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lundi, 27 mai 2013

La gauche n'est qu'un standing

Parait que je suis un anar de droite. La première personne à me l’avoir fait remarquer était une collègue, enfin si on peut appeler comme ça quelqu’un qui a sévi dans l’Education Nationale en laissant croire à des générations que la littérature française se borne au J’accuse et au Germinal de Zola, aux Misérables de Hugo, et l'allemande au Maitre Puntila de Brecht, saupoudré avant de passer au four de quelques poèmes d’Arthur et de Pablo, évidemment. Et qui, quand tu lui dis que Bloy et Péguy sont des Grands, te répond d’un air mi-dégouté, mi-indigné : « ils sont pas un peu réacs, ceux-là, quand même ? »

C’était il y a une septaine d’années. Après une vie entière de locataire (je n’ai pas le capitalisme dans l’ADN), je venais de céder à la tyrannie de l’emprunt pour tous, les loyers ayant atteint quasiment le prix des remboursements. Cette collègue, qui avait depuis un moment fini de payer son crédit, était déjà propriétaire d’un appartement boulevard des Belges, dans le sixième arrondissement de Lyon. Jusque là, rien que de très banal. Sauf qu’elle était aussi depuis toujours membre du parti communiste, engagée comme elle le disait à tout un chacun en emplissant la salle des profs de flyers syndicaux, « dans la lutte ».  L’Education Nationale a toujours été peuplée de gens paradoxaux comme ça, dont la carte du parti était en quelque sorte le pendant bonne conscience de la carte bleue.

Il y en avait une autre, une prof de maths, qui jouait les gens aisés parce qu’elle aussi avait déjà son appart  -  bien que son crédit fût encore en cours. Elle ne supportait pas qu’on lui dise que tant qu’elle n’aurait pas remboursé son prêt, elle ne serait jamais que locataire de sa banque, bref, qu’elle était encore une pauvre. Les gens de la classe moyenne ne supportent pas qu’on leur dise ça. C’est à ça qu’on reconnait leur fatuité. Le libéralisme giscardien et le socialisme mitterrandien ont bien joué, main dans la main durant des décennies, en faisant vivre tout ce petit monde à crédit.

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La classe moyenne a pu ainsi, tout en se donnant des airs chics de propriétaires, financer les fonds de pension et autres placements des riches à coups de taxes et d’impôts, comme les esclaves les plus soumis auraient refusé de le faire, pour peu qu’on libéralise les mœurs de temps en temps par une petite loi soi-disant progressive et bien troussée. Car dans son malheur, la classe moyenne qui ne croit plus sérieusement à Dieu depuis lurette, s’est couchée devant le dieu Egalité des francs-maçons, qui la sermonnent non seulement en chaire le dimanche, mais tous les jours de la semaine en petit écran, via ses cols blancs propres et diplômés peuplant ministères et medias.

Quand je faisais mes études à Paris, je me souviens d’eux, trentenaires dans les années 80, et achetant avec un apport consubstantiel de papa/maman qui un deux pièces au Marais, qui un duplex à Nanterre, qui un rez-de-chaussée sur cour boulevard Bonne Nouvelle ou un étage rue des Plantes. A l’époque déjà – j’en sais quelque chose- vous ne pouviez, sans l’aide de vos géniteurs, acheter un logement avec un seul salaire commun, à moins de vous serrer la ceinture et tout ce qu’il y a dessous pendant des années. Je me souviens de cette étudiante m’exhortant vers 1986 à la solidarité coluchienne, tout en réalisant son rêve de petite bourgeoise bien de droite avec les sous de ses parents. Les gros malins lui filaient l’apport dont elle avait besoin, à condition qu’elle achetât dans le même arrondissement qu’eux….

Le plus drôle étant ces fils ou ces filles de propriétaires vous expliquant alors que le capitalisme est une infecte sujétion et que jamais ô grand jamais ils ne s’abaisseraient à se mêler d’acheter quoi que ce soit, quitte à passer leur vie en meublés ou en colocations, et qu’on retrouve vingt ans plus tard signant des actes chez les notaires, en consciencieux héritiers.

Oui la gauche n’est plus aujourd’hui qu’un standing, une marque. Et le socialisme une perte de temps. Parce que ça coute beaucoup de temps, d’argent, de paroles, d’énergies, et surtout d’illusions répandues pour rien et déçues inexorablement, que de mettre en place un gouvernement et un président socialistes qui font la même politique que ceux qu’ils ont remplacés. Sous Hollande, le petit prof et le petit salarié ont vu leurs heures sup de nouveau fiscalisées, mais les salaires des grands patrons ne seront pas limités. Et les chiffres du chômage explosent. Les gays vont se marier, mais seuls les plus riches d’entre eux pourront se payer un gosse à l’étranger, dans une société dont les contrats à durée indéterminée sont par ailleurs bannis sans que ça gêne grand monde. Harlem Désir s’indigne plutôt qu’un groupe d’identitaires, grimpés sur le toit de Solférino, aient le culot anti-démocratique de faire flotter une banderole demandant la démission du pingouin. Des fascistes, moi j’vous dis.

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Après avoir jeté les maires de droite dans l’embarras, le manœuvrier Hollande qui, comme tous les manœuvriers de son espèce, brade la nation pour sauver le parti dont il tient tout son pouvoir, lancera bientôt le débat sur le droit de vote des étrangers pour tenir jusqu’à la fin de son mandat en préservant son standing de gauche. Ce type feint d’être de  la classe moyenne, en ce sens qu’il en incarne la normalité jusqu’en ses cheveux teints, tout en cédant aux sirènes de Bruxelles et du FMI qui ponctionnent partout la classe moyenne, tout en lui arrachant ce qui lui reste d’identité. C’est sous son mandat que le français aura cessé d’être la langue unique de l’enseignement au profit de l’anglais (On a échappé au hollandais, Dieu merci !).[1]

Avoir un standing de gauche, c’est applaudir à cette aberration, censée aider les étudiants chinois quand le fils ou la fille de monsieur Tout-le-monde déclaré bien beauf sera vite distancié, dans une Université même payée par ses parents contribuables. Avoir un standing de gauche, c’est traiter à table le maire de Vienne de vieux réac et de facho, tout ça parce qu’il a déclaré qu’il ne marierait pas d’homosexuels dans sa ville. Avoir un standing de gauche, c’est applaudir au mur des cons du syndicat de la magistrature et au suicide de Venner dans un même mouvement du menton, lueur complice dans le regard. Avoir un standing de gauche, c’est être assuré que l’euro reste malgré tout (et tout se tient dans ce malgré comme dans ce tout) la meilleure solution…

Bref.

Si tu trouves ce standing un peu court, carrément faux-cul et complètement suicidaire, pour les poseurs d'étiquettes, t’es forcément un anar, tu piges ? Un des pires : un de droite


   [1] Ce pauvre Hollande, qui fit entièrement évacuer la rue du Faubourg Saint-Honoré tout un après-midi de manif aujourd'hui, et en est à se réjouir de passer de 25 à 29% dans un sondage !. Aurait-il peur que les mères de famille cathos et les grands parents débonaires qui se tassent sur les Invalides à la même heure prennent d’assaut son palais pour l'en virer manu-militari  ?