mardi, 16 novembre 2010
Que faire de l'anti-sarkozisme ?
Au surlendemain de la nomination d'un gouvernement ubuesque, qui a dû en révulser plus d'un, la question est brûlante : Que faire de l'anti-sarkozisme ?
On le sent tous plus ou moins : la « gauche » vient de s’offrir un de ces moments mémorables dont elle a le secret en rassemblant les plus improbables synergies autour de l’anti-sarkozisme mani-festif.
En réponse, la « droite » dite dure (ça m’a toujours un peu amusé, cette appellation, la droite « dure », c’est comme la gauche « généreuse », vous savez, ça n’existe pas…), s’offre un gouvernement où pratiquer sans intrus l’entre-soi le plus restreint autour des petits-fours et des voitures de fonction. Un couple, oui même un couple y siégera (on avait Mam…, voilà Pom…).
C'est-à-dire que les chevaux sont dans l'ordre de bataille le plus caricatural qui soit, chacun bien à sa place, avec l’inénarrable « tragédie du centre » et les fols espoirs des extrêmes (droite et gauche) de part et d’autre de la photo de famille ; ce scénario bien en place, l’élection de 2012 se prépare. Les militants de tous bords rebandent un peu en pensant aux distributions de tracts (on dit flyers, à présent) sur les marchés et les parties de collage d'affiches.
Dans un tel contexte, que faire de Sarkozy, « le problème de la France » ? Même le sieur de Villepin, toujours aussi grotesque que lyrique, se le demande ! Sans doute n'est-il pas le seul parmi les gens de la « majorité ».
Que faire face à Sarkozy, se demandent de leur côté les gens de « gauche », la mine contrite et le ton faussement accablé… dans les deux cas, le même individu, celui qu’il faut déloger, jubile, au centre du dispositif.
J’entends aussi dire ça et là que le problème seraient les électeurs de Sarkozy. Le problème n’est-il pas plutôt le système qui, en amont, n’a laissé aux électeurs que le sinistre choix entre un Sarkozy et une Royal , deux sous-traitants, autrement dit ? Ce système qui finalement ne laisse au peuple que le choix d’entériner ses propres options…. Ou de s'abstenir.
Si le problème est bien ce système qui a mis face à face Royal et Sarkozy, et qui va placer face à face des gens du même acabit en 2012, eh bien nous sommes, en ce moment où se déterminent les figures autour desquelles se jouera « l’élection » de 2012 , au cœur même du problème ; au cœur même du problème, un dispositif vicié, mais qui arrange bien du monde, faute de mieux : l’anti-sarkozisme comme antidote du sarkozisme…
Cette radicalisation soudaine de la gauche (mouvement sociaux) et de la droite (nomination du gouvernement), pour cela, sent l’arnaque à plein tube : nous savons bien où sont les véritables décideurs de la réforme des retraites, par exemple. A quoi sert cette soudaine fausse passion, montée en mayonnaise à partir de juillet, sinon à rameuter les troupes vers les urnes en renflammant la vieille colère des électeurs blasés, - de quelque bord qu’ils soient ?
Alors que nous savons bien, tous, que les vrais centres de pouvoir sont ailleurs et que tant que nous serons ainsi divertis sur le plan national, nous serons d'autant plus désarmés pour les contester au niveau global qui est désormais le leur…
Dans un tel contexte, que faire de cet anti-sarkozisme qui est le drapeau le plus efficace qu’on a trouvé un peu partout pour rendre furieux les taureaux dans l’arène ? Le dédaigner du même dédain que le sarkozisme. Je me demande si la fonction des politiques français n'est pas d'attirer à eux les passions politiques afin de détourner la contestation des véritables centres décisionnels : un peu comme jadis, les premiers ministres servaient de fusibles aux présidents, les présidents ne sont-ils pas en train de servir de fusibles à ces instances de la gouvernance européenne et mondiale (bruxelles, lobbies, FMI, OCDE...) ? Président d'une nation européenne, premier ministre de l'Europe...
C'est le moment de tenter, si c’est encore temps, de réfléchir à ces deux questions :
Une contestation coordonnée sur le plan européen est-elle possible pour sortir des contestations nationales aussi épuisantes que stériles - on vient d'en avoir une nouvelle fois la preuve - ou bien sommes-nous condamnés à ne choisir éternellement que la couleur du costume (ou de la jupe) du sous-préfet élyséen et de ses courtisans zélés ?
Comment peut-on organiser une contestation globalisée dans un monde dont l'économie est globalisée ?
Plus que jamais, nous avons besoin de recul, de distance, de réflexion, de lectures.
Et plus que jamais, on tente de nous jeter dans ce que la passion politique produit de plus inculte, de plus hystérique et de plus bête : après la croisade du sarkozisme, la croisade de l'anti-sarkozisme...
01:10 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : sarkozy, politique, remaniement, ps, société, ump |
Commentaires
L'antisarkozysme s'il n'est pas adossé à une réflexion plus large est en effet dérisoire. Cependant, je préfère un valet de gauche à un valet de droite. On peut espérer qu'il soit un peu moins arrogant et ça allège un peu l'ambiance. Pour le reste, on ne peut qu'être pessimiste; Il faudrait en effet pulvériser un système absurde. Mais comment le faire sans violence et sans haine, juste pour rétablir des conditions honorables de vie de tous sur une petite planète qui s'asphyxie sous l'invasion d'une espèce terriblement prédatrice et stupidement convaincue de sa supériorité sur tous les registres du vivant. Au moins ne pas être dupe, ne pas s'aveugler. Vous avez raison, reflexion, recul, lectures mais aussi recherche d'organisation collective de la société.
Écrit par : Zoë Lucider | mercredi, 17 novembre 2010
@ Zoé : face au désastre contemporain, je n'en suis pour ma part plus au stade des préférences entre Pierre ou Paul. Une recherche d'organisation collective, oui, tout dépend ce qu'on entend par organisation.
Écrit par : solko | mercredi, 17 novembre 2010
Je découvre vos textes avec un autre regard
Je les trouve intelligents jusqu'à maintenant
(ne le prenez pas mal)
Ils me font réfléchir, creuser, voir changer d'avis sur certaines opinions que j'avais pu me faire
une anti-sarkozyste ultra-primaire
(C'est parce que ça me fait du bien)
Val qui passe et pense
Écrit par : val | dimanche, 27 février 2011
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