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lundi, 26 mars 2012

Grève des éboueurs à Lyon

Le changement annoncé, la France de demain... 

15:18 Publié dans Bouffez du Lyon, Sur le vif | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : politique, collomb, grève des éboueurs, socialisme | | |

dimanche, 04 mars 2012

Penser l'histoire à Bron, avec Bouton et Bégout

Christophe Bouton et Bruce Bégout présentaient hier à la Fête du livre de Bron leur volume Penser l’histoire, de Karl Marx au siècle des catastrophes, fruit d’une série de travaux menés dans le cadre du centre de recherches Lumières, Nature, Sociétés de l’université  Michel de Montaigne à Bordeaux.  Préfacé par Jacques Revel, l’ouvrage publié en 2011 se compose de plusieurs contributions, dont une de chacun des deux intervenants.

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Pour la mise en bouche, Christophe Bouton retrace brièvement le sens général de l’histoire, tel que l’ont défini les Lumières et dans leur sillage Hegel puis Marx : le fil conducteur du progrès est l’extension de la citoyenneté, basée sur la conquête politique de la liberté par le plus grand nombre, de l’empire oriental ou égyptien dans lequel seul un grand homme était libre (empereur ou pharaon), à la Grèce Antique où seuls quelques hommes étaient libres, jusqu'aux idéaux de la Révolution Française qui postule que tous les hommes peuvent être libres.  Il dresse ensuite le constat de la remise en cause par de nombreux penseurs modernes de cette philosophie heureuse de l’histoire devant les guerres mondiales du XXème siècle et le « temps des catastrophes » dans lequel nous nous trouvons à l’ère du capitalisme mondialisé. Il ne s’agit donc pas de réactiver les philosophies du passé, mais de définir des outils et des schémas d’interprétations appropriés pour saisir l’époque actuelle, définie principalement par la perte du sens. Rien de très neuf, en somme, mais une mise en perspective à la fois claire et professorale.

Partant d’une formule de Jan Patocka dans ses Essais hérétiques,, « l’homme ne peut vivre dans la certitude du non sens », Bruce Bégout rappelle alors qu’il ne peut y avoir de pensée historique sans un début et une fin. Le concept d’histoire débute ainsi pour nous avec les Grecs et se décline depuis en  deux schémas linéaires jusqu’à une fin : une première ligne continue, théologique, qui postule l’idée d’un but et qu’on peut dire progressiste ; une seconde, discontinue, eschatologique, qui se borne à attendre une fin, et qu’on peut dire messianique. En somme, nous dirigeons-nous encore vers un but ou attendons-nous simplement une fin ?  Voilà qui pourrait alimenter les riches débats menés en ce moment par les principaux candidats à la (re) conquête de l'Elysée.

La réflexion des deux invités aborde ensuite la question du rôle de l’homme dans l’histoire, à travers une article de Christophe Bouton sur le sens et les limites de la « faisabilité » de l’histoire par les hommes eux-mêmes. Contre l’idée que l’histoire serait ouvertement « disponible à l’action humaine », ils examinent trois arguments :

-      L’argument d’impuissance, selon laquelle la volonté humaine se brise contre la force des événements inéluctables et le discours fataliste qui s’ensuit. De ce point de vue Napoléon, dont la grande volonté s'enlisa  dans l’hiver russe n’est pas, comme le suggère Tolstoï dans Guerre et Paix, le grand stratège légendaire qu’on croit.

-      L’argument de l’ironie de l’histoire, qui consiste à dire que les hommes sont acteurs d’une histoire qui leur échappe inévitablement, et qu’ils ne savent pas, le plus souvent, la signification de l’histoire qu’ils écrivent : Ainsi Gorbatchev et sa Pérestroïka.

-      L’argument selon lequel vouloir faire de l’histoire est dangereux car cela autorise trop de crimes collatéraux. Et que, si vouloir « faire de l’histoire est dangereux »,  il faut sortir de la philosophie de l’histoire et revenir à la nature. Après avoir cherché à « transformer le monde », il faut réapprendre à le « conserver ». On reconnait là, quelque peu simplifiés,  les points de vue d’Hannah Arendt et de Gunther Anders.

La présentation se clôt par un détour vers la littérature et la notion d’Uchronie. On imagine alors ce que serait l'histoire contemporaine si, par exemple, Hitler avait gagné la guerre. Ce concept d'uchronie, pendant de celui d'utopie, ouvre selon Bégout un rapport original et nouveau à l’histoire et à l’imaginaire. Là-dessus, l'auditoire est rendu à lui-même, tandis que les auteurs se dirigent vers la table où se tiennent les dédicaces, comme c'est l'usage. Dehors, la nuit est tombée et l'hippodrome de Bron se vide de ses badauds d'un jour qui se dirigent sans faire d'histoire en file indienne vers le tramway.

samedi, 18 février 2012

Les églises des pentes de la Croix-Rousse en péril

C’est l’ami Myrelingot qui a attiré mon attention sur cet article de la Tribune de l’Art de Didier Rykner, daté du15 février 2012 concernant l’état de délabrement dans lequel se trouvent deux églises des pentes de la Croix-Rousse, joyaux du patrimoine canut du premier arrondissement,  Saint-Bernard et le Bon Pasteur : dégradations, profanations, tags, menaces d’effondrement et désintérêt flagrant de la municipalité pour le sauvetage de ces bâtiments historiques… Les deux photos ci-dessous, prises à l'intérieur du Bon Pasteur, proviennent de cet article que je vous invite à consulter et faire circuler. ( Cliquer ICI)

 

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La chaire du Bon Pasteur, brisée à coup de masses.

Etat du 31 janvier 2012 - photo de Didier Rykner

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Bon Pasteur : Plaque en marbre avec le nom des morts pour la France,

derrière,le maître-autel tagué


Radiographie de Saint-Bernard

Le 28 juin dernier, je publiais ce billet sur l’église Saint-Bernard, dont je vois de ma fenêtre la silhouette, sachant dans quel sinsitre état d’abandon elle se trouve. Je le republie aujourd’hui, accompagné d’un article que  Louis Jacquemin consacre à l'histoire de celle du Bon Pasteur, qu’on sait également menacée et abandonnée par la municipalité

 

De quelque point qu’on pose l’œil sur sa hautaine pierre, cette église nous parait spectralement oubliée. A un point tel que je possède certains témoignages d’habitués de la place en contrebas, affirmant ne l’avoir jamais vraiment remarquée : « Ah bon, il y a une église ? ». Magnifique et inachevé, ce mur qu’on voit, prompt à surplomber l’abrupt, donne le ton : devant le monument arc-bouté, la verdure forme rempart, jungle touffue à l’image d’un Eden d’avant la faute, paradou zolien où s’ébattent d’hermaphrodites escargots. Lorsqu’il pleut, les plus intrépides s’aventurent hors du domaine en longues files brillamment baveuses. De bonnes âmes en rejettent quelques-uns dans le repaire, toujours humide et broussailleux. Les autres meurent sous le pas d’inattentifs ou de sadiques.

 

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De ma fenêtre, j’aperçois ce mur qui tient tête à toutes les saisons. L’église n’a été que quelques décennies la paroisse des pauvres canuts. On était en 1852. Las de « descendre à Saint-Polycarpe », sur les bancs des riches marchands, ces derniers avaient obtenu du cardinal de Bonald un lieu de culte pour eux seuls. Le terrain fut offert par la famille Willermoz. L’architecte Tony Desjardins établit les plans ; La façade devait comporter un clocher ainsi qu’un double escalier monumental ; le manque d’argent compromit leur édification.

Quelques trente-cinq ans plus tard, la percée du funiculaire à travers la colline occasionna des affaissements de terrain et des lézardes inquiétantes dans l’édifice. Surgit le vingtième siècle qui, d’une guerre à l’autre,  vit le pays s’enfoncer dans la déchristianisation. Les paroissiens devenant de plus en plus clairsemés, le bâtiment menaçant de plus en plus de s’effondrer, on finit par le désacraliser. Certains petits vieux redoutèrent un temps qu’il devint une mosquée pour les maghrébins de la Grande Côte, d’autres une église pour les intégristes. Certains espérèrent que la ville en ferait un lieu culturel. Tout cela demeura lettres mortes. L’insécurité sauva en quelque sorte le bâtiment, qui demeure ainsi. 

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Devant la porte close de Saint-Bernard, on se croirait perdu en quelque hameau ruiné, comme si, tout autour, la ville ne profilait plus ses bâtis, et que la colline fût partout sauvage. Tel le clocher de la Charité, Saint-Bernard est un des rares lieux éminemment poétiques où se murmure à voix presque authentique le passé de la ville, lieu magnétique en ce sens qu’il fut heureusement retiré aux vivants et demeure clos sur son mystère. Ainsi, lorsque je rejoins le plateau, il m’arrive de passer devant cette porte de bois aussi mystérieuse que fermée. Dans l'aveuglant sépia d’une carte postale d’autrefois, j’imagine la solennité déserte (et sans contredit  peuplée de rumeurs) de cette chaire, ces bancs, ces chapelles, ces vitraux, ces statues, abandonnés au rêve d’une fantastique Résurrection, comme dans quelque conte enchanté de Barbey d’Aurevilly. Promeneur pourtant désabusé, je ne parviens pas à passer mon chemin sans emporter quelque grain de sa radiographie au cœur. 

 

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Histoire du Bon Pasteur, L. Jacquemin

Cette paroisse a été créée par le cardinal de  Bonald en 1855. Elle avait été rendue nécessaire par l’accroissement de la population ouvrière  venue habiter sur les pentes de la Croix-Rousse, le quartier de la soierie.

Une église provisoire fut ouverte au culte le 16 mars 1856.Or, ce jour-là, naissait Eugène-Louis-Napoléon, fils d’Eugènie de Montijo et de Napoléon III. L’Empereur  décida à cette occasion d’être le parrain de tous les enfants nés le même jour que le petit prince.

L’abbé Callot, premier curé du Bon Pasteur, écrivit alors au souverain pour lui recommander son enfant, l’église née, elle aussi, le 16mars. Napoléon III accepta ce parrainage. Le couple impérial visita le bâtiment provisoire le 10 août 1860.

La première pierre de l’église définitive fut posée le 25 août 1869. L’œuvre à réaliser avait été confiée à Clair Tisseur, architecte plus connu par ses œuvres littéraires publiées sous le pseudonyme de Nizier de Puitspelu. Il construisit une église de style romano-byzantin. On lui imposa un clocher bien peu roman et d’une hauteur exagérée : mais il fallait que la nouvelle église se voit de loin. Par contre, l’escalier monumental prévu devant le portail ne fut jamais réalisé.

Le nouveau sanctuaire fut consacré en 1863 par le Cardinal Caverot.Tony Tollet orna l’intérieur de peintures très académiques et Louis Bégule en dessina les vitraux.

(Louis Jacquemin –Histoire des églises de Lyon, 1983)

13:38 Publié dans Bouffez du Lyon | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : église saint-bernard, croix-rousse, canuts, lyon, christianisme, catholicisme | | |

jeudi, 12 janvier 2012

Léon Boitel, précurseur de la décentralisation littéraire

« C’est en flattant les hommes et les peuples qu’on les perd ». Formule choc, somptueuse aussi, d’un romantique à présent oublié, Léon Boitel, étonnant lyonnais dont Chantal Marie Agnès  parlera mercredi prochain 18 janvier, dans le cadre des conférences de L'Esprit Canut au cinéma Saint-Denis. : 

L’imprimerie du quai Saint-Antoine :

1826, : A peine âgé de vingt ans, le Lyonnais Léon Boitel, fait jouer au théâtre des Célestins un mélodrame dans le goût de l’époque, Le Mari à deux femmes. Quatre ans plus tard, il assiste à la bataille d’Hernani parmi Gautier, Musset, George Sand, Hugo. Cela aurait pu être le commencement d’une carrière nationale. Cependant, convaincu de la nécéssité de la «décentralisation littéraire », en laquelle il voit l’avenir de la littérature nationale et républicaine, c’est dans sa province natale que Boitel choisit de s’installer en se portant acquéreur, dès 1831, d’une imprimerie sise au 36 quai Saint-Antoine à Lyon.

Elle avait été fondée par un républicain d’origine marseillaise, Alexandre Pelzin, qui l’avait léguée en 1828 à sa fille, Claire-Joséphine, une brodeuse des Terreaux amie de la poétesse Marceline Desbordes-Valmore. C’est donc dans cet espoir de décentralisation culturelle, que Léon Boitel imagina en 1833 la formule de son étonnant Lyon vu de Fourvières, puis créa sa Revue du Lyonnais (1835) laquelle lui survivra grâce à l’écrivain Aimé Vingtrinier.

Lyon vu de Fourvières

Cet ouvrage de 570 pages, pionnier de la « lyonnitude», fut mille et mille fois imité, plagié, pillé. Il contient une quarantaine de chapitres dont le genre oscille entre l’article érudit, la promenade rousseauiste, l’opuscule politique et la nouvelle anecdotique. Léon Boitel en avait confié la préface à Anselme Petetin  le directeur républicain du journal Le Précurseur, alors incarcéré dans la toute nouvelle prison de Perrache. pourson soutien aux emeutiers de 1831.

Conscient du fait «qu’une décentralisation littéraire ne surviendrait qu’à la suite de la décentralisation politique», conscient aussi que cette dernière n’était pas encore à l’ordre du jour, ce dernier accepta cependant, du fond de son cachot,  d’agréer son « ami éditeur » en participant à sa façon à son utopie :

« Je ne crois pas que vous puissiez me citer aujourd’hui un seul écrivain hors de Paris qui ait quelque chance, je ne dis pas d’immortalité,  qui est-ce qui pense à l’immortalité en ce siècle de feuilletons ? Mais de célébrité posthume. Je ne crois pas qu’il existe dans les départements une école littéraire qui ait sa couleur locale propre, et une tendance locale et particulière (…). On a beau porter à Lyon et à Bordeaux des habits faits par Staub, et des cravates toutes semblables à celles qui se voient au balcon de l’Opéra, cela ne fait pas qu’il y ait une société française hors de Paris.»

La plus éclatante réussite de ce livre, cependant, son coup de génie, fut d’inventer pour la première fois un point de vue dont aussitôt tous les guides touristiques, les écrivains, les peintres et les photographes devinrent au fil des ans les dignes héritiers : Le panorama de la ville vue de Fourvières (auquel la tradition locale confèrait encore son s étymologique.)

Lyon, écrivent Léon Boitel et L.A. Berthaud, l’un de ses collaborateurs « est bizarre, vu de Fourvières : on dirait un monstre rabougri, plié sur lui, tordu dans ses larges écailles, se chauffant le dos au soleil, se baignant à la pluie ou se séchant au vent. » Ce qui frappe le plus l’esprit des deux compères, c’est la folie et le désordre du monde humain, la miniaturisation des bâtiments, des places et des statues : « J’ai vu notre Louis XIV de là-haut, et il m’avait tellement l’air d’un singe à cheval sur un chien que j’ai tremblé pour ses jours en voyant un milan qui tournait au-dessus de lui  prêt à descendre et à l’accrocher de sa serre. »

La Revue du Lyonnais

Dès 1834, Boitel commence son grand œuvre, La Revue du Lyonnais  : «Fiers de l’encouragement que nous ont donné les souscriptions de Lyon vu de Fourvières (...) nous voulons étendre à tout le Lyonnais ce que nous avons fait seulement pour sa capitale » écrit-il dans le prospectus.

On ne peut pas parler de régionalisme ni de folklorisme à propos d’une ligne éditoriale qui affirme haut et fort sa prétention à l’universel : « Concentrés dans le domaine de l’art, nous resterons toujours placés en dehors des passions du moment, nous recueillerons toutes les paroles bien dites, toutes les choses bonnes à savoir et à garder. Notre revue servira d’arène à toutes les luttes d’esprit d’où pourra jaillir quelque lumière ; elle sera un territoire neutre où pourront vivre en paix tous les partis. » 

Afin de définir au plus juste son projet, Boitel n’hésite pas à parler de «presse départementale», en saluant au passage les quelques deux-cents revues de la France Provinciale que la Révolution de 1830 et le nouvel espoir de la nation a fait éclore un peu partout dans les départements : «Nous n’aurons une littérature nationale que le jour où Paris aura cessé d’être le centre exclusif de la littérature en France». Propos autant romantiques que téméraires, sans doute prononcés en souvenir des imprimeurs Sébastien Gryphe ou Etienne Dolet qui furent ses devanciers.

Pourtant Boitel lança vraiment quelque chose qui, pour ne pas être vraiment un mouvement culturel, se révéla néanmoins davantage qu’une mode. Son premier titre fut Revue du Lyonnais. Esquisses physiques, morales et historiques; sous cette enseigne elle dura trois ans. En 1838, le format devint in-octavo raisin, le titre perdit son sous-titre. L’histoire de cette revue épousa celle de la carrière de son fondateur; l’atelier  du quai Saint-Antoine  ne possédait plus que trois presses à bras et employait à grand peine sept ouvriers quand, en 1852, à la suite de sérieux embarras dans ses affaires, il fut obligé de vendre son imprimerie, ainsi que la propriété de la Revue du Lyonnais, à Aimé Vingtrinier, alors bibliothécaire de la ville de Lyon.

Une disparition tragique et prématurée :

Léon Boitel fut également l’un des fondateurs du fameux cercle dit « le Dîner des Intellligences », réunion de trente joyeux convives qui banquetaient une fois par mois au Pavillon Nicolas, à Fourvière. Boitel demeure enfin comme l’éditeur de Lyon Ancien et Moderne ainsi que des deux magnifiques volumes de l’Album du Lyonnais, qui parurent en 1828 et en 1843.

Il se noya dans le Rhône et disparut prématurément, à quarante-six ans, le jeudi 2 août 1855, après un bon repas. 

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Conférence de Chantal Marie Agnès organisée par l'Esprit Canut

Cinéma Saint-Denis. 18 Janvier à 20 heures.  Entrée 5 euros

dimanche, 08 janvier 2012

Symbolique médiévale du lion

Le lion est un animal plein de ressources. Incarnation commune de la force et de la vigilance, symbole de la puissance solaire et de la clémence, emblème de la royauté et plus largement de la souveraineté, figure héraldique de la vaillance et de la générosité, le lion est aussi l’un des symboles particuliers de la Résurrection. (…)  Comme emblème du Christ, le lion est censé effacer ses traces avec sa queue pour échapper aux chasseurs, symbole de la science du Christ qui a dissimulé aux intelligences humaines les traces de sa nature divine. Quand il dort, son œil veille toujours, image de l’exceptionnelle nature du Christ à la fois mort dans son humanité et immortel dans sa divinité, dont il est dit qu’il avait les yeux ouverts dans son tombeau.  Enfin, il ranime, trois jours après sa naissance, le lionceau mort-né, symbole du Christ qui a éveillé le peuple des fidèles à la vraie foi et à la vie spirituelle et qui ressuscite trois jours après sa mort sur la croix. 

Yann Lignereux - Lyon et le Roi, Champ Vallon, 2003

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Lion-fontaine de la place Sathonay  devant la mairie du premier arrondissement

00:46 Publié dans Bouffez du Lyon | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : lyon, place sathonay, yann lignereux, bestiaire | | |

jeudi, 29 décembre 2011

La plaisante sagesse lyonnaise

La nécessaire édification des lyonnais : tel est le but revendiqué en sa préface par Catherin Bugnard, académicien des Pierres Plantées et auteur, de La plaisante sagesse lyonnaise, derrière lequel se cache Justin Godard

Les fragments de La plaisante sagesse lyonnaise ne diffèrent en rien de ces recueils de maximes de n’importe quelle province, où une résignation qu’on appelle bon sens devient peu à peu une forme de soumission qu’on trouve plaisante pour décliner sur le mode de l’universelle persuasion les aléas conjoncturels d’une simple condition, qu’elle fut paysanne ou ouvrière. On y trouve donc des proverbes, sans doute réellement entendus, d’autres plus ou moins manigancés. Ce qui distingue la Lyonnaise des autres, c’est la revendication simultanée et permanente à un métier et à un quartier, le tisseur et la Croix-Rousse. C'est pourquoi les maximes de la plaisante sagesse lyonnaise se répertorient facilement autour de quelques thèmes: 


Les mortes saisons, tout d’abord, si récurrentes dans l’existence d’un canut, qu’elles feraient de l’espoir en l’épargne bourgeoise l’un des piliers absolus de sa sagesse :

- «Ce qui donne le plus de peine, c’est d’avoir rien à faire. » ;

- « Mange pas tout ce que tu gagnes durant que te le gagnes, si tu veux avoir de quoi manger quand te gagneras plus. » ;

- «Si tu veux avoir de l’argent devant toi, faut le mettre de côté. » ;

- « La première argent gagnée est celle qu’on ne dépense pas. » ;  

- « Faut remplir sa cenpote avant que de prendre soif » ;

- « L’argent est plat, c’est pour qu’on l’empile. ».


Le rêve de propriété ensuite. C'est ce rêve qui justifie l’effort fourni ; dans ces maximes, il croise souvent le regret de ne pouvoir travailler pour soi :

- « Nul ne fait si bien la besogne que celui à qui elle est » ;

- « Il n’y a rien de tel que d’être obligé d’y faire pour y faire » ; 

- « Faut pas faire le besogne pour qu’elle soye faite ; faut la faire pour la faire. »


- Le marchand fabricant dont on se dit, pour se consoler, qu’on sera un jour égal à lui, devant la mort qui tout égalise :

- « Ne lui demande rien ; il a mal à la main qui donne » ;

- « Va pas rien croire que le juste milieu est le milieu juste » ;

- « Qui se ruine à promettre s’enrichit à ne pas tenir. » ;

- « Vois-tu, bien des fois qu’arrive que, malgré ses sous, un homme riche ne soye quand même qu’un pauvre homme. » ;

- « On ramasse pas des argents à regonfle sans les tirer de la poche de quelqu’un. » ; - « Le fabricant mange quand il a faim, le canut quand il a pain. » ;

- « Quand on te mènera à Loyasse, t’auras beau avoir ramassé tant et plus et même davantage, te n’emporteras que ce que t’auras donné. » (Loyasse est un cimetière de Lyon)


La misère ou la  précarité, selon les périodes de chômage ou de prospérité :

- « Qui ne peut faire avec le trop fasse avec le peu. » ;

- « Pauvreté n’est pas vice, mais c’est bien plus pire. » ;

- « Le temps vous dure plus à attendre la soupe qu’à la manger. » ;

- « Vaut mieux prendre chaud en mangeant que froid en travaillant. » ;

- « C’est au moment de payer les pots qu’on sent qu’on n’a plus soif. » ;

- « Vaut mieux un métier qu’une femme.»


- L’endurance ( seule façon de ne pas désespérer ?) :

- « Pleure tant que te voudras, te finiras bien par te moucher. » ;

- « Il sait assez, celui ne sait, s’il sait se taire. » ;

- « Fais ce que tu fais ; t’occupe pas du reste. » ;

- « Les vrais bons gones, c’est ceux qu’ont des défauts qui ne font tort qu’à eux. » ;

- « Ca qui est, est. Manquablement, c’est temps perdu d’y faire contre ». 

- « Y’a pas de pays au monde où on s’en voye autant que sur cette pauvre terre. »


-L’inégalité des conditions, un constat récurrent :

- « Avec tout le bonheur qui se petafine dans le monde, que d’heureux on pourrait faire ! » ;

- « Quand tout un chacun fait ce qu’il peut, personne se crève.» ;

- « Nous autres, pauvres canuts, nous pouvons pas nous payer le médecin ; alors nous mourrons nous-mêmes. »   

 

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Ce florilège ironique et désenchanté se donne à lire comme le témoignage sans candeur d’une servitude résignée à la loi de la Fabrique, transmise telle un dogme et intériorisée dès le berceau : « T’es pas content de la vie ? Réfléchis voir un peu et te trouveras que c’est toi le fautif ». La Fabrique et sa dure loi y résonnent comme une allégorie universelle et baroque du monde lui-même. On songe à quelque cauchemar carcéral. La terrible lucidité du verdict est sans appel : « Entre les bêtes et les gens, y a ben souvent que le baptême qui  fait la différence ». Ou bien : « Je me pense que si, sur cette terre, une fois d’hasard, c’étaient ceux d’en haut qui soyent en bas, et ceux d’en bas qui soyent en haut, et ben le monde serait quasiment pareil. » : Ni en l’Eglise, ni en la Révolution, ne demeure un lieu où placer l’espérance. Sinon en la ville elle-même. Comment décliner plus amèrement la vieille formule de Plaute, que décidément, l’homme est un loup pour l’homme ?


 

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Justin Godart, auteur de la Plaisante Sagesse lyonnaisevisitant les hôpitaux du front (juillet - septembre 1917). 

Ministère de la culture - Médiathèque du patrimoine 

00:01 Publié dans Bouffez du Lyon | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : justin godart, plaisante sagesse lyonnaise, lyon, société | | |

jeudi, 22 décembre 2011

Henriette Morel : le temps des individus

On sait peu de choses d’Henriette Morel  (1884-1956) qui est surtout connue comme l’amie (la muse) de Combet-Descombes. Une photo de Blanc Demilly la représente en sa compagnie. Lui ressemble à Toulouse Lautrec, elle à Louise Brooks. Etrange attelage. Sous un autre cliché des deux  célèbres lyonnais, elle sourit sous un chapeau blanc. Dans ses dessins sommeille pourtant le grave plaisir de tout une époque, prêt à s’éveiller pour peu qu’on s’y attarde. Si je devais réaliser un catalogue à son sujet, je lui donnerais pour titre « Le temps des individus », sans trop savoir pourquoi. C’est ce qui me vient à l’esprit en regardant les couleurs et les traits de ses dessins qui me semblent allier l’insouciance et la gravité dans un bel équilibre, pour s’attacher à la solitude des personnage. Henriette Morel a réalisé de nombreux pastels, des fusains, des huiles. Rapide tour d'horizon : 

 

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deux photos de Blanc et Demilly

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Son portrait, pastel et fusain de 1945 par le peintre Claude Juppet-Malbet

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Jeune femme  à la cigarette

Henriette Morel (1884-1956). La loge. Huile sur carton.jpg

La Loge

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Rêverie de printemps

 

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Paysage aux montagnes bleues

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Les amoureux à Sainte Croix

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Jeune paysanne et sa vache

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Jeune fille pensive

 

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Sous la neige

 

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Mon voisin d'en face (1946)

dimanche, 18 décembre 2011

Jean Seignemartin

Brève et romanesque existence, que celle du peintre Jean Seignemartin (16 avril 1848, 29 novembre 1875) dont une rue du huitième arrondissement (on ne sait pourquoi celle-ci) conserve le fin souvenir. Fils d’un tisseur, Jean Seignemartin fit tôt le forcing auprès de son père afin d'entreprendre dès 1860 (il avait douze ans) une formation aux Beaux-Arts de Lyon. Il fréquenta ainsi les classes de Michel Gemod et de Charles Jourdeuil, puis celle de Joseph Guichard qui l’intègra dès 1863 à un travail professionnel avec la décoration de l’hôtel Collet (aujourd’hui disparu) dans la rue Impériale (à présent de la République), qu’on venait tout juste de percer et qui servait de vitrine au matois  préfet de Napoléon III, l'autocrate Claude Marius Vaïsse. En 1864, âgé d’à peine seize ans, le jeune Seingemartin expose au Salon de Lyon. Il est couronné l’année suivante du Laurier d’Or, le premier prix de la classe de nature. Tout réussit au jeune prodige, jusqu’à FrançoisVernay qui, ayant remarqué au Salon de 66 l’une de ses natures mortes et l’invite à partager son atelier.

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Fleurs, musée d'Orsay

A partir de 1869, Seignemartin s’installe dans ses propres meubles, rue Jean de Tournes, où il peint des portraits et des scènes de genre. Mobilisé en 1870 dans un bataillon d’artillerie de la garde mobile, il part de Sathonay à Paris et réalise là encore plusieurs portraits de ses jeunes camarades. Il se retrouve affecté à la porte Maillot dans des baraquements précaires. L’hiver est rude. Il en revient avec la tuberculose.

 

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Autoportrait

Joseph Guichard l’accueille et le réconforte, François Vernay l’héberge à nouveau. Il peut présenter au Salon de sa ville natale  en 1872 le Ballet de Faust esquissé dès 1868 lors d’une représentation à l’Opéra de Lyon. C’est alors qu’il fait la connaissance des frères Tripier, médecins et amateurs d’art, qui lui achèteront régulièrement ces tableaux dont en 1904, ils feront don au Musée des Beaux-Arts.

 

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Le ballet de Faust

L’un des deux frères,  Raymond, devient son médecin personnel. Pour tenter de raviver santé la santé du jeune homme, il l’envoie à Amélie les Bains Palalda en Pyrénées Orientales. Seignemartin s’y ennuie profondément. Revenu à Lyon, il achève au cours des années 1873 et 1874 plusieurs tableaux de fleurs et de nombreux portraits, avant de partir une première fois à Alger. Son ami le peintre Alphonse Stengelin l’y rejoint en compagnie de sa sœur dont il fait le portrait. Il y rencontre Albert Lebourg, qui y est professeur à l’école des Beaux Arts. Il s’initie à la lumière, à la blancheur, et cherche à renouveler dans plusieurs tableaux les clichés de l’Orientalisme déjà académique. C’est la qu’il meurt prématurément lors d'un second séjour. Son corps est rapatrié et inhumé à Loyasse. Le buste qui ornait sa tombe a été dérobé il  y a peu. 

 

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Paysage d'hiver en Algérie méridionale

 

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Baiser d'adieu

 

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buste dérobé à Loyasse

17:45 Publié dans Bouffez du Lyon | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : peinture, loyasse, jean seignemartin, beaux-arts, lyon, alger | | |