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lundi, 21 octobre 2013

Les chiens de garde

Il faut les entendre achever leur carrière de chiens de garde du pouvoir socialiste, en tentant de meubler  la vacuité hollandaise d’arguments oiseux d’un plateau télé à un autre, histoire de retravailler en ce moment d’abousement général « la fabrique de consentement » de l’opinion. Peine perdue, à mon sens. Faut dire que le pauvre type qui squatte l’Elysée ne leur facilite pas la tâche, entouré de courtisans qui le méprisent, sifflé publiquement par des militants socialistes marseillais comme il le fut au défilé du Quatorze Juillet,, à la recherche d’une synthèse entre des motions et des courants dont le contribuable canardé de tous côtés se fiche pas mal. Ne parlons pas des licenciés de l’industrie ou des suicidés de la paysannerie. Ni des millions de provinciaux de la manif pour tous qui voient le pingouin qui les méprisa si ouvertement faire la courbette si piteusement devant une poignée de lycéens.

Dix-huit mois que dure ce carnaval, prévisible ô combien !

Pas drôle, en réalité. Ca fait vivre des députés, des conseillers généraux, des ministres, des secrétaires de ceci, de cela, des chiens de garde, encore eux. Ils aboient à l’entrée du portail et vérifient la tenue de chaque prétendant à la Cour. Il y a encore des gens pour lire leurs torchons, dont les rédacteurs squattent toutes les écoles de journalisme. Il faut les voir sortir les dents pour dire que « il faudrait faire ça, bien sûr, mais ça, ce n’est possible que dans le cadre européen », ah, le cadre européen ! voilà leur vrai maître. L’affaire de leur piteuse génération. Hollande n’est au fond qu’un de leur collègue, un scribouillardeux du même âge qu’eux, sans talent. Ce qu’ils craignent tous, c’est que les peuples envoient trop de députés anti-européens au Parlement de « là-haut », comme ils disent. Après un référendum volé, une multitude de magouilles effectuées dans leur dos, les naufrages grec, espagnol, italien, et bientôt français, et malgré la fin de l'histoire programmée par leurs logiciels espionnés par la NSA, les peuples étant les peuples, ça risque de ne pas être triste. Mais déjà ils ont dû, tous les chiens de garde, se prévoir d'autres niches au soleil.

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Claude Weill, Roland Cayrol, deux aboyeurs parmi d'autres

mardi, 15 octobre 2013

Tristes urgences

Des centaines de malades attendant parfois jusqu'à 24 heures pour disposer d'un lit en service d'urgences, des médecins transformés en hôteliers et perdant leur temps à téléphoner aux quatre coins des villes pour placer leurs malades : Tandis que le racket  banco-fiscal se poursuit à chaque étage de l’impôt, tandis que les Hotel Dieu, fermés l'un après l'autre, se métamorphosent en hôtels de luxe pour noceurs milliardaires, tandis que Marc Zuckenberg achète tout un quartier pour être en paix chez lui (lire ICI), l'hôpital français se délite dans l’indifférence, si j'ose ce jeu de mots douteux. Et la priorité de l'Etat semble ailleurs. On se demande où.

 

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13:18 Publié dans Sur le vif | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : hôpital, urgences, france, politique | | |

lundi, 14 octobre 2013

La République comme sujet et comme représentation

Dans la société séparée du Spectacle, telle que l’a théorisée Debord, il n’y a pas ce qui est advenu et ce qui va advenir, mais une constante interaction langagière entre les deux qui permet de maintenir les spectateurs en haleine en énonçant sans cesse les mêmes slogans pour mystifier le Réel et surtout les abuser, eux. Changer et Sauver,  pour faire court, sont les deux procès événementiels sans cesse invoqués par les officines de propagande, à quoi il faudrait rajouter leurs doublets sémantiques  reformer et refondre. Mais rien n’est jamais advenu et rien n’adviendra jamais d’autre, que des informations éparses reliant entre eux des gens à l’imaginaire de plus en plus pauvre, de plus en plus séparés et d’eux-mêmes et les uns des autres au fur et à mesure que la société s’européise et se mondailise, et que les profiteurs du Spectacle établissent leurs dynasties

Dans la réalité réellement vécue, pour parler comme Debord, dans et derrière l’écran de fumée du Spectacle, des gens, qui sont nous, cependant, passent. Les enfants affamés de Bangui prennent l’écran des enfants affamés du Biafra ; les naufragés de Lampedusa celui des boat people vietnamiens, et Nicolas Bedos le siège de Guy, et Alice Munro le prix de Camus. Ce qui est vrai des acteurs volontaires ou non des images que nous voyons l’est aussi des spectateurs qui les regardent. Nous passons.

Les sexagénaires d’aujourd’hui s’installent ainsi dans les murs de ceux qui avaient soixante ans il y a dix ans, il y a vingt ans, il y a trente ans et cinquante ans. Les sexagénaires d’aujourd’hui ont pris la place des sexagénaires du temps qu’ils avaient dix ans. Pour les rassurer, on leur laisse croire que le rôle a un peu changé, que Catherine Deneuve est plus jeune à soixante dix ans que ne l’était Marlène Dietrich au même âge. L’une a pris l’affiche de l’autre et rien d’autre n’adviendra de plus, sinon que l’une est morte et l’autre va mourir. Et pendant ce temps le  jeune homme d’aujourd’hui a pris la place du jeune homme d’hier. Il prendra la place des sexagénaires qui s’en iront et s’en ira à son tour.

Depuis quand dure cette histoire sans fin ? Quand finira-t-elle ?  La perspicacité de Debord rejoint la sagesse de Chateaubriand voyant embarquer à Cherbourg son vieux roi qui partait pour l’exil :

« Maintenant, qu'était devenu Charles X ? Il cheminait vers son exil, accompagné de ses gardes du corps, surveillé par ses trois commissaires traversant la France sans exciter même la curiosité des paysans qui labouraient leurs sillons sur le bord du grand chemin. Dans deux ou trois petites villes, des mouvements hostiles se manifestèrent ; dans quelques autres, des bourgeois et des femmes donnèrent des signes de pitié. Il faut se souvenir que Bonaparte ne fit pas plus de bruit en se rendant de Fontainebleau à Toulon, que la France ne s'émut pas davantage, et que le gagneur de tant de batailles faillit d'être massacré à Orgon. Dans ce pays fatigué, les plus grands événements ne sont plus que des drames joués pour notre divertissement : ils occupent le spectateur tant que la toile est levée, et, lorsque le rideau tombe, ils ne laissent qu'un vain souvenir. »

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 Lorsque Debord conçut Le prolétariat comme sujet et comme représentation, il ne fit jamais que reprendre ce que Chateaubriand avait fait de la monarchie elle-même, comme sujet et comme représentation, dans ces pages remarquables de ses Mémoires  :

«  Parfois Charles X et sa famille s'arrêtaient dans de méchantes stations de rouliers pour prendre un repas sur le bout d'une table sale où des charretiers avaient dîné avant lui. Henri V et sa soeur s'amusaient dans la cour avec les poulets et les pigeons de l'auberge. Je l'avais dit : la monarchie s'en allait, et l'on se mettait à la fenêtre pour la voir passer.

Le ciel en ce moment se plut à insulter le parti vainqueur et le parti vaincu. Tandis que l'on soutenait que la France entière avait été indignée des ordonnances, il arriva au roi Philippe des adresses de la province, envoyées au roi Charles X pour féliciter celui-ci sur les mesures salutaires quil avait prises et qui sauvaient la monarchie .

Dans cette insouciance du pays pour Charles X, il y a autre chose que de la lassitude : il y faut reconnaître le progrès de l'idée démocratique et de l'assimilation des rangs. A une époque antérieure, la chute d'un roi de France eût été un événement énorme ; le temps a descendu le monarque de la hauteur où il était placé, il l'a rapproché de nous, il a diminué l'espace qui le séparait des classes populaires. Si l'on était peu surpris de rencontrer le fils de saint Louis sur le grand chemin comme tout le monde, ce n'était point par un esprit de haine ou de système, c'était tout simplement par ce sentiment du niveau social, qui a pénétré les esprits et qui agit sur les masses sans qu'elles s'en doutent. »

La morale de l'histoire est qu'un régime est mort dès lors qu'il existe à la fois comme sujet et comme représentation. Bien triste. Heureusement, tant qu'un homme peut exister comme sujet différent de sa représentation, il est encore vivant. Nous savons donc ce qui nous reste à faire, quoi qu'il advienne.

jeudi, 10 octobre 2013

Le Pen, forcément Le Pen...

C’est tout de même assez drôle, que dans un pays ayant en 2005 rejeté en vain un traité constitutionnel,  et après que deux présidents, Sarkozy puis Hollande, ont manifesté l’attitude la plus antidémocratique qui soit en s’asseyant sur le vote des Français l’un après l’autre, il y ait des gens pour s’étonner que le FN arrive en tête des futures européennes. Quoi de plus normal, dès lors qu’il demeure le seul parti à militer ouvertement pour le NON à cette Europe ? Des partisans de Seguin de jadis aux militants du PC, de Fabius à Mélenchon, tout le monde s’est rallié à l’empire. Tout le monde, qui derrière Sarkozy, qui derrière Hollande, comme un seul troupeau bélant.

Il faut bien reconnaître les faits : la génération Hollande est vieille. Son gouvernement est un gouvernement de revenants. Pas de feu, pas de flamme, pas d’utopie, pas d’idéal, rien, le vide, le couac, le néant. En fait le socialisme véritable est mort en France depuis longtemps, avec Bérégovoy, un sinistre premier mai. Ce qui demeure est une machinerie électorale et médiatique bien huilée et des notables municipaux qui la font vivre tout en se faisant vivre eux-mêmes avec une raison désenchantée et grise, un cynisme à toute épreuve et une langue de bois capable de tourner à la vitesse de la lumière (ou des ténèbres, c'est selon).

Tous s’apprêtent à recevoir avec raison la dérouillée de leur vie. Dérouillée qu’ils n’imaginent même pas. Un ami me disait dans le bus tout à l’heure combien l’analyse de Valls, parti à la reconquête « des petites gens » à Forbach (campagne conduite au passage avec les crédits de l’Etat comme le fit Sarkozy pour tenter sa réélection ce qui déboucha sur les 11 millions à rembourser, mais ça, on ne l’entend guère) est fausse. Car me disait-il, ces petites gens qui ne peuvent payer à leurs enfants des voyages linguistiques aux States et  se barrer en vacances aux Baléares,ça fait longtemps qu’ils sont passés au FN. Ceux qui glissent en ce moment, c’est la petite classe moyenne, voire la classe moyenne tout court, des gens normaux exaspérés devant la politique de ce président anormal et son autisme sidérant.

 

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Bulletin de Michel Beregovoy, frère de Pierre, mort trente ans plus tard, en 2011

La capacité de se remettre en cause que les donneurs de leçon de la gogoche et de la droidroite imbéciles demandent avec toujours la même arrogance (au nom des valeurs, de l’intelligence, des droits de l’homme et tutti quanti) aux électeurs de Le Pen, cette capacité, tous ces donneurs de leçons devraient l’appliquer à eux-mêmes. Mais ils se croient en 2002, quand il suffisait d’une bonne campagne de presse anti Le Pen pour calmer les esprits de la Génération Mitterrand, cette trouvaille de Séguéla.  Ils ne voient pas que l’Europe des lobbies, des loges, des banques, de la crise et des blablas a vécu aux yeux de la plupart des peuples. Elle a vécu et n'a rien produit d'historique et de fiable. Et ce, pas seulement en France. Alors, que reste-t-il, quand tous les idéaux ont été trahi,  toutes les crapuleries osées, tous les mensonges révélés au grand jour,?  Il faut vraiment avoir vécu sur la lune pour l'ignorer : On peut s'en indigner, s'en féliciter, s'en foutre, il reste Le Pen, forcément Le Pen....

05:52 | Lien permanent | Commentaires (29) | Tags : sondages, européennes, le pen, hollande, france, politique | | |

lundi, 23 septembre 2013

Du poil sur le crâne de la cantatrice

Ionesco est mort en 1994, Devos douze ans plus tard en 2006. Les gens qui ont connu vivants ces deux champions de l’absurde riront de ce que je vais raconter là. Les autres m’intenteront peut-être un procès. Cela s’appelle une fracture générationnelle.

Les faits que je vais raconter sont vérifiables ICI. 

 

Aujourd'hui, le journal est gratuit, dirait M Smith

C'est le monde à l'envers, dirait Mme Smith

Et l'article que je lis est signé d’une jeune fille sourde et muette dirait M Smith

Elle  a envie de travailler dirait Mme Smith

Tout à son honneur dirait M.Smith

Elle veut être journaliste, rajoutera Mme Smith

Il lui faut la vocation, dira M. Smith

Elle l’a, elle l’a, dit Mme Smith

Tendre l'oreille à tous les ragots du bas monde  ! dit M Smith

Ma foi, elle y parvient très bien, dit Mme Smith

Et se faire le porte parole de tous les chiens écrasés ! dit M Smith

Ils disent un peu tous la même chose, dit Mme Smith

Et de quoi parle son article ? dit M Smith

Du mariage entre homosexuels, dit Mme Smith

Tiens, dit M. Smith. Un pompier peut donc épouser un prêtre ?  dit M Smith

Et un prêtre, un pompier, dit Mme Smith

La cantatrice n’est donc plus chauve ?  s’affolera  M.Smith.

Et la France est en Hollande, s'affole Mme Smith.

Et le pape s'appelle François, s'affole M Smith

Mais l'héritier s'appelle Georges, le console Mme Smith. 

C'est toujours ça qui tient debout, rajoute M Smith

Il ne marche pas encore, remarque Mme Smith

Et la cantatrice ? 

La cantatrice ?

Oui, la cantatrice  ?

Tous ces plans de licenciements partout. Je crains qu'elle aussi soit au chômage, conclut M Smith, en mettant le feu au journal.

Rideau.

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dimanche, 22 septembre 2013

Monsieur H...

Je sais, c’est pas drôle, le pays se délite culturellement et s’enfonce dans la récession économique , la vie intellectuelle n’est plus faite que du ressassement de lieux communs, à l’extérieur plus personne ne prend la France et ses rodomontades militaires au sérieux, mais quand je me souviens des propos du Pingouin sur Merkel et que je le vois être le premier à lui envoyer ses félicitations tout en bouffant son discours de Vincennes, ça me fait marrer, c’est comme ça. Monsieur 23%, paraît-il, quand la Teutonne dont il prédisait la défaite remporte une majorité absolue, malgré la crise y'a plus que les indécrottables du PS pour espérer encore j'sais pas quoi de lui. Quel pauvre type !

En attendant tu payes plus d'impôts pour armer des terroristes en Syrie et continuer à rembourser les intérêts d'une dette qui se creuse encore et encore, pendant que les fils de Fabius et de Marisol sont inculpés pour fraudes et que le gouvernement sort blanchi des magouilles de Cahuzac. Super, non ? Tout ça pour marier une poignée de gays ! Ha ha ! Et où sont toutes les âmes indignées du temps du sarkozisme ? Le quinquennat tourne tellement en eau de boudin qu'on ne peut que se fendre la poire devant ce très mauvais remake, en croisant les doigts pour que Désir ne devienne pas président dans trois quinquennats... Les meilleures plaisanteries sont les plus courtes, non ?

20:52 Publié dans Sur le vif | Lien permanent | Commentaires (21) | Tags : socialisme, merkel, hollande, politique, france, escroquerie | | |

samedi, 14 septembre 2013

Do you like or dislike front républicain ?

Le front républicain est le socle marketing et électoral de Hollande et de ses sbires. Il a vu le jour en 2002, lors de la sinistre farce qui a permis la réélection d’un Chirac à bout de vues, de convictions, de propositions. Sans doute trouve-t-il son origine dans les diverses cohabitations entre les deux partis qui se partagent le gâteau des votes des Français depuis leurs fondations respectives, le PS d’Epinay de Mitterrand en 1971, le RPR de Chirac en 1976, devenu UMP en 2002.

Ces deux machineries électorales qui ont vidé de sa substance idéologique la vie politique pour la soumettre à l’Europe et aux marchés n’ont que ce concept aussi ridicule qu’étriqué de front républicain à opposer une fois de plus à l’inévitable croissance du bébé commun qu’ils se sont faits dans le dos l’un de l’autre à force de langue de bois, de démagogie, de corruption interne et de mascarade de leurs propres identités respectives : je veux dire le FN de la famille Le Pen, qui pour exister n’a besoin que de recueillir le ressentiment violent qu’ils inspirent l’un et l’autre et à juste titre au sein de la population.

Pendant que dans ce pays qui n’est plus que l’ombre de lui-même, on se paye ainsi de mots creux sous la présidence d’un être aussi falot qu’imprévisible, le monde continue à marcher. Les bruits de bottes, fort heureusement, s’estompent (provisoirement). Car les marchés qui gouvernent le monde et les machineries de propagande qui cimentent les opinions continuent leurs funestes travaux de dépeçage de la culture et de fragmentation de la pensée. Une fois n’est pas coutume, Nauher sur son blog pose la bonne question et s’en prend au bon ennemi, en renvoyant dos à dos les partisans du bijoutier et ceux du braqueur pour s’en prendre à Marc Zuckerberg et son système Like and dislike. C’est vrai que sur fesses de bouc le monde est simple. La petite phrase de Fillon peut croiser le fait-divers de Nice : d’un côté, de bons sociaux-démocrates contesteront le droit de se faire justice soi-même tout en idolâtrant Taubira, de l’autre des vilains poujadistes défendront leur voisin commerçant et leur conception de l'ordre en votant bleu Marine. Le front républicain contre le front national, tu kiffes l’une ou l’autre dame et tu dislikes celle que tu ne kiffes pas, tu comprends ? Sur ton écran plat, une reine noire et une reine blanche comme aux échecs, sauf que tu ne fais jamais que regarder les autres jouer à ta place dessus.

Pour finir, c’est la journée du patrimoine dépecé, détourné, vendu, monté en manèges ou en carnaval, comme on veut. Y’a des gens pour faire la queue des heures pour visiter les lieux de l’impuissance qu’habitent les pantins qui taxent et taxeront encore le monde du travail, des courbes statistiques à la place de la cervelle et des dettes comme ça devant les vrais puissants. Ils se laissent photographier, emplis de fausse empathie devant ces visiteurs comme des maîtres d’école devant des enfants. Me demande ce qu’ils pensent de tous ces crétins. Me demande, vraiment… Au fond, la seule bonne nouvelle, c’est qu’on va enfin cesser de crever de chaud. L’automne doux s’installe sur nos toits. Nous n’avons, c’est vrai, qu’une chose à faire au milieu d'un tel foutage de gueule. Le plus difficile. Loin de tout ça, prendre soin de soi.

lundi, 08 juillet 2013

Le coureur perdu

 A la lucidité de Thibaut Pinot

Le podium n’était pas son rêve. Le podium n’en était qu’un des éléments les plus tangibles. Et pas davantage les micros tendus des journalistes. Ni les files de spectateurs braillant le long des routes. Tout cela ne tenait que de l’apparent. Sur le Tour comme ailleurs, on passe son temps à chercher de quelle sienne réalité l’apparent s’est fait la brume.

On lui avait parlé très tôt du mythe : Le podium devenu triomphe. Les micros devenus gloire. Les longues échappées de solitaire, chevalier devenu son propre cheval. Le pays tout entier au bout des pédales, et les plaines, les forêts, les pavés, les cols, les églises. Quelque chose du Graal encore vivant dans ce cycle de fer. Rouler dans une histoire.

Il y avait aussi les grands devanciers, les pionniers. Pas de légendes sans quelques noms propres, grappillés au Parnasse des Grimpeurs. Des noms et des surnoms : l’indomptable. Le cannibale. Le pirate. Tout ça justifia ses premiers efforts, dans – c’est ainsi qu’on le répète niaisement devant la caméra – son « rêve de môme ». Vivre le plus longtemps possible dans ses tout premiers albums de bandes dessinées, quand la ligne est bien claire et la route droite, chacun à sa place,  le monde et le peloton enchantés.

Mais alors, quel était son rêve ?

Satisfaire quelqu’un qui vous sourit, comme quand on est petit et qu’on court vers lui. Gagner sa reconnaissance. Conquérir son amour. Mais ce quelqu’un, qu’il est difficile à rencontrer à présent dans la foule des passants qui, déjà, arpente son existence ! A moins que ce ne soit soi-même, à bâtir ? Ne pas trop se poser de questions sur la selle. Pas le lieu ni l’heure. Les questions sont des portes ouvertes sur le rêve. Et dans le rêve, on a beau être invincible, on ne gagne jamais. C’est dans le Réel qu’il faut placer ses efforts. Là qu’il faut pédaler. Discours d’entraîneur. Sensations physiques.

Surtout, il y a la France. Nul n’est prophète en son pays, songes-y. A l’heure de la mondialisation frénétique et du règne de l’Autre marchand, il est plus facile de gagner le Tour quand on vient d’ailleurs, et que le lieu n’est qu’un stade comme un autre, qu’on ne s’embarrasse pas de lui ni de soi en lui.

Il les a donc accomplis, ses efforts.  On ne pourra, ça au moins, jamais le lui retirer. Il a même joui de les faire. Il est passé si souvent par lui-même qu’il s’est dépassé. Et dans la rage, il s’est arraché. C’est même devenu un plaisir, une raison, un but, un moteur. Un métier ? Des mois, des ans que ça l’agrippe. Gagner.

La compétition entre en soi, peu à peu. Se forge. Il faut avoir aimé la victoire de quelqu’un et subi en vaincu humilié sa propre défaite, ou celle de ceux qu’on aime. Après, ça pousse tel un sortilège. C’est banal et douloureux, un sortilège. Tu t’alignes au clan, tu t’intègres, tu te fonds, jusqu’à tous les surpasser. Ils ont gagné, tu as les ailes qu’ils ont voulues. Mais tu les as vaincus, tu voles au-dessus d’eux.

Par bonheur, il y a l’équipe, qui laisse à penser que la loi de la compétition n’est pas non plus souveraine. Le cyclisme est un sport collectif, te l’a-t-on assez rabâché ! Pourtant tu te sens tout seul sur la ligne. Si seul ! Quand tu grimpes et qu’il faut redescendre.

La compétition, finalement, oui, pourquoi pas. Même si tu n’aimes pas les compétiteurs, tu accepteras d’en devenir un. Tu trouveras bien le moyen de faire comme si c’était une solution, et pas une fin en soi. Tu tenteras d’obéir à sa règle, veillant à ne pas te briser. Tu réaliseras ton rêve sans le fracasser, comme un moteur ardent. Il va falloir t’aimer dans cette nouvelle peau. Tu essayes. Eux, ils disent que tu grandis. Tu progresses. Graine de champion. Un espoir, qu’ils t’appellent. Tu te méfies de leurs mots. Des clichés, leurs mots. Des clichés qu’ils se repassent. Le monde des people t’effraie et te fascine. Ecraser les autres, après tout, ce n’est qu’un jeu. Demain c’est toi qu’ils écraseront. Leur loi. C’est toi ou eux, n’est-ce pas ? Mais quand enfin tu auras gagné, tes ailes intérieures auront fondu. Eux, ils auront vaincu.

Dans la chaleur qui fige tout, la nervosité qui t’ébranle, leur monde t’apparaît : ton rêve ? Leur rêve… Tout reste encore à surpasser. Les vrais cols sont à l’intérieur, il faudrait pédaler les yeux fermés, oui, ne plus voir. Ne plus les voir.

Car derrière ces meutes massées sur la route, il y a la bêtise humaine. Le grand show qui avala des millions de figurants et même les plus Grands. Même les plus grands s’y sont brûlés. Ils ne furent jamais des dieux, on t’a menti, petit. Que des gladiateurs. Des imbéciles.

Derrière ces micros tendus, il y  a le vide. C’est bouleversant, ce vide, bien plus que celui des falaises. Tu voudrais le remplir de tes mots, mais le vertige te gagne devant ces journalistes qui ne font que leur boulot en tendant leurs micros. Ils suent. Eux-aussi, des crédits par-dessus la tête. Leur ligne, c’est le scoop. Eux, tu ne les as jamais cherchés. Ils sont là, pourtant. Des falsificateurs. Des imbéciles.

Il y a ce président de la République à lunettes venu parader, gras, infatué de lui-même, comme les autres refait du cheveu et des dents, faux de la tête aux pieds. Il parle de Tour propre, ah ! ah ! Son sourire, une grimace. Vanité, ses paroles. Un politique qui veut baiser l’Histoire. L’Histoire le baisera comme les autres. C'est le plaisir des peuples de les regarder tomber, un à un. Un imposteur. Un imbécile.

Et puis l’argent, surtout. Celui que tu fais gagner à ceux qui te mentent, Ils parlent de te faire gagner des étapes, il ne s’agit que de leur faire gagner des millions. Des millions, en veux-tu ?

L’argent, bien sûr. Les sponsors sont les pires. Eux, les puissants. C’est ton sang qu’ils doperont. Ton propre sang vaut-il ce jeu ? La question que tu n’oses poser à personne. Surtout pas à toi-même. Loyauté en allée. Tu es minuscule dans leur jeu.

Ah, s’ils pouvaient voir, ton mépris, dans ta tête !

Mais voilà que ton mépris te casse. Et toi, qui es-tu ?

Tu perds à présent quelques secondes. Décroché, comme ils disent. Et si tu décrochais, pour de bon ? Pour voir ? Tu as encore tant de choses à comprendre. Les jambes sont encore là, certes. Mais la tête, diras-tu, n’y était plus. Tes coéquipiers ont passé le col sans t’attendre. La voiture de ton entraîneur aussi. Ce qui devait te sourire ne te sourit plus. Le doute te brûle : ce qu’il faudrait, c’est gagner dans le monde dont ils t’ont fait rêver, pas dans celui-ci, qui pue.

Oui, mais…

C’est bien là tout le sens de l’épreuve. Tu t’éprouves. Tu penses alors qu’il ne faudrait pas penser. Tu dévales à plus de 80 kms heures les pentes du col. Mais les trajectoires fusent, les réelles et les irréelles. Quand tu franchis la ligne, il est trop tard. Tu diras que ta déception est immense. Tu aimerais avoir le temps de comprendre toute la force, la vivacité, la nature de ce que tu as entrevu : comme si l’apparent n’était fait que d’illusoire. Il en faut peu pour devenir un coureur perdu. 

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Daussy - Le Tour de France, 1945

samedi, 06 juillet 2013

Le cadavre pensif (2)

Ce qui étonne le plus dans le cadavre, c’est son silence. Car le siècle a foi dans la parole. C’est cette même foi, que le XXème égarera dans la propagande et la technicité, qui caractérise ce temps que Bénichou a si bien appelé celui des prophètes. De la parole, en effet, doit naître l’avenir A la question de la survie de l’esprit, par exemple, Hugo répond par l’affirmative dans le célèbre alexandrin de Suite dans lequel il postule la toute puissance du mot sur la lumière et sur le monde sensible.

« Mon nom est Fiat Lux, et je suis ton aîné ».

Qu’un homme aussi  « éclairé » qu’Hugo ait pu donner crédit aux théories spirites interroge aujourd’hui ; d’autant plus qu’il ne fut pas le seul.

C’est que la doctrine de Kardec offre plusieurs intérêts pour qui souhaite s’affranchir du catholicisme sans quitter le domaine de la croyance :

- en donnant la parole aux défunts, le spiritisme invente un lien idéalisé entre morts et survivants. Il place la parole et la communication au cœur de son dispositif, cédant en cela à l’engouement de tout le romantisme pour elles.

- d’autre part, il transpose dans un univers spirituel où les esprits se meuvent d’eux-mêmes et sans l’intercession d’un Sauveur, le concept moderne et bourgeois du progrès social. Dans son best-seller, Le livre des Esprits, Allan Kardec fait répondre à un esprit interrogé (question 766 : « la vie sociale est-elle dans la nature ») :

« Certainement. Dieu a fait l’homme pour vivre en société. Dieu n’a pas donné inutilement à l’homme la parole et toutes les autres facultés nécessaires à la vie en relation ».

Le manifeste spirite affirme par ailleurs de nombreux principes révolutionnaires  (la liberté de penser, l’égalité devant Dieu, la fraternité entre tous) comme des droits inaliénables accordés directement par Dieu à chacun. (1) Il n’a pu se concevoir que sur la base d’une vaste idée de l’humanité en mouvement, en progrès, au sein de laquelle vivants et morts communiquent leurs savoirs solidaires : « Nul homme n’a des facultés complètes. Par l’union sociale, ils se complètent  les uns par les autres pour assurer leur bien-être et progresser ». Sans doute est-ce ce qui explique que le spiritisme ait pu être pratiqué avec une stupéfiante naïveté par des individus issus de tous les milieux, et souvent par des hommes de lettres et des artistes. En 1862, Kardec, qui est lyonnais, recense quelques 30 000 spirites dans sa ville natale, dont l’essentiel se trouve dans une population canut par ailleurs très férue d’humanisme sociale.

Ce qui intéresse dans ce phénomène, c’est là encore ce mélange de négation et d’exaltation de la mort qu’il manifeste de façon aussi intempestive que théâtrale. Les esprits des morts « incorporent » les médiums et parlent aux vivants ; devant le cadavre, les spéculations les plus folles semblent permises, comme celle de parler en son nom.

Car « Le vaste et profond silence » de la mort, dont Hugo se fait au temps des Contemplations le chantre, est en réalité peuplé de paroles :

« Mais d’où je suis, on peut parler aux morts

Ah, votre cercueil s’ouvre  - Où donc es-tu ? – Dehors,

Comme vous. – Es-tu mort ?  Presque. J’habite l’ombre. » (2)

« Le souvenir de la vie reçue dans le néant et donnée dans la mort en appelle à l’espérance folle en une Parole Absolue parfaitement identique à son effet, la vie, note D.Vasse (3), et au regard de laquelle la mort ne se donne plus à lire comme un échec, mais comme le lieu de son surgissement éternel, ce dont témoigne, dans l’espace et le temps la vie de chaque homme »

La foi en cette parole quasiment performative devient une arme pour affronter les duretés de l’existence. Dans le chapitre « Le Roi des morts » de la Sorcière, Michelet regrette qu’on ait « tiré la fête des morts du printemps, où l’antiquité la plaçait, pour la mettre en novembre ». Il imagine ensuite cette prosopopée, faite de « je ne sais quelles faibles voix qui montent du cœur » :

« -Bonjour ami. C’est nous. Tu vis donc. Tu travailles comme toujours. Tant mieux ! Tu ne souffres pas trop de nous avoir perdus, et tu sais te passer de nous. Mais nous, pas de toi, non, jamais ».

On a bien affaire à un nouvel au-delà, dans lequel tout poète digne de ce nom se doit non seulement de croire, mais dont il doit également témoigner.

Un poème de Hugo, dont le ton mélodramatique a souvent été critiqué et qui connut un succès gigantesque auprès du public, Le Revenant, met en scène une mère dont le fils est mort et qui ne s’en console pas. Jusque là, rien que de très banal. Lorsque « elle se sentit mère une seconde fois », elle refuse d’abord cette nouvelle grossesse, ce nouvel enfant, jusqu’à ce que le nouveau-né la reconnaisse :

« Elle entendit avec une voix bien connue

Le nouveau né parler dans l’ombre entre ses bras

Et tout bas murmurer : c’est moi. Ne le dis pas »

Si un cadavre, dans un contexte aussi exalté, peut donner matière à penser, c’est bien, plus que tout autre, le mien.

Ainsi, le narrateur du Dernier Jour d’un condamné imagine sa tête décapitée, roulant comme une balle, découvrant les ténèbres dans lesquelles il va s’enfoncer :

« Il me semble qu’il y aura un grand vent qui me poussera et que je serai heurté ça et là par d’autres têtes roulantes (…) Quand mes yeux, dans leur rotation, seront tournés en haut, ils ne verront que le ciel sombre, dont les couches épaisses pèseront sur eux, et au loin, dans le fond, de grandes arches de fumée plus noires que les ténèbres. »

Nodier, dans cet extrait de Smara, pousse à l’extrême cette même vision, faisant de la tête de son cadavre l’instrument d’un jeu cynique et symbolique :

« Ma tête était tombée… elle avait roulé, rebondi sur le hideux parvis de l’échafaud et, prête à descendre toute meurtrie entre les mains des enfants, des jolis enfants qui se jouent avec les têtes des morts, elle s’était rattrapée à une planche saillante en la mordant avec ces dents de fer que la rage prête à l’agonie. »

Cette figure du cadavre, qui n’est plus appelée à ressusciter, mais pas encore à disparaître hante la littérature occidentale et traverse le XIXéme siècle à travers un genre qu’il affectionne particulièrement, le fantastique. Que sont la créature du docteur Frankenstein, et le comte Dracula, sinon des cadavres en instance de départ et de retour à la fois, des cadavres pensifs, amalgames d’un nouveau credo qui hésite entre scientisme et paganisme, et ne parvient pas à se défaire non plus du christianisme, dans une confusion des genres et des valeurs plus que jamais, si l’on peut parler ainsi, littéraire

 

rubens - The Head of Medusa. 1617. Oil on wood. 69 x 118 cm. Kunsthistorisches Museum, Vienna, Austria.jpg

 Tête de Méduse, Rubens

 

1 Allan Kardec, Le livre des Esprits

2 Hugo, Contemplations – « Ecrit en 1855 »

3 D.Vasse, « l’effet d’une parole dans le lieu de la mort », Cahiers de Psychanalyse, 5, Lumen Vitae, 1971