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dimanche, 07 avril 2013

La mesure de l'information

On le sait depuis l’ingénieur Shannon, la mesure d’une information tient à son degré d’apparition dans une chaine de probabilités donnée. Comme il était statistiquement peu probable qu’un ministre du budget chargé de traquer la fraude fiscale fût lui-même un fraudeur fiscal, on dira donc que le fait qu’il en soit un ne fut une information stupéfiante que pour ceux qui croient en la vertu de leurs élus ; pour les autres (les plus nombreux, qu’on dit atteints de populisme), la corruption des élites n’est pas une information nouvelle, mais bel et bien un fait avéré depuis longtemps.(1)

Dès lors, si l’on veut cacher sa propre corruption, il convient de rétablir « l’offense à la vertu républicaine » dans son caractère de rareté initiale, qui fait d’elle (pour certains) une information exceptionnelle : ce qui revient à exagérer considérablement l’opprobre jeté sur le fauteur de troubles.  C’est la stratégie adoptée par le président, le premier ministre, le gouvernement : on comprend quel est leur intérêt.

Shannon explique aussi que ce qui tue l’information, c’est le bruit. L’affaire Cahuzac se prête à merveille à une manipulation des esprits assez grossière, mais peut-être rassurante pour le plus grand nombre : en déplaçant la question sur le terrain moral (on fait beaucoup de bruit sur ce terrain) on oublie aussi le caractère politique de l’événement. Un président permet ni plus ni moins à un escroc de diriger le Budget du pays pendant presque un an. Faute professionnelle grave qui, dans d’autres pays aurait pu soulever une procédure d’impeachment.  D’où l’intérêt, malgré les risques encourus, de substituer au tous incompétents, le tous pourris. Et de partir en croisade contre la corruption. La manœuvre semble être en train de réussir

De leur « boite à outils », les communicants du président s’apprêtent à sortir de nouveaux « éléments de langage » pour les enfants que nous sommes à leurs yeux. Après la rhétorique du « changement », ils avaient, en effet, prévu celle du « choc » Le président avait lui-même annoncé « un choc de simplification ». L’affaire Cahuzac intervenant, ils sortent donc un nouveau tour de passe-passe ; voici venu  le temps du « choc de moralisation », que tous les medias, avec une servilité tragique, ne cessent de vendre.


Ce qui peut inquiéter le citoyen, c’est que, malgré la proximité de l’élection, nous avons affaire à une équipe déjà aux abois, engluée dans une spirale qui n’est pas, contrairement à Cahuzac, celle du mensonge, mais plutôt celle de l’incompétence. Une équipe qui, de surcroit, va confondre jusqu'au bout son destin et le destin du pays (On se souvient de la prostate du président, réélu coûte que coûte en dépit de tous les reniements,un cas d'école). 

Edwy Plenel, qui monnaye avec beaucoup de subtilité le dosage de l’information et la notoriété de Médiapart, promet pour tantôt de fracassantes révélations. Si ces révélations demeurent à la mesure de ce qu’on attend d’elles, il est probable qu’on en bouffe encore et encore, du bruit (c'est-à-dire de la célébration aussi ridicule qu’intempestive de la vertu républicaine).

On murmure l'annonce d'un référendum (2) sur une question de ladite moralisation. Le moyen est grossier, ils ne reculeront devant rien pour rafistoler la confiance en berne et la légitimité en question. On se rappelera de la phrase d'Alain : "Le plus grand abus de la force est sans doute d'exiger l'assentiment" (3) Et tout ça pourquoi ? Pour masquer, quoi qu’il arrive, l’incompétence politique de l’équipe et du président au pouvoir, dont l’impopularité dans les sondages n’est plus, depuis longtemps, une information. 


(1) Il n'est pas nécessaire d'aller jusqu'à la corruption financière pour être, au sens populaire, un pourri. Dans La Trahison des Clercs, Julien Benda évoquait la corruption intellectuelle qui est amplement suffisante...

(2) Non, pas sur le mariage gay, ce ne serait pas constitutionnel paraît-il... (ah ah ah !)

(3) Alain, Nuances de l'humiliation, in Convulsions de la force, 1939

Commentaires

Ah, Roland, in cauda venenum ! Vous dressez le tableau exact de tous ces tapages honteux ( et pas si subtils que vous le dites car ils nous sont évidents et nous ne sommes pas plus subtils que la moyenne, ne nous leurrons pas non plus) et vous aboutissez à l'incompténece des socialistes.
Certes, je ne vous la dispute pas. Plus cons que ça, t'es même plus con, t'es demeuré... Mais à la question "Et tout ça pourquoi? "vous donnez une réponse partisane et partiale. Du moins à mon sens .. Car tout ça c'est parce que la classe dite politique chie dans son froc, à gauche, à droite, au centre et à l'écart. Croyez-vous sincèrement que ce Cahuzac est un brebis galeuse ? Ils en ont tous un, compte occulte quelque part, ou des propriétés déguisées ou des prises illégales d'intérêt. Tous.
Tus pourris ? Oui. Populiste mézigue ? pas le moins du monde... Trop facile.

Écrit par : Bertrand | lundi, 08 avril 2013

Tout ça n'est plus qu'une question de gestion de l'opinion.
Surenchère de publications de patrimoines depuis hier. Tout le monde se fout à poil fiscalement, et hop : (enfin, fait mine de...)
Vent de démence et de paranoïa soufflant sur beaucoup de malversations

Écrit par : solko | mardi, 09 avril 2013

Cet étalage frénétique de patrimoine et autres déclarations, est à mourir de rire. Ils viennent d'avoir affaire à un gars qui avait tout faussement déclaré et les voilà qui déclarent tous jusqu'à leurs boutons de braguette ! Guérir le mal par le mal...N'importe lequel contribuable de base sait pourtant bien que c'est en déclarant qu'il peut frauder et que seule la non-déclaration alerte les chasseurs de primes de la fiscalité.

Écrit par : Bertrand | mardi, 09 avril 2013

Ça devient assez pathétique, quand même, tout ça...

Écrit par : Sophie K. | mercredi, 10 avril 2013

C'est le moins qu'on puisse dire, en effet...

Écrit par : Bertrand | mercredi, 10 avril 2013

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