lundi, 02 avril 2012
Aube d'avril sur la ville
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mardi, 14 février 2012
Etre à la glace
Solidité trompeuse de cette glace qui, au moindre redoux, fuitera. Dureté fausse. La pierre, elle, demeurera, qui n’est prise dans d’autre rétraction que la sienne. Fidèle à sa matière, pas à l’instant. Porteuse de jours anciens et de morts passés. Illusion de cette glace, qui feint de prendre mais se retirera tantôt.
fontaine Bartholdi, Lyon
Demeurer de glace, à fixer le monde et sa dureté, yeux dans les yeux. Privilège de la blancheur et de la solitude. Littré dit que la glace est le froid intérieur causé par des impressions morales, par l'äge. Qu'entend-il exactement par impressions morales ? Etre à la glace, disait-on jadis, et non pas de glace, pour exprimer cette insensibilité feinte avec résolutiuon et maladresse. Pour un coeur sensible, l'insensibilité qui est son contraire peut-elle être autrement que feinte ? Un coeur sensible se protège avec cette matière qu'il a appris à secrèter avec le temps : la glace, dont s'enrobe sa nudité aussi blessante que blessée.
On dit aussi rompre la glace, lorsque l'estime, la sympathie, l'amour s'écoulent à nouveau.
Mais on ne peut feindre ni fondre la pierre. La pierre, tout ce qu'on peut faire d'elle, c'est la sculpter. Ce n'est déjà pas si mal. L'hiver, l'eau eternellement frimeuse, s'accroche à la pierre et joue la forme. Mais elle ment, nul n'est dupe. La pierre et la glace, tout comme la pierre et la chair, n'ont jamais la même chance.
11:46 Publié dans Des poèmes | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : fontaine bartholdi, être à la glace, de glace, littérature, poésie |
dimanche, 01 janvier 2012
Chanson sur le souhait d'une fête
Pour commencer l'année en patois :
Que vo-z-aria. don vu de biaux-z-affére [1]
Sin la plaive [2], qu'a tôt patafma .
Lo vent, le nioules[3] leu-z-éliant contrère.
Assu, zo min [vais] vo-z-u raconta :
Ys-z-an, tartuis [4], fa ce qui-z-an pu fère;
Diu a volu fère à sa volonta.
« Que vous auriez donc vu de belles choses, -- sans la pluie, qui a tout abîmé. -- Le vent, les nuages leur étaient contraires. -- Or sus, je m'en vais vous le raconter. Ils ont, tous, fait ce qu'ils ont pu faire; - Dieu a voulu faire à sa volonté. »
Par vo fêta, y-z-an fa de peinture ;
An fa zoyi lo fifro, lo violon,
Irlumina lo bosquets de vardure ;
Vos zouillies boittes[5] ont chanta de chanson.
Lieu coeur sautiont et battiont la mesure,
Mèy sautiont d'una buna façon !
« Pour vous fêter, ils ont fait des peintures; -- ils ont fait jouer les fifres, les violons, -- illuminé les bosquets de verdure; -- vos jolies filles ont chanté des chansons. -- Leurs cœurs sautaient et battaient la mesure, -- mais ils sautaient d'une belle façon!»
Pure-z-efans, lausse étiant si joyuses,
De présenta à lieu more un boquet,
Qu'in l'avisant, le larmes amouairuses
Du coin du zieu a chaucune faillet,
Et lo garçon, d'une sorta curiuse,
Ayant le cœur que batiet lo briquet.
« Pauvres enfants, elles étaient si joyeuses -- de présenter à leur mère un bouquet, -- qu'en la regardant, les larmes amoureuses --du coin de l'œil à chacune tombaient, et les garçons, d'une façon curieuse, -- avaient le cœur qui battait le briquet
Vo-z-aide bien cugnaissu lo visadze
Qui z-avian forrau dessu lo bufet,
A qui y presinlôve de z’omadze :
C'étiet celui du pore Grassoilliet
Avouai celi de sa feno, et ze gadze
Que vos los avi devinau to net.
« Vous avez bien connu le visage -- qu'ils avaient fourré sur le buffet, -- à qui ils présentaient des hommages :- c'était celui du père Grassouillet -- avec celui de sa femme, -- et je gage que vous les avez devinés tout net. »
Car lo monchuqui, avouai sa cuaivetta
Preniet de blanc, de gris avouai de nai,
Los-z-a teri à'une façon finetta,
Qu'y on chacun, d'arrie le reconnaît.
Quand l'atniquii se forre de la fêta,
L'ouvre se fay est bien vrai.
« Car le monsieur qui, avec son petit balai (pinceau),- prenait du blanc, du gris avec du noir, -- les a retracés d'une façon si fine -- qu'un chacun, incontinent, les recon-naît. -- Quand l'amitié se met de la fête, -- l'ouvrage se fait, c'est bien vrai. »
Pouaysin[6] is z-anfa tortilli deflaumes;
An fa pela de la pudra dins l'air.
Cinqui tessible ce joua que dins lieu-z’aumes,
Vos z-atizi et rindi torzo clair.
Votra bonto io de noviau l’inflaume;
Oh! mè, sa pudra ne fa qu'un éclair.
« Puis, ils ont fait tortiller des flammes -- ils ont fait tonner de la poudre dans l'air. -- Cela signifie ce feu que, dans leurs âmes, -- vous attisez et rendez toujours clair. -- Votre bonté tout de nouveau l'enflamme; -- oh ! vraiment, sa poudre ne fait qu'un éclair. »
Faut que tartuis, ze prenian nôtre tausse,
Et que tsacune varse à son vaisin
Ce zouli vin, que de tant butta grauce,
Le patron nos-z-[u] a bailli sodain,
Et qu'un viva bien intindre se fasse !
Apre z-iran càbriolau insin.
« Il faut que, tous, nous prenions notre tasse, -- Et que chacune verse à son voisin-- ce joli vin, que, de tant bonne grâce, -- le patron nous a donné soudain, -- et qu'un vivat se fasse bien entendre ! -- Après, nous irons danser ensemble. »
La Saone vue de Fourvière (Laplace)
Cette chanson en patois a trait à une fête, qui fut donnée à la campagne de la Favorite, aux Massues, en l'honneur de Mme Vial, dont Revérony était le gendre. Cette jolie propriété appartient aujourd'hui à M. Demoustier, ancien agent de change.
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Ce qui a donné lieu à cette chanson fut un orage survenu au moment où on allait offrir un bouquet, la veille de la fête d'une mère de famille ayant pour patronne Marie, dans le mois d'août, en l'an 1776.
Les enfants, au nombre de six, dont quatre fils et deux filles, avaient engagé leurs père et mère à aller passer quelques jours auprès de leur tante, à Tassin, pour faire les préparatifs de la fête, ce qu'ils purent exécuter. Le lieu de la fête était dans la maison de la Favorite, près des Massues, où les arbres multipliés et les ombrages se prêtaient parfaite- ment aux dispositions projetées. Toutes les allées étaient décorées par des chaînes de lampions de diverses couleurs. On avait, par les soins et le travail du sr V. (1), maître de dessin des demoiselles et ami de la maison, disposé sur la terrasse un temple en papiers peints, cordes et pièces de soie, d'une dimension très grande. Le portique laissait apercevoir les portraits, en forme de bustes, de la mère et du père, placés sur l'autel de l'hymen, et nombre d'attributs et d'autres accessoires donnaient en quelque sorte une apparence de féerie au local. Mais au moment où la mère et son époux arrivèrent, un orage violent détruisit en un instant tous ces préparatifs, et tout ce qui composait l'ensemble du temple fut mis en lambeaux flottant au gré des vents, et la fête fut convertie en une espèce de deuil. Les enfants fondaient en larmes, attachés au col de leurs auteurs (2), et les assistants partageaient la douleur, qui devint générale. Un des invités à la fête (3), qui avait concouru aux préparatifs avec les enfants, voyant l'état de tristesse où tous étaient plongés, monta dans un appartement, se fit apporter les habits du jardinier et, après avoir composé la chanson dont il est question, il monta sur un petit théâtre composé à la hâte, sur lequel il chanta les couplets qu'il venait de faire, ce qui fit diversion à la douleur, rétablit un peu de gayeté, et le reste de la soirée se passa assez agréablement pour faire oublier la catastrophe qui avait jeté la consternation dans l'assemblée.
(La Revue du lyonnais, série 5 - n°1 ( 1886 ) Chanson de Reverony, 1776)
[3] Verbe composé du vieux français pute, dont on a fait un adjectif péjoratif, et de fin. On dit aussi faire petafin, et dans certains patois faire pulafin, mot à mot faire mauvaise fin. Pute, du latin populaire puta, jeune fille, comme on apiitus, jeune garçon.
[4] Tartuis, de inter (?) et de tutti. C'est le trelous, de Molière. Tuttituis en vieux lyonnais, et encore aujourd'hui à Lentilly. Sur le sens comp. la loc, lyonnaise en partie tous, pour tous.
13:38 Publié dans Des poèmes | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : lyon, patois, nouvel an, reverony |
mardi, 08 novembre 2011
L'Année du premier pas
D’un côté de la toile, il y avait la maison paternelle. La ferme où fut ravie l’enfance. Belle affaire que l’enfance ravie ! Et dans un corps vigoureux, il s’élance. Tout autour bruissent les grillons d’un seizième été. Lieu d’où s’annonce le monde.
De l’autre côté de la toile, le monde, précisément. Le monde qui court là-bas, de reptile en reptile, jusqu’aux plus renommées capitales. L’enfance enfin ravie, merci ! Il ira pieds nus par les routes et gagnera sa vie.
D’abord, précisément, ce champ d’andains à traverser; l’or de ces blés fauchés, de la couleur des saints ! Une technique pour traverser sans dommage, n’y poser le pied que le temps vif du rebond. Plisser le front sous la cisaille et contre le flanc, serrer le poing. Car après ce champ surgiront d’autres. Du même effort, et de la même couleur après chaque haie, chaque ville, guère plus qu’un pas.
Ce vert marin le tire, que déplacent les illusions lumineuses : cet été déjà tendu vers l’hiver : qui a quitté l’enfance a quitté pour jamais son été. Il apprendra cela de la déception de Venise, de Patmos, d’Istanbul, et d'ailleurs. A présent, devant cette toile de Ravier, lui importe seul de nicher à nouveau au seuil de cet instant superbe où il ne savait rien du désenchantement, l’année du premier pas.
Toile d'Auguste Ravier, Paysage au couchant
06:25 Publié dans Des poèmes | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : peinture, littérature, ravier, poème |
mardi, 25 octobre 2011
L'été 73
Cet été-là, le Qatar était tout juste indépendant
On dînait en Grèce pour 3 francs
Sur des terrasses ensoleillées
Personne n’y songeait tant depuis le franc Poincaré
« L’Allemagne paiera » disaient-ils
Le monde, ses nouvelles, ses bars, ses villes,
Avec du papier que décorait le visage de leurs grands hommes
Les francs se croyaient parés, fournis, et comme
La Fleur aux dents chantait
Joe Dassin qui louchait …
Mon premier job rue Bellecordière
Où les rotatives tournèrent
Pour quelques mois encore
Mon père et ma mère vivaient encore
La nuit dans un bar de cette rue
En lisant des auteurs de leur cru
La chaîne régionale émettait à peine
Du papier, nos poches à tous en étaient pleines
Je guettais l’avenir crissant sur ce papier
La tête emplie d’histoires à raconter
Partir, c’était la sainte Parole de ces temps-là même si
Tout n’était pas si
Entre Cendrars et Nizan
Tranché dans l’esprit des jeunes gens
Partir, loin du pays de nos ainés
Loin aussi du mensonge de mai
Avions-nous senti déjà impavides
A quel point nos poches finiraient vides
Et combien nous ne ferions
D’image en image que tourner en rond
Quand du mensonge de mai sortirait président
La rondeur grise de Mitterrand
Regarde, chanterait naïvement Barbara, puis Le Luron, morose,
L’emmerdant, c’est la rose
Mais nous n’en étions encore qu’à Pompidou
La crise, mais de quoi parliez-vous
Et même durant les années Giscard
La crise, auriez-vous fait un micro-trottoir
C’est pas pour nous auraient chanté en chœur
Des millions de téléspectateurs
Le premier juillet de cette année banale
Rockeller et Brzezinki fondaient la Trilatérale…
papier peint années 70
A suivre
21:20 Publié dans Des poèmes | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : politique, littérature, crise |
vendredi, 14 octobre 2011
Ocelles
La vérité sous l'écorce ?
12:18 Publié dans Des poèmes | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : automne, ocelles, solko |
lundi, 19 septembre 2011
L'insomnie d'un inconnu
Tu ne dors pas, tu gis, veillant sur ta souffrance
Laquelle, en ton sommeil, pourrait percer ton cœur
Sans ta garde effrayée –crois-tu -, dans le silence,
Du dédain de la ville et du nœud de ta peur.
« Est-ce ton corps qui lutte, ou ton esprit qui songe
Cette perte de toi dans un souffle qu'on tord ? »
Admettent l’un et l’autre, en ce mal qui te ronge,
Ton corps, ton cœur. Ta chair venue humer la mort,
Ta chair te cuit : dans le grand vide, seule, ainsi
Vint-elle au monde un jour, cicatrice, ô nombril !
De l'étrange début ce même effroi t’endure.
En ton amour-brasier, veilleur inaperçu
Des rêveurs de bûchers, mais qui ne rêvent plus,
S'infuse un chagrin chaud tissé d'un rien qui dure.
R T.Août 2011
06:29 Publié dans Des poèmes | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : littérature, poésie |
lundi, 05 septembre 2011
Jusqu'à Verlaine même
O bruit doux de la pluie,
Par terre et sur les toits !
Pour un coeur qui s'ennuie,
ô le chant de la pluie...
A chaque fois qu'il pleut (j'entends de cette pluie fine, longue, régulière), ces vers me reviennent en mémoire - et le temps des récitations qui vont avec, celui des saisons, de la permanence, ce lien indéfectible de la parole... J'ai la sensation que dans cet ennui de la pluie il y a tout, tout comme dans la clé qu'on palpe rassuré en sa poche, une simple clé, s'apprécient déjà la porte qui s'ouvre, le corridor et ses parfums, le salon et ses moulures, les bocaux de confiture, etc, etc... Car la bruine de cette strophe et des sons qu'elle fait choir mélodieusement appelle vraiment un mouvement de la pluie qui, certes, séchera mais pour l'instant crépite mezza voce par la fenêtre entrebaillée en direction de ce soi qu'on sait, certes, condamné, mais qui dure et se prolonge pourtant, vers l'intérieur, vers l'immuable de ce son auquel ne se compare vraiment que celui de la vague quand on est allongé au rivage, son qui se fout des hommes et du temps si bien que jusqu'à Verlaine-même la pluie de ce soir peut entraîner mon esprit ( bien au-delà de cette année - celle de mes douze ans je crois où l'on m'a contraint d'apprendre ce poème), et par le biais de Verlaine vers la permanence d'un sweet home véritable fabriqué de sensations multiples et bien nommées, qu'importent les toits successifs et les adresses de passage, vrai soi, ennui, ô le bruit de la pluie...
cha
08:18 Publié dans Des poèmes | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : littérature, verlaine, poésie |
vendredi, 02 septembre 2011
Au prix de l'effroi
Habiter dans un vivant mensonge.
07:34 Publié dans Des pièces de théâtre, Des poèmes | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : littérature |