jeudi, 25 décembre 2014
Les origines de la représentation
Certains voudraient voir disparaître les crèches de Noël des espaces publics. Ce sont rarement des adeptes d’une autre religion, bouddhistes, juifs ou musulmans, non. Mais le plus souvent des laïcards fervents , adeptes de la diversité et de l’égalitarisme, qui se satisferaient de voir partout fleurir synagogues, temples et mosquées en nombre égal aux églises pour enfin, comme ils le font partout, poser leur signe sacré ( =) entre tous ces édifices, comme ils le posent entre toutes les différences qui s’imposent à leur esprit borné, au prix d’un arbitraire dont ils n’ont plus cure depuis longtemps.
La crèche est pourtant, si on veut bien s’en souvenir, l’ultime trace du renouveau théâtral en France lequel, au contraire de ce qu’en disent les humanistes qui le situent au XVIe siècle dans l’imitation du théâtre antique, se produisit dès le Xe avec les mystères religieux dont le plus populaire, celui de la Nativité, se figea au fil du siècle en une représentation de santons dont la crèche est, si l’on veut, le fossile parvenu jusqu’à nous. C’est toute l’Histoire Sainte qui était alors représentée, et c’est d’elle que le théâtre français est né. Faut-il, au nom de la laïcité, interdire les trois coups dans les théâtres, qui représentaient en ce temps-là un salut au Père, au Fils et au Saint Esprit ? Bannir le mot marionnette du dictionnaire, sous prétexte qu’il descend de la Vierge de ces mystères médiévaux, la petite Marie, la marionnette ?
C’est bien le projet insensé de ceux qui, d’année en année, déposent des plaintes contre les crèches publiques. La religion catholique est essentiellement théâtrale, au sens le plus noble du terme, dans chacun de ses rites – la consécration de l’hostie qui est son cœur étant le plus beau. C’est sa spécificité, d’aucuns diraient son Génie. Ceux qui n’entendent rien à cette théâtralité catholique, parce qu’elle ne leur a pas été enseignée ou expliquée, sont tout prêts à trouver normal, (l’ère du normal est dévastatrice, pire qu’un pesticide de l’esprit) l’argument des laïcards, imbibés qu’ils sont de cette idéologie de l’égalité des traitements, du nivellement par l’arithmétique et des théories fumeuses du tout se vaut. Ils ne voient pas l’avenir uniquement technologique que ces bons laïcards, réducteurs de symboles, chasseurs de paraboles et adeptes du langage binaire leur préparent, occupant sans vergogne tout l’espace public de leurs valeurs en toc et de leur théâtre de contrefaçon.
La magie du moment de Noël, ce n’est ainsi ni les cadeaux, ni les sapins, ni les lumières ni la consommation, mais la représentation – au sens le plus strict – du mystère le plus sacré, celui de la Nativité. Et cette représentation, n’en déplaise à ceux qui voudraient que le monde commençât avec eux, est en France, depuis le Xe siècle, merveilleusement catholique.
les premières marionnettes
00:40 Publié dans Là où la paix réside | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : crèche, noël, marionnettes, santons, laïcité, catholicisme, théâtre, théâtralité |
Commentaires
Marionnette a aussi désigné, "en 1489 en Cambrésis, une monnaie portant l'image de la Vierge (Jean Molinet, Le Cri des monnaies, 32, op. cit., II, 767), et en 1566 une statue, une image de la Vierge (Henri Estienne, Apologie pour Hérodote, au lecteur, éd. P. Ristelhuber, I, p. 14)."
Histoire des mots, histoire des hommes...
Écrit par : Michèle | jeudi, 25 décembre 2014
ca devait avoir de l'allure de faire ses courses avec des marionnettes. Autrement qu'avec des euros ! Me sens de plus en plus, comme Brassens, "foutrement moyennâgeux"
Écrit par : solko | jeudi, 25 décembre 2014
L'obscurantisme n'est pas que religieux, il devient un marqueur de notre société dite mondialisée. Les empires antiques l'étaient, davantage, mondialisés. En l'absence de vision correspondant aux idéaux républicains, l'obscurantisme, l'aveuglement, les manipulations deviennent le credo des politiques qui manquent de classe. La France n'est plus la fille aînée de l'église , c'est une bonne chose mais nombre de ses habitants manquent de maturité et ne sont rien d'autres que des matérialistes, consommateurs, égoïstes, hypocrites....Il n'est pas dit que ce soit irréversible....
Écrit par : patrick.verroustp | vendredi, 26 décembre 2014
Quand un curé balance énergiquement le cercueil de Cloé dieu sait où, parce que son ami n'a pas de sous pour payer l'enterrement première classe, la représentation théâtrale catholique est certes moins folklorique chez Vian. Cela dit, au moyen-âge on n'aurait peut-être pas osé faire ce qui est dit ce jour dans un gros titre du journal Sud-Ouest :
"Les grilles anti-marginaux ont été démontées jeudi soir "par mesure de sécurité", explique la mairie. Elles doivent néanmoins être réinstallés dans la journée de vendredi"
Monde aseptisé, la peur des pauvres, de la mort, des malades. Monde non secourable... a-t-il jamais été question un jour d'égalité en dignité dans la réalité sociale et politique ?
Il me souvient d'un coup cependant qu'il fut une époque au moyen- âge où l'on ramassait les vagabonds pour les mettre en prison... en Angleterre je crois, les infortunés pouvaient être pendus pour avoir volé un pomme.
Rien de nouveau sous le soleil dirons-nous, question traitement des "pauvres inférieurs". La période hippie qui fit illusion deux trois ans ne déboucha sur rien... gars et filles d'alors arboraient des looks moyenâgeux, signe de représentation de décontraction avérée face à la question de l'égalité ou pas entre gens ainsi lookés. Vanité tout est vanité !
Écrit par : sauge | vendredi, 26 décembre 2014
@sauge
Qui est cette Cloé ?
Cet enterrement ?
Auriez-vous l'obligeance de nous informer ?
D'avance merci.
Écrit par : tamet de bayle | samedi, 27 décembre 2014
C'est la Cloé de l'Écume des jours.
mais les curés de Vian... Je leur préfère les moines de Rabelais pour tout dire...
Écrit par : solko | samedi, 27 décembre 2014
Bien sûr, Solko, mais la question sous-tendait ce mélange du fait divers et du roman, manière d'argumenter de six ou sept générations pétries par les mains délétères des hussards noirs de notre bonne république.
Vian le gosse de riche se souciait des curés comme des guignes d'Angoulême.
Mais le boboisme montrait sa petite culotte dans les caves de St Germain.
Voilà qui était fort !
Une libération, quoi !
Enfin j'veux dire...
Écrit par : tamet de bayle | samedi, 27 décembre 2014
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