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vendredi, 06 février 2009

L'argent du divertissement

Je suis toujours très étonné de la façon dont comiques, sportifs et chanteurs de variétés jouissent auprès du grand public d'une sorte de blanc-seing économique. Les mêmes qui s'insurgent devant les fortunes impunément accumulées par des patrons industriels ou des financiers véreux vont trouver normal qu'une Céline Dion, un Jean-Marie Bigard ou un Thierry Henry fassent en peu de temps des fortunes considérables, créent de véritables dynasties (Dutronc 1, Dutronc 2 - Noah 1 Noah 2 ...), et deviennent les gurus d'une société de plus en plus décervelée, prête à s'extasier devant n'importe quelle nouveauté technologique. Et pour reprendre une remarque évoquée dans le commentaire d'une autre note : « Les mémés à petites retraites qui dansent sur Capri c'est fini se souviennent-elles qu'au pire moment de ce qu'il appelle sa traversée du désert, un type comme Hervé Vilard gagnait 30 000 francs par mois en n'en tirant pas une rame de la journée, grâce à l'industrie délétère du disque ? »

Les arguments qu'on oppose à toute critique de l'argent du divertissement sont toujours les mêmes : d'abord, on élude la question de l'argent du divertissement pour ne retenir que celle du divertissement lui-même : et si vous critiquez le divertissement, vous êtes forcément un peine-à jouir ou un dépressif. Ah bon ? Pourtant le propre du rire, n'est-il pas d'être gratuit ? Ne pouvons-nous plus rire de nous mêmes par nous-mêmes ?  et en quoi avons-nous besoin de la bande à Djammel ou de la bande à Ruquier ? Je préfère rigoler à la terrasse d'un café avec des amis en buvant une tournée que d'aller voir des spécialistes du rire, gens cyniques et malsains comme ces capitaines d'industries dont les salaires et les primes défraient régulièrement la chronique. Pas touche, dit Florent Pagny, à ma liberté de penser. Mais quelle différence entre la liberté de penser de Florent Pagny, celle de Zinedine Zidane, et celle des patrons des banques et des groupes industriels ?

L'autre argument est de faire de ces gens, footballeurs, histrions, et autres suceurs de micros des artistes à part entière ou des acteurs de la vie culturelle. Le monde consacrait hier une page entière à un rugbyman, Thierry Dusautoir, sous un titre à la Libé, Serial Plaqueur. C'est vrai : que serait la France sans Thierry Dusautoir, n'est-ce pas ? Et le monde, sans le bon Yannick Noah ? Non seulement tout ce ramassis d'opportunistes incarne donc la vie culturelle mais de surcroit, « la vie culturelle populaire ». Et donc si vous critiquez cet argent qu'ils accumulent sur finalement ni plus ni moins la connerie du plus grand nombre, vous êtes non seulement un peine à jouir et un dépressif, mais de surcroit un élitiste (avec toutes les connotations négatives que ce beau mot trimballe avec lui désormais) et sans doute un jaloux...

J'en conclus que l'argent du divertissement, comme jadis celui de l'Eglise, est devenu un tabou. En dénoncer le trafic scandaleux relève du sacrilège, dans cette société du spectacle où la duplicité est parvenue à s'ériger en morale absolue et en syntaxe universelle. Continuons donc à dénoncer les salaires de Sarkozy et ceux des grands patrons de la société du spectacle en nous régalant des exploits des sportifs et des histrions médiatisés par ses soins. Qui a dit (et redit)  qu'un roi sans divertissement est un homme plein de misères ?

 

Commentaires

c'est surtout que ces modernes gladiateurs (dusautoir est un mec intéressant par ailleurs) permettent aux télés, aux maisons de disque et au sport busisness de générer de l'argent defaçon bien plus considérable que les émoluments de ces figures de la chanson populaire ou des stades.

Écrit par : romain blachier | vendredi, 06 février 2009

Savez vous qu'il y a une chanson d'hervé Vilard qui a pour titre
"ça va faire pleurer la concierge" ... ?
Quand je dis ça, je ne dis rien évidemment ;-))

Décidément... J'aime beaucoup vos colères.

Écrit par : frasby | vendredi, 06 février 2009

Bravo. Preuve en est que le silence n'est pas toujours d'or.

Écrit par : Christophe Borhen | vendredi, 06 février 2009

Bah Solko, nous sommes tous des peine à jouir et des dépressifs!
Je vous embrasse bien fort tiens!

Écrit par : Sophie L.L | vendredi, 06 février 2009

" nous sommes tous des peines à jouir et des dépressifs "
Mais pas du tout ! Je m'inscris en faux !!!

Écrit par : simone | vendredi, 06 février 2009

@ Simone : Si, si, vous dis-je : peine à jouir, dépressifs et de surcroit jaloux. J'insiste.

Écrit par : solko | vendredi, 06 février 2009

@ Frasby : Ce n'est pas une colère. Mais une analyse très calme, vous savez.

Écrit par : solko | vendredi, 06 février 2009

Ce que je trouve horrible : l'expression "acheter un joueur" ou "vendre un joueur" d'un club de foot à un autre

Écrit par : Nénette | dimanche, 08 février 2009

@ Nénette : c'est vrai que cette expression est horrible. Mais au fond, n'est-elle pas l'écume visible du même phénomène, omniprésent dans le monde du travail, et ce dans tout secteur ? La condition sine qua non pour s'y insérer n'est-elle pas précisément ce qu'on nous serine depuis des décennies : "savoir SE vendre" ? Forme (à peine) subtile d'odieux chantage au job.
Que peut-il rester de la liberté de penser quand on réduit l'homme à ne plus être que sa propre marchandise ? Ce n'est peut-être d'ailleurs pas indifférent à cette sourde culpabilité par rapport à l'argent : de "divertissement" ou non, sa concentration sur une seule tête laisse instinctivement supposer une sorte d'auto-prostitution aliénante.
Ce qui peut se voir comme un jugement "vertueux" à l'égard d'autrui... ou plus sûrement un mouvement d'humeur jalouse et envieuse qui ne veut pas dire son nom !...

@ Solko : merci pour votre accueil d'hier soir. Afin d'abonder dans le sens de Simone (mais si, mais si : cela peut arriver entre deux épiques échauffourées !), nous allons poursuivre l'un et l'autre un gros, gros effort d'auto-discipline dans vos colonnes... afin qu'elle ne dérive point en Cinquième Colonne !... Quoi qu'il en soit, ce ne seront pas des problèmes d'argent qui nous divertiront l'un ou l'autre !

Écrit par : Michel | dimanche, 08 février 2009

@ Solko : ah, j'oubliais ! Je vole au secours de Simone s'inscrivant en faux sur "peine à jouir, dépressifs et de surcroit jaloux." Allez : disons que pour ma part, je me tiendrai à mi-chemin entre vos deux positions, y allongeant la sauce du rire sans ticket d'entrée. Ainsi, l'on jouit d'une certaine liberté ; on s'interdit naturellement de déprimer. Seul hic : à défaut de jalousies que l'on s'attache à extirper de chez soi, on court le risque d'en déclencher chez les autres. Mais cela, c'est LEUR problème : plus le nôtre...

Écrit par : Michel | dimanche, 08 février 2009

@ Romain : "Gladiateurs", Ribéry, Henry et Benzema ? Vous ne trouvez pas la métaphore un peu spécieuse ? Je me demande ce que penseraient les gladiateurs de l'Antiquité de ces vestiaires des milliardaires !

Écrit par : solko | dimanche, 08 février 2009

@ Nenette ! S'ils pouvaient les vendre au diable ! Mais on va encore me dire que je suis dépressif, à avancer des pareils trucs...

Écrit par : solko | dimanche, 08 février 2009

@ Frasby : La concierge étant en pleurs à cause d'Hervé, le courrier ne sera pas distribué ce matin.

Écrit par : solko | dimanche, 08 février 2009

@ Christophe : Merci.

Écrit par : solko | dimanche, 08 février 2009

@Solko : Je sais que c'était une analyse très calme ...Vous êtes un stoïcien, mon ami
(dépressif ? ) ...Pas du tout ;-)) Je retire ce mot "colère". Vous pouvez sucrer mon commentaire. Je ne comprends rien aux gens. Vous voyez ! comment ça perturbe, quand vous parlez d'Hervé Vilard... ! Tout ce qui arrive dans le monde, c'est de votre faute de cette façon d'analyser tout calmement ;-)).
Au fait, Il y a une phrase encore meilleure que "savoir se vendre", je la tient de Machine Laroche Joubert (Reine de la com de la Starac) c'est "prendre le Pouvoir". précédé de un: "On ne va pas se mentir" de Nikos Aliagas, frère D'adidas, le poète grec. Et puis aussi Hervé Vilard, il a repris aussi des chansons de Barbara...
Alors ? Toujours pas en colère ?

Écrit par : frasby | lundi, 09 février 2009

@ Frasby : Vous m'offrez sur un plateau un sujet de billet pour la rubrique lieux communs. Merci à vous.

Écrit par : solko | lundi, 09 février 2009

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