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dimanche, 05 octobre 2014

Flinguer le petit Juif

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Léa Salamé et Eric Zemmour, On n'est pas couché, 4/10/14

Flinguer le petit Juif : C’était, de toute évidence, le mot que s’étaient donnés les habitués du Salon Verdurin télévisuel du samedi soir, je veux dire l’émission préchauffée et recuite de Ruquier. Zemmour venait y présenter son dernier livre qui, comme celui de Trierweiler (signe des temps), est déjà épuisé quelques jours après sa sortie. Avec Le suicide Français, il écrit au fond les Mythologies de ces quarante dernières années : du mariage de Coluche et le Luron au film Dupont Lajoie de Yves Boisset, de la féminisation de la société à l’islamisation des banlieues, du déclin du prolétariat et de l'Eglise à la montée des associations anti-racistes et sectorielles, Zemmour tente, comme le fit Roland Barthes en son temps, dans un « lien d’insistance, de répétition » de démystifier le « naturel dont la presse, l’art, le sens commun affublent sans cesse une réalité qui, pour être celle dans laquelle nous vivons, n’en est pas moins parfaitement historique » (1)

Sauf que ce n’est plus un penseur de gauche s’attaquant à l’ordre moral des années cinquante, c’est un penseur de droite s’attaquant, avec une même plume acérée, à l’ordre moral des années 2014. Un ordre, il le rappelle de page en page, fondé sur la déconstruction des valeurs et des traditions au profit d’un alliage redoutablement corrosif des libéraux et des libertaires fondateurs de la post-modernité : Le pire d’une gauche, qui a égaré en chemin la common decency chère au socialisme d’Orwell, et le pire d’une droite, affranchie de la morale catholique qu’elle a remplacée par celle, plus maçonnique, du marché. Le pire des deux qui s’incarne, il faut bien le reconnaître, dans le président godillot de la République actuelle, sa ministre de la justice et le reste de sa clique gouvernante, crispée dans la mauvaise foi, la démagogie et ce qu'ils nomment la justice.

Ce faisant, Eric Zemmour dénonce les acteurs embourgeoisés du soft-power culturel qui a façonné l’opinion depuis la mort de De Gaulle (c’est là qu’il situe caricaturalement le commencement de la fin) jusqu’au vote Maastricht, « le dernier moment démocratique français », juge-t-il avec raison. Comment s’étonner, dès lors, du tir tendu de tous les salonards du clan Verdurin contre lui, de Denisot à Ruquier, de Cohn-Bendit à Salamé, de Caron à la québécoise Anne Dorval, prototype de la femme savante des temps mondialisés, venue promouvoir dans l’hexagone  Mommy, son film-jackpot sur la relation fusionnelle mère/fils quand le père est absent. Cette ridicule Philaminte qui faillit s’étrangler devant ce qu’elle saisissait de Zemmour était, sur le plateau de Ruquier samedi soir, à se tordre de rire… Mais passons. Elle était bien du niveau des autres, à se prétendre distants et libres de toute idéologie, vivant eux dans un monde ouvert loin de la France rance, quand Zemmour, qui ne cessait de les placer devant leurs contradictions, vivrait lui dans la rancœur, le sectarisme et le passé.

Car c’est bien à la tirelire de tous ces gens et à leur compte en banque, in fine, que les arguments du polémiste s’attaquent, principalement. Tous ces idiots utiles du système, qui en vécurent comme Denisot ou Drucker depuis un demi-siècle - système auquel (Zemmour l’oublie-t-il ?) il appartient aussi -, soudainement attaqués en pleine face par un de leur pair ! un ancien de la boutique, qui plus est… Un renégat, un traître à sa cause...

Je glisserai sur les injures de Cohn Bendit (« Tu es un crétin »), les rodomontades de Caron (des chiffres, des chiffres, des chiffres…) pour en venir à ce qui fut le plus significatif, l’intervention de la nouvelle chroniqueuse de l’émission, Léa Salamé, fille de l’ancien ministre libanais de la culture Ghassan Salamé, qui s'enfuit du Liban lors de la guerre avec sa famille. : «Vous aimez tellement la France, vous, le Juif, vous voulez tellement faire plus goy que goy, faire plus français que français, que vous arrivez à remettre en cause Vichy et à réévaluer Pétain... », lui lança-t-elle, parce qu’il s’attaquait aussi au livre de Robert Paxton, La France de Vichy  (osant rappeler du même coup la complexité d'une période, qui sembla soudainement lettres mortes à tout ce plateau de joyeux festifs endoctrinés venus vendre leur soupe). Réponse de Zemmour, entre la consternation et l'agacement : « Pourquoi vous me ramenez à mon état de Juif? Je pourrais monter sur mes grands chevaux et vous dire que c'est antisémite! »

Et là j’ai senti comme un malaise : et je compris pourquoi il fallait tellement flinguer le petit Juif, ce soir, sur ce plateau où chacun se revendiquait d'une culture ou d'une communauté sexuelle différente, et qu'il menaçait de littéralement faire imploser de l'intérieur : parce qu’il avait passé les bornes, lui, le Juif, comme jadis Dieudonné, le Nègre, les passa chez Marc Olivier Fogiel, à se prendre pour un véritable Français de souche, à peut-être voter Marine Le Pen, et à parler comme l’aurait fait, tiens, ce dangereux fasciste de Renaud Camus, ou pire, l'innommable Alain Soral,  qu'on se garde bien, eux, évidemment, d'inviter. A oublier peut-être ce qu'il doit à ses origines, comme la jeune Libanaise arrivée en France à l'âge de 5 ans le lui rappela sèchement. Terrible, terrifiant,le racisme des anti-racistes, décidément ! Et l'on comprend même sans le lire combien le bouquin de Zemmour se situe encore en-deçà de la vérité, combien la décomposition du pays et la trahison de ses prétendues élites sont avancées, et combien terribles sont les événements que tous ces gens des médias et du show-business au compte en banque bien garni, tout prêts à fuir la France quand les premiers troubles éclateront vraiment, auront inexorablement et très cyniquement fait advenir...

(1) Roland Barthes, Mythologies, avant-propos

jeudi, 12 décembre 2013

L'écran et la mort

On hésite entre l’empereur  Auguste et le petit père des peuples Staline. 

A présent que s’est un peu calmée l’agitation médiatique autour de la mort de Mandela, on ne sait trop que penser ni que dire de cette déification en direct. Je n’arrive pas à me reconnaître dans cette religiosité sans dieu, parce que l’Histoire est emplie de trop mauvais exemples à son sujet.   Et j’ai trouvé que le discours d’Obama était à la limite du discours d’un guru. Quant à tous ces anciens présidents se congratulant dans les travées,  ça tenait à la fois de la maison de retraite et du Rotary Club.

Mandela c’est au fond la bonne conscience de l’Empire. C’est pourquoi son culte me laisse à la glace. Il n’est d’ailleurs pas anodin que la célébration se soit déroulée dans un stade.  N’est ce pas dans le cirque que se déroulait l’apothéose des empereurs pour la plus grande joie des gens de rien ?

A l’autre bout de la chaîne de la notoriété, il est d’autres façons surprenantes de quitter le monde : cette petite fille laissée par sa mère sur la plage, jusqu’à ce que la marée l’emporte – à bien y regarder le sang se fige. Et puis on pense à autre chose, comment faire autrement, entre l’horreur et l’insignifiance ?  La mort de deux soldats, à la croisée du politique et du milliaire, cérémonial glauque, nous reconduit à l’industrialisation de la guerre, aux  sempiternels saluts républicains, comme si nulle leçon ne pouvait être tirée de l’Histoire. L’édification des peuples a besoin du spectacle de la mort à l’ère technologique comme au Moyen Age, cadavres jetés en pâture à la vénération, l’indignation, la honte, la perplexité des foules.

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Mais la plupart des disparitions se déroulent sans grandes pompes, à l’abri de ce flux de spectaculaire que l’Empire concocte à notre intention, aussi puissant que dérisoire, et  qui tourbillonne sans gloire ni progrès autour de nous, renouvelant les mêmes comportements, les mêmes consentements, la même servitude.

Chacun d’entre nous ne tient en réalité au fil que de quelques proches, loin des effusions médiatiques du grand nombre et de la masse opaque. Quelques êtres pour lesquels on s’inquiète dans la pudeur et dont on se réjouit en secret. Ils incarnent, au sein de cette aliénation généralisée, un doux souvenir de la liberté, quand nous sentons combien nous les aimons.

jeudi, 13 juin 2013

Tout ce qui est mortel

Bientôt la terre nous recouvrira tous, ensuite, elle aussi se transformera. Et ces nouvelles choses se transformeront à l’infini. Et, si l’on pense à ces vagues successives des transformations et des altérations, et à leur rapidité, on méprisera tout ce qui est mortel.

 

Marc Aurèle, Ecrits pour lui-même


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06:38 Publié dans Sur le vif | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : rtf, ert, grèce, télévision | | |

dimanche, 04 septembre 2011

Se coucher...

Quand, sur le plateau de Ruquier, une pétasse explique que « Shakespeare parle de cul et est hyper moderne » et un connard vante le théâtre des  années 70 comme « une arborescence qui part dans tous les coins » en rajoutant que « Shakespeare était un mec amoureux de l’environnement », ou quand Martine Aubry se lance dans son antienne « La France va mal, la France ira mieux » sur l'air du moi je gère nous on change,on se dit que Naulleau manque pour interrompre « la promo » des uns et Zemmour la logorhée politicienne de l’autre, et que finalement on va aller se coucher bien vite... Pulvar et Polony semblent avoir clairement reçu pour carnet de route d'en finir avec la polémique frontale pour renouer avec le débat inoffensif. De nombreux artistes ainsi que de nombreux politiques vont avoir besoin d'une promo pépère cette année. Ruquier la leur offrira en bon Drucker, rubis sur l'ongle ; Ruquier, morne plaine : si le tout arrive à décoller, pas sûr que la formule light parvienne cependant à voler loin dans la saison. 

09:53 | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : ruquier, pulvar, polony, onpc, télévision | | |

mercredi, 24 août 2011

Je m'exprimerai plus longuement...

Fut un temps, lorsqu'un milliardaire familier du cinq à sept (ce qu'on appelera désormais un précipité - ah ah ah!), consenti ou non, dans les hôtels avec des femmes de ménage, se faisait ainsi ridiculement pincer, il avait le bon goût de se faire oublier par la suite et se retirait de la scène publique, où il venait de jouer un si piètre numéro. Question d'éducation. D'amour-propre et de respect de l'opinion, aussi.

On est effaré de constater jusqu'à quel point, dans un monde en crise, ils ont de condescendance pour leur petit soi-même, et sont prets à repartir du même pied, eux et leur entourage, comme si de rien n'était. 

Parlant de l'addiction à la télévision, l'amuseur Nicolas Bedos évoquait, en renonçant à toutes les propositions reçues et refusées pour la saison prochaine, "une drogue dure", et la nécessité de s'en protéger. Nicolas Bedos a l'air plus intelligent que DSK., si j'en crois sa déclaration à la télé tout à l'heure, ça a l'air, en effet. Je m'expliquerai plus longuement.... Est-il à ce point persuadé que sa personne intéresse les gens ? Cela relève de la maladie, ma parole...

L'histoire, ce 23 aout 2011, celle au moins qui est digne d'attention, se joue du côté de Tripoli

17:21 Publié dans Sur le vif | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : dsk, politique, nicolas bedos, société du spectacle, télévision | | |

dimanche, 27 juin 2010

Histoires sans paroles

Sans paroles et d’un autre siècle. Tout comme ce petit train rébus.

 

20:28 | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : générique, ortf, france, télévision, interlude | | |

mercredi, 16 juin 2010

La pédophagie de l'image

Dans La Crise de la culture, Hannah Arendt rappelle le sens du mot autorité, pris dans son acception étymologique : l’autorité est une augmentation. Une augmentation du pouvoir. Pendant longtemps, c’est la parole, celle des clercs, des poètes, des tribuns, qui a bénéficié de cette reconnaissance publique. Aujourd’hui, même si le pouvoir s’exerce toujours aussi efficacement dans la discrétion et le secret des palais et des loges, on peut constater à quel point c’est l’image et l’image seule qui est devenue l’agent de cette augmentation auprès du public. Dans certains cas même, qu’on se souvienne du « coup de boule » de Zidane, c'est une action en soi sans intérêt, faite par un type sans intérêt, mais qui, dans le contexte économique et politique d’une finale de coupe du monde, et celui du montage sémantique aussi ridicule qu’efficace depuis 98 du signifiant  « Zizou »,  s’est diffusée à la vitesse de la lumière dans l’esprit de millions des gens.

Tout ceci relève du lieu commun, du lieu le plus commun même. Nous vivons ainsi sous un régime des plus autoritaires qui soit, le régime de l’image, la société du spectacle. Et dans une société où, curieusement, chacun croit trouver dans l'image un moyen à sa portée de se  libérer.

Ainsi, l’image la plus terrifiante qui nous est imposée par cette curieuse société est celle que, par la mode, elle prétend permettre à chacun d'entre nous de donner de lui-même.

La mode qui, du temps des dandys pouvait encore permettre à un individu de marquer son originalité au sein de la communauté, est devenue la façon la plus conventionnelle que la dictature de l’image égalitaire offre à la personne - spécialement la jeune personne - pour trouver non plus sa place, mais ses contours, ses formes, son reflet dans le monde commun. Voyez ces troupeaux d’adolescents si similaires, à la déchirure de pantalon ou à la mèche de cheveux près, si conformes à ce que la société autoritaire attend désormais d’eux, tous pourtant si certains d’affirmer une originalité là où le terrorisme de la convention se saisit d’eux et de leurs illusions sans leur laisser la moindre chance, pour peu que leurs parents soient ce qu’il y a de pire au monde : d’éternels adolescents. Ainsi réifié par les bons soins de ses géniteurs qui n’ont (au sens propre) plus aucune autorité, l’adolescent des classes moyennes devient une sorte de projection – la plus conventionnelle qui soit – de leur souci constant d’intégration dans la société du spectacle. Une sorte d’enfant-sandwich, en quelque sorte, et dans tous les sens du terme puisque le voilà en effet pris entre ce qu’au fond ses parents attendent de lui (être au goût du jour, vivre sa jeunesse libérée…) et le tyran par excellence auquel il faut se plier pour être vraiment dans le rang : l’image, autoritaire et pédophage, devant laquelle il n’est plus de contestation politique possible.

 

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08:32 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : pédophagie, politique, télévision, image, autorité | | |

lundi, 24 décembre 2007

Ginger, Fred, et la nuit de Noël

C'est une émission enregistrée pour être diffusée une nuit de Noël dont l'enregistrement sert de fil conducteur à l'intrigue de l'avant-dernier film de Fédérico Fellini, Ginger et Fred. Tourné en 1985, c'est à dire en pleine montée du berlusconisme, le film est bien sûr une satire aussi méticuleuse que délirante de la télévision privée : Une télévision qui ne se contente déjà plus d'être vulgaire et abrutissante. Déjà, déjà, elle se révèle cynique et dictatoriale. « Géant au pied d'ar86912a54ceb337cab0c717edca6ebc55.jpggile », certes, à laquelle le vieux Fellini, qu'on sent poindre derrière Marcello Mastroianni, tire un malicieux mais direct bras d'honneur comme à travers les années, en profitant de la panne d'électricité qui interrompt le numéro de claquettes de ses deux personnages. Au fil des séquences de Ginger et Fred, Fellini ne se lasse pas de filmer des écrans de postes en fonction, dans le petit car qui conduit les « artistes », à la réception de l'hôtel, dans la chambre et le restaurant. Au beau milieu des foules, au cœur des conversations, la télévision s'installe et déverse des programmes immondes : matchs de foot où l'on ne voit que des pieds, sitcoms jeux et concours idiots, recettes de cuisine à vomir, variété toc et publicités obscènes.

Il y a, dans cet envahissement, quelque chose qui tient de Big Brother : la télé surveille et enferme chacun des personnages à qui elle n'adresse donc pas indûment la parole. En clair, on ne lui échappe pas. En témoigne ce plan étrange dans la chambre d'hôtel (cf photo ci-dessus) où Amélia regarde par la fenêtre en laissant le vide devant la télé allumée.  Elle est seule, de dos. Toujours coiffée de son chapeau, comme figée dans une présence étourdie au monde. Le film pourrait devenir un bref instant une fable poignante sur la solitude, particulièrement celle des soirs de Noël. Car n'est-ce pas en ces soirs-là, soirs de réveillon, que la télévision se fait particulièrement ignoble ? Particulièrement obscène, avec ses talk-shows préenregistrés et servis à peine retiédis ? Or, à l'extérieur aussi, Amélia se trouvera cernée, balayée par une lueur orange et le faisceau d'un projecteur inquiétant qui tourne dans la rue et ne cessera plus de tournoyer à l'intérieur de sa chambre, sur le relief de son fauteuil, dans les draps de son lit. 

GIN001AC-3245.jpgAvec Ginger et Fred, Fellini capte tout le processus de la représentation du Réel qui, de Hollywood à Cinecittà, a fini par se déglinguer complètement et priver petit à petit le monde de l’homme. Avec ce film, il nous plonge tous dans le vide d'un non-sens menaçant, érodant peu à peu le vingtième siècle finissant. Ce qui est frappant, dans la réalité qu'il montre, c'est qu'elle n'est plus qu'un amas de détritus ( gros plans sur les poubelles) où l'on s'appauvrit (interventions des nouveaux-pauvres), où l'on vieillit, tandis qu'en se montrant à la télé, on s'enrichit, on rajeunit. D'où la course à la notoriété, même illusoire, même éphémère, à laquelle même un amiral drapé dans sa dignité ne peut résister. Plateau de télé dans lequel on se doit donc de pénétrer en silence et en file indienne, "comme à l'église" déclare ironiquement un personnage, où un parterre de fidèles massés sur des bancs en toc attend sous les projos sa nourriture d'immanence. Pauvre, pauvre humanité, n'a-t-elle pas eu ce qu'elle méritait, à force d'avoir créé ce tourbillon d'oubli d'elle même ?  

Avec Ginger et Fred, fable sur ce qu'on peut attendre un soir de Noël de la société libérale - je vous laisse deviner quoi - Fellini filme la défaite de la pensée chère à Finkielkraut, celle qui nivelle en plaçant sur le même plan (celui du divertissement pour infirmes)  Marcel Proust et Clark Gable, un amiral et un terroriste, un moine et une danseuse de cabaret. Mais il y a pire : lorsque le couple de danseurs comprend que pour faire le spectacle, la télévision n'a plus besoin d'eux, mais n'a besoin que d'elle-même, on comprend que pour faire le monde, le monde, pareillement, n'a pas besoin de nous, mais seulement de lui-même. La mégastructure a bouffé toute la place. Premier des trois films testaments que filma Fellini avant de nous quitter (il meurt huit ans plus tard, le 31 octobre 1993), Ginger et Fred est une terrible leçon sur la Fabrique de l'Illusion et aussi un constat attristé de la disparition du Réel. Ce soir, c'est Noël. Si vous êtes seul, faites ce que vous voulez : lisez un livre; écrivez une lettre; promenez vous dans les rues; allez à la messe. Mais de grâce, éteignez la télévision!

 

 

 

 

 

 

 

 

 

10:00 Publié dans Des nuits et des jours... | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : fellini, noël, cinéma, ginger et fred, télévision, littérature, société | | |