dimanche, 28 décembre 2008
Le sens des Innocents
A la fin du chapitre qu'il consacre à Saint Etienne, Jacques de Voragine (La Légende dorée) réfléchit à l'organisation du calendrier liturgique qui, juste après la Nativité, place la célébration de trois martyres : ceux d'Etienne, de Jean, des Innocents. Voici ce qu'il rappelle :
"L'église a eu deux raisons pour organiser ainsi les trois fêtes qui suivent Noël.
La première, c'est de rassembler ses compagnons autour de l'Epoux et du Chef. En effet, le Christ époux, en naissant, a conduit vers l'Eglise trois compagnons, dont on dit dans le Cantique : Mon bien-aimé est clair et vermeil, il est insigne plus que dix mille. Clair est Jean l'Evangéliste, confesseur éclatant; vermeil est saint Etienne le protomartyr; insigne plus que dix mille est la multitude vrginale des Innocents.
La seconde raison est la suivante : l'Eglise réunit ainsi, selon leur degré de dignité, tous les genres de martyres dont la naissance du Christ martyr a été la cause. Or il y a trois types de martyre : le premier consiste en une volonté et un acte, le second en une volonté non suivie d'acte, le troisième en un acte et non une volonté. Le premier type se réalisa en saint Etienne; le second en saint Jean et le troisième dans les Innocents."
Voilà ce qui s'appelle créer de la signification. Ce que les sociétés dans lesquelles nous nous trouvons ne savent absolument plus faire. A un point qui a même cessé d'être consternant. D'où leur nullité. Et leur agonie. Loin, fort loin des Innocents.

01:36 Publié dans Là où la paix réside | Lien permanent | Commentaires (21) | Tags : christianisme, religion, jacques de voragine, martyrs, légende dorée |
Commentaires
J'aime votre conclusion: "créer de la signification et " l'agonie" de nos sociétés.
C'est bien vrai!
Bonne journée
Écrit par : La Zélie | dimanche, 28 décembre 2008
L'agonie des sociétés
Est permanente
Depuis l'origine des temps
Violent combat
Qui agite les tourbillons
D'insensées névralgies
Le martyr est un témoin
Parlant ou muet
C'est sans importance
Aucune souffrance ne luit
Dans son regard affranchi
Des néologismes sémantiques
Derrière le signifiant
Trône la liberté déchaînée
Sans nul besoin
De justification signifiée
Un sourire virginal
Au creux des reins
Écrit par : gmc | dimanche, 28 décembre 2008
Au passage, joyeuses fêtes à vous et merci pour votre soutien à la Cloche.
Écrit par : solko | dimanche, 28 décembre 2008
Au passage, joyeuses fêtes à vous et merci également pour votre soutien à la Cloche.
Écrit par : solko | dimanche, 28 décembre 2008
en fait, est-il réellement besoin de pleurer sur - ou de déplorer - la disparition présumée d'une culture dont les principales caractéristiques - propres à toutes les cultures dominantes - sont l'oppression, l'asservissement et l'exploitation à outrance des "barbares", "sauvages" ou autres "métèques"?
Écrit par : gmc | dimanche, 28 décembre 2008
Je ne déplore pas, je résiste à un avachissement démagogique de cette non culture "mondialisante" et barbare, oppressive elle aussi et discriminante, oh combien !. Et pour "résister" (à mon niveau) je ne peux m'appuyer que sur la culture. Quant au mot civilisation, je ne le confonds pas avec colonisation, il lui est antérieur et je le trouve fort beau (de barbare, devenir civil...)
Écrit par : solko | dimanche, 28 décembre 2008
barbare chez les grecs signifie juste étranger.
personne, intéressant aussi du point de vue étymologique, de l'étrusque "personna", masque de théâtre...
la notion d'individu date de l'époque médiévale effectivement, d'angleterre en fait au XIVème.
cette "non culture" mondialisante n'a pas que des travers, solko, gilgamesh raconte la même histoire que l'odyssée par exemple, partout les doctrines raconte sensiblement les mêmes choses, chacune ayant son approche spécifique, mille chemins pour gravir la montagne.
à ce sujet, il me revient une anecdote, bouddhiste je crois, ou peut-être hindouiste: "les chemins qui mènent au sommet de la montagne sont multiples; mais on trouve peu de pèlerins sur ces chemins. par contre, au pied de la montagne, que de discussions."
il est une chose qui ne lasse jamais de m'étonner dans les monothéismes, c'est la séparation effectuée entre sacré et profane. d'un côté une affirmation comme quoi "dieu est tout" et rien n'échappe à son autorité, de l'autre une séparation volontaire qui exclut certaines choses du champ du divin. cette discrimination, quand on voit les motivations sur lesquelles elle repose, me fait à chaque fois amplement sourire.
ce commentaire m'a donné l'idée de ressortir "l'évangile de thomas" (apocryphe découvert à nag hammadi, égypte, en 1945, non reconnu par l'administration religieuse) et de vous en resservir deux extraits, merci de l'opportunité, c'est un des rares livres que je consulte de temps à autre:
"...Mais le Royaume il est le dedans
et il est le dehors de vous.
Quand vous vous serez connus
alors vous serez connus
et vous saurez que c'est vous
les fils du Père le Vivant.
Mais s'il vous arrive de ne pas vous connaître,
alors vous êtes dans la pauvreté,
et c'est vous la pauvreté." (logion 3)
"...mais ce qui sortira de votre bouche,
c'est cela qui vous souillera." (logion 14)
à noter qu'en terre d'islam, on dit aussi "commence par ta propre personne"
mais on peut aussi vouloir résister (à quoi?) et poser des barrages sur la mer, pourquoi pas.
Écrit par : gmc | dimanche, 28 décembre 2008
Écrit par : Sophie L.L | dimanche, 28 décembre 2008
Écrit par : solko | dimanche, 28 décembre 2008
un des pieds sur lequel est construite cette idée de personne individuée est "je pense" (l'autre étant "je suis ce corps", jonction des deux par descartes "je suis cette chose qui pense", notez qu'aucune des deux n'est démontrée - pauvre descartes -, simples croyances du regard superficiel): or, il est impossible pour un individu présumé d'arrêter de penser; comment peut-on prétendre être responsable d'un processus qu'on est dans l'impossibilité de stopper? (on peut le ralentir, en focalisant sur la respiration par exemple, c'est le but de la méditation) la réalité observable s'établit-elle donc comme "je pense" ou plutôt comme "je suis pensé"? observez le processus, solko, c'est la clé de beaucoup de choses.
l'ermite ou le pèlerin digne de ce nom considère les écorces comme des écorces et les apparences comme des apparences. de plus, seuls les propriétaires disposent d'un tel héritage (une telle chose peut être appelée différemment) qui est issu par ailleurs d'une sélection valorisant l'individu qui en dispose (et dont il se glorifie, ou comment être couronné roi ;-)), le poème sur la mémoire traite en partie de ce point, me semble-t-il.
"construire du sens" est une expression qui dépend du panorama observable... plus bas est le point de vue, plus la profondeur se fait jour. en surface, la mer et ses moutons, peu importe leurs formes d'ailleurs.
il y a un problème dans la culture chrétienne au sujet de la destruction, c'est un point qu'elle n'a eu de cesse de nier, ne retenant que la puissance du dieu créateur (cependant, l'apocalypse - révélation - est pure destruction de l'ancien monde); mais la logique des phénomènes est la suivante, logique qui ne souffre aucune dérogation:
- émergence, développement, destruction.
aucune exception à cette règle en ce qui concerne les sphères physique, mentale ou émotionnelle. le nier déclenche souffrance, colère ou violence.
Écrit par : gmc | dimanche, 28 décembre 2008
Écrit par : solko | dimanche, 28 décembre 2008
si l'expression "je suis pensé" vous déplait, vous pouvez aussi bien aborder la chose par "un processus non soumis à la volition d'un individu présumé produit des pensées".
une personne individuée est une personne réelle, si vous voulez aussi; néanmoins, personne ne sait répondre aux questions "qu'est-ce que le réel?" et "qui suis-je?" (je passe sur les affirmations non démontrées de descartes et je ne vous la joue pas sur l'air des "impostures pseudos-scientifiques"); que peut-on dès lors accorder comme signifiant à votre phrase?
plus simple, essayez donc d'arrêter de penser 5 minutes consécutives et concluez comme bon vous semble ;-), rien de tel que l'expérimentation en direct live...
l'autre jour, un garçon de 16 ans qui écrit aussi bien que rimbaud m'a dit ceci: "je vais te dire un mensonge: il neige dehors"
voyez cela comme vous le sentez.
Écrit par : gmc | dimanche, 28 décembre 2008
Écrit par : Pascal Adam | dimanche, 28 décembre 2008
Écrit par : solko | dimanche, 28 décembre 2008
Écrit par : solko | dimanche, 28 décembre 2008
faites-le et vous tirerez une conclusion similaire (pas forcément dans sa formulation, mais ce n'est pas important) à la mienne, (qui n'est mienne que pour les besoins de la conversation), deux chemins pour deux pieds, une fois tronçonnés...
Écrit par : gmc | dimanche, 28 décembre 2008
Écrit par : solko | dimanche, 28 décembre 2008
deux petits derniers de chez thomas avant de le ranger:
"...au temps où vous étiez Un,
vous avez fait le deux;
mais alors, étant deux,
que ferez-vous?" (logion 11)
"Il n'est pas possible
qu'un homme monte deux chevaux,
qu'il bande deux arcs;
et il n'est pas possible
qu'un serviteur serve deux maîtres,
sinon il honorera l'un
et il outragera l'autre...." (logion 47)
Écrit par : gmc | dimanche, 28 décembre 2008
Écrit par : solko | dimanche, 28 décembre 2008
A gmc: je devine le développement de votre pensée mais je crois qu'il ne faut pas oublier que l'Homme est un animal qui essaye de penser, imaginer............... Nous n'en sommes qu'au début de la Pensée.
Écrit par : La Zélie | lundi, 29 décembre 2008
j'en connais la saveur par coeur, pas d'inquiétude à se faire, je l'ai juste ressorti pour le mot-à-mot.
zélie,
le début, c'est la fin...une brève histoire du temps, rien de plus. savez-vous comment on tue le nombre d'or?
Écrit par : gmc | lundi, 29 décembre 2008
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