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jeudi, 30 juillet 2009

Dans l'éternité d'Internet

« Enfin, je l'ai achevé cet ouvrage que ne pourront détruire ni la colère de Jupiter, ni les flammes, ni le fer, ni la rouille des âges ! Qu'il arrive quand il voudra ce jour suprême qui n'a de pouvoir que sur mon corps, et qui doit finir de mes ans la durée incertaine : immortel dans la meilleure partie de moi-même, je serai porté au-dessus des astres, et mon nom durera éternellement. Je serai lu partout où les Romains porteront leurs lois et leur Empire; et s'il est quelque chose de vrai dans les présages des poètes, ma renommée traversera les siècles; et, par elle, je vivrai. »

 

En relisant la fin des Métamorphoses, tout à l’heure, je songeais à la ressemblance entre ces deux termes, l’internet et l’éternité.

L’un vient de l’anglais inter/net (et devrait donc se dire, en français, « l’entre-réseaux »).

L’autre, du latin aeternitas, néologisme cicéronien forgé sur aevitas (l’immortalité).

 

In-ternet, ex-ternet : Troublante coïncidence phonétique, hasard des rencontres d’étymons ?

L’un semble bien être le contraire de l’autre.

 

Or c’est bien, in fine, au fil de ces réseaux du seul instant que nous jetons nos mots.

Ces réseaux contraires à cette éternité à qui Ovide, s'il confiait au seul instant les dons de sa semence, prenait garde de confier les dons de sa plume...

 

449px-Ovide_et_Corine.jpg

De toute façon, c'est bien au latin (la langue du seul et véritable empire) qu'il faut revenir, si l'on veut comprendre le sens des choses et des mots, et non pas à cet épouvantable anglo-américain dans lequel le monde s'est fourvoyé  :


inter/nete : inter, préposition pouvant signifier parmi, mais aussi ensemble et nete : substantif féminin servant à nommer  la plus haute corde de la lyre.


Ensemble, sur la plus haute corde de la lyre ...

Commentaires

"Ensemble, sur la plus haute corde de la lyre..."

Nous prenons acte. Gravide de cette inscription dans le coeur.

Écrit par : Michèle | jeudi, 30 juillet 2009

A la faveur de votre beau billet, j'ouvre le petit livre de Ronsard "Les amours" :

1552-1553
VOEU

Divin troupeau, qui sur les rives molles
Du fleuve Eurote, ou sur le mont natal,
Ou sur le bord du chevalin crystal,
Assis, tenez vos plus sainctes escolles :
Si quelque foys aux saultz de vos carolles
M'avez receu par ung astre fatal,
Plus dur qu'en fer, qu'en cuyvre ou qu'en metal,
Dans vostre temple engravez ces paroles :
RONSARD, AFFIN QUE LE SIECLE A VENIR,
DE PERE EN FILZ SE PUISSE SOUVENIR,
D'UNE BEAUTE QUI SAGEMENT AFFOLE,
DE LA MAIN DEXTRE APPEND A NOSTRE AUTEL,
L'HUMBLE DISCOURS DE SON LIVRE IMMORTEL,
SON CUOEUR DE L'AUTRE, AUX PIEDZ DE CETTE IDOLE.

1

Qui voudra voyr comme un Dieu me surmonte,
Comme il m'assault, comme il se fait vainqueur,
Comme il r'enflamme, & r'englace mon cuoeur,
Comme il reçoit un honneur de ma honte,
Qui voudra voir une jeunesse prompte
A suyvre en vain l'object de son malheur,
Me vienne voir : il voirra ma douleur,
Et la rigueur de l'Archer qui me donte.
Il cognoistra combien la raison peult
Contre son arc, quand une foys il veult
Que notre cuoeur son esclave demeure :
Et si voirra que je suis trop heureux,
D'avoir au flanc l'aiguillon amoureux,
Plein du venin dont il faut que je meure.

Écrit par : Michèle | jeudi, 30 juillet 2009

Permettez-moi (en attendant que Frasby, d'après "L'Art d'aimer" qu'elle déploie si savamment, nous dise qui est Corine), permettez-moi, dis-je, s'agissant de "l'éternité de l'Internet" de citer un passage d'un livre que je suis allée chercher il y a peu, chez mon libraire :

"[Dans l'offensive générale : sécurité, alimentation, santé, habitat, divertissement, urbanisme, et maintenant, éducation (...) Nous serions en retard.(...) Notre système éducatif serait, lui aussi, inadapté. (...) Ils ont ingénument accouché d'un concept fort efficace : la capacité d'adaptation. Ils ont trouvé un moyen : les nouvelles technologies. Qui seraient aujourd'hui pour la culture des masses, et donc pour la démocratie, ce que furent jadis les ailes d'Icare. Lançons-nous, depuis les poudreuses et séculaires falaises du trop sérieux savoir intellectuel, vers le soleil en devenir d'Internet et, surtout, projetons-y nos enfants ! Vite. Et tous !]

(...) N'est-il pas génial de s'adapter au mouvement universel, à la rotation planétaire incessante (...) N'est-il pas extraordinaire de voguer de site en site, d'être en apprentissage constant sur la grande scène mondiale où se déploie le grand show, où les talents de chacun d'entre nous sont, bien sûr indispensables ? N'est-il pas renversant de savoir à chaque instant qui, sur cette scène internationale de l'Intelligence et de la Création, pense quoi ? Dit quoi ? A fait quoi ? D'en être soi-même l'acteur, en créant son site permanent : le "moi.com" ? Comment, de toutes façons, continuer à vivre dans cette foire d'empoigne libérale, sans être au courant de qui sont les bons, de qui sont les méchants ? "

L'ECOLE VENDUE, de Roland Thévenet, L'Harmattan, 2000

Écrit par : Michèle | jeudi, 30 juillet 2009

C'était très risqué de citer un passage - forcément extrait de l'ensemble - de "L'ECOLE VENDUE", de Roland Thévenet.
C'est le livre qu'il faut lire bien entendu. Qui n'a pas une ride. Puisque traitant d'une question de fond : "Sans éducation à la culture (entendez les Humanités, les Savoirs), quelle communication ? Sans culture offerte avec respect, au plus humble, au plus isolé, au plus vulnérable, quelle civilité dans les rues ? Quel respect entre les générations ? Quelle compréhension entre les voisins ? Sans culture, quelle insertion sociale ? Quelle entreprise ? Quel commerce ? Quel tourisme ? Quel sport ? Sans culture, quelle séduction ? Quel humour ? Quelle parité hommes femmes ? Quels enfants ? Quelle solitude ?" etc.

Un autre professeur de Lettres et écrivain, Pierre Bergounioux, a écrit : ECOLE, MISSION ACCOMPLIE (Les prairies ordinaires, 2006) où il montre comment l'école n'a jamais si bien fonctionné dans sa redoutable efficacité à perpétuer les rapports de domination.

Des lectures salutaires pendant les vacances, au milieu de notre monde d'Internet.

Écrit par : Michèle Pambrun | jeudi, 30 juillet 2009

Solko, j'en jurerais : vous êtes un défricheur doublé d'un déchiffreur... Qu'on se le dise, j'aime bien me prendre les yeux (et la cervelle) dans votre Toile.

Écrit par : Chr. Borhen | jeudi, 30 juillet 2009

"si quid habent veri vatum praesagia, vivam"

Un autre regard... merci Solko !

Écrit par : Zabou | jeudi, 30 juillet 2009

Oh Merci Solko !!! pour ce billet splendide et le lien... J'en susi vriament choutée et sètr umée. Brh. Becron a raison quand il écrit que vous êtes un fricheduré bloudé d'un freudriché. c'est térs vria ! Votre toile (ether net , lojiment vasonnée) nous prend et nous apratte pra les sinmentets (les Saints mentaient ? mais > suvo majias !) et la grâce D'ivode (Draponnez-moi je suis un peu urnéhmée (Urne
aimée ?;-), je l'espère de totu oeucr, vuso le radne un rouj au cutenple. ( par la Garce d' Ivode ou de Coride, tuso xude ne fromant que nu luse aroum ;-) L'aroum des belles lettres, (le trove nous trope) lêmé à l'aroum totu crout, et sno teriente unicervelle.
Chacun sait beni, à sa fonça, qu'éternité est aussi l'anagramme d'étreinte ...

Écrit par : frasby | jeudi, 30 juillet 2009

@chilème : Cremi à vuso, pruo le choutant pemcolinet, prou vuso cremicire, je vuso pertenseria la conique Corinne, je susi rûse que vuso vediendrez sètr pocines. Cremi trusout de nous roffir un frentgam de "L'écu Vendole"... Vermeilleuse sanchon de Roland...

Écrit par : frasby | jeudi, 30 juillet 2009

Vous l'avez dit et bien dit Frasby :

L'Ecole vendue, pardon, L'écu Vendole = Vermeilleuse chanson pardon sanchon de Roland ; une sacrée brèche dans le prêt-à-penser.

Écrit par : Michèle à Frasby | jeudi, 30 juillet 2009

@ Michèle :
Ah la la ! Vous lisez ce livre d'un autre siècle, cette protestation réactionnaire contre la civilisation technologique, cette complainte passéiste d'un vieil amant des Auteurs ! Ah la la ! Pourvu que vous ne vous ne vous mettiez pas à y trouver quelque raison ! il ne manquerait plus que cela !

Ces citations de "l'Ecole Vendue", sous le billet d'aujourd'hui parlant d'Internet, sont d'autant plus troublantes qu'elles sont accompagnées de ce poème de Ronsard tiré des "Amours" et que, figurez-vous, c'est sur cette œuvre-là que j'ai dû composer une dissertation à l'écrit et une leçon d'agrégation à l'oral pour justement avoir le droit d'entrer dans cette école républicaine avant qu'elle ne soit précisément vendue à l'idéologie du nouveau millénaire.
Et ça, c'est d'autant plus troublant que vous ne pouviez le savoir. Alors merci de vous et merci pour Ronsard...

Écrit par : solko | jeudi, 30 juillet 2009

@ Christophe et Frasby
(pour un soir, si vous n'y voyez pas d'inconvénient ni l'un ni l'autre, j'ai décidé de vous marier)
Merci énormément pour ce compliment qui me touche autant dans sa version française que dans sa version charmillonnaise, dans sa version enrubée que dans sa version non-enrhumée.
"un fricheduré bloudé d'un freudriché", j'avoue que ça me va droit au coeur. Je me demande si je ne vais pas faire graver ça sur une plaque de bronze patinée pour la placer sur ma boite aux lettres (ma vraie, quittons un instant le monde virtuel), histoire de décourager le facteur. Cette phrase est, de surcroît, un excellent exercice pour acteur débutant, essayez avec un crayon à papier dans la bouche, x 20 sans laisser de silence, et vous m'en direz des nouvelles !

Écrit par : un fricheduré bloudé d'un freudriché | jeudi, 30 juillet 2009

@ Zabou
Vous avez 1000 fois raison : rien ne vaut l'original.

Écrit par : solko | jeudi, 30 juillet 2009

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