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mardi, 31 août 2010

Giono : la contagion du mal

Au début du Roi sans divertissement, le capitaine Langlois est un homme naïf.  Entendons par là qu’il croit bêtement que peut exister une justice humaine susceptible de condamner les méchants pour le bonheur des bons.  Au début du roman, Langlois n'est qu'un cow-boy.

Lorsqu’il arrive dans le village où Bergues vient de disparaître tout juste après Marie Chazottes en ce premier hiver en compagnie de six gendarmes, il croit tellement à cette justice qu'il souhaite même la rendre : ayant fait chou blanc, il doit cependant quitter le village en mai 44. Et la vie reprend son cours durant l’été. L’été est une saison sans crimes. C'est une saison banale.

Langlois reviendra donc « dès le début de l’hiver suivant ». Cette fois-ci, il est seul. A-t-il déjà compris que le terrible mobile de l’assassin est l’ennui, le terrible ennui de l’hiver ? C’est bien possible. Il a mûri. Il s’installe chez Saucisse où il attend patiemment le prochain crime, tout en discutant avec la vieille lorette de la « marche du monde ». Une parenthèse ici : l’action se passe-t-elle comme la chronique le prétend en 1844 ou comme les nombreuses distorsions laissées par Giono le suggèrent en 1944 ? Car d'un siècle à l'autre, de la Sylvie de Nerval à sa brodeuse à lui, il a marché le monde : deux guerres mondiales, rien de moins ! Et pour quel gain ?  

En tout cas le personnage Langlois va comprendre au dix-neuvième siècle ce que Giono aura, lui, compris au vingtième siècle face à certaines cours de justice de prétendus résistants, une leçon qu’on peut appeler la contagion du mal : dans le roman, le justicier quelque peu désenchanté réserve en effet l’une de ses premières visites au curé de Lalley, pour lui assurer qu’en ce 24 décembre 44, le village et ses habitants ne risquent rien puisque le sacrifice divin sera « un divertissement suffisant ». C’est la première occurrence de ce terme intriguant, emprunté à Pascal, et sur lequel le titre déjà attire notre attention. Une autre indication dans cette scène entre Langlois et le curé, cette remarque allusive à propos de l’assassin : « ce n’est peut-être pas un  monstre… »

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19:06 Publié dans Des Auteurs | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : littérature, giono, brel, un roi sans divertissement | | |