mercredi, 05 novembre 2008
Ces lieux communs venus d'Amérique
Nous vivons dans un système qui se nourrit d'images simples et de lieux communs. Nos cervelles en sont imprégnées. Nos neurones imbibés. Ceux qui veulent prendre la mesure des lieux communs venus d'Amérique peuvent circuler sur la blogosphère en ce moment : ils en recueilleront en quelques clics un beau panier ! Cela dit, la France et l'Europe ne sont pas en reste. Ces images prémâchées et ces lieux communs rabâchés sont finalement fort commodes : agglomérés les uns aux autres, ils donnent le sentiment que le monde humain possède une cohérence, là où il n'y a que vide et réelle absurdité. Ils donnent l'impression qu'une réflexion est en cours, là où tout est tragiquement incomplet. Ils offrent l'illusion d'une histoire réelle, là où ne se trouve qu'une histoire racontée. Ils procurent aux gens le sentiment qu'ils sont une collectivité, là où il ne résident, au fond, que solitudes économique et morale. Car la force du lieu commun découle de là : asséner une vérité abrupte et sans complément aucun. Exemple : Le monde bouge : Où ? Comment ? Pourquoi ? On s'en fout. L'essentiel est que ça bouge. On en frétille de bonheur ! Le point commun le plus visible entre Sarkozy le Français et Obama l'Américain, c'est qu'ils doivent l'un et l'autre leur victoire à un véritable torrent de lieux communs déversés à coups de milliards.
Pour valider son existence, le lieu commun a certes besoin de ces foules avides et fanatisées qui, littéralement, le tètent, comme bébé au sein de l'image souriante qui rassure. Et pour fanatiser les foules, il lui faut ce système binaire qui est en train de mettre la planète entière au pas en reprenant un à un tous les symboles les plus beaux de son Histoire. En France, nous avons le PS (parti refondé à Epinay il y a déjà longtemps pour porter un président à l'Elysée) et l'UMP (parti conçu plus récemment pour en porter un autre). Là-bas, démocrates / républicains, fonctionnent pareillement. En terme de carrières politiques, de pragmatisme idéologique, pas de salut hors de ces deux systèmes commerciaux qui font travailler des milliers d'experts et vendent des marques : Sarko pouvoir d'achat, Obama lave plus blanc, etc.. Ce système a sa fonction : gérer les masses (leur vie, leurs économies, leurs espérances, leurs déplacements, leurs loisirs... ) et quoiqu'en montrent ses manifestes et ses campagnes humanitaires, il n'a aucun scrupule et aucune autre morale, sinon la loi du plus fort : le plus fort étant un point dans l'infini du fantasme de chacun, point qui oscille entre le plus riche et le plus nombreux, ou le plus beau, c'est selon. Comment s'étonner que, soumis à ce système binaire, la société vive dans un état de crise permanent : on lui annonce sans cesse du nouveau, de l'historique, du changement, et la crise ne fait évidemment que s'amplifier, le nivellement des cultures du monde ne cessant non plus de s'opérer, sous le rouleau compresseur de ce schéma que médiatisent câbles, satellites et réseaux, de l'igloo de l'esquimau jusqu'à la grotte du yogi en passant par la hutte du nomade, le duplex de centre ville, l'immeuble de banlieue, le taudis des favelas. La question au fond la plus angoissante posée par la réussite de ce système, à l'œuvre depuis déjà plusieurs décennies, au vu de ce qui se passe sur Terre est finalement la suivante : méritons-nous mieux que cela ?
En tant que personnes humaines, toute la civilisation dont nous nous prévalons les héritiers postule que oui. En tant que population, masse, peuple, je ne sais trop quel mot utiliser, le doute finit par être permis...
20:08 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (20) | Tags : obama, usa, actualité, politique, élections américaines, société |
vendredi, 31 octobre 2008
Vaudou best-seller
La justice française vient de débouter Nicolas Sarkozy, qui réclamait l'interdiction de la vente de la poupée vaudou à son effigie. Aussi incroyable que cela puisse paraître, cette poupée accompagnée de 12 aiguilles et d’un « livre de 56 pages, commercialisée depuis le 9 octobre dans les librairies et sur le net, trouve des acheteurs. Son pendant, celle de Ségolène Royal, aussi ! Cette dernière s’est empressée d’annoncer au monde entier, au nom du « sens de l’humour » (pas des affaires) qu’elle prétend avoir qu’elle n’avait pas porté plainte dans un souci de défendre le droit à la caricature, faisant sans doute implicitement référence aux débats déjà anciens sur celles de Mahomet. Là-dessus, elle se fait traitée par Dominique Paillé (UMP) de « caricature ambulante »
Tapis au fond du bois, les dirigeants de la société Tear Prod, qui a commercialisé ces deux poupées aussi laides et dérisoires l’une que l’autre, se frottent évidemment les mains. Les deux laideurs et les aiguilles qui les accompagnent se vendent comme des petits pains. Le manuel s’arrache également et se retrouve propulsé en tête des ventes de livres, par ces heureux jours de rentrée littéraire.
A part ça, la douzaine de bombes qui a explosé dans l’Assam a transformé en film d’épouvante plusieurs marchés populaires, même scénario la veille en Somalie. Le pessimisme gagne, nous dit-on, « l’économie réelle » qui serait (apprécions ici l’emploi du modalisateur) durablement touchée. La liste des pays que menacent, au Nord la récession, au Sud la famine, ne cesse de s’allonger.
Pendant ce temps, aux Etats-Unis, on est « fan » d’Obama ou « fan » de Mac Cain, et l’on s’excite dans les derniers préparatifs d’un show comme ce pays ultra dément a le don de s’en offrir, aux frais de la planète, tous les quatre ans. Au regard de cette boulimie de mégalo-débats hystériques, les déboires de nos deux poupées françaises s'en retrouvent singulièrement relativisés. L'intérêt qu'on peut accorder à leur existence n'est plus que le signe d’un amateurisme dans le mauvais goût carrément ridicule. Tout ceci ne m'inspire qu'une réflexion : qu'est-ce qui nous attend en 2012 ?
12:22 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : politique, société, vaudou, sarkozy, obama, mac cain, élections américaines |