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mardi, 01 décembre 2009

Vieilles nouvelles de la grippe

HYG109.jpgC'est là un fait assez important pour ne pas le laisser passer sans le consigner dans nos archives. Le mois de janvier 1837 a été témoin d'une épidémie catarrhale qui a frappé les trois quarts à peu près de notre population. Tous nos journaux, grands et petits, sont devenus un instant des journaux, de médecine. Notre premier théâtre a compté quarante-six malades dans son personnel, et pendant une semaine il a été fermé au public. Nos rues étaient désertes à huit heures comme d'ordinaire elles le sont à dix ; nos tribunaux ont suspendu le cours de leurs fonctions. La médecine et la pharmacie se sont emparées des habitants et de leurs écus. L’homéopathie, toujours infaillible, a offert son traitement. M. de Guidi a fait une brochure. En attendant, la toux a régné en maitresse, et la mortalité a triplé. Nous avons, à cette occasion, demandé au passé les différentes invasions de la grippe (1).

 

Ce fut en 1745 qu'elle fut baptisée en France de ce nom là. Le Français vit de tout. Nos contemporains ont conservé le souvenir des dernières apparitions de cette épidémie. Elles eurent lieu, à Lyon, en 1754, 1763, 1780 et 1782. Ce fut à ces deux dernières époques qu'on donna à la grippe les noms de la Folette, la Coquette, la Grenade. Et comme chez nous tout finit par des chansons, elle eut les honneurs d'un gai vaudeville, licencieux comme ils l'étaient presque tous alors. Nous n'avons pu recueillir que le refrain. Le sujet, le voici : c'est une jeune fille qui, dans chaque couplet, énumère un des symptômes de son mal, et son mal n'est, sous l'équivoque, autre chose que la conséquence d'une faiblesse de cœur. Le refrain donnera une idée de cette gravelure.

 

                             « Maman, le mal que j'ai

                         C'est la grippette , c'est la grippette ,

                             Maman le mal que j'ai

                         C'est la grippette du mois de mai. »

 

  Nous ne sommes guéres plus sages que nos pères, car il est question dans ce moment d'un vaudeville, où la grippe sera traduite à la barre du parterre du Gymnase. Robert Macaire et son camarade Bertrand sont venus à Lyon pour assurer contre la grippe et les voleurs, et tous deux sont, à la fin, grippés.... par les gendarmes. Nous verrons bien.           

 Léon BOITEL. (1837)

 

(1)   Voici le tableau chronologique du catarrhe épidémique connu sous le nom d'INFLUENZA (grippe).

Bien que depuis 200 ans on trouve cette affection comme une maladie NOUVELLE, de nombreuses autorités proclament que depuis longtemps c'est un mal épidémique. Les renseignements suivants vont les appuyer. On les doit à M. J. M. Gully, docteur médecin qui les a communiqués au CONSTITUTIONNEL.

Avant le 14ème siècle, on ne trouve aucun symptôme de catarrhes épidémiques , et en s'arrêtant à la moitié du 16ème* siècle, on ne trouve que bien peu de descriptions des symptômes de cette épidémie dans les écrivains contemporains. Il suffira pour la chronologie d'indiquer les dates de la première période. Voici les dates des invasions les plus développées de l'épidémie.


 

     14ème SIÈCLE. -- L'épidémie parut en Italie en 1323, 1337 et 1358 et en France en 1387. Elle se montrait alors funeste aux vieillards.

      15ème siècle :  -- En France, elle régna en 1403, 1410, 1411, 1427 et 1482 et en Italie en 1418 .

 L'épidémie de 1411 fut attribuée par les gens superstitieux à la punition céleste d’une chanson de l'époque très-obscène. Ceux qui guérissaient s'entendaient par dire leurs amis : « Oh ! Par ma foi, tu as chanté la chanson »

Jusques-là il n'est encore question de cette épidémie qu'en France et en Italie, les deux seuls pays en Europe qui peuvent se vanter d'avoir eu alors  des médecins qui consignassent leurs observations par écrit.

      16ème  SIÈCLE, -- En 15o5 et 1510, la grippe a parcouru l'Italie, la France et l'Espagne ; elle causa la mort d'Anne , femme de Philippe I er , et compromit les jours du pape Grégoire XIII.

 L'épidémie fit le tour de l'Europe dans les années i 1557, 1559, 1574 1580 ; si l’on en croit  Sennest, elle s’étendit même à une grande partie de l’Asie. Elle ne fut pas généralement funeste,  si ce n'est en Italie où l'on fit fréquemment usage de la saignée. A Rome seulement, 9,000 personnes succombèrent. Vilalha prétend que la grippe dépeupla presque entièrement Madrid. Elle se répandit à Barcelone avec une telle rapidité, qu'en l'espace de 12 jours, 20.000 personnes furent atteintes. En 1590, 1591, on la voit en France, en Allemagne  en Italie, s'attaquant surtout aux hommes, depuis le mois d'août 1590 jusqu'au mois d'août de l'année suivante, plus de 60,000 personnes furent victimes à Rome.

      17ème SIÈCLE. – En 1638 la maladie se montra à Londres. Willis en a fait une savante description ; elle fut surtout fatale aux vieillards. En 1663 elle sévît dans les états de Venise où dans l'espace d'une semaine on vit plus de 6.000 personnes atteintes. En 1669 et 1675, la grippe se répandit en Allemagne et en France : en 1676 en Allemagne et en Angleterre. Sydenham qui en fait la description parle de familles entières attaquées subitement. En 1679, irruption en Angleterre ; en 1691 elle est en Hongrie, dans la Carniole , la Styrie , la Carinthie , le Tyrol , la Suisse et sur les bords du Rhin. E n 1696, elle fit des ravages à Paris et à Rome.

 Dans cette dernière ville elle enleva une foule d'enfants.

      18' SIÈCLE. -- En 1709 , la grippe parcourt la Russie, la France et l'Italie. En 1719 , elle est en Russie , en Pologne , en Allemagne , en Suède , en Danemark , en France , en Angleterre,  en Italie, en Espagne, Jamais encore la maladie n'avait été aussi générale que cette année. La grippe commença en janvier lorsque le dégel avait remplacé la glace. Elle fut bénigne en Suisse; mais à Londres, à Paris, en Espagne, en Italie , ses ravages furent grands en huit jours,  pendant le mois de novembre 1908 personnes furent enlevées à Londres. L'épidémie de 1733-1734 n e fut pas moins répandue. Voici sa marche vers la mi-novembre 1732 ; elle s'était montrée en Saxe et en Pologne, de là elle passa en Allemagne, en Suisse, en Hollande. E n décembre, déjà elle était en Angleterre.

     Au commencement de janvier 1753, elle avait envahi la Flandre ; à la mi-janvier elle était dans Paris. Dans les derniers jours du mois, elle avait atteint l'Irlande ; en février elle était en Italie ; le 15, elle avait visité Livourne, et à la fin du mois, elle avait paru à Naples e t à Madrid. De là, elle se répandit dans le Nouveau-Monde  et d'abord dans la Nouvelle-Angleterre, suivant sa carrière au midi , elle passe aux Barbades et à la Jamaïque , puis tournant au sud-est , elle visite le Pérou et le Mexique. Les symptômes dans ces régions lointaines étaient les mêmes que ceux qui l'accompagnaient en Europe. Les chiens et les chevaux subissaient la même influence. Le froid avait été très-rigoureux. Elle ne s'était déclarée que par un temps humide et doux. En 1737, on la voit en Angleterre : Huxham en a donné la description.  En 1742, elle commence en Allemagne et elle passe successivement en Hollande, en Angleterre, en France, en Italie : 2.000 personnes succombèrent à Rome. C'est peut-être, comme le  fait observer Seumert, parce que les médecins italiens se montrent trop empressés de tirer du  sang aux malades :  Italici medici prompti  nimis ad mittendum sanguinem

En 1743, la grippe parcourt l'Italie, la France et l'Angleterre. Huxham dit qu'en une semaine elle enleva 7000 personnes à Londres ; les chevaux et les daims, mais surtout ces derniers, sont violemment  atteints. Pour la première fois, à cette époque, on lui décerne en France le nom de  GRIPPE.

En 1740, elle règne en Allemagne. E n 1738, en Ecosse. En 1780, elle recommence ces excursions dans toute l’Europe, partant de l'Allemagne. Baker fait observer que les ravages de l'épidémie sont beaucoup plu s forts dans la ville de Londres que dans les faubourgs.

    A Breslau, la mortalité fut de 100 personnes par jour. Elle avait commencé en février, elle a fini en juillet. En octobre, elle passa en Amérique. En 1767, toute l'Espagne se trouve envahie ; en 1775, nouvelle irruption de l'épidémie en Europe. Elle s'attaque également à l'homme et aux animaux. Pour la première fois, à cette époque, elle prend le nom générique d'INFLUENZA, Ce mot italien, caractérisait  l'influence prétendue des éléments. L'épidémie avait commencé en Italie, en 1780, la France et l'Angleterre sont attaquées. En France, on lui décerne les divers noms de la  FOLLETTE, la COQUETTE, la GRENADE , etc. En 1782, la Russie, la Suède et l'Allemagne sont sous l'influence. Un fait curieux, c'est que dans la soirée du 2 janvier, le thermomètre s'était élevé, à  St-Pétersbourg, de 35 degrés au-dessous de zéro à 5 degrés au-dessus. Le même jour, 3o,ooo personnes souffrent de l'affection catarrhale. Les Allemands l'ont nommée BLITZ KATHAZ ( l ' [air catarrhal) pour caractériser sa rapide invasion. Des marins, à bord des escadres anglaises  et hollandaises, en furent atteints.

  Vers la même époque, la même maladie paraît à Smigaglia dans les Etats-Romains. De là, elle se répand dans la Romagne, l'Ombrie, le Latium, la Toscane et les légations. Elle passe à Venise, puis, rentrant sur le continent, elle visite Pavie, Vérone, La Bresce et le Milanais. E n 1799, on la voit en Russie, à Cason, à Moscou, à St-Pétersbourg, à Cronstadt. En 1800, elle est dans le midi de la France, en 1802, en Italie et en France ; en 1813, en France; en 1817, en Angleterre et en France ; en 1833, dans toute la Grande-Bretagne. Il est probable que cette année elle fera encore le tour de l'Europe,

   En parcourant ce tableau chronologique, on acquiert la certitude que l'épidémie est l'inévitable conséquence d'un froid rigoureux remplacé par un temps humide. Elle a presque toujours commencé en novembre, décembre et janvier, et si quelquefois elle s'est montrée en été, son apparition a toujours été annoncée et accompagnée par un froid insolite et une grande humidité- »

 

 

Revue du Lyonnais » série 1 - n°5 ( 1837 ) « La grippe à Lyon Léon Boitel

07:06 Publié dans Des nuits et des jours... | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : grippe, h1n1, actualité, léon boitel, revue de lyon, littérature | | |

Commentaires

Très instructif en effet! (on ne dira jamais assez qu'en période d'épidémie, l'éventail est un excellent anti-grippe! Mouchez vous tous derrière vos éventails!)Bonne journée Solko.

Écrit par : Sophie | mardi, 01 décembre 2009

C'est un très bon article!
En effet le froid est un facteur important pour l'augmentation des cas de grippe.
Gael

Écrit par : symptome | mardi, 01 décembre 2009

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