mardi, 15 juillet 2014
Le triomphe du neutre
Cette affaire commença il y a longtemps, avec l’abolition du sexe au profit du genre. Le triomphe récent de la théorie du genre, prônée par les gays et lesbiens, les Taubira, Belkacem et cie lui donna quelques lettres de noblesse… Elle prit corps ensuite avec la disparition du neutre dans la conversation courante : Le tu (2ème personne) se mit à remplacer curieusement le on. Au début, j’ai cru au simple anglicisme, l’anglo-américain du commerce, langue pauvre et sans nuances, sévissant partout dans le novlangue marketing. Ce tu indéfini permit en effet l’adresse directe au consommateur, puis au citoyen, là où l’indéfini français issu du vieux latin homo (un homme que je ne connais pas) parait à beaucoup désuet. Il faut de la familiarité au commerce. Ce tu n'est qu'un dérivé linguistique du célèbre I want you de l’armée américaine, en somme. Tout le monde s’y est mis. Il faut entendre les sportifs du mondialisme patenté massacrer l’oreille exercée : « Quand tu t’approches de la barre, c’est là que ça devient fantastique ». L’indéfini devenu défini SEMBLE apporter une proximité, une familiarité. C’est par ailleurs et partout le triomphe du tutoiement sur le vouvoiement dont la distance qu’il apporte, jugée trop classique, trop littéraire, trop je ne sais quoi, ne serait plus de mise dans le monde frelaté des bisournous où tout le monde, doté de son papa et de sa maman (et non plus de son père et de sa mère) s’aime. Hier, à Lyon, titre de l’inusable feu d’artifice tiré de Fourvière : Le feu d’artifice de l’Amour…. Glissons sur tant d’inepties.
Mais voilà que dans une pub récente pour Google, on voit des comédiens jeunes s’adresser directement à Google : « Google, montre moi, dis moi… »Comme si c’était un parent ou un ami (à condition, bien sûr, de penser ses parents ou amis comme des serviteurs, voire des esclaves, mais là aussi, glissons… Mieux : Google est le référent universel. Google, dis-moi, fais-moi, prends moi (pourquoi pas ?)… C'est précisément le moment que choisit le petit Hamon pour introduire l'enseignement du langage HTML dès l'école primaire à la rentrée. Si si ! Le vrai ABCD de l'égalité, pour le coup ! Les gurus de la modernité prévoient pour bientôt les appareils ménagers branchés sur le web et autres merveilles, les maisons intelligentes et les métropoles sensibles, alors, vos enfants doivent s'y préparer dès leurs premiers crayonnages et balbutiements….
On comprend dès lors combien cette disparition apparente du neutre est en fait son triomphe terroriste et navrant. La dissociation entre la question que je pose et la réponse que mon cerveau y apporte au profit de la question que je pose et celle que le logiciel ou le moteur de recherche apporte fait de moi un consommateur, un objet. Un neutre. Individu, citoyen, c'est ce qu'on continue de dire : sans sexe, sans âge, sans couleur, sans culture, sans religion, et sans ambition, que reste-t-il de ce moi parfaitement fondu dans le multiculturel technico-lambda ?. Dans le monde du neutre, nous sommes devenus tous égaux parce que tous broyés : blancs, noirs, jaunes, hétéros, homos, jeunes, vieux, valides, handicapés… Vive le progrès : Une humanité parfaite : une humanité abolie.
10:55 Publié dans Aventures post-mortem de la langue française | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : masculin, féminin, genre, neutre, grammaire, i want you, linguistique, littérature, belkacem, politique, arnaque, dictature, socialisme, google, hamon, html, éducation |
Commentaires
Parfaitement en phase, hélas, avec ce que vous mettez ici au jour.
Je pensais, en vous lisant, que c’est à l’écriture de faire l’archéologie du présent, de fouiller dessous les sédimentations déposées par la destruction du langage à seule fin de masquer l’essentiel : la pulvérisation de l’individu
C’est la raison pour laquelle je dis mis au jour.
Écrit par : Bertrand | mercredi, 16 juillet 2014
Coïncidence ? On songe à accorder le statut de "personne morale" à des robots ...
Écrit par : solko | mercredi, 16 juillet 2014
Ils l'ont déjà... Il n'y a plus qu'a inscrire ça sur le papier.
Ces salauds de politiques ne sont que les tabellions de la décadence
Écrit par : Bertrand | mercredi, 16 juillet 2014
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