lundi, 28 mai 2012
Du cinéma plus-que-parfait
Vu (revu) M le Maudit hier soir (ou ce matin) sur la 3 (France 3). Film plus que parfait au sens grammatical du terme, tant le passé durant lequel il me paraissait parfait est à présent accompli. Parfaits, ces noirs et blancs d’une autre époque, ces perspectives et ces plans insistants sur une autre mode, d’autres meubles, (clubs notamment), d’autres briques et d’autres façades, une typo datée et des chapeaux vissés sur le crâne. Cigarettes aussi, coupes de cheveux, cols de chemises ouverts sous nœuds de cravates défaits, téléphones noirs et télégraphistes échappés du muet : une époque, ce qu’il en reste et sa mythologie d’être un classique du septième art, c’est quoi ça ?
Me revint aussi l’époque durant laquelle je regardais M le Maudit, justement, – heure du ciné club demain c’était le lycée - , pantalons pattes d’éph’, tapisseries cubistes au salon et meubles en teck, Guy Lux et les cartes perforées de son Palmarès aux chansons, la couleur partout, Girardot dans Mourir d’aimer et Piccoli dans Max et les Ferrailleurs qu’elles étaient lointaines les années 31 de monsieur Fritz Lang il y avait quarante ans de cela et qu’ils étaient intimidants ces mots d’Art et d’Essai, comme sont éloignées, dissociées, perdues à présent celles durant lesquelles je regardais M le Maudit pour la première fois, et son long monologue en plan fixe à la toute fin, le criminel agenouillé et sanglotant devant ses jurés la pègre prête à le lyncher comme dans une page de Kafka, un temps passé qui en a rejoint un autre d’avant l’abolition de la peine de mort et les voici comme juxtaposés en leur bobine chacun sur la frise oh comme on est loin de Cannes et de son palmarès, du cinéma plus-que-parfait, vraiment…
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