Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

dimanche, 05 octobre 2008

Du déménagement, de l'art de la marionnette et de la tradition

On fêtait hier, salle Rameau à Lyon, les deux cents ans de Guignol. Pour l'occasion, la presque totalité des théâtres de Guignol lyonnais s'étaient donné fier et joyeux rendez-vous (La Compagnie des Zonzons, le Théâtre la Maison de Guignol, la Compagnie Art Toupan, la Compagnie Carton Pâte, le Guignol du Parc de la Tête d'or, la Compagnie Daniel Streble, Les Gones à Mourguet, les Compagnons de Guignol), bref, cela en faisait du monde, en chair comme en os & en bois comme en tissu, nom d'un rat, un sacré paquet de beau monde réuni par la centenaire Société des Amis de Lyon et de Guignol et son président Gérard TRUCHET. On doit à ce dernier l'adaptation d'une des plus célèbres pièces de Mourguet,  Le Déménagement, dixième du recueil ONOFRIO. Adaptation que je salue avec respect, car le texte recopié par Onofrio l'étant en langage lyonnais, il fallait le couper tout en gardant les repères les plus connus du public, actualiser sans trahir, avec humour, insolence et tact. C'était difficile : TRUCHET L'A FAIT ! Il a même su utiliser le canevas recomposé par ses soins du Déménagement pour glisser quelques extraits d'autres pièces, Le Pot de Confitures, notamment, dans un bel effet de mise en abime. A un moment donné, je me croyais vraiment, comme dans une gravure de Giranne, au caf'conc' du passage de l'Argue plongé au temps du Second Empire, quand le bourgeois allait écouter les fantaisies des descendants de Laurent. J'étais pourtant au fond de la salle Rameau, un samedi de 2007, l'an II du temps Sarko.

Extraits, saisis au vol :  A propos de Gérard Collomb : "Faut passer par son cabinet pour voir le Maire de Lyon, mais pour l'instant, c'est occupé". Un peu plus tard "Faut boire du vin de Brindas quand on ne peut pas aller du ventre". On cause, c'est vrai, beaucoup de bardanes (1). On en balance même sur le public, en trimballant joyeusement des matelas d'un logis à l'aulauren10.jpgtre. Cela, c'est pour la tradition. On vanne aussi l'euro, François Fillon, la mairesse du cinquième... La modernité de ce néo-Déménagement, alors qu'on évoque un peu partout les problèmes d'un chacun pour se loger, saute par ailleurs aux yeux.

Trouver un toit : Il y a dans la farce comme dans la comédie (lesquelles ne se soucient - ainsi disent les vilains pédants de l'Université - que du Bas Corporel) quelque chose qui tient à la fois de l'éternel et de l'universel : les besoins de boire, de manger, de rire et de s'aimer. Voilà pourquoi, dans la mise en scène de Christophe JAILLET, Guignol est si jeune. JAILLET, qui est un excellent marionnettiste, à l'aise dans sa gaine comme dans ses baskets, entouré de ses acolytes, Stéphanie Lefort, Daniel Streble, FLorence Vallin, Armand Pelletier, Patrick Bianchi, Thierry Fillon,Jean Marie Perre, Claire Maxime, Gaston Richard, Yvette Thibault-Verrier et, bien sûr, Gérard Truchet, viennent saluer à la fin sur l'air des "P'tits canuts", (Girier & Chavat / Hermand Brun) invitant tout le public à reprendre en choeur un chant d'anniversaire à l'honneur du papa Mourguet (voir le buste ci-dessus). Et cela marche. Hymne aux marionnettistes, hymne à Guignol, hymne à l'art de la marionnette ("un théâtre qui fait mal aux bras", lit-on dans la programmation des "Zonzons")dont on se souvient soudain, tout penaud, que l'origine est sacrée.

A propos du Guignol de la Belle Epoque, Henri Béraud écrivait ceci : "Il faut entendre ces mots à double entente, ces refrains pimentés et ces dialogues polissons sortir de ces lèvres impassibles, jaillir de ces faces où rien ne tressaille, ou pas une fibre ne s'émeut pour nous dénoncer une pudeur ou nous indiquer une réticence; il faut voir ces gestes étroits et monotones, faits pour accompagner des sentiments moyens, ponctuer des répliques excessives, des phrases qui n'ont d'ordinaire pour excuse que la verve du corps souple et la gaité d'un bras spirituel; il faut, dis-je, entendre et voir ce Guignol pour connaître la saveur de l'humanité toute crue."

Comment dire mieux ?

Voici, pour conclure, le monologue d'ouverture de Guignol, celui de Mourguet, dans la fantaisie initiale de Laurent Mourguet. En photo, les marionnettes de ce dernier (collection Gadagne)

 

 

 

trio.jpg

Lire la suite

09:47 Publié dans Bouffez du Lyon | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : guignol, gérard truchet, christophe jaillet | | |