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mercredi, 14 décembre 2011

Berlioz et l'inflation fantastique

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C’est du portrait peint par Emile Signol en 1832 que Lucien Fontanarosa  (1912-1975) s’inspira en 1969, lorsque la banque de France lui passa commande d’une aquarelle pour figurer sur  son dernier billet de dix francs à l’effigie d’Hector Berlioz. Lucien Fontanarosa avait déjà été sollicité en 1964 pour le 500 f (Pascal), en 1965 pour le 100F (Delacroix) et en 1967 pour le 50 F (Quentin de la Tour).

Les quelques mots qu’Hector Berlioz eut pour ce portrait non signé dans le chapitre XLII de ses Mémoires permirent d’en connaitre l’auteur : Berlioz et Signol avaient emporté le Prix de Rome la même année (1830), l’un en musique, l’autre en peinture : « Je pose pour mon portrait qui, selon l’usage, est fait par le plus ancien de nos peintres et prend place dans la galerie du réfectoire 3 », écrit-il. Mais le séjour mouvementé du musicien en Italie (interrompu par une escapade à Nice) diffère plusieurs fois la réalisation du tableau. Le 7  avril 1832, Berlioz écrit : « Le peintre qui l’a commencé ne sera libre d’achever que dans quinze jours. »

Sur le billet, Fontanarosa (qui fut, lui, prix de Rome en 1936) a coupé la lavallière rouge et bouffante qui évoquait le gilet rouge de Gautier à la bataille d’Hernani. Mais il a gardé l’ambiance de la génération des Jeunes France, avec la crinière d’un roux flamboyant et les traits acérés du visage, le verso du billet représentant Berlioz en chef d’orchestre.

Le billet fut imprimé du 23 novembre 1972 au 6 juillet 1978 : en tout, 306 alphabets, répartis en 24 dates d’impression, qui circulèrent dans une France giscardienne en passe de se fiancer longuement avec la crise. Il naquit l’année du serment des 102 au Larzac,  du suicide de Montherlant, du Bloody Sunday en Irlande du Nord et de la spectaculaire prise d’otage de sportifs israéliens à Munich. La durée de vie du 10 francs Berlioz (1972-1978) équivalut  à celle du «  serpent monétaire européen », dispositif économique destiné à limiter les taux de change entre monnaies européennes.

Il fut le billet de l’inflation par excellence ; la preuve : l'auteur de la Symphonie Fantastique céda la place à un rond de métal de 10 francs, ayant perdu une bonne moitié de sa valeur en quelques années. Que vaudrait-il, à présent ? A peine plus d'un euro : La chance d'avoir du talent ne suffit pas, avait écrit le Maître. Encore faut-il avoir le talent d'avoir de la chance...

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