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samedi, 04 février 2012

Vote utile et double contrainte

Les effets de l'injonction paradoxale dans l’interaction humaine ont été décrits par Paul Watzlawick dans le chapitre 6 de Une logique de la communication, titré « La communication paradoxale ».  C’est  là que s’élabore la fameuse théorie de la double contrainte, popularisée par le Collège invisible de Palo Alto.

Il y explique que la double contrainte se manifeste dès lors que dans une relation intense entre un destinateur et un destinataire,  un message est émis de telle sorte que :

-         Il affirme quelque chose

-          Il affirme quelque chose sur sa propre affirmation

-         Ces deux affirmations s’excluent

Pour que la double contrainte soit portée à un effet maximal, il faut que le récepteur du message soit placé dans l’impossibilité de sortir du cadre fixé par le message, soit par une métacommunication critique, soit par le repli. De sorte que celui qui se risque à dénoncer la double contrainte soit sanctionné en passant pour une sorte de méchant ou de fou.

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Ce qu'affirme l'image et ce qu'affirme la légende s'excluent mutuellement. 

En appliquant cette analyse à la campagne éléctorale qui se met en place, on s’amusera ici à débusquer la façon dont cette stratégie est bien présente à plusieurs niveaux dans les messages qui sont proposés aux électeurs par les différents candidats.

On commencera par un message particulièrement pervers envoyé par les deux principaux, ceux qui sont censés – au nom d’une sorte de droit de cuissage républicain- se trouver de droit au second tour : celui  du vote utile.

La notion de vote utile est utilisée à gauche comme à droite en référence au résultat prétendument tragique du 21 avril 2002 et à la propagande médiatique qui a suivi pour le dramatiser dans l’opinion publique

Elle joue sur cette notion de double contrainte parce qu’elle enferme dans une sorte de culpabilité les électeurs peu convaincus par la capacité des candidats officiels de l’UMP ou du PS à représenter qui la droite, qui la gauche (1), et enclins à utiliser le premier tour pour le faire savoir, dans le discours d’une apparente stratégie qui les conduiraient in fine à plébisciter par deux fois le candidat qui n’est pas à l’origine celui de leur choix, à l’inscrire définitivement dans la connotation « de droite » ou « de gauche » censée être la sienne, et à le plébisciter de la scandaleuse façon dont le fut Jacques Chirac, dont le score en vérité dérisoire fut digne d’un Napoléon III de la Cinquième République.

L’électeur se trouve dans ce cas de figure contraint de voter pour un candidat officiel non pas parce le message de son programme le convainc (il affirmerait quelque chose), mais parce on lui dit qu’il est utile par défaut qu’il  s’en contente. (affirmation sur la première affirmation créant l’injonction paradoxale).

Contraint de voter pour un candidat qui n’est pas vraiment le sien  au premier tour et pour « le moins pire » au second, l’électeur se trouve ainsi enfermé dans un ultimatum électoral qui n’a, si on regarde de près le processus, plus grand chose de démocratique, mais dont la propagande médiatique lui dira qu’il participé à « la Victoire » ou à « l’Histoire » en étant un « bon citoyen ».

Deux seules façons de s’échapper de cette double contrainte aliénante, soit métacommuniquer, soit fuir : dénoncer publiquement l’imposture ou ne pas voter. Dans les deux cas en effet, les sectateurs zélés qui défendent « le parti » ne manqueront pas de lui dire qu’il est soit un « méchant », soit un « fou »

(1)             Signifiés il faut bien le reconnaitre de plus en plus abscons

13:06 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : politique, ps, ump, palo alto, double contrainte, vote utile | | |