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mercredi, 05 novembre 2014

Prof, ton casier

Voilà trois ans que, pour arrondir mes fins de mois stagnantes, je me charge de cours supplémentaires auprès d’apprentis, dans le lycée où je travaille, avec des heures sup dorénavant lourdement imposées. Cette année, malgré ( ou à cause – cercle vicieux) de ce rackett de l’Etat de gauche, j’ai continué :  mes cours dans cette section ont donc commencé depuis septembre.

Quelle n’est pas ma surprise de découvrir ce matin que mon administration me demande, dans un avis plaisamment intitulé « Demande d’autorisation d’enseigner en apprentissage » (voilà trois ans que j’y suis – avec une promo qui est déjà passée par l’examen) , de lui fournir avant le 15 novembre « le bulletin n° 3 de mon casier judiciaire datant de moins de 3 mois….» Au cas où depuis début août, j’aurais eu l’insigne honneur de rejoindre l’émérite profession de braqueur de banque ou  de violeur de gamines pré-pubères, je dois donc attester de la virginité de mon casier comme si je débarquais dans le navire en train de couler. On pourrait l’exiger de moi, dans cette logique, tous les trois mois, car je me demande si je ne vais pas aller commettre ce soir quelque acte répréhensible avec des copains de retour de Syrie, tiens !   

Prof, ton casier ! C’est donc  à un gouvernement de gauche qu’on doit cette mesure, et je n’ose imaginer ce qu’auraient dit les encartés du SNES qui font profession d’éduquer les pauvres gens dans ce pays si une telle mesure s’était déroulée sous le mandat du tyrannique, odieux et somme toute pétainiste Sarkozy.

Ces deux gouvernements de gauche successifs auront tout fait : après un ministre du Budget bardé de comptes en Suisse, un  premier incompétent à l’Economie promu à la commission européenne, un second qui, après avoir prétendument redresser la production( !)  va faire des stages à 36 000 euros le mois pour apprendre le métier de chef d’entreprise, une ministre de la culture qui est capable de déjeuner avec un Nobel de littérature en demeurant infoutue le lendemain  de citer le nom d’un seul de ses livres à une journaliste, comme une vulgaire candidate  du bac, et un ancien de l’Education nationale qui retourne faire des cours payés en francs suisse à Neufchâtel après avoir débité sa morale républicaine à trois francs six sous à tout le monde, moi je dis aux gens de gauche qui ont voté pour cette clique de cyniques et de jean foutres, qu’attendez-vous pour renverser la table ? Que la majorité des gens de ce pays, après avoir bu le calice jusqu’à la lie, épuisés de supporter le double discours permanent et le spectacle ridicule de cette chienlit au pouvoir envoie Marine Le Pen à l’Elysée, et advienne que pourra ?

Au lieu de ça, je les entends rasant les murs, expliquer que c’est normal, pas si grave, blablabla, après tout, c’est vrai qu’il faut se méfier de tout le monde, hein, pas de discrimination, égalité, égalité des traitements  devant la tentation du délit…

Cette bande de charlots ….consternant ! Voilà ce que ça produit, le socialisme à la française : Une société gangrénée du haut par la méfiance et le mépris, infectant chacun de ses membres.

Je m’interroge : comment des gens ont-ils encore du temps à perdre à écouter à la télé les baragouinages de mauvaise foi de ce président lamentable et de ses partisans ?

Et tiens, je me tâte : demain, je ne fais pas cours, je vends de la poudre, de la bonne poudre blanche aux étudiants. Avis aux amateurs ! Dealer, en novlangue, ça rime avec professeur.  Et au moins, j’aurai une bonne raison de présenter mon casier au guichet du ministère de NVB….

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21:49 Publié dans Sur le vif | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : casier judiciaire, éducation nationale, france | | |

lundi, 27 octobre 2014

Suceurs de sang

Tout le gotha politique et économique enterrait ce matin Christophe de Marjorie à Saint Sulpice. Il fallait entendre, à la sortie de l’église, les « personnalités » socialistes, comme on dit, parler de lui non seulement comme « un homme bien », « un homme atypique apprécié de tous », mais surtout comme un homme plein d’humour, quand le PS lui-même avait menacé Gérard Filoche d’exclusion pour avoir parlé à son propos de « suceur de sang ». Le pingouin Hollande, dont le sens de l’humour est proverbial et qui connaissait bien le défunt, avait justement salué « la finesse d’esprit » de ce « grand patron » lors de son communiqué. Il était présent au premier rang de l’église, en tant que président, bien sûr, mais aussi en tant que proche de la famille, aux côtés de l’émir du Qatar (un autre proche…)

« Suceur de sang » : ce n’était certes pas très malin, pas plus que de traiter de « singe » Christiane Taubira.  Mais depuis quand demande-t-on à l’humour d’être intelligent ? Et depuis quand exige-t-on du peuple qu’il ne rit plus ?

Depuis les salons précieux du XVIIe, salons hantés par les Trissotin et les Bélise (amateurs futiles et complices de petites blagues) que Molière ne se priva pas de tourner au ridicule ! C’est alors que se développa  cet humour français si connoté, qui se piquait d’être un trait d’esprit et un instrument de séduction en instaurant le culte du bon mot contre la franche saillie rabelaisienne et qui, de Voltaire à Sacha Guitry , passa par la suite pour un signe de culture ( en lieu et place de la saine érudition), quand il n’était qu’un marqueur de classe dans une société de plus en plus sotte et embourgeoisée.

Bien sûr, avant les précieux, les dévots avaient aussi condamné le rire, au motif que « le Seigneur ne rit jamais ». Certes, bien avant les précieux, d’austères gens d’Eglise avaient même été les premiers à interdire au peuple de rire, au risque de perdre son âme et de compromettre son Salut : le rire, une forme de péché, était la signature de Satan. Au moins cette injonction s’inscrivait-elle dans une hiérarchisation du monde, du profane au sacré, qui faisait sens, à l’heure des bâtisseurs de cathédrales, et les jours de carnaval permettaient de s’adonner au rite d’une joyeuse inversion.

 

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Gargantua, Envoi au lecteur

 

Nos puissants bourgeois bohèmes aux commandes aujourd’hui se comportent, avec les interdits qu’ils multiplient sur la liberté de rire de tout, à la fois  comme des curés sans soutane et des précieux ridicules. Sous leur règne attristant, c’est peu dire que la France va mal. On se demande si elle n’a pas complètement perdu la tête, alors que les comiques milliardaires et si accommodants avec le pouvoir emplissent les bacs des centres culturels d’objets indéterminés et les théâtres parisiens. En 1983, Gilles Lipovetsky appela cette ère « l’ère du vide ».  Dans cette époque, écrivait-il, l’humour apparait comme un « code de dressage égalitaire, qu’il faut concevoir ici comme un instrument de socialisation parallèle aux mécanismes disciplinaires » Nous y sommes. Tu ne diras pas singe ni suceur de sang, au risque d’apparaître tantôt comme diabolique, tantôt comme imbécile. Dans les deux cas, border line, c'est-à-dire infréquentable. Rire de certains trucs, c’est très vilain et ça peut te coûter cher. Confère Dieudonné. Mais tu riras du reste, officiellement drôle, ruquierisé devant ton écran : Tu riras seul, et seulement de ce qu’on te dira.

 

dimanche, 05 octobre 2014

Flinguer le petit Juif

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Léa Salamé et Eric Zemmour, On n'est pas couché, 4/10/14

Flinguer le petit Juif : C’était, de toute évidence, le mot que s’étaient donnés les habitués du Salon Verdurin télévisuel du samedi soir, je veux dire l’émission préchauffée et recuite de Ruquier. Zemmour venait y présenter son dernier livre qui, comme celui de Trierweiler (signe des temps), est déjà épuisé quelques jours après sa sortie. Avec Le suicide Français, il écrit au fond les Mythologies de ces quarante dernières années : du mariage de Coluche et le Luron au film Dupont Lajoie de Yves Boisset, de la féminisation de la société à l’islamisation des banlieues, du déclin du prolétariat et de l'Eglise à la montée des associations anti-racistes et sectorielles, Zemmour tente, comme le fit Roland Barthes en son temps, dans un « lien d’insistance, de répétition » de démystifier le « naturel dont la presse, l’art, le sens commun affublent sans cesse une réalité qui, pour être celle dans laquelle nous vivons, n’en est pas moins parfaitement historique » (1)

Sauf que ce n’est plus un penseur de gauche s’attaquant à l’ordre moral des années cinquante, c’est un penseur de droite s’attaquant, avec une même plume acérée, à l’ordre moral des années 2014. Un ordre, il le rappelle de page en page, fondé sur la déconstruction des valeurs et des traditions au profit d’un alliage redoutablement corrosif des libéraux et des libertaires fondateurs de la post-modernité : Le pire d’une gauche, qui a égaré en chemin la common decency chère au socialisme d’Orwell, et le pire d’une droite, affranchie de la morale catholique qu’elle a remplacée par celle, plus maçonnique, du marché. Le pire des deux qui s’incarne, il faut bien le reconnaître, dans le président godillot de la République actuelle, sa ministre de la justice et le reste de sa clique gouvernante, crispée dans la mauvaise foi, la démagogie et ce qu'ils nomment la justice.

Ce faisant, Eric Zemmour dénonce les acteurs embourgeoisés du soft-power culturel qui a façonné l’opinion depuis la mort de De Gaulle (c’est là qu’il situe caricaturalement le commencement de la fin) jusqu’au vote Maastricht, « le dernier moment démocratique français », juge-t-il avec raison. Comment s’étonner, dès lors, du tir tendu de tous les salonards du clan Verdurin contre lui, de Denisot à Ruquier, de Cohn-Bendit à Salamé, de Caron à la québécoise Anne Dorval, prototype de la femme savante des temps mondialisés, venue promouvoir dans l’hexagone  Mommy, son film-jackpot sur la relation fusionnelle mère/fils quand le père est absent. Cette ridicule Philaminte qui faillit s’étrangler devant ce qu’elle saisissait de Zemmour était, sur le plateau de Ruquier samedi soir, à se tordre de rire… Mais passons. Elle était bien du niveau des autres, à se prétendre distants et libres de toute idéologie, vivant eux dans un monde ouvert loin de la France rance, quand Zemmour, qui ne cessait de les placer devant leurs contradictions, vivrait lui dans la rancœur, le sectarisme et le passé.

Car c’est bien à la tirelire de tous ces gens et à leur compte en banque, in fine, que les arguments du polémiste s’attaquent, principalement. Tous ces idiots utiles du système, qui en vécurent comme Denisot ou Drucker depuis un demi-siècle - système auquel (Zemmour l’oublie-t-il ?) il appartient aussi -, soudainement attaqués en pleine face par un de leur pair ! un ancien de la boutique, qui plus est… Un renégat, un traître à sa cause...

Je glisserai sur les injures de Cohn Bendit (« Tu es un crétin »), les rodomontades de Caron (des chiffres, des chiffres, des chiffres…) pour en venir à ce qui fut le plus significatif, l’intervention de la nouvelle chroniqueuse de l’émission, Léa Salamé, fille de l’ancien ministre libanais de la culture Ghassan Salamé, qui s'enfuit du Liban lors de la guerre avec sa famille. : «Vous aimez tellement la France, vous, le Juif, vous voulez tellement faire plus goy que goy, faire plus français que français, que vous arrivez à remettre en cause Vichy et à réévaluer Pétain... », lui lança-t-elle, parce qu’il s’attaquait aussi au livre de Robert Paxton, La France de Vichy  (osant rappeler du même coup la complexité d'une période, qui sembla soudainement lettres mortes à tout ce plateau de joyeux festifs endoctrinés venus vendre leur soupe). Réponse de Zemmour, entre la consternation et l'agacement : « Pourquoi vous me ramenez à mon état de Juif? Je pourrais monter sur mes grands chevaux et vous dire que c'est antisémite! »

Et là j’ai senti comme un malaise : et je compris pourquoi il fallait tellement flinguer le petit Juif, ce soir, sur ce plateau où chacun se revendiquait d'une culture ou d'une communauté sexuelle différente, et qu'il menaçait de littéralement faire imploser de l'intérieur : parce qu’il avait passé les bornes, lui, le Juif, comme jadis Dieudonné, le Nègre, les passa chez Marc Olivier Fogiel, à se prendre pour un véritable Français de souche, à peut-être voter Marine Le Pen, et à parler comme l’aurait fait, tiens, ce dangereux fasciste de Renaud Camus, ou pire, l'innommable Alain Soral,  qu'on se garde bien, eux, évidemment, d'inviter. A oublier peut-être ce qu'il doit à ses origines, comme la jeune Libanaise arrivée en France à l'âge de 5 ans le lui rappela sèchement. Terrible, terrifiant,le racisme des anti-racistes, décidément ! Et l'on comprend même sans le lire combien le bouquin de Zemmour se situe encore en-deçà de la vérité, combien la décomposition du pays et la trahison de ses prétendues élites sont avancées, et combien terribles sont les événements que tous ces gens des médias et du show-business au compte en banque bien garni, tout prêts à fuir la France quand les premiers troubles éclateront vraiment, auront inexorablement et très cyniquement fait advenir...

(1) Roland Barthes, Mythologies, avant-propos

samedi, 20 septembre 2014

Le même et l'autre

L’un, à 13% dans les sondages n’ose plus trop parler aux Français. Il ne s’adresse plus qu’à des journalistes, tentant de leur resservir quelques blagues à la con et, la paupière basse, la voix dans les chaussettes, leur explique qu’il fait un job difficile et que c’est dur d’aller contre sa nature pour faire preuve d’un peu de fermeté dans une décision.

L’autre, bondissant du placard où l’avait remisé son échec, voudrait parler aux Français. Mais il ne s’adresse qu’aux militants de sa page facebook, pour leur resservir l’espoir d’un improbable sursaut et, le sourcil pointu, le menton volontaire, leur explique que, quand le devoir l’appelle, c’est dur d’aller contre sa nature pour faire preuve d’un peu de constance dans une décision.

Rester encore et revenir, contre vents et marées dans les deux cas : malgré les déculottées publiques, ça doit tenir de la drogue dure, l’or des palais et la fréquentation des Grands Merdeux de ce monde :  l’autre et le même ou le même et l’autre, comme on voudra, une page politique qui refuse de se tourner, comme en son temps celle des Mimi-chichi jusqu’à la nausée, du grain à moudre pour les journaleux et, pour les électeurs, des avis d’impôts qui, malgré la phobie politique des contribuables continuent de grimper en descendant du national au local…

 

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La queue pour la visite du prestigieux bordel républicain, le jour de la fête du patrimoine

mardi, 09 septembre 2014

Dit en passant

Il y a comme des seuils dans l’ignominie et l’absurdité, au-delà desquels, saisi de nausée, on n’a plus envie d’en parler. Hollande se sentant obligé de jouer les François en déclarant  que les pauvres sont sa raison d’être, Thévenoud avouant sa phobie administrative, Valls aboyant que Marine Le Pen est aux portes du pouvoir, ces socialistes, je ne peux plus les voir, les entendre, les supporter. Leurs discours sur la France, la dignité, je bouche les oreilles, ferme les écoutilles, ils n’ont rien à voir ni à faire, ni avec la France, ni avec la dignité,tout ça devient obscène.

J’entendais Fabrice Lucchini l’autre soir à la télé dire que pour affronter le monde tel qu’il est, la France n’avait plus besoin de ces guignols, mais qu’elle devait revenir là d’où elle parle, de ses écrivains. Et le comédien de citer Flaubert, La Fontaine, Céline, bien sûr… A quoi je rajouterai Chateaubriand, Bloy, Bernanos et Péguy. Et les poètes, de Ronsard à Bonnefoy, et les dramaturges, de Rotrou à Jarry. A quoi bon dresser des listes. Le problème de Hollande, disait-il, c’est qu’il ne lit pas, ni romans ni poésie. Il n’a, et c’est le fond du problème, aucune capacité à représenter la culture française.(1) Ou alors comme une culture morte, vide et conceptuelle, à quoi il donne le nom de République. Ce n’est pas mon pays.

Oui, pour aimer la France, il faut beaucoup de littérature. Ce n’est pas nouveau et n’est pas De Gaulle qui veut. L’époque n’est ni classique ni romantique, comment la décrire ? Les gestionnaires techniciens en costumes ou en tailleurs bleus et gris qui déambulent sur nos écrans, le sourire figé, ne sont que les ombres de la non-France, de la non-vie, de la mort.

 

Cela ne m’empêchera nullement de rire et d’être heureux. De rire d’eux, contre eux et sans eux. D’être heureux malgré eux, et malgré la tristesse profonde que je ressens pour mon pays si mal traité, si mal compris et si mal gouverné.

(1) Et Valls n'est pas mieux. Sans doute même pire. 

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Balzac, La Comédie humaine, ed FURNE -  

 

vendredi, 05 septembre 2014

Les cloches de l'Hôtel de Ville

C’est aujourd’hui l’anniversaire de Louis XIV, qui aurait 376 ans. Peu de Lyonnais, en traversant la place des Terreaux, se souviendront qu’on posa en grande pompes la première pierre de l’Hôtel de Ville en son honneur, un 5 septembre 1646, alors que le jeune roi n’avait que huit ans. Cela ne porta pas chance au bâtiment de Simon Maupin puisqu’il fut ravagé par un incendie quelques vingt-huit ans plus tard. On fit appel alors à Jules Hardouin Mansart pour le restaurer et lui donner l’allure qui est encore en gros la sienne aujourd’hui. L’hôtel de ville de Lyon ne figure pas parmi les œuvres de Hardouin Mansart sur la page que Wikipedia lui consacre. On y trouve, en revanche, celui d’Arles, que je n’ai jamais eu l’heur de contempler autrement qu’en photo. Les deux façades ont bien un air de famille, sauf que le beffroi lyonnais est placé au centre, quand celui de la patrie de Jeanne Calment se trouve fortement déporté sur la gauche.

Hardouin Mansart avait fait placer au cœur du grand tympan au-dessus de la porte centrale une statue équestre de Louis XIV, selon la tradition italienne consistant à mettre en valeur le prince. Il s’agissait surtout, pour les échevins de l’époque, d’affirmer leur indépendance effective dans une fidélité symbolique au roi. Ces vieux bourgeois provinciaux, dans une ville de commerce qui n’avait jamais eu de tradition parlementaire, avaient bien compris le paradoxe politique de leur temps, et comment cultiver la réalité de leur liberté à travers l’affirmation de leur sujétion. La Révolution l’en chassa pour le remplacer par une pompeuse allégorie de la Liberté, dont elle seule eut le secret. On décida, sous Charles X, d’y rétablir un prince et c’est Henri IV, roi bien aimé à Lyon raconte-t-on pour son soutien à la Fabrique de soie de son temps et l’annulation de la dette lyonnaise suite à la Ligue, qui fut choisi. Il y trône encore aujourd’hui.

 

On peut sourire de ce souci d’apparat et le croire caractéristique de la monarchie. La République possède aussi le sien : lors du G7 de 1996 qui se tint à Lyon, on remplaça huit des 65 cloches du beffroi, et on leur donna le nom des 7 participants  (dont Clinton et Chirac) auquel tint à se rajouter le maire de l’époque Raymond Barre. C’est un dur métier que celui de carillonneur. Les cols blancs ne s’en doutent pas, il ne faut pas être trop mélancolique. L’un d’entre eux, André Combe, se suicida en 1986 en se jetant du beffroi dans le vide. Le carillon sonne régulièrement, de 7 à 20 heures, les deux premières phrases musicales de Big Ben toutes les heures, sauf à 9, 12, 15 et 18 heures, où le carillonneur peut jouer des mélodies en fonction des demandes. Songer que Clinton, Chirac, Barre et consorts jouent ainsi dos à dos du Béart, Gainsbourg ou Macias ne manque pas d’un certain sel, à l'heure de la cacophonie politique dont nous sommes les témoins impuissants.

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Maquette de l'Hôtel de Ville de Lyon,musée GADAGNE. Le bon roi Henri en son centre 

jeudi, 04 septembre 2014

Un SDF de la communication

Un comportement n’ayant pas de contraire, il n’y a pas  de « non-comportement ». Autrement dit, on ne peut pas ne pas avoir de comportement, qu'on soit ou non un personnage public. C’est à partir de ce constat que Paul Watzlawick dégage le premier axiome de la communication moderne dans Une Logique de la Communication : Dans la sphère de l’interaction humaine, impossibilité donc, de ne pas communiquer : un clochard qui s’endort sur un banc dans la rue communique évidemment quelque chose de lui-même et de la société, à son insu. Et ce qui est vrai d’un clochard l’est évidemment bien davantage des personnages qui font profession de trôner sur les écrans, en occupant sur la scène sociale un rôle, de quelque ordre qu’il soit. Que dire de celui qu’on appelle tristement le premier personnage de l’Etat , et dont – à moins de le contraindre à une démission – il semble qu’on doive encore s’accommoder trois ans encore ?

« Je considère que les affaires privées se règlent en privé », disait ce dernier lors de sa conférence de presse de janvier. Certes. Et de répudier publiquement sa concubine, dans un communiqué sec qui fera date dans la petite histoire de l’Elysée. Aujourd’hui, cette dernière publie un livre qui défraie le microcosme parisien et médiatique et qui, parce qu’un comportement n’a pas de contraire, et qu’en effet, on ne peut pas ne pas communiquer, risque de faire parler de lui plus loin et longtemps

Cédant ostensiblement à un mot d’ordre du Palais, on vient d’entendre dans la bouche de toute la gentry socialiste (députés, ministres, sénateurs) la même rengaine : « je ne lirai pas ce livre… », proclament ils, la bouche en croupion et le cœur sur la main ; car « on ne commente pas la vie privée » un tel étalage de serviles dénégations fait sourire. Les journalistes – y compris, pour ne pas dire surtout, les femmes – tombent majoritairement sur Trierweiler comme si elle était devenue une brebis galeuse ; il faut bien avouer que son éclat met à mal les collusions entre le politique et le journalisme dont elle-même est, journaliste et ex-première maîtresse (dame, du latin domina est, rappelons le, étymologiquement réservé aux femmes mariées) l’incarnation absolue.  Valérie Trierweiler, estiment-elles, « déballe du linge sale », est « indigne », etc, etc. Position également du vieux Duhamel, totem des commentateurs politiques, pour qui la « vengeance personnelle » de Trierweiler est « une transgression politique », et même assène-t-il « une muflerie ». On apprécie l’art de retourner les choses. Quant à Pujadas la moue aux lèvres, il renvoie carrément Trierweiler à sa grossièreté et choisit de ne pas commenter cette affaire. Dont acte, le service public ! D'autres, enfin, s'indignent du jackpot financier que représentent les droits d'auteur d'un tel bouquin. Certes, certes ...On aimerait les voir, avec un même et unanime esprit vertueux, dénoncer les salaires des footballeurs ou les coups médiatiques de certains acteurs. Bref...

C’est un plaisir de voir tous ceux qui défendent la transparence, les apôtres de la société de la communication, soudain se retrancher derrière ce quant à soi frileux. Il n’empêche. Ne pas  communiquer quand on est un personnage public et qu’on s’étale chaque jour sur les écrans,  c’est comme s’endormir sur un banc sur une place publique quand on est un clochard. C’est communiquer quand même, et ce pour envoyer le pire des messages. Sauf que là où le clochard subit, le personnage public agit. C’est donc bien pire encore. C'est, comment dire ? Le pire des faits du prince, un prince ridicule qui voudrait que le monde aille à sa guise.

Et niant aussi puérilement le rôle de cette communication qu’il l’a fait roi (des pitres) Hollande creuse sa propre tombe de ses propres dents - qu’il a longues  (au contraire des sans dents diront les plus acerbes). N’est-ce pas lui-même qui a fait du comportement exemplaire de Moi President une jauge morale ? Son programme ? un comportement, pourrait-on dire, son programme se réduit à un comportement, dès lors qu’il mène ostensiblement – et en bien pire – la politique de Sarkozy. Il n’en reste dès lors à ce jour plus rien de crédible.

On pourrait lui rappeler que, s’il avait bien lu son Balzac, il aurait su qu’un homme d‘Etat ne s'affiche pas impunément avec des actrices et des journalistes. Qu'une première dame, a minima, ça s'épouse, surtout quand on se proclame à la va vite le guru du mariage pour tous (ha ha ). Mais la culture des présidents est décidément une peau de chagrin en ce siècle de cuistres.  François Hollande est à présent «atterré», selon les mots d'un de ses proches cités par Le Parisien. Et nous ? ne les sommes-nous pas ?  «Le président n'a rien vu venir, il a appris la nouvelle hier matin, comme tout le monde. Il ne sait pas ce qu'il y a dedans». Et c’est là que le bât blesse.

Car c’est bien cet homme qui, après avoir assuré que le premier navire promis aux Russes serait livré en octobre, et après avoir écouté son conseiller revenant de Washington lui rapportant le mécontentement de son mentor Obama, accepte à présent d’en suspendre la livraison. Versatilité, amateurisme, quand tu nous tiens… Tout ça parce qu’il se rend devant ses maîtres de l’OTAN aujourd’hui. Hollande, rompt donc son contrat et n’honore pas sa signature en ne livrant pas, malgré les intérêts commerciaux du pays, le Mistral à la Russie. Les syndicats des chantiers navals sont scandalisés. Des emplois, des milliards d’euros sont en jeu. Pas seulement des emplois et de l’argent, pour tout dire. Car Poutine, ce n’est pas exactement la même chose que Trierweiler. Et la fonction présidentielle, pas non plus, une bluette amoureuse. 

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François m'a suivi... La faute d’orthographe a fait le tour des rédactions...

lundi, 25 août 2014

49,3

Les gens friands de politique spectacle étaient servi, hier soir : un ministre démissionnaire (ou démissionné) sur la première chaîne, un autre sur la deuxième. En toile de fond, Angela Merkel, souhaitant ironiquement bonne chance « au président français », comme si elle s’adressait avec condescendance à un subalterne. Subalterne, ce président l’est dans l’âme, et il est clair que c’est désormais Valls qui se retrouve aux commandes du pays.

Ce dernier a fait ses classes à Matignon, sous Rocard, lequel gouverna à coups de 49,3 (1) la majorité relative que lui avait laissée à l’Assemblée les louvoiements du vieux Mitterrand. Naviguer à vue d’un projet de loi à l’autre, Valls qui, sans jeu de mots, porte bien son nom, saura donc faire : Avec ses 42 conseillers (dont le fils de Michel Rocard, un certain Loïc,récemment embauché) il négociera le soutien tantôt des uns, tantôt des autres (du parti de gauche aux centristes, sans compter les radicaux et les sans étiquette). Comme en ces temps-là, on parlera de crise de régime et de décomposition politique. De VIe République. Pourtant, paradoxalement, c’est De Gaulle et son 49,3 qui sauveront Hollande comme, jadis, Mitterrand. 

On touche là à la raison profonde de ma détestation du socialisme : car ces gens-là sont en fait fascinés par cette toute puissance qu’ils critiquent. Le coup d’état permanent, qu’ils contestent lorsqu’ils sont dans l’opposition, ils s’en emparent avec une onctuosité d’évêque dès qu’ils le peuvent. Tout ce qu’ils ont reproché à la droite de Sarkozy  (on se souvient du Merkozy), ils l’appliquent sans état d’âme dès qu’ils sont en place, se gargarisant de titres, d'honneurs et de commémorations. Hollande est de ce point de vue socialiste jusqu’au dernier poil de son cul, qui ne cesse de sanctifier le Général depuis plusieurs mois. Or, je me demande (2) ce que le Général penserait de cet ectoplasme, franchement...

La leçon que j’en tire est celle que j’avais déjà tirée lorsque je l’ai vu rappliquer, il y a trois ans : Les hommes ne changent pas. Il est donc vain d’espérer le changement, du moins un changement réel,  tant qu'on garde les mêmes hommes. Penser que Ségolène Royal, perdante d'une élection présidentielle, puis battue aux législatives, parce qu'elle est l'ex-du président et la mère de ses enfants, est encore aux commandes ! La campagne de Hollande axée sur le changement était bel et bien une imposture. 

Ainsi, nous revoici plongé dans la déliquescence politique qui régnait à la fin du XXème siècle, avec, au pouvoir, les dirigeants qui firent leur classe en ce temps-là. Du 49,3, il y en aura, et avec tous les arguments des commentateurs sur la nécessité de gouverner, même à rebours de ses promesses. Et au diable les idéaux. Il ne manque plus que quelques suicides louches, pour égaler sur le mode politico-burlesque l’heureux temps des Grossouvre et Bérégovoy.

(1) Michel Rocard fut le champion toutes catégories du 49,3, qui en a usé à 28 reprises entre 1988 et 1991. 

(2) Non, j'ai lu les  Mémoires de de Gaulle, je crois savoir...

 

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Loïc Rocard, fils de Michel, conseiller de Valls

 

21:32 Publié dans Sur le vif | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : 49, 3, valls, matignon, rocard, montebourg, hamon, remaniement, gouvernement, france, politique | | |

mercredi, 09 juillet 2014

Une aventure de Limousin

Le Limousin a donc changé de mains. C’est les députés qui en ont décidé ainsi, en votant hier en commission une nouvelle carte des régions.  Celle de l’idiot de l’Elysée qui, avec ses nouvelles lunettes, tente de ressembler à un idiot qui l’a précédé dans ce même palais (je vous laisse deviner lequel) avait été retoquée par le Sénat.  Ce qu’il y a d’absolu dans ce genre de décisions semble ne choquer aucun de nos braves républicains tout prêts à vouer l’absolutisme louis-quatorzien aux gémonies. Pauvre France.

A l’origine, l’initiative d’un baron rhônalpin au patronyme intestinal, qui souhaita annexer le vieux duché d’Auvergne (alors même que le nouvel hôtel du conseil régional – 85 millions d’euros – venait tout juste d’être livré – comme on dit avec si peu d’élégance dans le novlangue contemporain – à Clermont) On découpa donc pour le satisfaire le massif central en deux  de façon arbitraire. Mais que faire, dès lors, de ce malheureux Limousin ? Le relier au Centre ou à l’Aquitaine ? On retint donc la seconde solution au nom « d’un tropisme naturel vers l’Atlantique », ce qui nous ramène au XIe siècle et à l’empire des Plantagenets.

Pendant que les coureurs du tour de France vont traverser les régions, tous ces parlementaires vont donc poursuivre leurs blablas pour les redécouper au gré de leurs intérêts financiers, partisans ou politiciens. Rien d’absolu, me dira-t-on, que du très représentatif, n’est-ce pas ? Personnellement, si j’en avais encore les cuisses, je préférerais être un vaillant coureur du Tour qu’un de ces navrants députés. Les coureurs du Tour transportent avec leurs bécanes un peu de la magie de cette France éternelle, dont les députés se gargarisent en l’anesthésiant et la démembrant un peu plus chaque jour, de loi en loi, de décret en décret. Longeant fleuves et canaux, traversant bourgs et capitales, roulant sur des avenues ou des chemins de traverses, bien plus même que les footballeurs sur leurs artificielles pelouses [ de plus en plus déclassés malgré ce qu’on raconte dans la presse], ils donnent à vivre au territoire, et demeurent en ce sens héritiers d’une histoire. Ce que ne sont plus les politiques enlisés dans leurs éléments de langage foireux et leurs vues de l’esprit toujours en retard d’une locomotive.

Revenons aux régions.  Des sondages venus d’on ne sait d’où nous font croire que cette réforme serait une demande prioritaire des Français.  Ils auraient élu Moi Président pour cela. Résultat : C’est évidemment une aberration de séparer la Loire Atlantique de la Bretagne, comme de séparer l’Auvergne du Limousin.  Il semble que ni l’Histoire ni la géographie n’aient plus de sens face au diktat européen qui veut de grandes régions, organisées par des énarques zélés autant que bésiclés autour de grandes métropoles  économiques, comme on jette des bouses sur une carte. On vous découpe ça comme il n’y a pas si longtemps, on créa dans la brousse et la savane des états africains. Tant qu’on y est, pourquoi ne pas marier ce Limousin qui reste en rade avec la Corse et l’Alsace, puisque  les  électeurs s’y sont prononcés contre tout rattachement de leur région il y a tout juste un an  [référendum sur lequel, au passage, le très démocratique pingouin qui nous gouverne a posé son gros cul] ? Cela ferait un bel ensemble à colorier.

Tout ceci n’impressionne guère, certes, ni la Loire qui continue son cours, ni les Pyrénées qui dominent, ni la Beauce qui s’étend, ni les volcans d’Auvergne qui continuent, tels des dieux morts, de dormir. On comprend que l’homme de la rue, au fond de lui-même, s’en foute bien. Ces hommes désincarnés ne peuvent accoucher que d’un pays désincarné qui ne sera jamais le sien. Mais il risque d’être celui -et c’est toujours sur cela que comptent les imposteurs-, de ses enfants. C'est cela qu'on appelle réformer en novlangue, hélas...

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