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samedi, 20 août 2011

A vous de jouer

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1) Le dernier cours du CAC 40

2) L'état réel de la centrale de Fukushima

3) La grille de rentrée des programmes de TF1 

4)  Eva Joly qui part en campagne

5) La dernière version d"Asterix le Gaulois avec Depardieu

6) Sa belle-mère

7) Autres

16:28 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (22) | | |

jeudi, 21 juillet 2011

Auguste, face et pile.

A quoi ressemblera le monde quand nous ne serons plus là ?

A ce qu’il est aujourd’hui, vu par d’autres yeux.

Telle est la force, la puissance du lieu commun…

 

vacances,mois d'août,été



Dans le repos de l’été, laissons

Donc filer le mois d’Auguste

Ces gradins vides le sont pour notre paix.

 

Sur la photo, toujours,

Le temps de son refrain,

Chacun veut placer son visage.  

summer.jpg

 

Septembre nous reverra, je l’espère

Emplis d’histoires à se conter

D’ici là, bon été. 

 

 

 

 

 

 

07:37 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : vacances, mois d'août, été | | |

mardi, 05 juillet 2011

Dsk président

Pour moi, un type capable de se faire filouter dans une suite du Sofitel par une prostituée qu'il se paye avec le pognon de sa femme n'est guère plus capable d'assurer le destin du pays qu'un obsédé sexuel qui saute sur tout ce qui passe. Aussi, qu'il y ait des gens pour s'interroger encore sur l'avenir politique de Strauss-Kahn à la tête du PS en dit long sur la décomposition avancée de ce parti. 

Très pénible, très malsaine, mais sans doute très juste impression que cette affaire lamentable révéle et qui me pourchasse à les voir tous, les acteurs, les sportifs, les journalistes, les hommes politiques : que dans cette société ceux qui réussissent, de quelque bord qu’ils soient, pensent tous la même chose, et c’est au fric. Et qu'ils sont prêts à fermer les yeux sur tout au nom de cette complicité-là.  Alors, à la tête de ce convoi carnavalesque dans cette société de contrefaçons, DSK président, in fine, pourquoi pas ?

 

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18:37 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (16) | Tags : politique, société, socialisme | | |

dimanche, 26 juin 2011

Le mariage gay

Comment sortirons-nous vivants de ce tunnel dans lequel droite et gauche nous contiennent, avec d’un côté l’extrême tolérance à l’égard des marchés, de l’autre la même tolérance à l’égard des individus ? Ne discriminer ni l’un ni l’autre, abolir toute morale, vis-à-vis des uns, comme vis-à-vis des autres. Laisser faire. Distiller in fine un laxisme généralisé dans l’opinion publique, ou plutôt faire en sorte que la pensée, déjà confondue avec l’opinion dans la culture de masse, finisse par se décomposer dans le laxisme du dire, du faire et surtout du payer.

Quelques boulevards du pays étaient emplis hier des défilés de la Gay Pride, et des revendications politiciennes de gaillards opportunistes tels que Lang, Mélanchon ou Joly, qu’on vit le soir sur les écrans en train de revendiquer d’une seule voix l’instauration du mariage gay et celle de « l’homoparentalité ». Même Villepin (que ne ferait-il pas ?) trouve qu'après tout, si d'un côté on rend obligatoire le vote (ce mec est fou), autant autoriser de l'autre le mariage gay... (il est quand même tolérant, non ?)

Si ce curieux mariage gay peut ainsi s'inviter aussi tôt dans une  campagne présidentielle qui n’a pas même débuté, c’est parce qu’il ménage la possibilité d'un débat d’opinions aussi formidable que simpliste, à la maison comme au bistrot : ce mariage-là, qui qu’on soit, on ne peut-être que pour ou contre. Au-delà des intérêts réels qui pourraient être ceux des homosexuel(le)s, et des avis de tous, hétéros et homos sur cette question, on comprend dès lors pourquoi c'est la question qui intéresse les politiciens de tous crins : jetée en pâture sur la place publique, elle devient (parmi d’autres) une question faiseuse d’opinions. Et donc, éventuellement, de clivages et de votes.

Il fut un temps où l'idée même, laissant de glace, n’aurait pas même été posée. C’était celui de Wilde et de Gide, de Proust et de Cocteau, de Coco Chanel, de Joséphine Baker et d’Arletty. Me demande ce que l’un ou l’une de ceux-là aurait pensé de la question, eux qui avaient décidé soit d’abolir la norme, soit de s’en tenir à l’écart. L’idée d’un mariage homosexuel leur aurait sans doute fait horreur, comme par ailleurs pouvait leur faire horreur l’uniforme ou la soutane, en tant qu’emblèmes divers d’un ordre établi volontiers honni. Mais on était, alors, d’un autre courant d'opinion, au sens où l'on parle aussi de courant d'air. On ne cherchait pas en ce temps là à ce que tout le monde soit égal, pareil, normal. 

Aujourd’hui, triomphe cette double et étrange revendication de la part des homosexuels de la Gay Pride (revendication collective, relayée par des associations, des artistes, des médias et tout à la fin de la chaine par des hommes politiques, notez-bien !) : revendiquer une identité différente et être semblable à la norme. On a déjà beaucoup glosé sur ce paradoxe : si je le relève, c’est parce qu’il est essentiel dans un dispositif qui fait du gay de base, comme de l’immigré de service ou de tout indigné une sorte d’agent de la non-discrimination, à une époque où le mariage gay intéresse -en tant que vecteur de propagande- et la gauche et la droite.

Car l’une comme l’autre ont trouvé dans la non-discrimination le lieu commun idéal pour amalgamer dans un même à peu près tout ce qui sert à définir par ailleurs leur res publica, cet « idéal républicain » dont ils ont la bouche pleine. No Pasaran est devenu pour eux No Discrimination : Touche pas à mon gay, variante de Touche pas à mon pote, et bientôt de Touche pas à tout ce qui pourra servir à diluer l’exigence intellectuelle et la connaissance des histoires de chacun dans la soupe de ce nouveau tabou dogmatique où droit à la norme et droit à la différence se monnayent. Tout ça parce que l’ordre mondial qui a choisi d’imposer partout le libre échange a aussi partout besoin de ne plus discriminer (du moins en apparences et en formules toutes faites) les individus ; on vend donc de tout à tous, y compris le mariage aux homos qui seront bientôt prêts à se damner pour obtenir ce dont il y a cinquante ans, aucun n’aurait voulu : libéraux et libertaires les acclament au sommet de la pyramide, Lang et Villepin feignent l'accord, Borloo et Melenchon. 

Il faut saluer là l’efficacité diabolique de la bonne vieille propagande : le mariage gay et l’adoration de l’immigré n’étant que deux maillons d’un même chaîne, ou comment manipuler les gens en démocratie ; car mon vieux, si tu es contre le mariage gay, tu es aussi contre le respect dû aux immigrés, tu es contre l’Europe, l’euro et la mondialisation, tu es contre le nucléaire, la fête de la musique, et la légalisation du cannabis, contre les Indignés qui s’indignent ; tu es de surcroît forcément catholique, et tu votes au mieux Boutin, au pire Le Pen ou Sarkozy. Tu es donc forcément un pauvre con. Tu ne me crois pas ? Allume une télé et regarde…

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17:32 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (15) | | |

mardi, 14 juin 2011

La gôche Péhesse

J’entends Elisabeth Guigou déclarer ce matin sur une chaine de télé qu’elle soutiendra Martine Aubry, si cette dernière se présente, parce qu’elle :

·         A le sens de l’amitié

·         A su rassembler le PS  et, dit-elle en clignant de l’œil, ce n’était pas facile.

·         Saura rassembler la gauche

·         Saura parler aux Français

 

aubry,guigou,PS,politique

C’est tout ?  C’est tout.

Martine parlera. Elle parle déjà. Comme tous les siens, elle sait que la politique, c’est un discours : J'en veux pour preuve celui de Villepin, sur une autre chaîne, face à Bourdin : "Sarkozy ne parle pas suffisamment aux Français. On a besoin d'une parole". Mais qu'ont-ils, tous, à croire qu'on a besoin de bouffer leur verbe ? 

Martine serait donc une bonne maman républicaine. Après Tonton le lettré, Maman, la parleuse.  Le socialisme deuxième ou troisième génération, plébiscité avec humour par Chirac, serait ainsi de déclamer de bons principes à longueur de plateaux télé, de colonnes de journaux, jouer la messe laïque, blablater. Je connais des gens, encore juste assez mais pas plus que ça touchés par les effets de la crise européenne et mondiale, encore capables de ne se contenter que de symboles, à qui ça suffira. Une image de soi convenable, rassurante, professorale ; un anti-discours contraire à celui que la presse et les medias ont construit au président Sarkozy. Et hop, je pose mon cul sur le strapontin. Le tour est joué. Relire Bernays.

Et après ?

Ma dentiste me rappelait un jour que c’est elle qui, ministre du travail, avait, dans un éclair de réalisme économique, supprimé le remboursement des soins des gencives.

La gôche  Aubry, la gôche Péhesse, quoi, tout un programme

08:12 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : aubry, politique | | |

jeudi, 05 mai 2011

Capital santé

Que la santé soit un capital, le prolétaire vivant parmi les autres à la force de ses seuls bras l’a toujours su ; ainsi, bien conscient de la portée économique d’un physique en pleine forme, s’est-on s’est toujours souhaité de concert la bonne année de pair avec  la bonne santé. Un proverbe malicieux que je relève dans un recueil de sagesse populaire le dit clairement : « Soigne ta peau, te la porteras longtemps »

Mais le rapport à la peau, c'est-à-dire à la santé, demeurait encore un rapport à soi, c'est-à-dire à l’être. On était en bonne santé. Ce qui a changé avec le capital santé, prolongement des chèques restaurant ou vacances, c’est que la santé est dorénavant un avoir qui s’entretient au même titre qu’un parc immobilier, un portefeuille d’actions ou un bon héritage. Comme l'expression, mon corps en bonne santé devient un lieu commun de l'époque, le capital-santé faisant partie du package indispensable à toute existence heureuse en social-démocratie globalisée.

Capital-santé : La notion s’est propagée durant ces foutues années 80, aussi incongrue à notre patrimoine culturelle qu’étrangère à notre patrimoine linguistique. Dans la forme, la suppression de la préposition entre le terme santé et le terme capital est une construction issue du marketing. Elle  fleurait bon son consumérisme ambiant et son modernisme dynamique, tout comme  les prix-fêtes, les cadeaux-fidélité, la ligne-visage, la laque-double action, la poudre spéciale-textiles délicats, l’assurance tous risques   Mais l’expression n’est pas seulement dissonante à l’oreille, elle est aussi lourde de trivialité en assimilant la bonne forme à une valeur capitalisable, autrement dit à un bien, une marchandise. Derrière la capital-santé se cache l’ombre massive de l’OMS et de ses recommandations : dans cette perspective, il ne suffit plus d’être bien dans sa peau pour soi-même, la santé devient une sorte de devoir (un de plus) à l’égard de la société de consommation : manger équilibré, limiter le sucre, surveiller le cholestérol, dépister le cancer à temps, ne pas fumer, ne pas boire et rester svelte… Bref, traiter son corps comme une partie de l’espace public, et non plus comme le lieu même de l’intime.

Au regard de la norme ainsi constituée avec sa cohorte de Diafoirus (pharmaciens, diététiciens, conseillers et spécialistes de tous crins), le « comportement sanitaire » de chacun d’entre nous devient conforme ou non à ce qu’on peut attendre d’un bon citoyen, au même titre qu’un comportement économique ou social.  

Parlera-t-on un jour de délinquant sanitaire ?

Les plus imprévoyants, déjà, les plus irresponsables (les pauvres et les incultes) qui perdent ou dissipent leur capital pour finir poivrots, tabagiques ou obèses sont de plus en plus mis à l’index. A l’autre bout de la table, on montre en exemple ceux qui savent rester sain en faisant fructifier leur capital, de liftings en transfusions sanguines complètes, de liposuccions en greffes d’organes : En matière de santé comme en tout, on ne fait crédit qu’aux riches. 

politique,capital-santé,société,


10:46 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : politique, capital-santé, société | | |

vendredi, 29 avril 2011

The show must go on

Un mariage royal en cours à Londres , une future béatification en préparation à Rome, les télés du monde sont en rut, ici, c'est la saison des impôts...   Parce que the show must go on…



JEAN MINEUR PUBLICITE BALZAC 001 GENERIQUE... par kirivalse

13:09 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : kate, william, jean paul ii, actualité, mariage, béatification, londres, rome | | |

jeudi, 28 avril 2011

Du fait sublime au fait divers

J’étais toujours surpris par la façon dont ma grand-mère s’exclamait en lisant le journal, lorsqu’elle y rencontrait un fait-divers particulièrement dramatique : « Quelle horreur ! », lançait-elle, avant de reposer les feuilles sur ses genoux et de laisser son regard humide et bleu se perdre dans le vide, en s’abimant dans une muette méditation sur la méchanceté de certains hommes.

L’affaire Troppmann (l'horrible massacre de Pantin), le 21 novembre 1869, avaient lancé la roue de la fortune de Moïse Millaud : une mère, déjà, et ses cinq enfants. Tant d’autres, depuis, de Violette Nozière en Dominici, de Landru en Grégory,  que la presse, toujours, présentait comme une tragique exception, avec des surenchères de vocabulaire, d’images, de révélations, sans compter les adaptations littéraires ou cinématographiques à la clé.

Pantin_murder_victims.jpg

les victimes de Troppmann

Dans la société du spectacle, le fait divers a perdu ce caractère exceptionnel. Le meurtre, qui n’y apparait qu’à titre d’image – une image comme une autre –, n’est plus vraiment érigé dans sa dimension monstrueuse ni commenté comme une exception cathartique. Il se donne à voir plutôt comme un événement in fine comparable à un autre. L’image l’a inscrit dans l’ordre du réel et du quotidien : En bref, dit le speaker... Et on passe à autre chose.

Dans ce panier ménager d’affaires en tous genres, le fait divers est devenu une sorte d’événement constitutif des rouages du vaste monde, un fait de société, au même titre que le tabagisme ou le chômage, qu’on doit par temps de crise pouvoir expliquer par quelque dérèglement du système ou de l’individu ; il n’a plus de signification propre et individuelle : tuer sa famille, tirer sur des inconnus, se suicider en public, autant d’actes jadis transgressifs devenus peu à peu les ingrédients du show sur lequel la norme de l’information offre à méditer. Méditer ? Voire ! 

Pourquoi nos regards humides et bleus s’attarderaient-ils trop longtemps sur l’écran ?  S’exclamer, comme le faisait jadis ma grand-mère, « quelle horreur !» n’est depuis longtemps plus de mise devant ces meurtres « objectivés » par ceux qui nous informent de leur existence sans jamais plus ni les raconter, ni les juger, ni les mythifier.

En 1985, le « forcément sublime » de Marguerite Duras fut une formule crépusculaire.

Nous avons quitté la saison de l’horreur ou du sublime pour passer à l’ère de l’insignifiance et de la platitude. Trop de divers a tué le sublime. Là où s’exprimaient indignation et réprobation devant l’étrangeté des crimes, ne sourd qu’une angoisse diluée et intrinsèque devant leur inquiétante familiarité : le criminel aussi a cessé d'être un sujet. N’en déplaise à Dostoïevski.  Comme tout un chacun, il n'est plus qu’un écart par rapport à une norme. Les rotatives du fantasme ont cessé de tourner : C’est à ce prix que la société de l'information subsiste.

mercredi, 27 avril 2011

De l'enquête, du témoignage, de la fiction véritable

J’évoquais dans un billet récent le fait que les faits divers, si sanglants, si sordides, si spectaculaires fussent-ils,  ne donnaient plus lieu à de grandes passions populaires et éveillaient de moins en moins la fibre des romanciers, noyés, submergés que nous étions sous de plus amples catastrophes (séismes, éruptions de volcans, tsunamis…) de mois en mois et d’années en années. Pas de quoi réveiller un Simenon, affirmais-je péremptoirement à propos  d’une affaire récente. Le drame nantais qui défraye non plus la chronique, mais les pages Google, me donne aujourd’hui tort.

J’aurais d’ailleurs dû me rappeler que l’un des billets de ce blog les plus régulièrement lu depuis mai 2009- au point qu’il figure de mois en mois et jusqu’à ce jour dans le tiercé gagnant des pages visitées -,  est précisément un « nouvelle » écrite à partir d’un fait divers atroce commis à Lyon Vaise et titré La tête dans le miroir.

A première vue, ce qui attira une majorité de gens vers l’assassinat d’Agnès Dupont de Ligonnès et de ses quatre enfants, fut tout d’abord cette photo qu’on vit partout ;  les visages souriants, sympathiques, on ne peut plus normaux  a priori, d’un père et une mère de famille entourés de leurs quatre enfants : cette affaire nous plonge dans ce qui, en surface, parait donc tout sauf dramatique. Ce genre de portraits qu’on découvre sur les commodes et les tables de nuit, que Maigret considère un instant tout en tirant sur sa pipe, puis repose dans un soupir en se disant qu’il aura du pain sur les planche. Des gens ordinaires. De quoi activer les turbines du fantasme.

Il y a peut-être aussi ce nom, qui, au patronyme le plus banal (Dupont) associe un parfum non seulement aristocratique, mais aussi terriblement vieille France et franchement  romanesque (De Ligonnès). Si l’on en croit le témoignage d’une grande tante du père en fuite : «Nous sommes une vieille famille aristocratique pratiquante, tout d'abord installée en Ardèche puis en Lozère. Sophie de Lamartine, la sœur du poète, a notamment épousé un Ligonnès et un Ligonnès est devenu évêque de Rodez. Le vrai patronyme de notre famille qui est en fait Du Pont de Mars de Ligonnès a été changé à la suite d'une erreur dans l'état civil que personne n'a cherché à rectifier. Avec la disparition des trois garçons d'Agnès, ce nom va s'éteindre. » 

Le public est donc partagé entre deux impressions à la fois, comme l’a souligné une enseignante dans le cortège de la marche blanche ; celle « que ça peut arriver à tout le monde », mais le sentiment que si ça arrive à ces gens précisément, il doit y avoir une raison cachée.

Alors on la cherche.

On la recherche d’autant plus que tout l’arsenal des affaires les plus romanesques se retrouvent rassemblé en celle-ci : les leçons de tir, la rumeur d’un agent secret, les découvertes macabres sous la terrasse, les sacs de chaux, une double vie avec une maîtresse à Asnières, les comptes opaques, les dettes multiples, les héritages dilapidés, et surtout la cavale du meurtrier présumé vers le Sud, cavale classique et d’autant plus frappante qu’elle entraîne les enquêteurs  d’une suite prestige à 220 euros dans une auberge du Pontet  dans le Vaucluse à une chambre de formule1 à Roquebrune sur Argens, et finalement un parking et une voiture abandonnée, et puis plus rien, rien  malgré tous les efforts d’Interpol…

Le romanesque serait-il de retour ?

Entrent alors en scène les « internautes ». Qui sont-ils ?

Des gens comme vous et moi qui soudain s’improvisent détectives, essaiment la toile, ouvrent des pages Facebook, exhument des commentaires sur des forums. Des investigateurs anonymes à la façon XXIème siècle, qui n’écriront jamais aucun roman, et pour qui Xavier Dupont de Ligonnès ne deviendra jamais un personnage, mais restera, si monstrueuse soit-elle, une personne.

Et c’est alors qu’on apprend que ce Xavier Dupont de Ligonnès, sous divers pseudos (Chevy, Ligo) fréquentait il y a peu encore un site catholique, sur lequel il déclarait avoir perdu la foi. On survole alors quelques commentaires : Etrange impression, quand on  découvre, sous la plume de cet « homme le plus recherché de France » (disent les journaux), des dissertations sur la nature des anges, l’âme des animaux, la conscience du temps, la date véritable de la création du monde, et la transformation inexplicable de Lucifer en Satan. Voilà qu’on glisse tout à coup d’un climat à la Simenon, provincial et français, vers une ambiance à la Dostoïevski, à  la tonalité plus sombre, plus inquiétante, presque métaphysique comme dans les pages du « Grand Inquisiteur » des Frères Karamazov. Le fait-divers et ses journalistes semblent loin.

Le romancier parviendra-t-il à entrer en scène ?

Trait d’époque, il faudrait que les choses aillent moins vite, et que la partition s’écrive à moins de mains. Un grand quotidien, qui a retrouvé un ami d’enfance de l’assassin en cavale titre déjà : « une jeunesse plus fêtarde que bigote ». Les témoignages affluent. Trop, disent les enquêteurs, qui n’arrivent plus à avancer.

Et puis il y a l’émotion.

Bien que tous ces éléments soient nimbés d’irréel, il y a ces lieux, ces visages, ces voisins, ces copains, ces fleurs, la douleur, ce réel. C’est une histoire vraie, comme on dit. Si compacte dans l’horreur soit-elle, elle appartient à des gens en propre et en privé. C’est le dernier rempart contre la fiction.

Sans doute retrouvera-t-on Xavier Dupont de Ligonnès un de ces jours, à moins qu’il ne se soit déjà donné la mort dans quelque coin du Sud. Ce qui est sûr, c'est que l'histoire aura déjà été vécue et interprétée par des milliers de gens, avant même que la fiction n'ait le temps de la raconter. Son pouvoir d'évocation romanesque aura ainsi été épuisé, dilapidé, consommé et vidé de son sens, avant même de s'écrire. D'aucuns pourront toujours, certes, se risquer à en faire des enquêtes, des témoignages, des films. Il faudra alors coller au réel. Le suivre. Mais s'en inspirer pour un roman...

Cette extinction est peut-être ce que cette affaire dit de plus tragique sur le peu de part que notre époque et ses realities shows spectaculairescontrairement à d'autres, prend la précaution de laisser de soi à l'imaginaire littéraire. 

10:50 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : littérature, fait-divers, dupont de ligonnes | | |