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vendredi, 20 novembre 2009

C'est une vraie question ...

 

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Comment peut-on raccourcir une bûche sans la blesser ?

 

15:33 Publié dans Sur le vif | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : fendre une bûche, bucheron, devinette | | |

jeudi, 19 novembre 2009

La mode était aux fraises

Celui que j’ai sous les yeux est tout déconfit. Un morceau de scotch, à présent jauni, lui redonna naguère un corps entier. Rogné, fendillé, les coins pliés - pauvre hère ! Je doute qu’un collectionneur m’en concéderait plus d'un liard, ce cent francs Sully demeurant l’un des billets les plus communs sur le marché. Quant à la Banque de France elle-même... Il m’est souvent arrivé de tailler le bout de gras à propos de ces vieux francs démonétisés, images d'un siècle à présent autre, si autre. On m'évoquait à chaque fois, l'oeil comme retombant en enfance, quelque vieux tiroir à la campagne où il s'en trouvait, croyait-on, dans un coin d'un certain garage, ou bien chez une tante - la prochaine fois qu'on ira la voir... .Immanquablement, quelques jours plus tard, dans leur trésor aussi précieux que dérisoire  se trouvaient,  quelques cent francs Sully…

- Tu crois que ... ?

 

 

L’étude de ce billet fut confiée en 1933 au peintre Lucien Jonas. Le filigrane choisi fut celui qui avait déjà été utilisé pour le cent francs 1906, encore en cours de circulation : profils superposés du vieux ménage de Cérès et Mercure, fertilité des moissons et prospérité du commerce incarnant les deux sources les plus fiables de revenus. Mais les maquettes présentées au Conseil Général de la Banque de France par Lucien Jonas avaient soulevées quelques critiques à l’époque et l’émission du billet fut suspendue jusqu’en mai 1939, date de sa première émission. Il fut imprimé jusqu’en 1942. En raison de probables disparitions massives, on lui préféra alors le cent francs Descartes.

 

Au recto on voit une femme en péplum, appuyée du bras droit sur un sceptre et tendant du bras gauche une couronne de roses et de raisins que soutient un enfant à l'épaule ronde et nue. Cette couronne sert de cadre au filigrane. Derrière les deux personnages, une vue à vol d’oiseau du centre de Paris, Notre Dame en son centre. Le 16 janvier de cette année 1933, Jean Mermoz et un équipage de 5 membres avaient effectué, à bord du Type 70 Arc en ciel, un vol sans escale entre Saint-Louis (Sénégal) et Natal (Brésil) en 14 h 27 mn. Le mois suivant, les Britanniques Gayford et Nicholetts effectuaient le premier vol sans escale entre la Grande Bretagne (Cranwell) et l'Afrique du sud (Walvis Bay) en 57 heures et 25 minutes. En juillet, le premier tour du monde solo était réussi par Wiley Post (lequel devait s’abîmer en vol deux ans plus tard) sur monoplan Lockheed et 7 jours 18 h et 49 mn. Et le 30 août naissait une certaine Compagnie Air France. Ceci explique-t-il cela ?

L’engouement pour les tout récents maîtres du ciel était alors réel. Aussi, cette vue aérienne de Paris, qui  confèrait à la vignette une modernité indéniable par rapport aux coupures précédentes, fut-elle appréciée en son temps.

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Sur l’autre face le pensif Sully. Derrière lui se distingue, au milieu des champs, le village de Sully-sur-Loire et son château. L’œil est vif, bleu, déterminé. La barbe poivre et sel. La fraise – ah la fraise aux godrons immaculés est admirable ! Que n’avons-nous plus le loisir de déambuler, tels Sully ou Montaigne, le cou ainsi ceint d’un tel ornement !  De cette fraise si caractéristique, Pierre de l'Estoile, décrivant les jeunes gens du temps à la mode, écrivit :

- leurs fraises de chemises de toile d'atour empesées  et longues de demi-pied de façon qu'à voir leur tête par-dessus leur fraise, il semblait que ce fût le chef de Saint-Jean dans un plat... (1)

 

 

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Maximilien de Béthune, duc de Sully (1559-1641) fut honoré par la Banque de France avant le roi qu’il servit, puisque Henri IV n’obtint son billet qu’une décennie plus tard. De la devise de Sully « Labourage et pâturage sont les deux mamelles de la France », la France industrielle n’aura su conserver grand-chose.  D'aulcuns trouveront que sa campagne aujourd’hui sillonnée par des autoroutes payantes insulte avec éclat  l’action de cet homme qui avait en son temps aboli bon nombre de péages pour passer d’une province à l’autre.  Avec ses deux paysages fondus dans le lointain derrière les personnages, le billet établit dans un joli rapport de complémentarité l'univers de la ville et le monde de la campagne, se donnant la possibilité de passer avec un égal bonheur de la poche du plus rusé citadin à celle du plus roué paysan.
(1) Journal de l'Estoile pour le règne de Henri III, Paris, Gallimard, 1943, p 122

19:51 Publié dans Les Anciens Francs | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : billets français, cent francs sully | | |

mercredi, 18 novembre 2009

Louis XIV et le petit vin d'Alicante

Saint-Simon rapporte que peu avant de mourir, le mercredi 28 août 1715, Louis XIV « fit le matin une amitié à Mme de Maintenon qui ne lui plut guère, et à laquelle elle ne répondit pas un mot. Il lui dit que ce qui la consolait de la quitter était l’espérance, à l’âge où elle était, qu’ils se rejoindraient bientôt ». Dans la minutie et le souci du détail que le duc met à sa narration des derniers instants du monarque, se respire un arôme qui m’a toujours fasciné. On sent qu’il prend plaisir à écrire ce lent chemin du vieux monarque vers une extinction définitive, et que cette jouissance extrême ressemble à celle de lui avoir survécu.

Dans l’insignifiance et la précision d’une phrase comme : « On donna donc au Roi dix gouttes de cet élixir dans du vin d’Alicante sur les onze heures du matin », par exemple, n’entendez-vous pas le grand silence de la chambre de Saint-Simon, et comme son écriture devait occuper l’espace de cette chambre, et casser l’ennui profond dans lequel son esprit se trouvait ? Le long récit de l’agonie du monarque dut être sous sa plume, au sens propre, un divertissement. Un réel divertissement. Le seul possible, probablement, durant cette semaine qui alla de ce lundi 26 août où Louis XIV se sut condamné au dimanche 1er septembre à huit heures et quart du matin, où il expira.

 

Le 29 août, « le Roi mangea deux petits biscuits dans un peu de vin d’Alicante avec une sorte d’appétit » note le scrupuleux mémorialiste. Saint-Simon  se met bien sûr en scène lui-même à l’occasion de l’événement, notamment en exagérant l’importance de son action politique auprès du futur Régent et du Conseil qui l’institua. C’est le propre du genre, et Chateaubriand retiendra la leçon. Raconter la vie des grands c’est déjà être grand soi-même. Raconter leur mort, c’est les dépasser.

 

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« Le samedi 31 août, la nuit et la journée furent détestables. Il n’y eut que de très rares et de courts instants de connaissance. La gangrène avait gagné le genou et toute la cuisse » Il prête au vieux monarque des dernières paroles religieuses « O mon Dieu venez à mon aide, hâtez-vous de me secourir » Il est d’ailleurs le seul, parmi les rapporteurs de l’événement, à placer de tels propos dans la bouche de Louis.

Avec une joie morbide, les mémoires de Saint-Simon fouillent ensuite  le corps anéanti de Louis XIV, s’attarde sur les transferts de ses entrailles à Notre-Dame et de son cœur à l’église Saint-Louis des Jésuites de la rue Saint-Antoine.  Selon la relation de l’Arsenal, le cortège comprenait  deux carrosses (trois selon Buvat) ils étaient escortés de vingt pages portant des flambeaux, de trente gardes du roi, vingt valets de pied et trente suisses. Cela devient chez Saint-Simon : « Le vendredi 6 septembre, le cardinal de Rohan porta le cœur aux Grands-Jésuites avec très peu d’accompagnement et de pompe. Outre le service purement nécessaire, on remarqua qu’il ne se trouva pas six personnes de la cour aux Jésuites à cette cérémonie. »

Ayant lié en quelque sorte sa postérité littéraire au détail de cette longue agonie, il glisse en quelques lignes sur les cérémonies religieuses. Celles du vendredi 25 octobre à Saint-Denis tout d’abord « où tout se passa dans une confusion si grande et d’une manière si éloignée de celles de Louis XIII, d’Henri IV et de tous ses prédécesseurs, que je m’en épargnerai le récit » ; celle de Notre-Dame ensuite,  relatées en quelques lignes : « On fit le 28 novembre les obsèques solennelles du feu Roi à Notre-Dame avec les cérémonies. Maboul évêque d’Alet, y prononça l’oraison funèbre. Le cardinal de Noailles y officia, et donna à l’archevêché un grand repas aux trois princes du deuil, qui furent les mêmes qu’à Saint-Denis, et à beaucoup de gens de la Cour. »

 

PS. Ce billet a dû naître par association (surperposition) d'idées, parce que j'ai dû lire en fin d'après-midi qu'un acteur qui avait joué deux fois le rôle de Louis XIV s'était tué dans le tunnel de Saint-Cloud, au volant de sa voiture. Le château de Saint-Cloud, propriété de Monsieur, frère de Louis XIV, accueillit plusieurs fois Louis XIV, notamment lors des fêtes d'octobre 1678. C'est dans ce château que mourut la célèbre Henriette d'Angleterre dont Bossuet prononça l'oraison funèbre.

06:08 Publié dans Là où la paix réside | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : mémoires de saint-simon, littérature | | |

mardi, 17 novembre 2009

Quand Musulin arrivera à ses fins

Le convoyeur s’est rendu, ça y est disent les braves gens, le convoyeur a mis fin à sa cavale, etc.…  Les journaux du jour,  emplis de la nouvelle : « il avait l’air assez bizarre » aurait confié une source. Du coup sur la Toile, tous ceux qui l’ont adulé commencent à le brûler. C’est vraiment avoir la vue courte, je vous dis. Car Toni Musulin est tout sauf un pauvre type. Tout sauf ça.

Revenir d’abord,  sur le casse du siècle qui, justement, eut ceci de paradoxal de ne pas être un casse, mais juste un hold-up (on aurait envie de dire un emprunt). Le 5 novembre, Toni se tire et largue, ce-faisant, une existence de bourrin, sa vie de con de convoyeur de fonds, comme aurait chanté en son temps le magnifique Bourvil ou le non-moins espiègle Bobby Lapointe. Il se tire, sans dommage irréparable puisque-il ne risque guère plus que trois ans de prison. « Il n’a fait de mal à personne » comme le proclame déjà sur les ondes son astucieuse ex-compagne. A partir de ce jour la notoriété est vite acquise, car Toni le malin sait bien qu’il vient de réaliser là le rêve du beauf quelconque comme le Villeurbanne et son petit logement avec lequel il vient de rompre (et qu’il a soigneusement vidé) en abrite,  par millions   (Villeurbanne étant, comme Vaise ou Noisy le sec, une métaphore…).

Voici donc notre Toni en cavale qui se paye le luxe inouï et presque scandaleux de larguer derrière lui comme si, après tout, ce n’était que du papier, quelques 9 millions d’euros qu’on retrouve, mal planqués, dans un garage dans un garage. Du travail d'amateur, commence à rugir l'opinion en regagnant sa case à Villeurbanne ou Noisy le Sec. Du travail de toccard,  tout en se disant que les 2 millions qui restent après tout manquent quand même un peu à leur comptes à banque pour payer les jouets des gosses à Noël et les vacances avec Bobonne en juillet. Oui, car l'opinion est de plus en plus juilletiste.  Un amateur, donc, mais encore hors-du-commun…

C’est là que la grandeur de Toni mérite qu’on l’examine de plus près.

Car il aurait pu devenir un parrain médiocre, en effet. S’entourer de jolies nanas à beaux culs et cervelles de moineaux, comme on en voit dans les romans de San Antonio et les films de James Bond. Blanchir son argent en quelques paradis fiscaux et se la couler, comme disent les cons, douce... C’est oublier qu’il est, tous les articles qui lui sont consacrés le répètent à l’envi, d’une humeur taciturne, étrange, un solitaire… Il sait bien que même blanchi, l'argent n'est jamais propre. Avec le paquet de biftons qu'il a transportés en dix ans de bons et loyaux service à sa putain de banque, sûr qu'il l'a compris, ça.  Moi, je vous le dis depuis le début, Toni est vraiment un gars bien. Alors que fait-il ? Il se rend de lui-même à la police. Histoire de rester un sujet. Car ça peut encore servir.

Une vie de milliardaire, traqué par toute la flicaille du monde, avec des cervelles de moineaux à ses pieds et des tas de précautions à prendre en permanence pour pas se faire trahir par ses meilleurs poteaux, il n’en veut pas. Trop d’emmerdes et surtout pas assez de liberté. Une romance déjà faite. Toni a compris que l’argent qui fait rêver les cons qui se pressent sur le Champ de Mars le samedi n’est plus une valeur véritable. La preuve : voir comment on le distribue aux footballeurs…

Toni, y’a rien à faire, est un vrai héros paradoxal. L’argent des imbéciles et le rêve commun qui va avec ne l’intéressent plus. Il choisit Monaco pour se rendre, grand seigneur. On l’escorte jusqu’à la « frontière » pour lui passer les menottes. Mes hommages à la famille du Prince et Au revoir.

Trois ans de tôle qu’il risque...  C'est vite passé ! Aux frais du contribuable que  vous êtes, en plus. Dans des prisons bien chauffées et bien équipées, mieux que le petit appart' à Villeurbanne si ça se peut. Plutôt que de se faire chier à trimballer nos sales biftons d’un dépôt à un autre, au risque de se faire trouer la peau par un truand banal, je vais vous dire ce qu’il va faire, dorénavant, ce gars qui a tout compris de la société de lampistes qui est la nôtre. Il va écrire un petit récit qui romance l’inoubliable cavale qu’il vient de s’offrir. Quand on l’aura un peu oublié, il le sortira, son récit, avec la complicité de quelque éditeur opportuniste et enthousiaste. Passage chez Ruquier ou son successeur, signatures de Fnac en Fnac, vous verrez. Contrat avec un producteur à la clé. Tournage dans la foulée avec un Alexandre Dujardin anglo-saxon et quelques starlettes pour jouer les cervelles de moineaux in situ.

Un de ces quatre, vous le retrouverez en train d'empocher des illustres académies littéraires du pays  un Goncourt ou un Renaudot, comme Diaye ou Beigbegger, ou une Palme d’Or comme Bégaudeau. Mieux, de la paluche de Sarkozy ou d'un quelconque successeur une Légion d’Honneur, comme Dany Boom et, pourquoi pas, tout encravaté à Stockholm, un Nobel comme Le Clezio. J’attends son discours avec impatience.


Car ce taciturne- là, je vous le dis, il a tout compris de ce qu'est la réelle valeur dans la société du spectacle. Et comment dealer avec.

Alors moi je le dis à nouveau : Chapeau Toni …

19:49 Publié dans Des inconnus illustres | Lien permanent | Commentaires (15) | Tags : toni musulin, actualité, littérature, monaco, légion d'honneur | | |

lundi, 16 novembre 2009

Charles Clément, canut de Lyon

Les Dossiers de l’écran, vous vous souvenez ? L'émission passait le mercredi soir (de mémoire) et comprenait un film à thème, suivi d'un débat. Par l'intermédiaire du standard "SVP", les téléspectateurs posaient des questions que collectait le sieur Guy Darbois. Mercredi prochain, au CIFA, une occasion unique (parlons un peu comme la pub') se présente à vous de retrouver cette ambiance incomparable : tout d'abord le générique solennel à vous donner des sueurs froides, ensuite la balafre au menton d'Armand Jammot, les engueulades et les provos des invités sur le plateau. Avec en prime, sur cette video empruntée à You Tube, un long plan sur Michel Lancelot en train de fumer sa clope, narquois, et une engueulade Marchais/ Jospin sur le thème de lequel de nous deux est resté le plus proche des ouvriers ...

 

clip_image002.jpgAprès-demain mercredi, en effet, au CIFA Saint-Denis à 20h30, l'Association l'Esprit Canut vous invite à découvrir ou à revoir un téléfilm de Roger Kahane écrit il y a tout juste trente ans par Jean Dominique de la Rochefoucault et diffusé sur Antenne 2 en 1979 dans le cadre de cette émission. Il s'agit de Charles Clément, Canut de Lyon, avec Avec André Weber (Charles Clément), Jean Lanier (Bouvier Dumolard), Robert Etcheverry (Fulchiron), Jacques Monnond, Louis Lyonnet, Roger jacquet, André Sanfratello, Maurice Deschamps…

 Le film sera suivi, bien sûr, par la projection du débat servi dans son jus de l’époque. Occasion de retrouver un certain rythme et, peut-être aussi, une certaine complexité de pensée. 

 Parmi les participants au débat, on retrouvera avec plaisir, parmi d'autres,  deux personnalités récemment disparues, Georges Mattelon et Maurice Moisonnier. Le prix d'entrée est de 5 euros. Venez nombreux. Nombreuses. Avec vos copains. Copines. Il faut remplir la salle.

 

 

 

 

07:41 Publié dans Bouffez du Lyon | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : armand jammot, esprit canut, charles clément, cifa saint-denis | | |

dimanche, 15 novembre 2009

Chronique de Séfiradis, de l'argent qui tombe du ciel et de la cantatrice chauve

Le canular d’Orson Welles, en octobre 38 avait provoqué un mouvement de panique tel qu’entre les jambes cassées, les fausses couches, et les accidents sur les routes,  l’acteur avait dû verser 200.000 dollars de dommages et intérêts à tous les naïfs qui avaient cru à la réalité du débarquement, par lui annoncé sur les ondes, des martiens. Terrible leçon, que de prendre conscience de la connerie de ses contemporains et de ce que coûte le fait de jouer avec.

Jouer avec la connerie des imbéciles porte dorénavant un nom : opération de marketing :  n’est-ce pas par ces termes que la société de droit belge Rentabiliweb justifie ce qu’en d’autres temps on aurait appelé un canular ? faire se déplacer plus de 7000 cynico-candides jusqu’au pied de la tour Eiffel, dans l’espoir d’une douche de billets…  On le savait me direz-vous depuis longtemps que le dressage des imbéciles et l’art du marketing avaient des points communs,  mais à ce point !

-So curious, aurait dit, en câlinant l’une des mèches argentées qui tombaient sur son front, une romancière des années vingt, en contemplant le spectacle de tous ces abrutis, dépités de n’avoir pas eu leur ration annoncée de billets, en train de caillasser, pour se venger, bus et vitrines. Car c’est bien connu, l’argent, ça tombe du ciel, et le droit à la connerie est désormais si inaltérable qu’il est le premier des droits de l’homme.

 

Un peu plus tard, on retrouverait notre très british observatrice dans un sofa moelleux. Un chat nommé Séfiradis se loverait sur ses genoux. Elle se saisirait négligemment d’un journal et lirait :

« Samedi après-midi, dans le bourg Dommary-Baroncourt de 850 habitants, le maire ceint de son écharpe a posé la question rituelle à Magali. Elle a dit  « Oui » (…)  A coté d'elle, un grand portrait de  Jonathan, posé sur un chevalet. La jeune femme de 25 ans qui souhaitait épouser à titre posthume son fiancé décédé il y a un an dans un accident a vu son rêve exhaussé : elle s’est mariée avec Jonathan, mort en 2008. »

Elle se tournerait alors vers son mari : Oh look, look, so curious…

Son mari s’approcherait par-dessus son épaule et dirait en faisant claquer sa langue : « Non, ce n’est pas le feuilleton de la Chronique de Paris. Une femme épouse un mort, c’est désormais la re-a-li-té d’un fait-divers

-Oh ! Wonderful ! Comme dans un conte de Lewis Caroll

-Yes darling ! »

 

Puis se saisissant d’une paire de jumelles de théâtre, tous deux  retourneraient  à la fenêtre de leur hôtel, pour assister à la fin du caillassage sur le Champ de Mars.

 

Le travestissement, l’usurpation, le canular, font désormais partie intégrante de ce que, si distanciés de la nature, nous nommons le réel. Quel talentueux peintre a-t-il au juste réalisé le tableau des Onze qui trône au Louvre ? Valéry Giscard d’Estaing ne siège-t-il pas à l’Académie Française ? Et Bernard Pivot au Goncourt ? Dany Boom ne vient-il pas d’être fait Chevalier de la Légion d’Honneur ? Carla Bruni n’est-elle pas première dame de France ? Ou Mireille Mathieu ? On s’y perd. N’est-ce pas le but secret de ce fameux métissage des cultures dont on nous rebat les oreilles ?  Après tout, pourquoi un jeune Blanc n’aurait-il pas le droit d’avoir des cheveux comme Yannick Noah et une jeune Noire des mèches à la Marylin ? Si c’est leur choix ? Leur goût ? Après tout, pourquoi l’argent ne tomberait-il pas du ciel, et pourquoi n’aurait-on pas le droit – nom de Dieu – d’épouser des morts ?  Séfiradis ronronne sur les genoux de sa maitresse. Mr Smith fait à nouveau claquer la langue : « Cependant, la soupe était peut-être un peu trop salée. Elle avait plus de sel que toi.  Ah, ah, ah » :

« La civilisation actuelle décomposée ne passe pas par la Barbarie ; elle se perd en elle-même ; le vase qui la contient n’a pas versé la liqueur dans un autre vase ; c’est le vase qui est brisé et la liqueur répandue. »

Je vous laisse en compagnie de ce constat déjà ancien. Celui qui trouve le nom de son auteur a gagné tout l’argent qui tombera demain du ciel.

Et c'est ansi qu'Alexandre est grand

samedi, 14 novembre 2009

L'indécence Ndiaye

Il y a une véritable indécence à prolonger une polémique sur « la France de Sarkozy, pays monstrueux», alors qu’on vient d’empocher un Goncourt et qu’on mène, de Berlin,  une carrière d’écrivain à Paris somme toute assez fructueuse. Une indécence de baronne parvenue, à provoquer ainsi la victimisation. Une indécence d'imbécile.

« Je regrette » dit la dame « que le Ministre de la Culture ne prenne pas position sur le sujet ». (le sujet = ses propos) Mais qu’est-ce que c’est, encore, que cet ego surdimensionné ? La dame, qui a bien l’air d’appartenir à son temps tout de lieux communs tissé, ne me donne guère envie de fréquenter sa prose, à vrai dire. En ai quand même feuilleté quelques pages, tout à l’heure, dans le coin best-sellers d’une grande surface. Rien de bien neuf visiblement. Rien que du très convenu, du très bobo- banlieusard, dont seuls les medias comme les inrockuptibles ou Libé sont encore friands. Rien que du très bête, chez cette dame, à vrai dire. Et j’ai laissé tout ça sur le rayon best-seller d’une grande surface. Comment ne pas voir qu'ici encore, comme toujours, l'indécence et le commerce se rejoignent ?

 

Hélas, l’indécence est devenue dans ce pauvre pays un argument de vente. Depuis longtemps. Et chez certains, ça fonctionne et ça tourne comme la planche à billets en période de faillite.

Jusqu’où la littérature va-t-elle dégringoler entre les mains de ces gens ?

Jusqu’où  l’esprit ?

La pensée ?

16:29 Publié dans Sur le vif | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : édition, marie ndiaye, prix goncourt, littérature, gallimard | | |

Lecture de Roland Tixier

J’ai rencontré hier un homme charmant. En compagnie duquel nous avons passé, une poignée d’auditeurs et moi-même, un moment de poésie – oui, ce mot galvaudé peut encore retrouver, à l’occasion de moments comme ceux-ci, un peu de sens.

De poésie donc

 

Roland Tixier, a lu dans l’intimité du premier étage des Xanthines, l’intégralité de son recueil,  Simples Choses. (1) J’avais déjà lu les 180 haïkus (2), mais j’avoue qu’ainsi parlés, oralisés, racontés – et par celui qui vit dans leur rythme mental depuis – dit-il – une dizaine d’années, ils ont pris une sorte d’existence intérieure tout à fait étonnante.

 

Pour parler de sa poésie et de sa façon de mettre en relief les mots, Roland Tixier évoque, un rien malicieux, les expositions de mots auxquels les surréalistes aimaient s’adonner, ou bien encore les films sous-titrés. Il parle également du vocabulaire et du style de Georges Simenon, cité par Vialatte (« Simenon écrit comme tout le monde, mais personne n’écrit comme Simenon ») Mettre en valeur les mots simples des gens simples, afin de restituer le dénuement d’un simple moment, tel pourrait être son art poétique.

 

La lecture de Tixier est très régulière. Psalmodiant, il s’interrompt pour préciser, parfois : « Ce haï-ku, c’est un jour de soldes, à Monoprix… » Ou encore, « là c’était devant la mairie de Vaulx en-Velin, quand les pigeons viennent grappiller les grains de riz juste après les mariages… » ; « Là, c’était deux amoureux sur l’avenue Bianqui, deux amoureux qui s’embrassaient au lieu de faire un créneau… »  «  le poilu moussu, c’est dans le quartier Montchat… »

 

Il est des mots dont la mise en relief est inquiétante :

 

Je ne vois plus l’homme au chien

Ont-ils quitté le quartier ?

Ou peut-être pire ?

 

Cette strophe est d’ailleurs la seule, dans tout le recueil, à posséder deux points d’interrogation. Les autres sont non ponctuées, comme liées ensemble car, dit-il «un haïku n’a de sens  que dans le nombre »

 

Avec humour, Roland Tixier nous raconte que pour voyager aujourd’hui, il n’est plus besoin d’aller au Japon. Changer de rue lui suffit .

Et lorsqu’il lit ce haïku :

 

causerie dans l’entrée

il ne fait pas très froid

si on regarde bien

 

il prend le temps de nous expliquer : « j’allais sortir, et la voisine m’a dit : Il ne fait pas trop froid, si on regarde bien ».

 

Magnifique sous-titrage, poète ! Magnifique sous-titrage avec ces mots de rien, ces mots du quotidien. Et on a envie de lui dire qu’en effet « il ne fait pas très froid si on le lit bien… »

 

 

(1) Simples Choses Roland Tixier, Éditions Le Pont du Change

13 € - ISBN : 978-2-9534259-0-1

(2) Premier billet ICI

15:11 Publié dans Des Auteurs | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : poésie, roland tixier, le pont du change | | |

vendredi, 13 novembre 2009

Le piéton du pont du Change

Roland Tixier sera au café associatif Les Xanthines, vendredi 13 novembre à 18 heures, pour lire des extraits de son dernier recueil, Simples choses, un ensemble de 180 haïkus urbains paru aux éditions Le Pont du Change.

Les Xanthines, café associatif du commerce équitable

33 rue de Condé, 69002 Lyon - métro Perrache ou Ampère.

Entrée gratuite sur consommation équitable.

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