lundi, 11 février 2008
La démocratie du spectacle
NON ! Quelle manchette ! Le soir du 29 mai, malgré la hauteur du résultat, il n'y eut pourtant pas particulièrement de liesse populaire dans les rues. On s'attardait un peu devant les écrans (PPDA, Chabot, Pujadas, la même clique, toujours...). Et puis, le peuple qui s'était prononcé alla se coucher.
« Vive l'Europe, vive la France »... Hier, un président français, pour la première fois dans l'Histoire du pays, conclut ainsi l'une de ses interventions. Teint terreux, coupe de sergent-chef, le ton parfaitement faux-cul et l'œil libidineux de l'avocat véreux touchant ses honoraires: Vive l'Europe ? Un Persan de Montesquieu qui observerait les convulsions médiatiques de ce pays y perdrait son latin. Quoi ? Ce pays qui a dit Non à l'Europe libérale, publiquement désavoué trois ans plus tard par son propre "dirigeant" ? Quel funeste désaveu ! Dans la formule conclusive de ce pseudo-président, où donc, au fait, est passée la République ? Ainsi va la démocratie du spectacle, le « show politique », lequel « must go on »... Est-ce une nouveauté ? Rouvrons donc les Mémoires d'Outre-Tombe", Troisième Partie, XII, 8. Chateaubriand décrit l'indifférence avec laquelle le peuple accueille la nouvelle du départ de Charles X pour Prague, peu après les Trois Glorieuses de 1830 :
« Dans ce pays fatigué, les plus grands événements ne sont plus que des drames joués pour notre divertissement : ils occupent le spectateur tant que la toile est levée et, lorsque le rideau tombe, ils ne laissent qu'un vain souvenir ».
Sauf que, dirons les plus inquiets d'entre nous, ce n'est pas un roi qui s'en va tristement en exil cette fois-ci, mais une certaine légitimité de la souveraineté populaire.
Sarkozy a beau jeu de se targuer de ses 53 %, plus récents que les 54,67 du référendum (un résultat en chasse l'autre), pour affirmer cyniquement qu'il « fait ce pour quoi il a été élu ». Ceux qui ont voté pour lui, et dont la préoccupation première n'est, certes pas l'application du Traité de Lisbonne, apprécieront. Dans les coulisses, le PS, qui s'y croit déjà, fait mine de s'abstenir et applaudit. Cette démocratie spectaculaire, en sa majorité comme en son opposition, n'est même plus écœurante. Elle est mortifère. Elle porte les traces de la mort, de sa propre mort et de la mort de tous ceux qui se livrent à ses icones. Car un feuilleton politique, bien vite, en chasse un autre. Une série supplante une série. Au nom de la politique de l'audimat dont elle use et abuse, la série Sarkozy touche à ses limites. Une autre suivra sans doute. A quand, le grand réveil du politique ?
08:40 Publié dans Des nuits et des jours... | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : europe, sarkozy, chateaubriand, montesquieu |
Commentaires
Hélas, la démocratie a vécu. Le tsar est déjà en train de présenter son fils sur les lsites à Neuilly. Il n'y a plus qu'à rendre la fonction héréditaire.
L'horreur dans ce "mini" traité de Lisbonne, ce n'est pas tant que chaque état perde un peu de sa souveraineté, (on accepterait s'il s'agissait d'une constitution faite pour tous les citoyens) c'est surtout le fait que le texte mis ne place officialise le capitalisme. Un système économique devient donc la seule manière de gérer les rapports politiques entre les peuples.
Le jour où un état voudra prendre des initiatives (sociales, par exemple, oou environnementales) en faveur de ses citoyens, il ne le pourra plus puisqu'il entravera la libre ciculation des biens et des richesses.
Empêcher un particulier de s'enrichir (pour protéger la majorité) ne sera plus possible. Celui qui l'osera sera taxé de terroriste.
Écrit par : Feuilly | lundi, 11 février 2008
D'accord avec les généralités de Feuilly, forcément. Mais on a fait le tour des possibilités d'action, on en a fait la liste. Tout a échoué. Le système avale TOUT. L'espoir n'est plus qu'en moi. Mais chez les autres ? On est revenu loin en arrière.
Écrit par : l'accablé | lundi, 11 février 2008
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