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vendredi, 20 février 2009

Ecrivains aphones

Qu'est-ce qu'un écrivain aphone ? Un écrivain sans voix. Qu'est-ce qu'un écrivain sans voix : un écrivain qui ne sait parler que de soi. Soi. Soi, à tout bout d'pages, entraînant chacun de ses lecteurs dans l'illusion et la banalité que représente la pseudo-connaissance de soi par ce type d''écriture. Entraînant son lecteur dans sa vision lilliputienne des choses. Qu'est-ce qu'une vision lilliputienne des choses ? Une vision lilliputienne des choses est une vision dépressive du monde. Une vision vue de soi. La vision dépressive de l'écrivain aphone. Un écrivain a tout à fait le droit d'être névrosé (dixit l'illustre Barthes). Mais pas celui d'être dépressif. Car alors il perd sa voix. Je constate qu'un des traits communs de tous les écrivains aphones que les cinquante dernières années ont produits est d'être dépressif.  Ou de faire  comme. Des exemples ? On en trouve à la pelle.  Je me contenterai de deux icones : Côté mâle, regardez Charles Juliet. Côté femelle, tournez les yeux vers  Annie Ernaux. Aussi aphones l'un que l'autre. Aussi centrés sur eux. Vision du monde au ras de sa propre existence. Leur seul individu. Le mien. Nos miasmes. Aucun style. Le monde, avec cela, comme évacué. Absent.

Dans un chapitre de La culture du narcissisme, l'essayiste américain Christopher Lasch a fort bien analysé la manière dont ces écrivains aphones sont les chevaliers servants de l'ordre narcissique qui s'impose à nous tous. Il est l'un des premiers à avoir mis en lumière la différence entre l'introspection à laquelle une véritable autobiographie convie son lecteur, et la platitude désespérante de ce discours truqué qui est celui du faiseur d'autofiction.  Pour finir, ce paragraphe essentiel de Christopher Lasch sur le sujet,

« Les confessions entreprises dans cette atmosphère d'irresponsabilité dégénèrent en anticonfessions. Ces expositions de la vie intérieure en deviennent, sans le vouloir, la parodie. Ce genre littéraire qui semble mettre en valeur l'intériorité nous prouve au contraire que la vie intérieure est précisément ce qu'on ne peut plus prendre au sérieux. L'écrivain d'antan mettait à nu ses luttes intérieures, car il était persuadé qu'elles représentaient un microcosme du monde. Les confessions de l'artiste contemporain n'ont de remarquable que leur écrasante banalité. Le voyage intérieur ne révèle que le vide. L'écrivain ne voit plus la vie reflétée dans son esprit mais, au contraire, le monde, même vide, comme son propre miroir. Lorsqu'il rend compte de ses expériences "intérieures", ce n'est pas pour nous donner un tableau objectif d'un fragment représentatif de la réalité, mais pour séduire afin qu'on s'intéresse à lui, afin qu'on l'acclame, qu'on sympathise, et qu'ainsi l'on conforte son identité chancelante ».                                                    

 

 Christopher Lasch, La Culture du Narcissisme (Climats)

 

Voilà. C'est, brièvement, ce que j'appelle être aphone. Avoir une voix, et ne révéler que le vide. Mais la notion demande à être retravaillée en temps et heures. Elle le sera assurément.

 

Commentaires

Pour le coup le justicier se sent concerné!!! Très intéressant merci Solko.

Écrit par : tanguy | vendredi, 20 février 2009

Tiens Solko je me permets une remarque de "libraire":c'est bien de citer Climats! qui a édité Michéa aussi. D'ailleurs un nouveau livre de Lasch vient juste de paraître, qui s'appelle..."Le moi assiégé"!
Très bonne journée à vous (février est bientôt fini!)

Écrit par : Sophie L.L | vendredi, 20 février 2009

Cher ami Solko, et provocateur, avec ces "côté mâle" et "côté femelle", qu'en termes choisis ces choses-là sont dites. :-)

Le "côté mâle" d'abord : Charles Juliet.
Que j'ai peu lu, eu égard à son abondante bibliographie, mais je réparerai cela, votre billet m'y incite.
Charles Juliet et son admirable "Lambeaux".
Un livre intime, oui, et dense. Un dyptique, soixante pages contre soixante pages, les premières écrites en 1983, les secondes en 1995 : douze ans pour cent vingt pages.
Le même pronom "tu" dans chacune des deux parties. Dans la première partie, le "tu" désigne l'autre, la mère, mais la désigne en dehors de sa relation avec le narrateur. Avant sa naissance, hors de la relation qu'il aura pu entretenir avec elle, sauf dans les ultimes pages de la première partie, celles de l'adieu et de la mort.
Dans la seconde partie, le même "tu" désigne le narrateur, son texte renvoyant donc à lui-même, pour installer la relation à celle qui est maintenant sa mère, dans une relation évidemment tout aussi complexe et profonde, d'autant que le narrateur traverse à chaque instant, pour se constituer dans cette relation, la catastrophe extrême, celle qu'a inscrite la fin de la première partie.
("Une guerre éclair et la France ne tarde pas à sentir peser sur elle la botte de l'occupant. Très vite celui-ci met en place la politique qui va viser à éliminer ceux qui selon lui, appartiennent à une sous-humanité.
Dans cet hôpital où tu te trouves, la mortalité augmente.
Chaque matin, en ouvrant les portes les surveillantes ont un mouvement de recul. Les salles sentent le cadavre. Un de ces matins-là, un jour de juillet - tu viens d'avoir trente-huit ans - on constate ton décès. Tu es morte de faim.")Lambeaux, folio plus, p.66

Dominique Viart (La Littérature française au présent -Héritage, modernité, mutation-) parle à ce propos " d'écriture de la restitution, qui n'avance jamais rien sans mettre en doute ses propres investigations, qui se méfie des discours et des concepts, récuse les idées reçues et les vérités les mieux établies. (Dont) le souci d'honnêteté se marque aussi dans la spécification de la posture énonciative : on sait le plus souvent qui parle, à partir de quelle position, et selon quel projet. (Enfin) ce(s) récit(s) n'organise(nt) jamais le passé pour en faire un modèle, ni pour en tirer quelque leçon ou morale d'action : le passé ne leur sert pas à décider du présent, juste à refaire le lien, à comprendre aussi, parfois, comment on en est arrivé là."

"Côté femelle" : Annie Ernaux.
La grande Annie Ernaux, dont j'ai lu tous les récits (pas ses deux ou trois premiers livres qui étaient des romans autobiographiques, que je trouvais touffus, ennuyeux).
C'est avec "La Place" paru en 1983 qu'Annie Ernaux renonce au masque de la fiction et assume ouvertement l'élément autobiographique. C'est un récit sur le père, cafetier-épicier, écrit vingt ans après la mort du père.
Interrogée en mai 2001, pour le 23e Mai du Livre organisé par la F.O.L. des Hautes-Pyrénées, voici ce qu'elle en dit :

"J'ai sauté le pas de me dire que ce que je devais faire, c'était dire la réalité. Donc la narratrice qui disait "je" dans le livre, ça renvoyait à moi. Clairement, volontairement. Je ne changerais rien à la vie de mon père. Ce seraient les faits. Des faits quasiment d'ordre sociologique : il a quitté l'école à douze ans, il a travaillé dans les fermes... des anecdotes vraies, que je pouvais dire, qui étaient significatives de ce qui était pour moi l'aliénation de cette époque-là. Et aussi comment lui vivait les choses. C'est-à-dire que, dans mon souvenir, mon père me disait toujours : "C'était comme ça, on n'y pensait pas." C'est une phrase que j'ai remise dans La Place.
J'ai eu le sentiment que ce que je voulais faire, sans trahir, c'était, pour moi qui allais parler de quelqu'un dont j'avais été très proche, de quelqu'un qui appartenait à une autre culture, à un autre monde que celui qui était le mien maintenant, de ne pas offrir à ce monde cultivé (dont viscéralement je ne pourrais jamais être par mes origines) quelque chose qui fasse pitié. De ne pas offrir non plus quelque chose de glorifié, tel que "Autrefois, on était pauvre, mais qu'est-ce qu'on était bien, on allait chercher l'eau au puits." Le puits c'était dur ; chez nous il y avait une pompe et ma mère allait tirer l'eau pour faire la lessive. Si je l'avais fait, moi, j'aurais certainement un peu plus de muscles dans les bras, mais c'était une aliénation, le puits.
Donc il s'agissait pour moi, dans l'écriture du livre sur mon père, de trouver la voie étroite qui me permette de rester dans la saisie des signes de la réalité de la vie de mon père. La réalité de sa culture. Pour ne pas trahir et pour être juste."

En rappelant ceci sur Juliet et sur Ernaux, je n'explique rien, ne démontre rien. Vous réponds, simplement.

Je viens de finir, vous le savez le livre qu'Henri Béraud écrivit sur son père, en 1927, presque 20 ans après la mort de ce dernier.

Les conditions historiques de production de ces deux livres (Béraud et Ernaux) sont différentes.
Si le père Béraud, boulanger, a travaillé dur et a toujours baissé la voix devant "les gens instruits", il n'a cependant pas connu l'aliénation, la précarité et la pauvreté du cafetier, empêché de s'élever à la conscience de lui-même, et donc d'échapper à, d'exister.

La représentation n'en peut, à mon sens, être la même. Mais je ne m'aventurerai pas davantage sur ce terrain glissant.
J'aime lire Béraud. J'aime lire Juliet. J'aime lire Ernaux.

Écrit par : michèle pambrun | vendredi, 20 février 2009

Les écrivains sont aphones ? Aucune importance, puisqu'on fabrique de toute façon des lecteurs sourds.

Écrit par : Pascal Adam | vendredi, 20 février 2009

Si certains écrivains sont aphones, vous ne manquez point, cher Solko, de savoir d'autres "blogueurs" vous faire l'écho :) Que dis-je ? L'amplificateur ! Soyez-en très sincèrement remercié.

Écrit par : Le Photon | vendredi, 20 février 2009

Pardonnez moi, Michèle Pambrun mais Annie Ernaux m'ennuie profondément et j'ai insisté pourtant car je redoute les jugements définitifs fussent les miens or sa prose me paraît juste bonne à être déversée sur le divan d'un psy. C'est le cas de beaucoup d'auteurs actuellement. Qu'avons nous fait pour mériter cela, je vous le demande ?

Écrit par : simone | vendredi, 20 février 2009

@ Michèle Pambrun
Vous pensez bien que je ne me suis pas lancé dans ce billet sans avoir en tête et "Lambeaux" et "La Place" que j'ai lus - comment y échapper quand en plus on a le malheur d'être prof de lettres ? Je les ai lus et je n'ai pas entendu de voix, comme chez Béraud, ou chez Claude Simon, ou chez - si vous voulez parlez de grandeur, le grand Joyce. Dailleurs vous le dites vous-même, ou plutôt D. Viart que vous citez le dit : A force de douter, de ne rien restituer sans, de s'en tenir à, et tutti quanti, ces écrivains minimalistes, ces écrivains de l'inhibition qui certes ont inventé un genre, ont de mon point de vue, cessé d'être écrivain en route, ont perdu leur voix. Encore, si ce n'était que cela. Le roman français a besoin de guérir de tous ces gens qu'une critique littéraire ( Ah, Le Monde !) et universitaire a, en quelque sorte, inventé. Le roman français a besoin de retrouver du corps, du souffle, de la voix. Les vrais écrivains n'ont pas besoin d'adopter cette posture analytique (ah, les dégats du divan sur la littérature) mais de retrouver le monde, l'histoire. Si le récit de Béraud est bien supérieur aux deux autres, c'est précisément parce qu'il n'est pas que le récit d'une relation fils/père au sens existentiel du terme (quel ennui). Il y a du souffle, du chant, du soleil.
A partir de la citation de Lasch, la distinction qu'on peut faire entre autobiographie et autofiction mérite d'être creusée davantage. Mais encore une fois, le cadre étroit de ces commentaires le permet peu.

Écrit par : solko | vendredi, 20 février 2009

"L'ordre narcissique qui s'impose à nous tous" ? Permission de gueuler comme un putois : "non merci !" ? Sinon, c'est à en rester sans voix !
"Le voyage intérieur ne révèle que le vide." Gloups : le malheureux blogger qui nourrit quelque velléité en la matière -jusqu'à l'exhiber sur sa bannière d'accueil- doit-il fermer pour cause de risque de contagion de "vision dépressive du monde" ? (Du reste n'a-t-on besoin ni de blogs ni de plumes pour choir dans ce type de vision !...)
On peut aussi prendre au sérieux sa vie intérieure sans toujours se prendre au sérieux : ne pas en conclure trop hâtivement à la "parodie"... du moins, sur cette vie intérieure ! Sans doute est-ce d'ailleurs la clé permettant de naviguer entre les écueils de la "dépression" et de la "névrose"...

L'autonomie de la pensée, oui : l'autofiction, pouah ! Celle-ci étant d'ailleurs un assujettissement au regard des autres, elle se moule nécessairement sur leurs (non ?)pensées : antinomie de l'autonomie !

Écrit par : Michel | vendredi, 20 février 2009

@ Solko : Je trouve que c'est très bien que nous ayons des avis différents et si je me suis permis l'intervention ci-dessus c'est parce que je sais pour l'avoir lu sur ce site que vous êtes prof de lettres. Et que vous ne pouviez que connaître ces textes.
J'espère qu'il y aura d'autres échanges sur d'autres écrivains contemporains, comme on dit.
Moi, en tout cas, après "Le martyre de l'obèse" et "La Gerbe d'or", j'ai tout Béraud à me lire. Espérons que je vais les trouver.

@ Simone : Bonjour chère Simone, je comprends tout à fait votre ennui, rejet d'Ernaux. ça passe ou ça casse. Moi, je trouve dans ses livres un regard qui m'intéresse. Son écriture "blanche" m'intéresse aussi. J'ai eu des engueulades avec des amis au sujet d'Ernaux. Mémorables.
C'est pas fini.
Bien à vous

Écrit par : michèle pambrun | vendredi, 20 février 2009

@ Michel, je vais sans doute vous choquer (ce n'est pas la première fois, ni la dernière) mais ne confondons pas blog et production littéraire ou alors on en viendra a placer sur le même plan l'écriture d'un essai et celle d'une pièce de théâtre, lesquelles se situent aux antipodes ... Nous nous permettons tous sans exception l'utilisation de certaines expressions sur un blog qui ne seraient pas envisageables (du moins je l'espère) si nous écrivions un roman. Bon cela, dit j'apprends à l'instant que Solko enseigne la littérature ce qui ne me surprend nullement mais qui me laisse confuse quant à l'intérêt qu'il daigne me témoigner moi qui ai arrêté mes études à la fin de la IVème. Thomas Bernhard aussi mais je n'ai pas son talent. (peut-être sa hargne ?) Restons lucide avant tout.

Écrit par : simone | vendredi, 20 février 2009

@ Michel : Quelle que soit la résistance personnelle que vous engagez contre lui, il me semble que "l'ordre narcissique s'impose à nous tous"/ A la vue (regardez les affiches d'individus, partout, flattant le narcissisme), à l'ouïe (écoutez les paroles des chansons, à l'esprit : lisez ces autofictions qui se prétendent de la littérature), à l'intelligence (j'aime / j'aime pas deviendra bientôt le seul critère critique qui fera autorité) même au goût, puisque des publicitaires sont arrivés à "individualiser" les goûts, afin de créer des marques (êtes vous "thé à la vanille" ou "thé à la cannelle" ?...) Je ne doute pas que vous y resistiez vous, mais enfin, convenez qu'il s'impose à nous dans la société présente. Et comme il le fait particulièrement par le biais de cette littérature, je la dénonçais, en effet. Cela dit, Simone a raison de rappeler qu'un blog n'est pas une oeuvre littéraire. Cela me semble tenir de l'évidence. Et puis il y a blog et blog. Combien de blogs ne sont que des ersatz de journaux intimes exhibés, sans aucun intérêt...

Écrit par : solko | vendredi, 20 février 2009

@ Simone : Confuse ? Vous plaisantez, j'espère. Je n'ai jamais confondu le fait de faire des études avec le fait d'avoir de l'esprit. D'ailleurs, si vous me poussiez un peu trop sur ce terrain...

Écrit par : solko | vendredi, 20 février 2009

@ Michèle : Nous manquons de place pour developper tout cela. Bien sûr que la controverse peut être enrichissante ! Bien sûr ! Quant à l'oeuvre de Béraud, je serai le premier à vous dire qu'elle est inégale. Surveillez "Qu'as tu fait de ta jeunesse" sur ebay...

Écrit par : solko | vendredi, 20 février 2009

@ Simone : aïe ! shocking ! Mais allez, comme je ne suis pas rancunier et pour ne pas vous laisser ainsi "toute confuse" vis à vis de notre hôte, un jour -et sans doute sous l'empire d'un thé parfumé à la vodka- je vous avouerai peut-être que je n'ai pas poussé beaucoup plus loin que vous, question études. Mais chut : pas ici...

@ Solko : bien sûr que je conviens avec vous de ce qu'il convient de convenir ! Ce ne serait pas convenable de faire semblant d'être aveugle... et peu crédible : je n'ose m'imaginer tapotant sur un clavier en braille. Si cela existe ?

Écrit par : Michel | vendredi, 20 février 2009

je trouve que l'archétype est ANgot.juliet, sur un livre ou deux c'est supportable...aprés en effet c'est un peu répétitif

Écrit par : romain blachier | vendredi, 20 février 2009

Ernaux n'est absolument pas narcissique.
Qu'elle n'ait pas de style, je peux l'admettre.
"Les Années" est un inventaire de notre société, elle parle très peu d'elle-même.
Une de mes amies, prof de Sciences éco a étudié "La Place" en sociologie ! Du narcissisme ?
Quant à Charles Juliet c'est de l'autobiographique qui permet de se projeter autant qu'une fiction.
Mes élèves, des garçons, très peu lecteurs ont dans l'ensemble apprécié "l'année de l'éveil".
Quant à Lambeaux, c'est un livre admirable sur la souffrance,
la fatalité d'être née femme intelligente dans un monde de brutes, des paysans du début du siècle.
Un livre qui parle...en tout cas aux femmes, même si c'est côté mâle.
Ceci dit pour avoir une fois rencontré Charles Juliet, j'avoue avoir été déçue par l'homme : distant, peu intéressé par son lecteur. Mais on n'a pas à en tenir compte pour juger l'oeuvre.

Bien sûr que le narcissisme est omniprésent dans la littérature mais ces deux exemples ne sont pas convaincants.

Écrit par : Rosa | vendredi, 20 février 2009

ECRIT EMPORTABLE

La lecture ne dépend que du regard
Et l'histoire unique d'un homme
Est celle de tous les hommes
Même s'ils se croient femmes
Ou bien mâles

Le regard trouve dans la lecture
Ce qu'il y cherche
C'est-à-dire rien
Mais avec du parfum
Pour en faire des sandwichs

Les chants sont la force des hommes
Même aphone la voix parle
En iridescences de candeur
En fluorescences de saveur
En arborescence de douceur


au sujet du pronom "tu", j'aime beaucoup ce sonnet (11) de shakespeare^^:

Aussi vite que tu vas décliner, tu grandis
Dans un des tiens, de ce que tu y laisses
Et ce sang frais, à qui tu accordes renaissance
Tu peux l'appeler tien, quand tu transformes sa jeunesse

Ici vivent sagesse, beauté et élargissement
Sans folie, vieillesse et froid déclin
Si tous le voyaient ainsi, le temps s'arrêterait
Et trois fois vingt années éloigneraient le monde

Laisse ceux que nature n'a pas fait pour mémoire
Périr lourds, déplaisants et sans forme
Regarde celui qu'elle a le mieux doté, à qui elle a donné le plus

Généreux présent que tu dois chérir généreusement
Elle t'a gravée de son sceau, et conçu de fait
Pour écrire encore et ne pas laisser mourir cet exemplaire

Écrit par : gmc | vendredi, 20 février 2009

Que de réactions diverses, contrastées, à cette réflexion fort intéressante de Christopher Lasch. Ce qui m'amuse, c'est de voir à quel point le mot "narcissisme", paradigme pourtant structurant de la société dans laquelle nous sommes, est dénié par certains/ certaines contre toute évidence - et je renvoie ceux que cela intéresse au magnifique essai de Lasch, "la Culture du Narcissisme"-,
@ Sophie LL : Oui, "Climats", mais savez-vous que Flammarion a racheté Climats ? du coup Lasch et Michea se retrouvent exportés avec. "Le moi assiégé", très bel essai également, ainsi que "Le seul et vrai paradis". Tout Lasch est à lire, car c'est une synthèse honnête, courageuse des symptômes de la mutations de la société américaine à présent plongée dans la crise qu'on connait.

Écrit par : solko | vendredi, 20 février 2009

@ GMC :
- Magnifique, en effet.

-"Même aphone la voix parle" : je sais que vous aimez les antithèses et les paradoxes, mais tout de même... Vous allez bientôt me dire que Carla Bruni a du talent ?

Écrit par : solko | vendredi, 20 février 2009

Solko: oui Flammarion a racheté Climats, mais depuis quelques années Flammarion appartient à l'éditeur italien Rizzoli, alors...!

Écrit par : Sophie L.L | samedi, 21 février 2009

@ Sophie LL : Rizzoli ? Un producteur de spaghettis ?

Écrit par : solko | samedi, 21 février 2009

le talent caché, c'est un peu comme la beauté cachée... d(^_^)b

http://www.youtube.com/watch?v=ZqvD8k02mvk#

Écrit par : gmc | samedi, 21 février 2009

Le producteur de spaghettis qui édite aussi le Corriere de la Serra avec des oignons de la viande hachée et beaucoup de tomates juteuses

Écrit par : Sophie L.L | samedi, 21 février 2009

@ Sophie : Et Lasch se trouve embarqué là-dedans, indirectement. C'est, post-mortem, le moi assiégé...

Écrit par : solko | samedi, 21 février 2009

@ GMC :
La beauté cachée de lady laid
Mais Nicolas est beau, voyons

Écrit par : solko | samedi, 21 février 2009

Erratum, j'ai dit une ânerie - que vous avez eu la délicatesse de ne pas relever!: je savais que Lasch est mort depuis longtemps mais je croyais que "Le moi assiégé"était un texte inédit! Honte à moi! c'est une reparution. Bonne nuit Solko.

Écrit par : Sophie L.L | samedi, 21 février 2009

Et bien... j'arrive après la soupe...

La réflexion est fort intéressante... j'approfondirais, merci à vous... mais j'avoue que le propos sur Juliet me parait dur.

Que son écriture soit tournée vers lui-même, cela semble vrai (je n'en ai lu que deux), mais je ne l'avais pas vu s'inscrire dans "notre" époque. J'ai perçu en lisant Juliet une humilité et un minimalisme que je ne pensais pas compatibles avec le narcissisme.

Bref, nous manquons d'espace pour approfondir tout cela... merci de toute façon pour la piste à explorer..

Écrit par : Thomas P | dimanche, 22 février 2009

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