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mardi, 12 janvier 2016

Sondages

Après ça :

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Les Français veulent-ils vraiment ça ... ?

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14:29 Publié dans Sur le vif | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : sondages, présidentielles, primaires, juppé | | |

dimanche, 10 janvier 2016

Manifestation (5)

Jérôme longeait le quai Romain-Rolland, mi-joyeux mi-désemparé : Une rue pavée humide non loin d’une cathédrale, un horloger assassiné devant son échoppe, un assassin en cavale : Simenon, en quelques jours, aurait troussé une intrigue sacrément haletante ! Mais l’époque tournait le dos à Simenon depuis lurette. Et puis le père de Maigret fût-il encore au goût du siècle, soixante à quatre-vingts pages par jour semblait au besogneux Jérôme un cap infranchissable ! Pour finir, le polar avait changé d’ingrédients. Les flics de 2016 boulottaient tous en équipe : un black, un blanc, un beur, si possible supervisés par une quadragénaire dynamique. Le recours aux tests ADN supplantait le flair ancestral du limier, le profilage à l’américaine la déduction psychologique, et la coordination des services le solitaire obstiné. Bref, Simenon, c’était mort.

De toutes ces réflexions sur la matière dorénavant frelatée du roman de naguère aurait pu jaillir un corps narratif sanguinolent : mais l’entrain pour les contemporains capitaux s’était épuisé ; usé jusqu’à la corde, le « J’écris Paludes » de Gide fleurait dorénavant mauvais son atelier d’écriture du mercredi après-midi pour madame l’Agrégée de Lettres modernes. Et la libération textuelle ne passionnait plus grand monde parmi le Grand Show des images pour Indignés : Rien à tirer de ce meurtre, donc, qui ne pouvait servir dans les medias mainstream la cause d’une minorité discriminée. « Ren de chez Ren !» aurait dit Barnabé ! Le fuyard n’avait pas non plus hurlé Allah akbar, signant ainsi son appartenance à la race banale des petits casseurs de bijouteries mal grandis du dimanche… restait qu’à abandonner l’affaire à la page quartier du journal local.

Paul Ricard rejoindrait donc inévitablement l’innombrable foule des disparus sans cause, sans plaque et sans hommage présidentiel dont on retire le nom des logiciels, à la banque, à la poste et aux impôts,  une fois réglées les affaires courantes, et pour lesquels très rapidement plus personne ne prie. Leur destin commun, dans cette France tristement déchristianisée.

Un coup de pot : à peine parvenu à l’arrêt, un bus surgit du carrefour, qui fonçait à présent, presque vide, par les virages des ruelles désertes : Nous sommes, se disait-il, collectivement et depuis trop longtemps, engagés dans l’erreur : or les individus sont capables, grâce à la raison, de rebrousser chemin lorsqu’ils s’aperçoivent qu’ils ont fait fausse route. C’est même la preuve la plus jolie de leur intelligence. Mais les sociétés ? Les sociétés vont de leur allure erratique par les voies que leurs dirigeants leur fixent, et la moindre reculade, une fois les lois votées, les décrets publiés, les traités signées, se révèle impossible, surtout dans leur terrifiante démocrassouille où le poids des décisions prises par quelques-uns au nom de la majorité endoctrinée doit ensuite être porté et subi par tous. Une seule solution donc pour l’individu dissident : se dissocier du groupe, par la mise à l’écart ou le combat. Et comme il avait passé l’âge du combat, ne restait que la mise à l’écart.

Le bus arrivait devant son immeuble. Considérant les méandres de son existence, ses multiples échecs, il cherchait ses clés dans son trop grand manteau, se demandant s’il n’avait jamais disposé véritablement d’une autre solution…

(A suivre)

15:17 Publié dans Manifestation | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : littérature, simenon, gide, maigret, paludes | | |

samedi, 09 janvier 2016

Le trop œcuménique François

Mais de quelle religion François est-il le pape ?


 

17:27 Publié dans Sur le vif | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pape françois, œcuménisme, religion, bouddhisme, islam, catholicisme, bible, thora, vatican, vatican ii | | |

vendredi, 08 janvier 2016

Manifestation (4)

IV

Décidément, le père Julius ne craignait donc pas les voleurs ! Ça n’était pas la première fois que Jérôme trouvait son magasin vide. Il se résignait tout juste à rebrousser chemin, quand une pétarade retentit au-dehors. Un type vêtu de noir et encagoulé filait et se retourna en défouraillant avant de s’engouffrer dans un break garé sur la place.

Jérôme quitta en hâte le magasin. Comme lui, d’autres curieux passaient le nez par leurs portes ou leurs fenêtres. Un corps gisait dans une flaque de sang à une dizaine de mètres de là sur le trottoir: à sa corpulence, et surtout à ses larges bretelles à pois noirs, Jérôme reconnut Paul Bricard, l’horloger-bijoutier du n°14. Déjà, Madame Lacourt prenait son pouls à son chevet, et son fils jappait à son portable. À l’air consterné de la charcutière – mais cet air-là, aussi, lui était si habituel !–, Jérôme se dit que les carottes devaient être cuites pour l’horloger, et se signa. Nom de nom, il n'avait pas même eu le temps de relever la plaque du break ! Pour le coup, ça s’appelait avoir l’esprit d’escalier…

Par curiosité, il fut tenté de lorgner dans la boutique de Bricard dont la porte était encore grand’ ouverte, mais se ravisa. Mieux valait faire le planton devant en attendant la police, pendant que Madame Lacourt veillait sur le corps, en attendant des secours. Ces derniers ne tardèrent pas – heureusement, car le cercle des badauds s’élargissait. A la première question qu’on lui posa, Jérôme s’étonna du calme qu’il avait conservé durant tout ce temps. On confirma que Paul Bricard était bien mort. Il dut décliner son identité, son adresse, puis on lui posa les questions de routine. Il s’étonna une nouvelle fois que le père Julius n’ait pas réapparu entre temps, mais par respect pour le vieux qui devait avoir de bonnes raisons, n’en souffla mot à la police.

Madame Lacourt déposa aussi, très calmement. A la première détonation, elle avait entrevu par sa vitrine l’individu tout en noir qui s’enfuyait, poursuivi par l’horloger gesticulant. L’autre avait tiré de nouveau, et c’est alors qu’il s’était effondré sur les pavés, d’un seul coup. Alors, elle était sortie avec son fils qui faisait ses devoirs dans l’arrière boutique, mais ne put fournir aucune précision sur le braqueur, sinon qu’il était encagoulé et tout de noir vêtu, ce que confirma le gamin rougeaud de quatorze ans qui pianotait de nouveau sur son portable comme si rien ne s’était passé. On leur demanda à tous de se tenir à disposition, comme d’usage.

Dans le soir tombé, les gyrophares des voitures et du camion de pompiers commençaient à donner à la scène un air cinématographique qu’elle n’avait pas jusqu’alors. A quoi bon s’attarder parmi les curieux ? Jérôme ne connaissait ce Bricard que de vue, n’ayant que rarement besoin de faire affaire avec des horlogers. Il avait une réputation de noceur qui cadrait mal avec l’idée de vieux garçon méticuleux qu’on se fait de la profession. En tout cas cette fois-ci, son compte était réglé. Et Julius ? Fourrant les paluches dans son manteau, il rebroussa chemin.

Au tintinnabulement de la porte, le pâtissier parut cette fois-ci, vif dans son tablier bleu, comme de coutume. Tout occupé à lui raconter ce qui s’était passé plus haut dans la rue, Jérôme n’évoqua point sa disparition de tout à l’heure et le vieux enveloppa sa tarte à l’abricot, sans non plus y faire allusion.

- On te voit dimanche au Cercle ? demanda-t-il, au moment où Jérôme allait pousser la porte.

- Ça se peut, éluda-t-il. À moins que les Gauchers aient besoin de moi.

Julius haussa les épaules. Toujours les Gauchers !

- Et sinon ? Madeleine ?

- Rien de neuf.

- Donne-lui mon bonjour si tu la vois.

L’espace de quelques secondes, la monotonie de son existence avait repris le dessus sur les événements survenus, que les gyrophares du dehors lui jetèrent de nouveau à la figure. Tout paraissait si irréel, depuis peu : à quoi la couverture du Charlie, toujours punaisée sur la pancarte du bureau de tabac, donnait un sens tout à coup bien réel : L’assassin, oui, l’assassin courait toujours.

(A suivre)

17:52 Publié dans Des nouvelles et des romans, Manifestation | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature | | |

mercredi, 06 janvier 2016

Manifestation (3)

III.

En guise d’événements spirituellement vains qui encombraient l’actualité, ils étaient copieusement servis ! Un débat sur la déchéance de la nationalité occupait la politicaille, comme seuls les chiffonniers de la gauche bourgeoise, habitués à se jeter leurs principes et leurs valeurs à la figure, les aimaient. Tandis que le régime tentait de sauver ce qui lui restait de tête en organisant, au nom d'un «devoir de mémoire» instauré en quasi religion d'Etat, des commémorations solennelles que relayaient tous les médias, plus de 3,5 millions de chômeurs trainaient la savate dans un pays plus que jamais clivé. L'hiver, heureusement, se révélait plus clément que les précédents pour les sans-abris. Mais la douceur de cette température n'apaisait pas les tensions dans toutes les couches de la société. On battait des records en matière d’insécurité, durant un état de siège en voie de généralisation…  on pouvait d'ailleurs légitimement se demander si le président normal aurait pu se maintenir au pouvoir sans cette dérive sécuritaire qu'autorisaient les attentats islamistes importés en plein Paris quelques mois auparavant.

Jérôme fit une moue, glissant trois doigts contre sa joue. A elle seule, cette polémique suscitée par laCX0ZmrsWYAAFB48.jpg
couverture du dessinateur rescapé résumait impeccablement le misérabilisme de la vie intellectuelle ainsi que le vide spirituel dans lesquels tout le pays était plongé : niveler tout et tout réduire à la même enseigne, abolir toute distinction et toute hiérarchie, voilà quatre années qu'on ne faisait que cela à tous les étages d'une République en décomposition, et c’était à pleurer, vraiment, ou à souhaiter prendre la poudre d'escampette.

Mais cette perte, cette dissolution du Bien commun au profit d'un tiède et mou communautarisme s'étaient déroulées d'une manière si progressive qu'il était incapable d'en retracer précisément le cheminement, ni d'en dater non plus le commencement. C'est d'ailleurs ce qui permettait à chacun des responsables d'en rejeter la faute sur d'autres, et d'autres encore : lui-même, qu'avait-il engagé de ses forces pour résister à l'apparente fatalité de ce mouvement de décomposition ?  Il n'avait fait durant toutes ces années, parmi la majorité silencieuse, que plier, s'incliner, laissant filer les jours de soleil comme ceux de pluie, ceux de paix comme d'inquiétude, ceux de fête comme d'ennui.

Alors, assassin, le bon Dieu ? Seul responsable de toutes les folies humaines ? Comme si les politiques, les industriels, les spéculateurs, les idéologues, les sportifs et les artistes milliardaires, et la masse grouillante des soumis de son acabit qui formaient l'opinion publique étaient linge blanc dans cette affaire...

L’antienne était antique ! Celui-ci, avec ses sandales de moine aux pieds, sa kalachnikov dans le dos, sa barbe et ses cheveux blancs, son troisième œil et son triangle maçonnique sur la tête tenait de la chimère ou du monstre grec. Ne lui manquait en réalité que le turban du Prophète – mais sans doute avait-on estimé qu'il ne fallait pas trop jeter d’huile sur le feu, alors que chiites et wahhabites continuaient de s’entredéchirer d'Iran en Arabie Saoudite, et que Paris venait de trembler sous les assauts des petits envoyés de Daech. Diluer la partie dans le tout en accusant un vague dieu composite alors que c’est clairement l’Islamisme le Mal Absolu devant lequel ceux que le Christ appela un jour « les hommes de bonne volonté » devraient lutter, qu’ils fussent ou non croyants, était-ce la bonne stratégie ? Pas d'amalgame, clamaient-ils tous en chœur pourtant. Pas d'amalgame...

Jérôme prit faim. Restaient quelques tartes dans la vitrine du père Julius. Il poussa la porte, ragaillardi au spectacle de celles à la pomme et de celles à l'abricot que le vieux pâtissier réussissait tout particulièrement depuis plus de quarante ans. A se demander laquelle il choisirait ce soir, il laissa filer quelques secondes, et ne s'inquiéta pas de suite de ne pas entendre son pas trainant et familier dans l'arrière-boutique. A l'abricot sans doute, se disait-il, tandis que le seul tic-tac de l'horloge mécanique frappait son oreille.

(A suivre)

08:56 Publié dans Des nouvelles et des romans, Manifestation | Lien permanent | Commentaires (0) | | |

mardi, 05 janvier 2016

Manifestation (2)

II.

Il venait de psalmodier le récit biblique. Mais pas seulement : il venait de communier avec lui, c'est-à-dire d’en  goûter le caractère éminemment sacré. Qu’au fond ce récit de la visite des mages fût historique ou non ne comptait donc plus. Depuis peu, Jérôme prenait conscience de la suffisance qu’il y avait à juger de la valeur des textes bibliques à l’aune de leur genèse historique ou de ce qu’en disaient de prétendus spécialistes. Un texte saint n’est pas vrai ou faux en fonction de la réalité historique qu’il raconte ou non, mais de sa capacité à manifester, justement, une épiphanie. Un enchantement. Un salut.

Et puis, s’attacher à la véracité des faits  revenait –  qu’ils fussent avérés ou non –  à les reléguer dans le passé lointain. De passer à autre chose, aux événements spirituellement vains qui encombraient l’actualité, par exemple. Or, c’est maintenant qu’il croyait, et à la qualité de ce maintenant, de surcroît. Si la vérité des faits demeure primordiale dans une enquête policière, que les rois mages aient ou non été guidés par une étoile pour découvrir le berceau du Christ et s’agenouiller devant Sa grandeur ne compte pas pour celui qui, aujourd’hui encore, n’aspire qu’à s’agenouiller.

Car au-delà du récit historique, au-delà même du  récit symbolique, dans ce monde où le mensonge règne en maître,  le récit de vérité  fonctionne sur les deux axes de la Croix : et  ce qui a été vrai ou pas demeure selon ton choix encore aujourd’hui vrai ou non. Jérôme se disait que telle était pour lui  la force surnaturelle de l’histoire sainte de Bethléem, puisque derrière la crèche à laquelle Hérode avait condamné Dieu se cachait déjà le bois auquel Pilate L’irait clouer…

Sur le perron de l’église, las de tous questionnements, il n’était donc plus qu’une émotion. Une poignante émotion qui, tel un cordon ombilical, le liait à des altitudes insoupçonnées de lui il y a peu encore. Par ce fil intérieur, il fallait grimper : rompre avec la pesanteur, celle-là même dont la sensation devenait plus épaisse d’année passée parmi les hommes de ce temps, en année écoulée parmi eux…

 Par-delà le gris-même du ciel, qu’est ce que grimper, sinon comprendre ?  Comprendre par quoi, par Qui,  il était à ce point ému ! Dieu, pouvait-il s’entendre murmurer en réponse, Dieu le Père ! Le Père ?   cela manifestait à son être quelque force indéterminée pressant ses entrailles et capable de mettre fin, pour peu qu’il entrouvrît plus encore sa porte, à cet insoutenable sentiment d’abandon avec lequel sa vie même jusqu’à ce jour s’était malgré lui identifiée.

Un lien avec ce Père au nom imprononçable autant qu’imprononcé ?  Un lien ? Allons donc ! Il plongea de nouveau chacune de ses mains dans son manteau par des poches trouées dans lesquelles il les enfonçait comme dans des ailes. Moi un lien ? Moi le fils ? C’était effrayant d’Amour, c’était pourtant ce que le Fils Universel, oui, le Fils pour chacun, lui permettait de ressentir, Lui dont le Père assura que rien de Sa Personne ne lui avait déplu et que non content d’être à son image, il était consubstantiel à Lui.

A la seule pensée de la possible restauration de ce lien, Jérôme se sentit englué dans l’universelle matière de ce Péché immémorial dont il est question depuis le commencement du monde, et percé d'une poignante  douleur « Ecce enim in iniquitatibus conceptus sum, et in peccata conceptis me mater mea » [1] récitait-il pas plus tard que ce matin.

Sur ce perron, il ne pesait pas plus lourd que cette émotion, confus et retenant ses larmes, quand son regard se posa, devant le tabac, sur un présentoir peint en rouge sur lequel la Une du Charlie de ce jour faisait polémique : Un personnage à l’allure d’un Dieu le Père coiffé du triangle maçonnique et la robe maculée de sang dénoncé tel un assassin courant toujours… Il ressentit une étrange impression.

 

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[1] « Car j'ai été conçu dans l'iniquité et ma mère m'a conçu dans le péché» Psaume 50, Miserere mei.

(A suivre)

lundi, 04 janvier 2016

Manifestation

 

Jérôme haussa les épaules devant le prix de la chemise. De plus en plus inquiétante, la qualité du tissu ! Mieux valait attendre les soldes, ou, mieux encore, s’en passer. Des visions en transit,dans tout ce micmac pas de réels besoins ! Et pis toujours le même micro-moulin dans la cervelle, à moudre mal le moindre grain. Toujours de plus en plus hônéreuse, l’existence parmi ces hommes…

Enfin, l’existence... Celle dans leur monde - leur meilleur des… Mais comme le jurait Barnabé jadis dès qu’il était un peu bourré, « pas l’seul évidemment, pas l’seul du tout, loin d’là ! ». Et pis s’en passer coûtait bien moins que d’y coller son nez fort à la vitre, hein donc ! Il enfouit ses doigts à plat au plus profond du manteau rêche : pas de mouchoir, mince, rien que ce prospectus froissé ! Quoi déjà ? Ah oui…

Sans importance.

Voilà bien quelques années que Barnabé n’était plus jamais bourré. Depuis,  à vrai dire, qu’il s’en était passé pour de bon de l’existence qui fait flop un jour. Et du trop qui coule, quoi faire ? L’avaler ? Il zyeuta autour, derrière, personne devant non plus.

Il posa le prospectus pour le Concert du Nouvel An à plat dans sa main, d’un doigt se boucha la narine et d’un Pôôôn retentissant extirpa loin du conduit cuisant la morve épaisse et translucide qui chut sur le papier glacé. Pas de quoi payer l’entrée non plus. Il replia le tout en quatre, du bon grammage ça ! Et jeta le tout dans l'égout. 

Là-bas marchait par le soir gris une femme entre deux âges qui traînait à longs pas lents un sapin jaune et dégarni par la pointe. Un peu plus loin, entre quatre barrières grises, le cimetière annuel des bons conifères de décembre. Chaque année, il se faisait la même réflexion que tant mieux d’en avoir pas fait d’arbre de Noël, pour finir comme ça, bon sang ! Quelque chose d’obscène, trouvait Jérôme, bien loin des astrologues chantés dans l’autre siècle par le joyeux Guillaume Apollinaire, bien loin vraiment ! Sapins d’aujourd’hui, sapins des villes, sapins terminus de la fête, surchauffés sans geindre épine par épine. Sapins d’leur monde, d’leur meilleur des comme aurait susurré Barnabé. Trop à leur image, sitôt servis, sitôt jetés, ni rabbins ni demoiselles, consommés tout net. Entassés là « les frères abattus » loin des bateaux qui sur le Rhin voguent… Rideau !

Elle s’en retournait le regard traînant comme le pas, lasse de quoi, bon sang ? Un personnage dont le Grand Jacques aurait fait une ritournelle à chanter un peu pompette, entre Mathilde, Madeleine ou Jeff. Et Jérôme se dit en la voyant ne pas le voir qu’elle avait dans le regard un peu du meurtre de Noël, l’esprit déjà dans les augmentations de janvier, les mensonges du gouvernement, la rengaine du lendemain. Noël ! Noël, pourtant !

Ça ne se résume pas à ce qu’en dit le monde, non pas, le vrai Noël en pays chrétien ! Ça ne vient pas se rompre le cou comme ça dans une benne municipale, hagard et déguirlandé, le tronc vide de vert et la branche toute plumée. Dans toute vie, dans toute fête que proposent ces hommes, certes, la fin, la mort, tel un reptile prêt à mordre et figer son venin dans ton sang.  Mais là, pile où ça s’arrête pour tout un chacun, Jérôme se dit qu’il n’y avait pas d’autre moyen de continuer la fête qu’en en saisissant avec soi, derrière tous les symboles, l’essence même : car Celui qui venait de naître n’irait qu’en apparence mourir dans quelques mois sur le bois d'une Croix.

Il s’agrippa à sa prière : Seigneur, ne nous abandonne pas ; surge, illuminare, Jérusalem ! (1)

Un don, certes, mais un don qui ne s’interrompt ni ne meurt, tel fut le Noël surnaturel des mages. Pourquoi le mien cesserait-il là sa manifestation ? Devant ce cimetière de sapins comme devant la vitrine du marchand, comme devant toute cette société revenue à la pire des barbaries, il y avait bien de quoi hausser les épaules ! Il les haussa donc, lentement, résolument, fermement. Puis l'échine un peu voutée, le pas lourd, le regard vif, il poussa sans peine la porte en planches sombres de l’église, où débutaient tout maintenant les vêpres de l’Epiphanie.

(A  suivre)

 

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(1) Lève-toi et resplendis, Jérusalem, collecte de l'épiphanie.

 

jeudi, 31 décembre 2015

Barbara

Une leçon d'articulation.


L'hommage de Serge Lama


Les cons, ça ose tout,  c'est à ca qu'on les reconnait  (Audiard)




16:03 Publié dans Sur le vif | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : barbara, serge lama, bruel, dis quand reviendras-tu | | |

mardi, 29 décembre 2015

Brel

Pitre : le premier regard lucide posé sur une certaine gauche française




Peintre : dans le son déchiré d'un accordéon rance...


Poète . la revanche d'un belge sur Baudelaire