mardi, 12 juin 2012
Les affaires de l'Europe
L’euro qu’il faut sauver, l’euro qu’il faut gagner… Crise ou coupe, en ce mois de juin, on entend partout parler de l’euro, que ça en vire au névrotique, à l'obsessionnel ! Moi je vous dis l’euro dépêchons-nous d’en sortir ou de le perdre pour au moins deux raisons :
D’abord parce que l’euro est tout le contraire de l’euphonie : [øro], Ces deux voyelles fermées, vous trouvez ça doux au palais, suave à la lippe, franchement ? Obtus et fermé comme un cul de bœuf au moment de l’abattage, rien qui fleure la joie, l’ouverture. Le français aime le e muet, tous les poètes (les vrais, ceux qui, plus que le souci du dire, prennent le soin de l'écouter) le savent : La Fontaine, Racine, mais aussi Rimbaud, s’il faut pour être compris à tout prix être moderne…
Pas de e muet, donc. Autrement dit, une Europe de consommation sans devenir et sans immédiat, un sigle de banquier et de président de l' UEFA, rien de plus. Pet de mouches. Murmurez-vous, pour vous en convaincre, et lentement, et les yeux clos, et en prenant votre souffle : [ europ].
Jupiter et l'Europe, Gustave Moreau
Le e muet, rime féminine, reste en suspens.
Il faut, mes amis, le deviner sur le bout de la langue, ce « e » : Europ…
J’en arrive à la seconde raison.
Euro,c’est bourrin, euro, c’est masculin. C’est une une rime masculine, une rime en « o », les pires. Avec quoi voulez-vous faire rimer ça ? Avec ego ? Avec égaux ? Deux termes abominables, réfléchissez-y… Tandis qu’Europe rime avec philanthrope…
Europe a le juste sexe, le juste ton, la juste proportion. Zeus, rappelons-le, captiva la belle nymphe. Depuis qu’un prof de latin m’apprit la chose en classe de seconde naguère, je n’ai jamais pu pisser contre l’ocelle basse d’un platane sans penser à Ovide narrant le verbe haut l’enlèvement d’Europe par Jupiter : plus de gueule que les commentateurs des matchs, que les Benzema, Ribéry et consorts, que la langue de bois des politiques ou les déplorations d’économistes, franchement !
Eu-ro-pe donc !
Depuis Delors et Maastricht (le père de Martine au Sénat), c’est sûr,comme je la regrettre, « l’Europe aux anciens parapets… », c’est peu de le dire, Arthur !
« La faire », disent, non sans culot , ceux qui la volent aux peuples et la défont d'éléction en élection sous nos yeux tristes…
Les footballeurs, eux, courent après les millions d’euros qui font les millions de malheureux, ironie du sort. Nadal soulève la coupe quand les banques espagnoles coulent les crédits de ceux qui le vénèrent outre Pyrénées. Les pauvres, ils appellent le sport un challenge pour les nations tandis qu’ils matent le gazon vert ou la terre battue à la TV. Ils peuvent, ah ils peuvent être fiers, Zbigniew Brzezinski, et ses potes de la Trilatérale qui l'ont kidnappée, l’essai est transformé, et pour des lustres !
Mais comme l’euro reste loin de cette Europe féminine et euphonique, celle de Montaigne en Italie, de Rousseau à Genève, de Chateaubriand à Prague, et de tous ces écrivains voyageurs, amants magnifiques, qui l'ont chantée, l’Europe !
00:10 | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : euro, europe, football, crise monétaire, politique, sport, chateaubriand, littérature, l'europe aux anciens parapets, rimbaud, enk-vement d'europe, gustave moreau |