dimanche, 31 janvier 2016
Contrition
On a souvent eu l’occasion de dénoncer ici-même la religiosité républicaine avec son credo de « valeurs humanistes », ses processions & rassemblements de gueux endeuillés ou indignés, ses lumignons tremblotants pieusement déposés au pied de statues d’allégories, ses somptueux palais historiques peuplés d’évêques aussi insignifiants que lénifiants qu’ils fussent mâles ou femelles, son Panthéon de faux-prophètes et son calendrier qui, de Conseil des ministres en réceptions onéreuses de chefs d’Etat, de propagande télévisée en grandes messes électorales, organise imperturbablement sa liturgie de 4’sous. Une religion creuse, sans dieu, sans transcendance, sans amour, mais dont l’entretien coûte aux contribuables le prix d’au moins quatre ou cinq clergés pour un spectacle aussi indigne que inadapté à force d’avoir trahi sa légende initiale.
A cette pantomime lugubre [et au sens propre, sacrilège] il manquait la contrition : avec (parmi tant d’autres) le livre de Sarkozy, c’est chose faite : « Je confesse à la bienheureuse France, à la Sainte Opinion et au Peuple Tout-Puissant mes erreurs et mes fautes, en quête d’absolution que je me trouve pour une nouvelle élection... » Cette culture de l’excuse, comme l'appellent les commentateurs les plus originaux de nos ondes, nous vient en droit fil de l’Amérique protestante. Elle connut sa plus hilarante manifestation avec le président Clinton confessant publiquement la trahison de sa blonde épouse, que ce pays ridiculement magnanime s’apprête à élire à sa place quelques mandats plus tard dans un grand élan de charité paritaire et démocratique.
La reconnaissance de ses péchés demeure, dans le catholicisme romain, un acte de piété incontournable d’autant plus difficile à réaliser que nous sommes tous viscéralement soudés au péché. Nous ne connaissons même en général que lui, pour être nés dedans, n’avoir fréquenté, aimé, admiré que des pécheurs, avoir sans cesse confondu ses routes avec celles du salut, encouragé en cela par tous ceux qui nous ont précédés et dont l’histoire se souvient dans le grand livre de ses mensonges. Nous aimons tellement le péché que, pour avoir accès au pardon, nous avons besoin de Quelqu’un qui non seulement ne l’aime pas, mais qui n’ait jamais été en contact avec lui. Ainsi, lorsque Jésus vient chercher Pierre dans sa barque, celui-ci tombe à genoux devant Lui et, dans un mouvement contraire à celui de son agenouillement, s’écrie : « Seigneur, éloigne-toi de moi parce que je suis un homme pécheur.» Viens et fuis… du fait que je te reconnais, je me sens indigne de toi et de ta grâce sanctifiante. Paradoxe du pécheur que Seule la nature aimante du Père peut lever.
C’est pourquoi toute véritable réconciliation ne demeure possible que par la miséricorde et dans la tendresse instituées par le Dieu trinitaire : un Père pardonnant, au nom des souffrances endurées par son Fils Unique, le pécheur soudain conscient de sa faute, grâce à l’opération du Saint Esprit. Parce que la contrition nait dans la douleur d’avoir offensé Dieu, cette douleur doit devenir plus intense que notre attachement au péché : un tel renversement (une telle conversion) n’est possible que par la conscience (que l’Eglise appelle surnaturelle) de la Bonté infinie de Dieu, de son Amour pour les hommes, et de Sa Profonde aversion pour le péché.
Je veux dire par là que toute contrition qui ignorerait cette douleur secrète (cette conversion) ne tiendrait que de la parodie : on voit ainsi comment tous les rites de cette religion d’inspiration maçonnique nous font exister dans une sacralité fausse qui n’est qu’une caricature de la vraie religion à laquelle elle emprunte en les vidant de sens tous ses sacrements. Mais au lieu de les appliquer au Bien Commun vertical qui est Dieu, elle ne peut les appliquer qu’à un Bien commun horizontal et prosaïque (res publica). Il y aurait certes quelque vertu romaine à demeurer de bons républicains si nous étions guidés par des chefs politiques honorables, valeureux et efficaces. Mais, fort éloignés hélas de ces augustes modèles, empêtrés que nous sommes dans une république fallacieuse destinée à n’être qu’une société du spectacle, cette religiosité laïque nous condamne, pour paraphraser Debord, à la séparation achevée d’avec toute vie authentique… On appelle cela l'égalité.
En glissant son bulletin d’absolution dans l’urne, l’électeur confesseur décidera donc en 2017 quelle est à ses yeux la plus grande faute morale: traiter un citoyen-électeur de pauvr'con ou bien installer sa gourgandine à Élysée avec la prétention d’en faire « la première dame de France « pour la remercier brutalement «de ce moment» quelques mois plus tard. A moins que ses lointains maîtres ne lui demandent de statuer sur le sort d’un escroc plus ancien, septuagénaire bordelais expert en fausses factures et emplois fictifs, mais repenti lui aussi dans son costume propret de sage et honnête troglodyte.
Dans le confessionnal laïc
14:13 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : république, laïcité, mea culpa, contrition, sarkozy, france, peuple, élections, repentance, clinton, jésus, pierre, pêche miraculeuse, sacrement, saint luc, debord, montesquieu, troglodyte |
Commentaires
Écrit par : nauher | dimanche, 31 janvier 2016
Pour finir de dézinguer la souveraineté du pays, y'aura pas mieux....
Écrit par : solko | dimanche, 31 janvier 2016
Bien sûr que "les gens" voteront Juppé, c'est-à-dire qu'ils mettront au pinacle, sans doute, un "providentiel" qu'ils avaient déjà foutu à la poubelle.
Franchement, je le pense vraiment, je crois que le seul parti qui vaille aujourd'hui est celui-ci - https://www.youtube.com/watch?v=ZrbT9e42IHA - car une colère, ça a une dignité et ces gens-là ne méritent même pas la colère de l'honnête homme.
Écrit par : bertrand | lundi, 01 février 2016
Et ces connards et connardes qui s'imaginent tous qu'on attend après leur personne comme si c'était des messies, publient des livres (dernière en date, Taubira qui, à peine à la porte, va en sortir deux coup sur coup, sans jeu de mots elle doit avoir un bon nègre ou n'a pas fait grand chose place Vendôme) squattent les medias et servent un système qui détruit peu à peu toute urbanité, culture, industrie, éducation, art, bien-être et plaisir de vivre ensemble dans ce pays ne me font plus rire.
Ni colère, ni rire, dédain, mépris véritable. Le plus difficile, sans doute. Parce que ça revient à leur laisser la place. Or, comme disait Nizan, devons nous avoir "cette naïveté" et leur "faire ce plaisir" ?
Écrit par : solko | lundi, 01 février 2016
Écrit par : Julie | samedi, 06 février 2016
Comment conciliez vous votre amour de Dieu et tous les sentiments de haine qui vous animent à l'encontre de tant et tant de personnes ?
Écrit par : Julie | samedi, 06 février 2016
Une certaine confusion entre catholicisme et gauche, oui, prétend amer les personnes derrière des actes ambigus ou des paroles trompeuses. Ce n'est pas ce que dit le Christ. Le Christ, même si sur la croix il demanda pardon à son Père en Son nom parce qu'ils "ne savent pas ce qu'ils font", traita les Juifs et les Pharisiens les plus obtus de "race de vipères".
D'autant plus que ces gouvernants abjects, Pilate et Hérode à la fois, se planquent derrière la société du spectacle qu'ils ont engendrée et déploient une propagande éhontée pour faire passer pour des personnes dignes ce qui n'est que des images malsaines et un jeu hypocrite qu'il faut sans cesse dénoncer si on aime la vérité, évidemment !
Aimer Dieu, ce n'est pas aimer n'importe quoi, n'importe qui, au nom de ces fameuses "vertus chrétiennes devenues folles", comme le dit Zemmour.
Mais dénoncer artifices et faux-semblants, c'est aussi tenter de barrer la route à tout ce qui n'est pas le Christ, finalement, et qui est Satan parce que lentement cela contribue à déchristianiser la société et perdre les hommes sans culture ni religion.
Écrit par : Solko | samedi, 06 février 2016
Même si vous faites une distinction entre les êtres et leurs actes, vos paroles, souvent, stigmatisent les personnes, et souvent avec une dureté et des arguments qui m'ont poussée à employer le terme de "haine".
Quand vous parlez du physique, "le bouffi", par exemple, il ne s'agit pas d'idées ni d'actes. Vous avez un jour défini Mitterrand par "le prostateux" terme qui m'a blessée pour une raison que je n'ai pas à exprimer ici, mais ce terme ne s'appliquait pas aux actes.
Il me vient parfois à l'esprit que votre idée de la religion ressemble à celle d'un personnage historique de jadis qui proposait de tuer tout le monde, en laissant à Dieu le soin de faire le ménage.
Je suis athée, je vous l'ai déjà dit, mais je discute souvent avec des personnes croyantes, et nous avons mon mari et moi un très bon ami prêtre. Nous parlons souvent et pour lui, Dieu est amour.
Écrit par : Julie | dimanche, 07 février 2016
Venons-en à « prostateux ». Ceux qui me connaissent savent que je ne stigmatiserai jamais un individu atteint d’un cancer. Dans ce cas spécifique, le mot veut désigner le mensonge d’Etat de la crapule présidentielle chez qui ce cancer s’était développé ; mensonge grâce auquel ce dernier a gagné sa ré-élection, ré-élection néfaste qui a entraîné le pays dans un second septennat à mon sens catastrophique, puisqu'il y laissa sa souveraineté, ce dont il n'est toujours pas remis. J’en ai souvent parlé ici. Mensonge d’état, mensonge public que je cherche à désigner ici stylistiquement par ce néologisme qui dépasse largement la simple personne de Mitterrand pour désigner la fonction (avec laquelle lui-même s'était largement confondu, il faut le rappeler pour notre malheur) . Effet de style par lequel s'exprime un point de vue, nullement un discours de vérité car on peut ne pas être d'accord avec cela, comme tous les europhiles.
Dieu est amour, certes. Mais Dieu est Dieu et nous sommes les hommes.
Il ne s'agit pas non plus de tuer tout le monde (pas d'analogies fausses), mais de dénoncer l'outrecuidance des Puissants dont les actes malicieux, les œuvres et les propos mauvais ne nous paraissent pas en accord avec la charité divine ou la pensée chrétienne. Rien de plus et rien de moins...
Écrit par : Solko | dimanche, 07 février 2016
Pour ce terme de prostateux, je comprends vos arguments et j'ai été choquée par ce mensonge, mais je reste persuader que ce terme était inutile. Stigmatiser la personne sans employer ce terme aurait été aussi bien. S'il avait eu une tumeur au cerveau l'auriez vous appelé la cervelle ?
Écrit par : Julie | lundi, 08 février 2016
Car Bloy, comme saint Pierre qui tire l'épée et coupe l'oreille du serviteur du grand prêtre (cf Jean - 18 - 10), tout chrétien qu'il est, n'est qu'un homme. Pierre se fait rabrouer par le Christ qui l'arrête et lui explique "qu'il doit boire le calice que le Père lui a donné", et que Pierre doit donc le laisser aller jusqu'à la Croix. Mais le Christ est le Christ et Pierre n'est que Pierre. Il n'y a qu'un Seigneur, qu'un Oint. En ces temps démocratiques, tout le monde voudrait avoir la grandeur, spécialement la gente politique qui se ridiculise particulièrement à ce petit jeu médiatique, voyez cet idiot de Hollande devant lequel Pilate fera bientôt figure de grand juste. Mais il n'y a qu'un Christ, et être chrétien, c'est avant tout l'aimer. Voilà pourquoi je préfère mille fois Léon Bloy à Emile Zola, saint Pierre au grand prêtre juif, même si du point de vue chrétien, ils sont en effet répréhensibles - et le Christ ne se prive pas de leur faire savoir.
Ravi en tout cas que cette illustre prostate nous ait permis ce bref dialogue.
Écrit par : solko | lundi, 08 février 2016
Écrit par : Sophie | mardi, 09 février 2016
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