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samedi, 19 juin 2010

De l'amitié en société libérale

Pour se développer, fleurir et tenir bon entre les hommes, l’amitié véritable a besoin de se nourrir d’un sentiment minimal d’égalité entre eux. C’est pourquoi elle a pu s’éprouver longuement dans des situations transitoires où cette illusion d’égalité était à même de se faire ressentir avec le plus de justesse : l’école, l’armée, le séminaire. Le maquis (celui dont René Char parle dans ses feuillets d’Hypnos) offre sans doute la situation la plus propice à la souveraineté de l’amitié, parce que le sentiment d'égalité le plus extrême s'y fait ressentir. Les aléas de vie et de fortune, la situation devant la mort et les risques encourus au quotidien n’y sont pas simplement un facteur de rapprochement, mais bien plus un révélateur de l’égalité des conditions sans quoi il n’est point, entre les hommes, d’amitié possible. C’est ainsi que Char, à propos d’Emile Cavagni, parle de frère d’action : « Je l’aimais sans effusion, sans pesanteur inutile. Inébranlement. », dit-il.  Mais à plusieurs reprises, le poète évoque avec appréhension et lucidité l’après (n° 65 et 65) et la perte du « trésor commun », une fois venue la Libération.

Pour le reste, Char a magnifiquement défini le ressenti propice à l’amitié en liant ce sentiment à celui de sympathie, mais aussi à la nécessité de servir et même d’œuvrer ensemble : « Cet homme autour duquel tourbillonnera un moment ma sympathie compte parce que son empressement à servir coïncide avec tout un halo favorable et mes projets à son égard. Dépêchons-nous d’œuvrer ensemble avant que ce qui nous fait converger l’un vers l’autre ne tourne inexplicablement à l’hostile » (n° 196)

La société libérale prive les hommes de cette œuvre commune, en les dressant au contraire les uns contre les autres dans des projets singuliers. Elle n’a de cesse, par ailleurs, de rendre criantes les inégalités de sorts et de fortunes entre les membres qui la composent. C’est pourquoi l’amitié véritable y est en son sein impraticable ou souvent très douloureuse. Tout juste peut-on parler de camaraderie, en évoquant quelques similitudes de goûts ou de tempéraments, quelques intérêts communs un bref instant partagés. Ou de collégialité lorsqu’au travail, des êtres qui ne se sont pas choisis et se trouvent placés face à l’affrontement de tâches quotidiennes similaires, ressentent quelques bribes, quelques aspects de la nécessaire entente entre les hommes. Le sentiment d’appartenance à un clan se trouve alors partiellement légitimé, de façon éphémère. Un concept ambigu d’équipe se fait jour. Encore faut-il, pour que ce concept fonctionne, qu’un semblant d’égalité de traitements entre les membres de cette équipe soit identifié par tous. Ce qui, dans la société libérale, est de plus en plus difficile à faire, entre hommes et femmes, jeunes et vieux, héritiers et non-héritiers, diplômés de telle ou telle école… Si les pools de brancardiers fonctionnent mieux que les dreamteams de certaines entreprises, sans doute est-ce parce que les écarts de salaires y sont moins importants. Ne parlons pas de ce que certains continuent à nommer fort hasardeusement l’Equipe de France de foot.

Reste ce que bien des gens appellent leurs amis : J’entendais dans la rue l’autre jour une mère expliquer à son enfant que les Untel étaient leurs amis, qu’ils avaient été témoins à leur mariage et vice-versa, et qu’ils avaient souvent partagé ensemble des locations d’été. Ce qui tient lieu d’amitié, c’est ici l’adéquation commune à la même classe sociale (quelle qu’elle soit) et ce n'est qu'une affaire d'habitus, comme disait Bourdieu.  Ainsi se fréquente-t-on, du haut en bas de l’échelle sociale, entre gens du même monde et qui partagent les mêmes opinions, c'est-à-dire bien souvent, les opinions de personne.  

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17:36 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : amitié, politique, football, libéralisme, société, l'équipe | | |

mercredi, 16 juin 2010

La pédophagie de l'image

Dans La Crise de la culture, Hannah Arendt rappelle le sens du mot autorité, pris dans son acception étymologique : l’autorité est une augmentation. Une augmentation du pouvoir. Pendant longtemps, c’est la parole, celle des clercs, des poètes, des tribuns, qui a bénéficié de cette reconnaissance publique. Aujourd’hui, même si le pouvoir s’exerce toujours aussi efficacement dans la discrétion et le secret des palais et des loges, on peut constater à quel point c’est l’image et l’image seule qui est devenue l’agent de cette augmentation auprès du public. Dans certains cas même, qu’on se souvienne du « coup de boule » de Zidane, c'est une action en soi sans intérêt, faite par un type sans intérêt, mais qui, dans le contexte économique et politique d’une finale de coupe du monde, et celui du montage sémantique aussi ridicule qu’efficace depuis 98 du signifiant  « Zizou »,  s’est diffusée à la vitesse de la lumière dans l’esprit de millions des gens.

Tout ceci relève du lieu commun, du lieu le plus commun même. Nous vivons ainsi sous un régime des plus autoritaires qui soit, le régime de l’image, la société du spectacle. Et dans une société où, curieusement, chacun croit trouver dans l'image un moyen à sa portée de se  libérer.

Ainsi, l’image la plus terrifiante qui nous est imposée par cette curieuse société est celle que, par la mode, elle prétend permettre à chacun d'entre nous de donner de lui-même.

La mode qui, du temps des dandys pouvait encore permettre à un individu de marquer son originalité au sein de la communauté, est devenue la façon la plus conventionnelle que la dictature de l’image égalitaire offre à la personne - spécialement la jeune personne - pour trouver non plus sa place, mais ses contours, ses formes, son reflet dans le monde commun. Voyez ces troupeaux d’adolescents si similaires, à la déchirure de pantalon ou à la mèche de cheveux près, si conformes à ce que la société autoritaire attend désormais d’eux, tous pourtant si certains d’affirmer une originalité là où le terrorisme de la convention se saisit d’eux et de leurs illusions sans leur laisser la moindre chance, pour peu que leurs parents soient ce qu’il y a de pire au monde : d’éternels adolescents. Ainsi réifié par les bons soins de ses géniteurs qui n’ont (au sens propre) plus aucune autorité, l’adolescent des classes moyennes devient une sorte de projection – la plus conventionnelle qui soit – de leur souci constant d’intégration dans la société du spectacle. Une sorte d’enfant-sandwich, en quelque sorte, et dans tous les sens du terme puisque le voilà en effet pris entre ce qu’au fond ses parents attendent de lui (être au goût du jour, vivre sa jeunesse libérée…) et le tyran par excellence auquel il faut se plier pour être vraiment dans le rang : l’image, autoritaire et pédophage, devant laquelle il n’est plus de contestation politique possible.

 

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08:32 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : pédophagie, politique, télévision, image, autorité | | |

samedi, 12 juin 2010

Les Nuls de l'In-foot

Très pervers, le foot : il y a ceux qui ne parleront que de ça, et ceux qui ne voudront pas en entendre parler. Y’a ceux qui soutiendront la France, ceux qui souhaitent qu’elle gicle au plus vite. Dans les deux cas, le foot prend une place qu’il ne devrait pas avoir, vraiment pas, ni dans notre imaginaire ni, évidemment, dans la société. Les medias et les politiques seront parvenus à en faire une sorte de référence. Et quelque position qu’on prenne, on se retrouve à la prendre par rapport à lui. Lui. Le foot. Le foot, c’est comme Sarkozy, qu’on soit pour ou contre, on en parle. Se déchiffre là sa parenté avec le pouvoir. Le foot a bien pris le pouvoir, hélas : Pouvoir idéologique avec ce concept bidonné de France black-blanc-beur. Concept qui, dans sa paroissiale, stupide et médiatique tolérance a oublié les jaunes (désolé, y’avait que trois couleurs sur l’ancien drapeau). . . Pouvoir médiatique, car c’est bien le foot qui incarne le spectacle total aux yeux d’une bonne partie de la population. Pouvoir commercial : qui s’insurge véritablement des salaires de tous ces connards, joueurs, entraîneurs, présidents de clubs, journalistes sportifs ?(1) On te dira que c’est toi le connard, l’aigri, le jaloux… Pouvoir culturel, enfin, puisque comme l’a souligné l’excellent Nauher , même les guignols de la direction du PS courent derrière les Ribéry et consorts en prétendant que le foot c’est de la culture…

Histoire de songer à autre chose, et de se faire plaisir, une perle rare (je crois) : le sourire de Hitchcock

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(1) Eugène Sacomano, le bon Eugène de « Ooonnnnn refait le match », sur RTL, monnaye de simples et vulgaires piges à 5000 euros, par exemple, tandis qu’on trouve audacieux un propos de Rama Yade qui n’est qu’un simple propos de bon sens, sur l’incongruité d’un hôtel de luxe pour l’équipe des joueurs français, lesquels dans cette affaire ne représentent bien évidemment qu'eux-mêmes et leurs propres intérêts. La France, qu'on lui foute la paix.

06:46 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, france, afrique du sud, les bleus | | |

jeudi, 03 juin 2010

Critique de la technologie

J’aime tout particulièrement lire des textes argumentés sur la critique de la technique (Adorno, Anders, Arendt, mais aussi Bloy, Bernanos, Ellul…). Et pour tout dire, je fais plus qu’aimer ces lectures, elles sont nécessaires à la distance nécessaire à ma survie. Car je suis né dans un environnement technique et je vis à présent dans un environnement technologique. Or, il m’est de plus en plus difficile d’adopter un point de vue et un recul suffisants pour, tout en l’utilisant, garder cet œil juste, et cette mémoire correcte, face à l’illusion de toute puissance qu’offre cette putain de technologie. Si je jette un œil sur mon existence, force m’est de constater que cet environnement m’a été imposé, et que certes, je ne l’aurais pas choisi. J’ai subi la technique. J’en profite aussi, bien entendu. Je profite de ses effets seconds. Comme nous tous. Mais je subis aussi ses effets premiers. Hélas.

Et si je pense que les ouvrages critiques sur la société technique sont si utiles, c’est parce que pour moi, la technique n’est pas une cause de la civilisation. Elle n'en est (comme l’écriture, dans le très beau texte de Levi-Strauss) qu’une conséquence. (1)

Mis de côté leurs intérêts seconds, que je ne nie pas, la technique et la technologie sont de redoutables instruments d’aliénation, et deux formes de mystifications assez redoutables pour le salut des intelligences.

 

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(1) Nous avons commencé - et ce n'est qu'un début - à payer fort cher cette confusion dont, hélas, nous ne sommes guère responsables, étant nés après que la plupart des décisions visant à imposer le modèle technique et technologique comme modèles prioritaires de société (je n'ose parler de civilisation) ont été prises.

06:32 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : technologie, société, critique, adorno, anders, bloy | | |

jeudi, 13 mai 2010

La connerie n'a pas de couleur

 

v_8_ill_943089_158587.jpgOn a, dit le proverbe populaire, les dirigeants qu’on peut. Aurions-nous, finalement, aussi la censure qu’on mérite ? Le XIXème siècle assignait Les Fleurs du Mal et Madame Bovary en justice. Le XXIème siècle traine Tintin devant les tribunaux. Un congolais résidant en Belgique, Mbutu Mondondo, exige en effet rien moins que le «le retrait de la vente ou à défaut, l'ajout d'un avertissement » sur l'album Tintin au Congo, qu'il juge « raciste à l'égard des Africains ». Diable ! On sait qu’en juillet 2007, une «Commission pour l'égalité raciale » avait considéré que cet album contenait « des images et des dialogues porteurs de préjugés racistes abominables, où les indigènes sauvages ressemblent à des singes et parlent comme des imbéciles. » Il parait qu’Outre-Manche, depuis, certains libraires classent la bande dessinée au rayon adulte, et un préambule met en garde contre les préjugés que véhicule l'ouvrage. A New-York, la bibliothèque publique de Brooklyn a restreint l'accès au livre. Il ne peut être consulté que sur demande et appartient désormais à une collection sur l'histoire de la littérature enfantine...

Verra-t-on un jour les Bretons porter plainte contre Bécassine ? Les beaufs contre Cabu ? Tout ça ne manquerait pas de sel... Et les belges, pour finir,  contre Baudelaire ? M. Mbutu Mondondo qui doit l’être un peu de cœur et d’esprit aussi, belge, devrait s’occuper de l’auteur de Fusées après avoir réglé le sort d’Hergé. Cela lui permettrait encore de faire parler de lui.

A l'issue de ce procès ubuesque, le CRAN (comité représentatif des associations noires) n'exclut pas d'intenter une action en France. Son président, Patrick Lozès, affirme très sérieusement : "Nous aimerions ne pas en arriver à la solution radicale d'un procès. L'éditeur Casterman entend notre malaise, mais Moulinsart SA reste intransigeante".

 

Mille sabords, dirait Haddock, le ridicule ne tue plus personne. Et tout est bon pour faire du pognon. On savait la connerie sans âge. On sait aussi que la vraie, la profonde connerie est aussi sans couleur...

22:35 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (15) | Tags : mbutu mondondo, tintin au congo, moulinsart sa, belgique, cran, société | | |

dimanche, 02 mai 2010

Sacré, le maillot bleu ?

Qu’elle était belle, Esmeralda, lorsqu’elle dansait avec sa chèvre, qu’il était romantique, Quasimodo, lorsqu’il sonnait les cloches de Notre-Dame. Mais là, ils ne font plus rêver personne. Même le président de la Fédération française de football (FFF), Jean-Pierre Escalettes, estime que l'affaire de prostitution qui éclabousse Franck Ribéry et d'autres joueurs de l'équipe de France est regrettable.

« Mais, nuance-t-il, cela existe dans tous les milieux, pas seulement celui du football »… Ah ! Moi qui avais cru comprendre que le foot, c’était mieux qu’ailleurs (« que du bonheur » !), les valeurs, le sport, la compétition, lalala … D’ailleurs, Rama Yade a affirmé que le maillot des Bleus, c’est sacré. Rien que ça… Quitte à être sacrilège, on se demande alors pourquoi le mec qui s’est torché avec le drapeau français à la Fnac de Nice ne s’est pas plutôt essuyé le cul avec ce maillot-là.

 

Si au moins cette histoire post moderne entre une Belle version pute de luxe et une Bête version Bayern de Munich pouvait définitivement mettre un terme à tout le bourrage de crâne de cette ridicule ère Zizou, ouverte un soir de juillet 98, ça serait, me dis-je, toujours ça de gagné…

Mais j’en doute fort. Cette année, Paris aura eu sa coupe, Marseille son championnat, Lyon sa demi-finale… Et tout va pour le mieux dans le Royaume de France… Comme a dit un chef de l'enquête, «On ne bouge pas avant la Coupe du Monde»,  avant d'ajouter «la fille reconnaît qu'elle ne leur a jamais dit qu'elle était mineure. De plus, sur les photographies d'elle à 16 ans, elle parait bien plus âgée. […] Et comme elle le dit, Benzema n'avait que 18 ans. Il n'y a pas urgence. Il n'est pas utile d'aller très vite. Les conséquences peuvent être trop lourdes.»

...

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08:45 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : ribéry, escalettes, rama yade, football, actualité, maillot bleu, politique | | |

dimanche, 25 avril 2010

Sans évasion possible

 

Ces bouts de vies, ces bribes de conversations crachées de ci de là, dont on devient le complice involontaire désormais, un peu partout… Au marché, ce matin, entre les cageots de légumes et de fruits, un type en train de causer de son séjour en Irlande avec un copain à lui malade, il était content que les vacances s’arrêtent, vivre avec un malade toujours aigri, non tu vois, trop difficile. Là, ça (!) allait reprendre (!) c’était mieux comme ça. Et toi ? disait-il : « Ah, encore une semaine ! Ah vous êtes en location ? Profites-en bien, alors… »

Devant lui, un maraîcher gueulant à qui les voulait ses fraises à 3 euros pour finir, pour finir...

Et dans cet alors, (je ne sais pas pourquoi ce mot plus qu’un autre, et avec le ton qu’il prit pour le dire), dans cette relation de cause à effet qu’il instaurait entre le fait d’être en location et celui d’en profiter, toute l’horreur du prendre et du consommer plantée dans ces vacances qui, pour lui,  s’arrêtaient enfin, à tel point qu’il était, disait-il, content de reprendre.

N’est-ce pas bien ça, au fond, l’aspect le plus misérable de cette société des loisirs ? Que le plaisir dont on profite y soit  sans cesse jaugé à l'aune de ses moyens ? Et ses moyens, à celle de ses pauvres envies, capitalisées au fond de la cuirasse de soi ? Et ses envies à celle d'un simple conditionnement, au fond, et d'un calendrier d'époque... D'une idéologie du profit partout répandue, même à l'endroit où ce qu'on attendrait serait plutôt qu'on s'en reposât enfin, un peu... Rompre d'avec ce souci constant, ça serait un luxe. Un vrai luxe spirituel qui pourtant ne coûterait presque rien, pas même un billet d'avion, de train, de métro. Eh oui, mais...

Ce monde se reconnait par le fait, comme l’a dit excellemment Victor Serge un jour de 1911, qu’il est « sans évasion possible »…

 

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09:00 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : victor serge, vacances, société | | |

mardi, 20 avril 2010

Dans les cendres du volcan

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« Qu’on ne me refasse plus le tableau séduisant des voyages poétiques et sauveurs, avec leurs fonds marins, leurs monceaux de pays et leurs personnages étrangement vêtus devant des forêts, des montagnes, des cimes couvertes de neiges éternelles, et des maisons de trente étages… »

Paul Nizan – Aden Arabie, ch. XIII

 

A l'heure où l'on parle d'image de soi, quelque chose d’irritant, quand même, à entendre sur toutes les radios du monde des touristes français incessamment bêler contre les ambassades, geindre devant les sièges de compagnies aériennes et de tour-operators « qu’on ne les prend pas en charge, qu’on ne s’occupe pas d’eux, qu’on ne leur dit rien, qu’ils doivent se débrouiller tout seuls, qu’ils sont laissés pour compte… ». Mais qu’est-donc devenu le voyage ? A faire se retourner dans leurs tombes tous les grands arpenteurs de planète du passé, non ?

 

14:32 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : actualité, société, eyjafjöll, volcan islandais, tourisme de masse | | |

dimanche, 07 mars 2010

Il faut voter

Je reviens tout juste du marché où, entre autre routine, j’ai vu les militants se mêler au piétinement marchand des chalands pour tenter de leur fourguer leurs prospectus électoraux. Pas l’air très convaincus, les militants, de l’un ou l’autre front! Je ne leur jetterai pas la pierre : comment être convaincu par quiconque dans un tel manège ? Je me suis arrêté devant la petite école où je suis censé aller voter dimanche prochain. Ai zeuté vite fait toutes les affiches, les unes après les autres. Du regard faussement candide de Begag (Modem) à celui dur et fermé de Gollnish, (FN) de l’air parvenu de Grossetête (UMP) à celui, (grand)paternaliste de Meirieu (Ecologie) ou rigide de Queyranne (PS). Sans compter la pléiade d’anonymes sur diverses listes… Vous me direz que dans la société du spectacle, on ne vote pas pour des hommes, hein, mais pour des idées... C'est ça, c'est ça... Je me suis dit qu’en politique, je n'avais jamais vu déloger des fripouilles que par d’autres fripouilles qui prenaient leur place. Un beau lieu commun, certes. Mais qui vaut bien cet autre-ci, « Il faut voter »…  J'entendais, hier, l'inénnarrable Besancenot expliquer (après avoir dit qu'il était fier d'être facteur)  que l'ennemi de son parti anticapitaliste, c'était le parti des abstentionnistes... Je republie, du coup ce billet, daté du 9 mars 2008.

AffichesMetroPetit.JPGCelui-ci a la vie dure et la peau solide. Il faut voter ! Je connais gens de toutes sortes et de toutes générations, capables de vous l'asséner en toute occasion. Si vous ne filez pas droit, vous êtes un mauvais citoyen !  Mauvais ! Vous ne songez pas à tous ces nobles esprits, à tous ces braves gens, à tous ces sacrifiés et ces martyres qui sont morts pour la démocratie ! Eh, dites ! Si vous n'aviez pas eu la chance extraordinaire d'être leur con-citoyen, si vous étiez né dans l'un de ces pays de sauvages ou de malheureux qui ne connait pas l'élection, ah ! ... Vous vous rendriez compte de votre égoïsme, de votre insouciance... Non! non ! Il faut voter, il faut y aller. Même blanc ! Mais il faut se déplacer.

Ce catéchisme républicain ignore pour commencer que le droit de vote n'est pas un devoir.   Remarquons bien que la confusion entre droit et devoir, (comme celle entre individu et citoyen, client et consommateur, choix et option...) est monnaie courante autour de nous. Cela ne signifie pas que j'aie le devoir impératif de voter : d'ailleurs il m'est arrivé de voter au moins aussi souvent qu'il m'est  arrivé de ne pas voter, à des élections de toutes sortes. Et je dois dire que j'ai plus souvent regretté d'avoir voté que regretté de ne pas avoir voté. Toute une génération (celle d'Elections / pièges à cons) semble avoir à ce point viré sa cuti qu'elle culpabilise les plus jeunes aujourd'hui. Dans un de ses poèmes, Gaston Couté décrit ces chars à bans de moribonds qu'on traîne à la maison commune pour déposer dans l'urne au jour dit le bulletin sacré. Aujourd'hui, ce ne sont plus avec des bulletins de morts ou de moribonds qu'on bourre les urnes (encore que…), mais avec des bulletins de téléspectateurs. Est-ce un progrès ? Car on ne déloge des fripouilles du pouvoir que pour en mettre d’autres à leur place...

 

09:23 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : politique, élections régionales, ps, ump, modem, europe ecologie, front de gauche | | |