mercredi, 21 octobre 2009
A coeur vaillant, rien d'impossible
13 juin 1940, la Banque de France lance la première impression du premier de ces billets de guerre dont le petit format permet, sur une unique feuille de papier, de tirer le plus grand nombre possible d'échantillons. C'est une coupure de 50 francs. Elle est dédiée à la mémoire de Jacques Cœur. Insolite retour du Moyen Age, en plein cœur du vingtième siècle et alors que se noue le deuxième conflit mondial du monde industriel : Au quinzième siècle, dans le Conseil de Charles VII, (le roi de la petite Jeanne) Jacques Cœur, incarne à la fois le roturier et le grand argentier. Personnage à la trouble légende, parti faire fortune sur les pistes de Syrie et du Liban, dont Michelet a dit :
« Ici il fait son fils unique archevêque de Bourges, là-bas, il marie ses nièces aux patrons des galères »
Ce Jacques Cœur devint très vite une légende, à en croire le bon clerc de François Villon, qui parle de lui dans son pauvre Testament :
« Le cœur dit à Villon
Ne te chagrine pas, homme
Et ne demeure pas en douleur
Si tu n'as tant eu que Jacques Cœur
Mieux vaut vivre sous tissu de bure
Pauvre, qu'avoir été seigneur
Et pourrir sous riche tombeau ».
Etrange, oui, ce personnage aux contours flous et presque anachroniques qui, en sa maison de Bourges, collectionnait des bas-reliefs représentant, en lieu et place de saints et de saintes, tantôt une fileuse (cf verso du billet), tantôt une balayeuse, tantôt un vigneron, et dont on murmura qu'il fut sans aucun doute à l'origine de l'empoisonnement de la belle Agnès Sorel. Romanesque, oh combien ! Son cœur, précisément, Lucien Jonas l'a placé en filigrane, telle une fenêtre ouvrant de part et d'autre de la demeure, sur des boiseries chaudes ou sur un ciel laiteux. Bergère, filez votre quenouille et gardez vos blancs moutons : Le billet de juin 40 met à l'honneur le Berry, ses humbles et lointaines aïeules des héroïnes de George Sand,
Le curieux personnage, marchand, courtisan, aventurier, n'a jamais cessé, de son vivant, de balancer entre deux devises : Le billet reproduit la première dans le rectangle rouge du recto, qui sert de reposoir à son bras :
« A vaillans (cuers) riens impossible ».
On imagine qu'en juin 1940, alors que triomphait la chanson de Lucienne Delyle ("Mon Ange, mon ange qui veillez sur moi / Mon ange, mon ange, ayez pitié d emoi..."), la formule pouvait être d'un certain réconfort, en effet...
L'autre devise reste moins célèbre sans doute. Elle résume cependant tout ce que ce quatorzième siècle fascinant et déjà bourgeois, qui paracheva l'invention du Purgatoire, contient de neuve sagesse :
« Bouche close. Neutre. Entendre dire. Faire. Taire. »
L' opulente demeure de Jacques Cœur se profile derrière son effigie. D'une main, il porte une plume qu'on devine destinée non pas à consigner quelque pensée de philosophe, mais plutôt à tenir l'un de ces livres de compte qui furent les véritables ancêtres du journal intime. De l'autre, il soupèse son menton, dans un geste où peuvent se lire et la hardiesse et la défiance du véritable parvenu. Devant lui, un coffre, et un petit encrier bleu. Quelque chose du roué politique se déchiffre aussi sous ce bonnet, et dans ce geste. Nul autre que lui, parmi tous les personnages dont la Banque de France honora (ou déshonora, c'est selon) la mémoire, nul autre que lui, qui définissait la sagesse ainsi, "prêter d'une main, se payer de l'autre", nul autre mieux que lui, finalement, ne mérita de passer de main en main, de croupir dans des bourses, d'être joué, volé, échangé, comme une putain et comme un presque roi bref, de figurer sur un billet.
La coupure circula peu de temps, de janvier 41 à juin 45. Le temps d'une guerre moderne et de toutes ses atrocités. Une guerre qui fit oublier, il est vrai, tout ce que la Guerre de Cent Ans avait eu de modestie dans l'horreur et d'amateurisme dans la technicité. C'est que du quinzième siècle de Jacques Coeur au vingtième d'Einstein, les hommes avaient su prendre le temps de peaufiner aussi bien l'art de la planche à billets que celui (qui va de pair) de la destruction massive.
19:45 Publié dans Les Anciens Francs | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : littérature, villon, numismatique, écriture, billets français, jacques coeur |
samedi, 17 octobre 2009
Demain l'enfant
Je serai l’enfant. Demain, je trottinerai sur des pistes, de nouveau accroché à une main ; une main de nouveau plus large, plus flétrie, plus impatiente, que la mienne. Comme autrefois, une main plus âgée que la mienne.
Je parcourrai, accroché à cette piètre bouée, une invraisemblable quantité de kilomètres à petits pas, dans les rues polluées d’une ville menaçante dont tout le passé aura été recyclé.
A quel degré de son calendrier effrayant l'humanité sera-t-elle alors parvenue ?
2060, tout au plus…
Nous parcourrons des places, des portiques, des ponts.
«- Et là ? Et là ? dirai-je. Et là ? ferai-je
-Je ne sais pas, me dira-t-on. Je ne sais plus. Je n’en sais rien.»
Me dira-t-on... Ma mère, mon père, ou quelqu'un d'autre.
Nous passerons devant de très vieux bâtiments lesquels, à force d’avoir égaré leur fonction première, seront devenus tels de vieux singes au pelage mat, au regard attristé, à la truffe asséchée, mendiant la mort : Des églises reconverties en centres prétendument culturels, des hospices en hôtels de luxe, des maisons communes en résidences surveillées, des écuries en salles d’exposition, des usines en musées pour touristes des cinq continents …
«-Et là, dira l’enfant, et là ? Qu’est-ce que c’est ? Qu’est-ce que c’était ?
-Je ne sais pas, dira la mère. Je n’en sais plus rien. Tu m’embêtes… »
Partout également, des tours vertigineuses dont certaines, délabrées avant que d'être achevées, abriteront une population sous constante surveillance administrative. Dans un monde uniforme et rendu imbécile par l’incessante propagande, des milliards de gens auront appris à se plaire en écoutant de simples sons, et en s’émerveillant de quelques couleurs projetées sur des murs. A force de ne lire que des verbes sans compléments dans des phrases simples, ils se seront familiarisés avec le fait de n’ambitionner que la morne satisfaction de quelques désirs tout aussi simples, et, eux aussi, sans compléments.
L’extrême puissance de leur paresse les ayant définitivement mutilés, leur renoncement à tout, anesthésiés, en quoi sera-t-il même nécessaire, pour les maintenir dans un état de servilité, de les menacer de quoi que ce soit ? Ils ne se souviendront plus de rien. De rien. Aussi, quand ceux à qui leurs ébats bio-technologiques auront donné naissance les interrogeront trop longtemps sur ce qu’il en était réellement des choses et des gens du passé, ils ne pourront, en tout état de cause, que les frapper pour qu’ils se taisent, à la fin.
- Et là, dira l’enfant. Là ?
09:52 Publié dans Des nouvelles et des romans | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : littérature, écriture, demain l'enfant, solko |
vendredi, 16 octobre 2009
La leçon du XIXème au XXIème siècle
Ce billet fait suite à celui sur les grotesques videos d'hier. Joyeux, incorrigible et ringard, je laisse la finesse de la critique baudelairienne ainsi que le bucolisme présumé de Pierre Dupont parler d'eux-mêmes, en guise de pendant.
En 1846 ou 47 (je crois plutôt que c’est en 46), Pierre Dupont, dans une de nos longues flâneries (heureuses flâneries d’un temps où nous n’écrivions pas encore l’œil fixé sur une pendule, délices d’une jeunesse prodigue, ô mon cher Pierre, vous ne souvenez-vous ?), me parla d’un petit poème qu’il venait de composer et sur la valeur duquel son esprit était très indécis. Il me chanta, de cette voix si charmante qu’il possédait alors, le magnifique Chant des Ouvriers. Il était vraiment très incertain, ne sachant trop que penser de son œuvre : il ne m’en voudra pas de publier ce détail, assez comique d’ailleurs. Le fait est que c’était pour lui une veine nouvelle.
Si rhéteur qu’il faille être, si rhéteur que je sois et si fier que je sois de l’être, pourquoi rougirais-je d’avouer que je fus profondément ému ? Je sais que les ouvrages de Pierre Dupont ne sont pas d’un goût fini et parfait ; mais il a l’instinct, sinon le sentiment raisonné de la beauté parfaite. Ce chant était-il un de ces atomes volatiles qui flottent dans l’air et dont l’agglomération devient orage, tempête, événement ? Etait-ce un de ces symptômes précurseurs tels que les hommes clairvoyants les virent alors en assez grand nombre dans l’atmosphère intellectuelle de la France ? Je ne sais ; toujours est-il que peu de temps, très peu de temps après cet hymne retentissant s’adaptait admirablement à une révolution générale dans la politique. Il devenait, presque immédiatement, le cri de ralliement des classes déshéritées.
Le mouvement de cette révolution a emporté jour à jour l’esprit du poète. Tous les événements ont fait écho à ces vers. Mais je dois faire observer que si l’instrument de Pierre Dupont est d’une nature plus noble que celui de Béranger, ce n’est cependant pas un de ces clairons guerriers comme les nations en veulent entendre dans la minute qui précède les grandes batailles. Pierre Dupont est une âme tendre portée à l’utopie, et en cela même vraiment bucolique. Tout en lui tourne à l’amour et la guerre, comme il la conçoit n’est qu’une manière de préparer l’universelle réconciliation. »
Charles Baudelaire, « Réflexions sur quelques-uns de mes contemporains, Pierre Dupont », Critique Littéraire, 1858
15:24 Publié dans Des Auteurs | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pierre dupont, critique littéraire, le chant des ouvriers, politique, baudelaire, littérature, révolution |
jeudi, 15 octobre 2009
Le XXIème siècle fait joujou avec le XIXème
Nerval : El desdichado
Baudelaire : A une passante
Rimbaud : Ophélie
Connaissiez-vous ces horreurs en caoutchouc ?
Moi non.
J’ai découvert cela sur un blog « pédagogique ».
Je m’imagine, à seize ou dix-huit ans, ayant des poètes une telle vision.
Chamallow, chamallow.
Brrrr….
06:40 Publié dans Des poèmes | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : littérature, chamallow, nerval, baudelaire, rimbaudd, mallarmé |
mercredi, 14 octobre 2009
14 octobre 1980
Mort de Louis Guilloux, un jour de pluie, à Saint-Brieuc.
"Quand venait le soir autrefois et que je regardais la ville, tout ce qui l’entourait restait plongé dans les ténèbres. La ville n’était qu’un ramassis de vieux toits et de clochers : le clocher pointu de Nazareth, celui de l’hôpital, le dôme de la gare, les deux tours carrés de l’église Saint-Michel sur l’une desquelles pendant plus de quatre ans, jour et nuit, une sentinelle allemande monta la garde. Certaines nuits sans lune étaient si noires que si nous devions sortir après le couvre-feu, il nous arrivait de nous perdre et de tâter les murs. Quel bonheur, quelle surprise quand les lumières se sont remises à briller ! Il y a maintenant trente ans et de plus en plus de lumières. Faut-il les croire ? Autrefois, j’entendais siffler les trains. Je voyais le train de Paris tout rutilant courir au fond de la nuit. Je ne le vois plus. Je ne l’entends plus siffler. Selon l’orientation des vents, j’entendais l’heure tinter au clocher de notre vieille cathédrale Saint-Etienne. Que s’est-il passé ?
Sur le plateau, là où s’édifie à présent la cité industrielle, on ne voyait que des champs et, parmi eux, un grand champ de colza. Je ne me lassais pas d’en regarder les moissons onduler au vent du soir. Le champ de colza, comme tout ce qui l’entourait, a disparu, à la place s’élèvent aujourd’hui de grands ensembles. Le soir, on dirait des blocs de cristal transpercés de lumière. La vieille ville est bien noire sous les orgueilleux lampions, toute consentie, toute résignée. Plus les lumières se multiplient autour d’elle plus elle se recroqueville, plus elle se cache, comme une vieille femme qui se ramasse sous un capuchon. A quoi rêve-t-elle, si elle rêve ? Et où sont passées la vieille rue des Champs-Gibet et la rue de la Clouterie ? La rue des Filotiers ? La rue des Tanneurs ? Rien ne dure. Nous avons encore notre rue aux Toiles et notre rue Charbonnerie qui fut la rue es Charbonniers, notre rue de la Mare-au-Coq et la rue de la Fontaine Sucrée – mais pour combien de temps encore ? Ce qui reste de la vieille ville est comme un tison qui s’éteint, au bout de quinze cents ans !(…)
Le soir en regardant les lumières de la ville, je me souviens d’avoir ouï dire que, du temps de mes grand-père, les rues n’étaient éclairées que par des lampes à huile, et encore ne les allumait-on pas les soirs de lune – mais sont arrivés les becs de gaz, et je me souviens fort bien de l’allumeur de réverbères, avec sa grande perche sur l’épaule, et la poire qu’il pressait pour faire la flamme, et après le gaz, la fée électricité et les grandes lumières partout que c’en est une féerie. Oui mais sommes-nous mieux qu’avant ? Vend-on encore les pauvres gens ?"
Louis Guilloux, L’herbe d’oubli, 1984
Les articles à propos de Louis Guilloux consultables au fil de ce blog :
- A propos de l'émission Apostrophes que B.Pivot lui a consacré :
http://solko.hautetfort.com/archive/2008/10/13/louis-guilloux-franc-tireur.html
- Une lecture du Pain des Rêves :
http://solko.hautetfort.com/archive/2008/10/18/louis-guilloux-et-la-chronique.html
- Une lecture du Sang Noir :
http://solko.hautetfort.com/archive/2008/10/17/louis-guilloux-l-esprit-de-fable-3.html
-Une lecture de La Confrontation :
http://solko.hautetfort.com/archive/2008/10/15/louis-guilloux-l-esprit-de-fable-22.html
- Louis Guilloux et l'esprit de fable:
http://solko.hautetfort.com/archive/2008/10/14/louis-guilloux-l-esprit-de-fable.html
- D'une guerre l'autre
http://solko.hautetfort.com/archive/2009/09/23/louis-guil...
06:25 Publié dans Des Auteurs | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : littérature, louis guilloux, saint-brieuc, l'herbe d'oubli, romans |
mardi, 13 octobre 2009
Lequel des douze ?
Revoici le monde, et ces grandes taches imbéciles qu’il fit sur nos cahiers.
Les levers de soleil reviendront un à un nous manger,
Faisant jusqu’au dernier
De nous un peu de cendres.
« -Tu n’es pas gai », disait par-dessus mon épaule
L’arbre lecteur, aux feuilles rousses, agitant le vent dans ses feuilles,
Et des rais de lumière perçant la frondaison.
Bien sûr que si, disais-je moi, en saluant,
Qui passait au loin,
Un cortège d’assassins.
22:15 Publié dans Des poèmes | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : littérature, écriture, poèmes, poèsie |
Les deux fleuves
Sénèque, en l’an 55 de notre ère, dans un écrit satirique contre l’empereur Claude, né à Lyon, écrivait déjà:
« Je vis, dominant deux fleuves, un sommet
Que chaque jour Phébus regarde à son lever
Là où le Rhône immense précipite son flot
Et la Saône, hésitant sur le sens de son cours,
Sans bruit baigne ses rives d’une onde tranquille.
Est-ce cette contrée qui fut la nourrice de ta vie ? »
L’eau, comme la lumière, sont très clairement désignées dans ce texte pour leurs vertus nourricières. Sénèque reprend la remarque attribuée à César, et qu’on trouve dans La guerre des Gaules : « Flumen est Arar, quod per fines Haeduorum et Sequanorum in Rhodanum influit, incredibili lenitate, ita ut oculis in utram partem fluat iudicari non possit. » (Il y a une rivière, la Saône, qui va se jeter dans le Rhône en traversant le territoire des Eduens et des Séquanes, avec une lenteur si incroyable qu’on ne peut juger à l’œil du sens de son courant.) Déjà, cependant, l’opposition entre la rapidité du fleuve qui « précipite son flot » et la langueur de la rivière à « l’onde tranquille » attribue à chacun un caractère sexué qui deviendra, dès la Renaissance, un motif récurrent, tant sculptural que littéraire. De fait, opposer la singularité de chaque fleuve avant le confluent permettait d’accentuer celle de leur mariage. La symbolique des deux fleuves permit ainsi de fonder successivement et le thème pétrarquisant de Scève :
« Plus tôt seront Rhône et Saône disjoints
Que d’avec toi mon cœur se désassemble »,
et celui de la ville-Antithèse, cher à Jules Michelet :
« Oui, malgré l’effort méritoire des beaux fleuves qui viennent y mêler leurs flots et leurs populations, malgré le génie pacifique de cette noble reine, la Saône, malgré la peine que se donne, après cent détours, le Rhône pour atteindre ce mariage qui fait sa grandeur et son nom, la nature, front à front, y pose les deux révélateurs de la guerre intérieure de Lyon, deux rocs, la Croix-Rousse et Fourvière. »
20:55 Publié dans Bouffez du Lyon | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : lyon, rhône, saône, littérature, claude farrère, jean reverzy, henri béraud |
lundi, 12 octobre 2009
Theatrum Mundi
A lire aujourd’hui, sur Theatrum Mundi, une fort belle mise en forme de la façon dont l’époque contemporaine a dissocié les mots et les images. La sacralisation de l'une, l'opprobre jeté sur l'autre participant de façon complémentaire à la réduction de l'individu à un "citoyen" consentant. Con, s'entend...
09:44 Publié dans Sur le vif | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : theatrum mundi, littérature |
dimanche, 11 octobre 2009
Un conte d'après-vendanges et d'avant-dégustation
L’année 2009 accouchera le jeudi 19 novembre 2009 à minuit d’un beaujolais nouveau, qu’on espère à la hauteur des promesses publiées par les viticulteurs cette année. En attendant, voici pour patienter un conte pour veillées d’octobre en patois lyonnais (1888), lorsque que toutes vendanges finies, on attend le premier vin. C’est rapporté par Nizier du Puitspelu, illustrissime conteur, philologue, essayiste et académicien du Gourguillon. Où il est question, comme souvent, de vendanges, de jolie fille, de curé et de malentendus salaces. D’abord le texte, ensuite une traduction.
Je vo z-u diré qu’o y aviet ina vès ina joulia bôyi de vais chiz nos, qu’i lyi disiant Parnon, bien bravona, mé in pitit brizon niéci. O v-est parqué sa môre lyi disiet tojors : « Mé Parnon, quant l’ant se-z -ians su lo cu , le bôye sant pô tant betonnes comm’icinqui ! »
Véquia qu’in vépro la Pernon allôve in champ le vaches. Don, bien sûr, o y avié la Bardella, la Frominta, et lo chin Faraud. Don, de l’afère, que la Parnon rincontrô monsu lo curô que lyi disit comm’iquien :
« - Bon sai, Parnon !
-Bon sai, monsu le curô
-Comint que te vôs ?
-Marci bin, monsu le curô, et vos mémo ?
-Marci bien, Parnon. Avis vos fait bona vendêmi ?
-Marci bin, monsu le curô, et vos mémo ?
-Més, Parnon, los curôs font pôs de vendêmi ! Comint que va ta môte ? S’est-elle accuchia ?
-Marci bin, monsu le curô, et vos mémo ?
-Més, Parnon, les curôs ne s’accuchiont pôs ! Te vêquia bien grandette, Parnon ! Quel ajo que t’ôs ?
-Se-z ians, monsu le curô.
-Se-z-ians ! O v-est pôs possible !
-Vèdes vos-mêmo, monsu le curô, rebrique la Parnon, in trossant cott'et chamisi par darri, vèdes vos-mêmo, ma môre disiet qu’o y étôve écrit iqui »
16:47 Publié dans Des nouvelles et des romans | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : beaujolais nouveau, vendanges, nizier du puitspelu, littérature, patois lyonnais |