vendredi, 03 mai 2013
Cinq euros
Alors que le fonctionnement délétère de la zone euro est de plus en plus apparent, la BCE édite une nouvelle série et commence par la plus petite valeur, le Cinq euros. Pas envie de m’étendre sur une analyse des signifiants du billet, qui n’a pas plus de corps et de chair que le dix euros ICI commenté, et ne mérite pas plus de littérature, avec sa couleur de fond de marécage et ses portiques ridicules. Un détail seulement, la présence dans le filigrane non pas d’un homme, mais de la déesse Athéna : on le sait, si les humains ne figurent pas sur les euros, c’est parce qu’on ne veut privilégier aucune nation sur une autre. Imagine-t-on, avec une déesse (pas n’importe laquelle, celle de la démocratie, c’est risible ! ) étouffer les controverses ? La BCE et la commission s’autoproclament démocratiques, un comble !
On comprend, devant leurs œuvres, par quel processus l’Empire romain a fabriqué ses idoles et ses dieux. Les maîtres de l'eurozone devraient malgré tout relire saint-Augustin :
« C’est à ce moment-là que, sous le coup de la grande peur, les Romains se précipitèrent sur des remèdes sans effet et qui prêtent à rire (…) Mais de la République à l’Empire, les dieux n’ont pu empêcher une guerre civile. (Augustin, La Cité de Dieu, livre II)
07:03 Publié dans Les Anciens Francs | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : cinq euros, eurozone, monnaie, billets français, sortie de l'euro, politique, fiance, magouilles, dette souveraine, crise de l'euro |
mardi, 03 janvier 2012
La mer pour vingt balles
De 1914 à 1918 disparurent de nombreux jeunes gens alors en pleine force l'âge : Charles Péguy au front, Guillaume Apollinaire au retour, de la grippe espagnole. On cite aussi souvent le nom d'Alain Fournier. Ces disparitions ont éclipsé celles d'autres gloires nationales, plus âgées. Parmi elles, Claude Debussy, emporté par un cancer, à 56 ans. Un musicen de génie qui a un front de chien indochinois, l'horreur de son prochain, un regard de feu et la voix légèrement enchifrenée : C'est ainsi que le dépeignit Léon Daudet dans ses Salons et Journaux, avant de rajouter qu'il se régalait d'un oeuf pas trop cuit agrémenté d'un petit morceau de foie ou de rognon au jus.
Paul Jean Toulet, qui se déclarait ami comme cochon avec l'auteur du Prélude, entretint avec lui une correspondance qui s'étala sur 16 années. Paul Jean Toulet était l'un de ceux qui, au soir du 30 avril 1902, n'avait pas hurlé son déplaisir ni crié : "Nous ne sommes pas heureux non plus!" lors de la création de Pelléas et Melisande. A Toulet, Debussy confiait donc qu'il était "une des rares personnes dont j'aime à recevoir des nouvelles". Cette correspondance est emplie des petites prévenances qui faisaient alors le charme des amitiés durables. On y parle souvent de nourriture : "Venez diner sans crainte demain, il y a une cuisinière qui évidemment n'est pas la petite nièce de Brillat Savarin, mais elle fait ce qu'elle peut"
Le peintre Marcel Baschet, qui réalisa en 1884 le portrait de l'artiste (on peut admirer le tableau au musée d'Orsay) ne se doutait pas qu'un jour, une reproduction à l'identique en serait tirée à des milliers d'exemplaires pour finir dans la poche de millions de Français. Pour quelle raison un Debussy valait-il deux Berlioz ? Cela reste un mystère que la Banque de France gardera sans doute bien bouclé dans ses coffres. Imprimé en 1980, le Debussy fut livré aux Français avec la gauche au pouvoir, Mitterand à l'Elysée et une rose au Panthéon, en 1981. Curieux destin, pour un farouche nationaliste, qui se fit appeler Claude de France. Comme le Quentin de la Tour, il fut conçu par Taurelle. On découvre le musicien devant une mer et des récifs sur une face du billet. Il n'y avait pas eu une telle valeur faciale depuis 1950, date du retrait du Vingt francs pécheur.
07:36 | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : debussy, la mer, billets français, euros, léon jusseaume, société, crise de l'euro, actualité, politique, musique, économie |