée immédiate des rois mages -qui ré-instaurent une chronologie dans la non-chronologie, mais parler des rois mages, ça m'a fait peur, je n'ai pas voulu apparaitre comme la reine -pas mage!- de la contradiction, bref tout ça a fait que je n'ai pas commenté hier et que j'y reviens! Mais je vais écrire un billet sur ces rois mages pour ne pas abuser de l'espace ici. Ici je vais juste vous dire une fois de plus ce banal et humble merci pas à la hauteur de vos billets!

Écrit par : Sophie L.L | dimanche, 28 décembre 2008

Solko, dur pour les parents...

Écrit par : Rosa | dimanche, 28 décembre 2008

Sur les saints,
ce blog que j'ai beaucoup consulté à une certaine époque

et que l'auteur a transformé en site.
http://unjourunsaint.hautetfort.com

Écrit par : Rosa | dimanche, 28 décembre 2008

Cher Solko,
C'est un compte "msn" qu'il faut pour laisser un commentaire (msn, hotmail, yahoo aussi, je crois ?). Sinon, d'autres le font en envoyant un mail là : zabou-the-terrible*arobase*hotmail.fr en indiquant le nom du billet en sujet et je transfère ensuite, mais c'est peu pratique.

Tang, si vous saviez combien je vous comprends concernant les parents...

Écrit par : Zabou | dimanche, 28 décembre 2008

@ Rosa : Je citais Joyce. Même les meilleurs parents sont confrontés à cela, c'est une vérité : ils sont un mal necessaire. Ils transmettent la vie, soit. Ils vous amènent dans ce monde aussi. Un mal necessaire : il n'y a pas de jugements, là-dedans. Un simple fait. Et la rencontre entre ces deux notions, mal et nécessité, est si parlante.
Merci pour le lien avec le site sur l'histoire des saints.

Écrit par : solko | dimanche, 28 décembre 2008

@ Sophie : Je ne cherche pas à être très dur envers "les païens", avec les gens. J'utilisais ce mot pour justement faire réagir. Mais avec la société dans laquelle nous sommes et qui nous rend païens (ce monde qui nous a pondu un tel calendrier médiatique et marchand, et qui traite l'humain comme il le fait), je crois que nous ne serons jamais assez dur. C'est un monde faux, stupide, assassin ("la société du crime" disait je ne sais plus qui), inversé (regardez qui gouverne), qui cultive à loisir les fausses valeurs, le double langage et l'inculture. Bref. A pourfendre.

Écrit par : solko | dimanche, 28 décembre 2008

Solko, pas de jugement de votre part peut-être mais de la part de Joyce, je me méfie...
En tout cas je peux dire en tant que mère que les plus profondes souffrances me sont venues par mes enfants même s'ils n'en n'étaient pas responsables.
Et c'est là que Marie est d'un grand secours même si je suis loin d'être une "marieolâtre"...
Et j'ai du mal à considérer le jugement de Joyce comme un simple fait.

Écrit par : Rosa | dimanche, 28 décembre 2008

@ Rosa : Je ne sais pas, je comprends la chose ainsi : nous connaissons le mal dans le monde et nous venons au monde par nos parents, il y a un lien entre ce mal que nous recevons nécessairement à travers eux et eux-mêmes. C'est un fait. Qui peut, par ailleurs, affirmer que ses parents ne lui ont fait, exclusivement, que du bien ? Ou qu'il n'a fait, lui, que du bien à ses enfants ?
Ce serait intéressant de penser la chose en sens inverse, également : les enfants, un mal nécessaire ? Bossuet n'affirme-t-il pas qu'ils nous poussent vers notre mort ?
(Bossuet, sermon sur la mort).

Écrit par : solko | dimanche, 28 décembre 2008

Les enfants nous poussent vers la mort mais nous assurent aussi l'éternité.
Certes aucun parent ne peut prétendre n'avoir fait que du bien à ses enfants car il n'a pas reçu lui-même que du bien. Mais c'est quand même la puissance de la vie donc on revient au mal nécessaire.
Je ne lirai pas ce soir le billet sur le massacre des Innocents étant donné que celui-ci m'a déjà empêchée de dormir hier !

Écrit par : Rosa | dimanche, 28 décembre 2008

Solko et Rosa: quoique -ou parce que! -mère de deux enfants, je pense que les parents apportent beaucoup de mal à leurs enfants!

Écrit par : Sophie L.L | dimanche, 28 décembre 2008

@ Rosa & Sophie : Ils apportent (ou n'apportent pas) ce qu'ils peuvent (ou ne peuvent). Le jour où on comprend vraiment que ses parents sont finalement des gens comme les autres, comme nous (souvent, c'est lorsqu'on devient parent soi-même), on fait un grand pas.

Écrit par : solko | dimanche, 28 décembre 2008

Solko: c'est le même pas d'ailleurs qu'envers les autres, d'une façon générale, non?

Écrit par : Sophie L.L | dimanche, 28 décembre 2008

@ Sophie : Soit. Mais avouez que vous avez eu moins l'occasion dans votre enfance, dee mythifier les autres êtres humains que vos parents, non ?

Écrit par : solko | dimanche, 28 décembre 2008

Intéressante discussion... Je dois dire que ma remarque sibylline n'était pas si sombre. J'ai compris bien des choses du jour où j'ai vu mon père pleurer. Enfin vu, non. Su. Devant la mer, moi qui me moquais comme un idiot de son attachement au village natal.

Que les parents fassent du mal à leurs enfants sans doute. Mais le plus souvent en voulant faire le bien et c'est cela vraiment qui est le plus dur à accepter, cela prend du temps, le temps de devenir un homme - prêt à être parents nous-même sans doute.

Le mal que les enfants font à leurs parents est moins défendable il me semble. Bien plus égoïste, un mal nécessaire assurément pour empêcher que leur bien ne nous étouffe, ne nous détruise... Peut-être... Une chose est sûre, ils ne sont pas immortels oui Solko et mieux vaut ne pas s'en rendre compte trop tard.

Écrit par : Tang | dimanche, 28 décembre 2008

Sauvée !
Tang merci pour les parents !
Tu ne réponds pas sur Segalen mais tu sais rassurer les mamies !

Écrit par : Rosa | lundi, 29 décembre 2008

J'inquiète la mienne - enfin, ce n'est pas ma grand-mère mais aussi protectrice au moins! - comme tout jeune homme de moins en moins jeune et redoutablement solitaire... Que ne ferait-on - comme contresens - pour rester bon!

PS: Oh j'ai répondu sur Segalen - nom de la fac qui m'abrita en son sein - avec retard certes...

Écrit par : Tang | mardi, 30 décembre 2008

J'inquiète la mienne - enfin, ce n'est pas ma grand-mère mais aussi protectrice au moins! - comme tout jeune homme de moins en moins jeune et redoutablement solitaire... Que ne ferait-on - comme contresens - pour rester bon!

Écrit par : Tang | mardi, 30 décembre 2008

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