Des nouvelles de l'Hôtel-Dieu

 

C’est à mon sens l’argument le plus spécieux, le plus asséné et peut-être le plus performant du « nouveau monde » : le changement est bon. Cette idée, proprement libérale puisque c’est dans le changement que tout marché fait son nid, rencontre aussi dans l’esprit du plus grand nombre je ne sais quelle idée de jeunesse qui la rend sympathique et a priori admissible, quelle que soit la nature du changement envisagé.

Qu’en est-il, dans un tel contexte du patrimoine ? Il est question, à Lyon, de construire un musée et un grand stade qui pour l’instant ne sont, ni l’un ni l’autre, sortis de terre. Et en même temps, il est question d’assigner au vieil Hôtel-Dieu un usage nouveau, hôtel de luxe, usage en contre sens complet, c’est le moins qu’on puisse dire, avec sa fonction emblématique et  séculaire. Et l’idée semble séduire de nombreuses personnes qui vous disent naïvement : mais qu’est-ce que vous avez contre le changement ?

J’ai qu’au nom de ce changement, un bâtiment qui appartient de fait non seulement à l’histoire de la ville, mais par conséquent à chacun des lyonnais, entre symboliquement dans une sphère dont il doit être maintenu à l’écart : celle du privé. J'ai qu'on brade une mémoire, un symbole, une culture. J'ai que c'est idiot. Je renvoie le lecteur à tout ce que j'ai écrit à ce sujet et aux nombreux billets qui sont regroupés ICI.

De nombreux lecteurs de ce blogue ont signé, et je les en remercie du fond du coeur, la pétition de protestation pour la promotion d’un centre de santé à l’Hôtel Dieu. Cette pétition ne sauve pas l'ensemble du site, mais seulement 4 à 5000m2, sur plus de 40 000. C'est déjà ça, même si à mon sens il faudrait mobiliser les gens  de façon bien plus radicale pour la création d'un musée qui regrouperait tous les musées épars de la ville et serait un musée, justement, à la hauteur d'une ville qui se veut de dimension internationale.

Entre la plate forme en lien et une autre plate forme, en cumulant également les signatures manuscrites, 5000 signatures ont été recueillies. C’est beaucoup, c’est encore insuffisant pour créer une dynamique sur toute la région. Je retranscris un extrait de la lettre que j’ai reçu de la part de M. J.F.Valette, du Collectif Hôtel Dieu , ainsi que le texte qui l’accompagne :

« Après le soutien de nombreuses associations (Espace Régional de Santé Publique, Espace Prévention Santé, Antenne Sociale, Santé Environnement Rhône Alpes), l’engagement du Président de la région, JJ Queyranne et du Pr Thierry Philip à la fin 2009, qui nous ont permis de financer une étude de faisabilité (rendu de l’étude prévue en Juin 2010), nous avons reçu un soutien de Philippe Meirieu, tête de liste d’Europe Ecologie. La Mutualité Française, le parti des verts, la CFDT nous ont également manifesté leur engagement à nos cotés. Le Conseil Général du Rhône et l’Agence Régionale de Santé (représentation du ministère de la Santé en Rhône Alpes) nous ont reçu récemment. L’étude de faisabilité du projet menée par la société Alcimed, en lien avec l'ERSP et le collectif  sera finalisée à la fin du mois de Juin.

Nous rappelons que notre démarche est apolitique et non confessionnelle, et qu’elle a vocation à recevoir les soutiens de toutes les organisations qui le souhaitent. Nous rappelons aussi que ce pôle aura vocation à cohabiter avec d’autres projets dans le cadre de la reconversion du bâtiment décidé par la Mairie de Lyon et par les HCL, puisqu’il ne vise à occuper qu’une petite partie des surfaces libérées.

Nous allons produire, dans les prochaines semaines, des supports papiers de communication pour rendre accessible notre appel citoyen au plus grand nombre (et notamment à ceux qui ne maîtrisent pas internet) Pour nous aider à le faire (ce seront des flyers et des affiches qui viseront à rendre plus facile l’accès à notre manifeste), nous avons besoin de l’aide des signataires qui seraient intéressés pour nous aider dans ce  travail de diffusion de l’appel Pour cela, nous invitons ceux d’entre vous qui le souhaiteraient à nous contacter afin  de pouvoir leur envoyer ces supports (en nous indiquant le nombre approximatif d’affiches et de flyers souhaités) sur le mail suivant [e-mail]

Par ailleurs nous sommes aussi disposés à venir, à votre demande, vous aider à présenter ce projet dans des lieux qui vous sembleraient opportuns pour cela (syndicats, associations, entreprises, organisations confessionnelles ou laïques, etc.).

Merci aussi à ceux qui le souhaitent de bien vouloir nous aider à poursuivre la diffusion de l’adresse du site sur internet en diffusant le lien de la pétition :

http://www.petitionshoteldieu.fr/

Pour les nombreuses personnes ne possédant pas d’adresses mails il est aussi possible de signer par voie postale. Merci à vous de votre aide précieuse, de votre participation pour un projet qui nous concerne tous. Dont le succès dépendra en partie de notre capacité à  le rendre accessible au plus grand nombre.

Bien cordialement, p/o le collectif

JF Vallette,
Coordinateur,

[e-mail]

Espace prévention santé

71 quai Jules Courmont

69002 Lyon

POUR UN POLE REGIONAL DE PROMOTION DE LA SANTE

A L’HOTEL-DIEU

SIGNIFICATION ET ENJEUX DU PROJET

DOCUMENT DE TRAVAIL

6 AVRIL 2010

ECRIRE UNE NOUVELLE PAGE DE SOLIDARITE dans la longue histoire de l’Hôtel Dieu… par le renouvellement et l’actualisation des intuitions d’hospitalité et d’accompagnement des populations les plus vulnérables, au cœur de la cité …

EN CONSTRUISANT UN POLE REGIONAL D’ACCUEIL, DE FORMATION ET D’ACCOMPAGNEMENT A LA SANTE, susceptible de mettre à disposition de tous les habitants de l’agglomération lyonnaise et de la région des ressources pour un mieux être personnel et pour un mieux vivre ensemble…

VOILA CE QUE PORTE LE PROJET DE POLE REGIONAL DE PROMOTION DE LA SANTE

1. LA SANTE ET LE LIEN SOCIAL : UNE PERSPECTIVE A DEPLOYER

La santé est une ressource sociale vitale. Elle ne se réduit pas à l’absence de maladie, même si cette approche oriente encore trop souvent les modes de pensée et les discours. La santé est déterminée par des supports collectifs de protection des individus et des groupes, au sein de la cité.

Promouvoir la santé publique implique, dès lors, de renforcer les capacités de tous les citoyens à exercer une meilleure maîtrise des facteurs déterminants de la santé, dans tous les milieux de vie.

La persistance des inégalités sociales et territoriales, en matière de santé, met à mal, aujourd’hui plus que jamais, la résistance du tissu démocratique. Les inégalités étant elles-mêmes amplifiées par la montée des incertitudes économiques et écologiques.

Contre le repli sur soi et contre le cloisonnement des pratiques et la complexification des politiques publiques, il est aujourd’hui nécessaire de réaffirmer et de garantir les conditions qu’exigent la santé d’une société et la manière de la promouvoir, en cohérence avec le pacte social, c’est-à-dire la reconnaissance mutuelle.

Sur une échelle qui va du quartier et de la ville à la région et jusqu’au cœur de l’Europe, la capacité des habitants d’un ensemble territorial à vivre ensemble et à participer au contrat social dépend, en grande partie, de la possibilité pour eux de se maintenir en proximité et en solidarité, par un accès équitable aux ressources et aux services essentiels qui favorisent leur santé (physique et psychique).

En proposant un cadre stratégique et un processus dynamique, la promotion de la santé est un levier majeur sans lequel les risques de fragmentation sociale et de déperdition des énergies demeurent menaçants. La promotion de la santé publique considère l’individu à la fois comme connaisseur de ses besoins et capable de les exprimer à la condition d’être accueilli, écouté et considéré dans ses droits. En cela la promotion de la santé s’inscrit au cœur du lien social et ne peut prendre sens qu’en croisant des démarches relationnelles, individuelles et collectives.

Augmenter les aptitudes individuelles et collectives requiert de ce fait de mutualiser et d’amplifier les ressources déjà existantes en les faisant se rejoindre. Dans ses interventions plurielles (accueil ; formation ; production de guides et d’outils pédagogiques ; expertise, la promotion de la santé vise à favoriser le renforcement des qualifications et des compétences, le partage des savoir-faire et la rencontre entre des pratiques professionnelles relevant de disciplines diversifiées. Au cœur de l’interdisciplinarité, quand se croisent les acteurs de terrain et les chercheurs, la promotion de la santé, entendue comme une visée éthique commune soude le lien entre l’implication des personnes et la responsabilité sociétale et politique.

Le soutien et l’appui à la mise en œuvre des politiques publiques, en matière de santé, concernent les différents acteurs potentiels, à tous les échelons déconcentrés et décentralisés, au plus près des élus locaux, des professionnels et des habitants. Pour agir dans le respect des identités sociales et culturelles des habitants, la promotion de la santé exige par conséquent un positionnement professionnel qui soutient les valeurs démocratiques de justice sociale et qui fait de la santé un droit fondamental pour tous.

2. AU CŒUR DE LA PROMOTION DE LA SANTE, LA VALEUR DE L’HOSPITALITE

C’est peu dire que l’Hôtel Dieu est au cœur de l’histoire lyonnaise et de la mémoire de ses habitants. Les première traces de cet hôpital remontent en 1177 lorsque le jeune Bénezet, berger du Vivarais, rassemble lui-même les premières pierres de l’édifice et convainc le peuple de participer à cette construction.

· L’Hôtel Dieu, symbole de la proximité et de l’accessibilité : en devenant, en 1507 « l’Hôtel Dieu de Notre Dame de Pitié du Pont du Rhône », il marque son ancrage dans le centre ville ; grâce à la construction d’un pont, aujourd’hui Pont de la Guillotière, la presqu’île s’ouvre à ceux qui viennent de l’autre côté de la rive.

· L’Hôtel Dieu, symbole de l’accueil et de l’ouverture au monde : de siècle en siècle, son déploiement a su allier la générosité de femmes et d’hommes attachés au soin des indigents et le soutien public des autorités locales. La peste marquera notamment la mémoire des lyonnais et de l’Hôtel Dieu, aux XVI ème et XVII ème siècles. Il deviendra, à la fin de l’épidémie, un immense orphelinat.

· L’Hôtel Dieu, symbole de l’innovation, de la recherche en santé publique et de l’éducation pour la santé : dès l’époque de François Rabelais, le rôle des médecins et le développement du savoir-faire médical a fait de l’Hôtel Dieu un haut lieu de l’essor de la thérapeutique moderne. L’accueil et le soin ont toujours permis d’assurer équitablement l’accès de tous aux ressources de la pharmacopée ainsi qu’aux ressources éducatives et préventives qui contribuent, de siècle en siècle, à l’amélioration de la santé publique. Progressivement, en alliant médecine, recherche et santé publique, l’Hôtel Dieu du XXème siècle a couvert les besoins de la maternité et de l’orthogénie, du traitement des maladies infectieuses (SIDA), des soins d’urgence jusqu’aux disciplines chirurgicales pointues, gardant toujours la mémoire de l’hospitalité pour les personnes en grande nécessité. En 1937, Pierre Delore devait assumer une mission déterminante, à cet égard, qui donna naissance au premier Centre de Promotion et d’Education Sanitaire et Sociale.

 

3. LES ENJEUX MAJEURS DU PROJET

· Passer d’une approche disciplinaire cloisonnée, qui compartimente des questions sanitaires et sociales complexes, à une démarche transdisciplinaire, nourrie tout spécialement des apports et des acquis méthodologiques de la recherche-action, en vue de construire, de manière dialoguée, des réponses sur-mesure.

· Passer d’une vision normative, centrée sur le repérage de symptômes sociaux, à une considération compréhensive qui tienne compte de la multiplicité des contextes dans lesquels se manifeste la singularité des comportements humains.

· Passer résolument à une pratique relationnelle fondée sur une éthique personnaliste et une rigueur professionnelle aptes à renforcer les capacités des individus et des groupes à conduire leur existence et à déployer leurs aspirations.

· S’inscrire, en cela, dans le dynamisme propre aux stratégies de lutte contre les inégalités sociales et territoriales en matière de santé.

4. LES DEFIS A RELEVER

 

· L’accueil et de la conseil, dans les conditions de respect et d’anonymat requis. Un accueil qui permette d’offrir, au cœur de la ville, une guidance des personnes et des groupes en souffrance et en précarité, vers des lieux de soins appropriés

· Une contribution, à partir de cette écoute, à l’évolution des qualifications en vue de la promotion de la santé. Coopération méthodique et soutenue entre acteurs de champs professionnels diversifiés et de la société civile. Croisement des savoirs professionnels et « profanes », au sujet des questions relatives à l’exclusion, à la souffrance au travail, à l’environnement, à l’habitat, à l’insertion, au lien social …

· La rencontre entre le monde associatif, le monde universitaire et le monde politique à propos des questions de santé et de lien social. Cette rencontre doit viser à un décloisonnement des prérogatives et des missions en vue d’une visibilité des actions de promotion de la santé, grâce à une réelle mutualisation des réflexions et des moyens.

· Le lien entre les politiques de santé publique et le repérage de besoins réels des populations, en vue d’une prise en compte de questions émergentes et grâce à l’élaboration d’approches et de modèles nouveaux. Il s’agit de mieux comprendre les comportements de violence, d’addiction, d’épuisement, sans jamais déconnecter ces comportements des environnements dans lesquels ils se manifestent.

 

5. LES PRINCIPALES CLES D’ENTREE ET DE DEVELOPPEMENT DU POLE

 

· Il s’agit d’un espace de coopération entre des acteurs et des structures existantes, aujourd’hui disséminées ou peu articulées les unes aux autres, en matière d’éducation et de formation aux pratiques de santé. Cet espace de coopération requiert une gestion concertée du lieu et du lien entre acteurs, ce qui engage à la création d’une structure ad hoc.

· Il s’agit d’un lieu de recherches concertées, entre acteurs (analystes, pédagogues, historiens, anthropologues, éthiciens …) traditionnellement non impliqués dans le champ de la santé et cependant légitimes, chercheurs et usagers du système de santé, sur la base de programmes négocié et validé par un Conseil Scientifique à créer, qui puisse garantir la pleine participation des acteurs.

 

· Il s’agit d’un lieu où puisse être offert un ensemble de prestations et de moyens (documentations et méthodes mises à la disposition d’un public et d’acteurs avertis en matière de santé), intégrant des disciplines spécialisées mais aussi des problématiques nouvelles d’éthique et d’éducation, d’expressions culturelles et artistiques capables de soutenir une prise en charge communautaire des questions de santé.

· Il s’agit d’un lieu de coopération régionale, européenne et internationale où puissent se déployer des initiatives articulées – et, éventuellement des missions – entre pays développés et pays émergents, en matière de santé.

(Texte de travail élaboré par Jean -François Valette et Bruno-MarieDuffé

épreuve du 6 Avril 2010)