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jeudi, 24 novembre 2011

Au moins, j'aurais laissé un beau cadavre

Billet invité de Patrick Verroust, à propos du spectacle de Vincent Macaigne, MC2, Grenoble.

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Vendredi soir, j'ai subi Au moins j'aurais laissé un beau cadavre. La prétention du titre me laissait espérer, mieux, qu'une bouteille de Beaujolpif.

Ce spectacle, je l'ai trouvé pute, manipulateur, profanateur. J'entends, par ce dernier terme, un acte gratuit, potache, sans signification. Vincent Macaigne pratique le théâtre de l'outrance, du bruit et de la fureur. En l’espèce, il a oublié le théâtre et la fureur pour surjouer, le rôle qui fit sa réputation, ce mec cogne. La manipulation ne se situe pas que dans le plaisir dictatorial qu'il s'octroie,  de faire lever et saluer les spectateurs « ad libitum », de les éclabousser d'eau « putride », elle consiste, surtout, à dire tout et son contraire, à se situer dans un registre trash avec de couteux clins d’œil, esthétiques. A saturer le public, à l'égarer.Sa génération est d'une époque sans repères, il en joue et en abuse. Il a le talent, particulier, de taper à côté des émotions, de faire mine de choquer, d'épater le bourgeois, tout en le caressant, mine de rien, dans le sens du poil. Il fait gueuler pour gueuler des imprécations, sinon sans queue ,du moins sans tête. Il accapare non seulement son domaine mais aussi celui des spectateurs. Pour ma part, je n'ai nul envie de me tordre le cou pour regarder les gesticulations de ses acteurs. Le spectacle est long, avec d'insupportables  longueurs, introduites malhabilement. Je sais bien que cette génération est la génération du mobile incessant, mais téléphoner les situations à  ce point est enfantile. Je me demande s'il n'y a pas une perversité à maintenir assis, les spectateurs aussi longtemps, sans objet. En fin de spectacle surgit un aquarium dans lequel il est évident que tous les protagonistes vont aller se vautrer, l'envie d'aller les y plonger, rapidement, à coup de pieds dans le cul, fut vive. Trois malheureux moutons furent introduits sur scène. Que faisaient là ces bêtes terrorisées, à  part symboliser le manque d'égard envers les spectateurs cloués à leur siège ? Un château d'Elseneur se dressa, effet sensuel et esthétique garanti, il se dégonfla, aussitôt et cela deux fois.

Actuellement, il doit y avoir un contrat entre la MC2 et les metteurs en scène, il est difficile de voir des spectacles , sans, au moins, un acteur nu. C'est, peut être l'effet des réductions budgétaires, il n'y aurait plus de costumes pour tout le monde et un nouveau métier émergerait « déshabilleuse ». Il est rare que cela ne soit pas gratuit. Je donne acte que, cette fois ci, la première scène  de nudité et de fornication avait du sens et aurait bien servi le spectacle si elle avait su surprendre en n'allant pas tomber dans la fosse  à l'attrait irrésistible. La seconde m'a paru être un acte compulsif, sans intérêt.

Le monologue de l'acteur nu, outre sa longueur, le monologue, voulait, peut être, signifier que le spectacle partait en couilles, ce dont nous étions nombreux à nous en être aperçu. Les applaudissements furent nourris, sans plus. Il est certain que dans cette période où le trash est un signe de vitalité musicale entre autre, il y a un public pour ce genre de prestation. De toute façon, il y a, toujours, un public. J'ai noté, les symboles accrochés au décor, drapeau français, européen, drapeau des croisés, faucille et marteau, hure de sanglier mais il ne me semble pas avoir vu de symboles représentant le fascisme.

Je suis un farouche défenseur de la liberté d'expression, plus précisément , de la nécessité d'apprendre à penser par soi même, et à apprendre à penser ce qu'on pense. J'ai entendu des enseignants se demander s'ils  amèneraient des élèves voir ce spectacle. Je leurs ai déconseillé d'y amener des élèves non avertis et sans repères. Ils pourraient sortir contents et satisfaits , leurs égos paumés y trouveraient justifications. Je leurs ai recommandé de les emmener voir des spectacles où l'expression est portée par une grande rigueur, dans le respect du texte, la mise en scène, le jeu des acteurs. La liberté d'expression, sans rigueur ni cohérence, n'est que flatulence liberataire  complice d'un libéralisme qui a besoin de la pauvreté de pensée pour spolier sans vergogne.

 Paradoxalement, par des chemins différents, ce spectacle rejoint des aspects du théâtre de Georges Lavaudant et d'autres en produisant un spectacle visuel et sonore à regarder sans s'attacher à tout voir et écouter. Cette création me semble se rapprocher d'une performance d'art contemporain.  Un théâtre, telle la grande salle de la Mc2 ne me semble pas appropriée à ce type de spectacle que je verrais mieux dans un grand espace où les spectateurs pourraient déambuler à leur guise, aller, venir, discuter, boire un verre, échapper à toute main mise, garder leur libre arbitre et leur droit d'aller et venir.

 Vincent Macaigne vous avez oublié la beauté de l'écriture de W Shakespeare, lisez mieux , vous vociférerez à meilleur escient.

Patrick Verroust

 

MC2, Grenoble, du jeu. 24/11/11 au ven. 25/11/11

07:22 Publié dans Des pièces de théâtre | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : théâtre, vincent macaigne, littérature, shakespeare, mc2, grenoble | | |

Commentaires

Je n'ai pas vu le spectacle. Ce que vous en dites me laisse accroire que c'est un spectacle sans risque, issu de ce nouvel académisme devenu une attristante convention -gueuler, se déshabiller, faire violence aux classiques (!!!) appeler ça une performance ou mieux une provocation... - . Ce type de théâtre, qui plait à présent au troupeau, vous verrez, ce sera le théâtre "pompier" de demain. Laissons les imbéciles trouver cela original et innovant...

Écrit par : solko | jeudi, 24 novembre 2011

Patrick a décidément, en plus du sens critique, une belle plume. Texte qui me ravit à beaucoup d'égards. Et ce qui y est dit du Théâtre, est hélas transposable en littérature. Selon mon sens "passéiste".Classique plutôt.
"Taper à côté des émotions", oui, Patrick...Mais quand on n'en éprouve pas, d'émotions, autre que celle affligeante du cabotin, difficle de trouver le la pour émouvoir un public.

Écrit par : Bertrand | jeudi, 24 novembre 2011

Solko: Merci de cette invitation!

Le libéralisme a besoin de laisser croire que l'époque actuelle est dépourvue d'idéaux, d'enjeux politiques,que l'existence n'a pas de sens. Replacer son pauvre "petit" moi narcissique dans une vision collective n'est pas aisé, certes. Mais, un simulacre de baston,arrosé d'hémoglobine ne fait pas avancer le schmilbblick, même si le punk trash est tendance. Au contraire, les grands libéraux, pseudo libertaires sont servis "sur un plateau" et le spectateur asservi dans son enfermement,ainsi validé.

Écrit par : patrick verroust | jeudi, 24 novembre 2011

Bertrand, Merci, j’apprécie! Je suis content de constater que ce billet d'humeur, de colère face à une fausse fureur rencontre des lecteurs et des échos. Il est de bon ton de prendre les gens pour des veaux passifs que quelques communicants éclairent. Il est réconfortant de constater, que partout, de la lucidité et de la réflexion existent. Elles sont des levains d'espoir pour trouver des issues aux embrouillaminis dans lesquels on nous coule. Dans cette affaire, je n'ai été que "le pauvre fou qui veille".

Écrit par : patrick verroust | jeudi, 24 novembre 2011

Ah, voilààààà... C'est quand même beaucoup mieux que dans un commentaire. Bravo Patrick, merci Solko ! :0)

Écrit par : Sophie K. | jeudi, 24 novembre 2011

Oui. On devrait les uns et les autres faire cela plus souvent. Le principe de l'invité ponctuel. Comme le dit Sophie, c'est quand même plsu convivial que dans un commentaire.

Écrit par : Bertrand | vendredi, 25 novembre 2011

Je me souviens d’un spectacle du même genre, vu il y a bien une vingtaine d’années. Un pièce d’après les « Lettres de la religieuse portugaise » de Guilleragues. Pour les besoins de la mise en scène, la représentation avait lieu dans un ancien bâtiment industriel désaffecté. On se promenait de pièce en pièce, d’hangar en atelier. Le tout délabré, avec des vitre cassées, un vent glacial, des dénivellations, de l’eau partout. Les acteurs ne faisaient que proférer des cris, parfois quelques mots, rarement une phrase entière. Ils se vautraient par terre, se frappaient, hurlaient. A la fin ils étaient tous en train de se rouler dans la boue, la plupart nus. Je n’ai jamais rien compris à ce spectacle et j’en suis ressorti avec la nette impression qu’on se moquait de moi.

Écrit par : Feuilly | vendredi, 25 novembre 2011

Ces commentaires laissent croire que les jalousies de certains dépassent leur controle de dignité: Tout comme *Quand les souffrances nous dépassent* et que Vincent Macaigne tente de les dessiner sur ses scènes:
et à croire Vincent Macaigne il a su de nous les faire comprendre. Certes que le théatre à Vincent Macaigne *abusé pleure sur son sort et abuseur doit l'éviter...
Sans doute dans notre existance SI on pouvait être moins jaloux et savoir plus partager , il aurait eu moins d'agressivité et un peu de bonheur pour tous.
Je note : Au moins Vincent Macaigne partage avec son groupe et ils sont tous très travailleurs et courageux .
Le théatre de Vincent Macaigne est pour donner la voix à ceux qui ne l'ont pas et souffrent. C'est une solidarité humaine.

Écrit par : smac | vendredi, 25 novembre 2011

c'est intéressant ce nouveau concept de "contrôle de dignité", ça recouvre quoi comme réalité exactement?

Écrit par : gmc | dimanche, 27 novembre 2011

c'est intéressant ce nouveau concept de "contrôle de dignité", ça recouvre quoi comme réalité exactement?

Écrit par : gmc | dimanche, 27 novembre 2011

Une dignité qui se contrôle est-elle encore digne ?

Écrit par : Bertrand | lundi, 28 novembre 2011

Pas bien compris non plus le commentaire de smac.

Écrit par : solko | lundi, 28 novembre 2011

on peut ne pas aimer le théatre de Vincent Macaigne , mais , c'est être mesquin : de jalousie vers nos jeunes* qui est grave ; EN tenter de tuer les jeunes - vous deviendriez plus riche? Moi, je dirai c'est d'étre mesquin en esprit et en...
Vincent Macaigne prévient toujours que son théatre crache: et justement il démontre le caractère de ceux qui se croient supérieurs : Mais ils ne le sont qu'avec les pires des actes à l'encontre des êtres innocents.Bien évident ! Le théatre de Vincent Macaigne avec son groupe: Le méchant ne l'aimera pas et mieux vaut l'éviter pour ne pas se trouver vexé, mais, l'abusé pleure ou rit sur son sort.
Le théatre de Vincent Macaigne; C'est de la *solidarité humaine* Vincent parle des principes de la morale qui sont en dégradation dans les sociétés actuelles.

Écrit par : sarah | vendredi, 16 décembre 2011

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