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jeudi, 22 juillet 2010

La lettre, le mot, la page

 9782212126211.jpg« Tout a changé à partir de 1985 pour la réalisation de certains travaux d’imprimerie, surtout dans le secteur de la publicité. Avec l’informatique graphique, une seule personne peut réaliser le travail en amont de l’imprimeur là où plusieurs personnes étaient nécessaires au temps du plomb. La transition ne s’est pas faite sans secousses. A la fin du deuxième millénaire, l’édition par informatique a remplacé presque toutes les techniques de l’ancienne imprimerie et la photogravure pour la reproduction des images. Le mot typographie ne conserve donc que son acception de style. Une typo signifie, en mise en pages, l’esthétique des rapports de masse entre les textes, les illustrations et les blancs. Le graphiste est donc moins spécialisé que ses prédécesseurs et, puisqu’il regroupe l’ensemble des métiers d’autrefois, son rôle devient plus flou. (…) Le graphiste doit acquérir une solide culture typographique pour répondre aux demandes. L’informatique graphique a remplacé l’exécution artisanale des documents et aurait dû maintenir la qualité. Malheureusement, il n’en est rien. Les cycles de la formation des graphistes sont volumineux. La connaissance typographique est une base prépondérante à notre époque où la publicité dispose d’une énorme typothèque. Si la communication graphique tombe dans la vulgarité, il ne faut pas accuser l’informatique graphique, mais le manque de formation des graphistes. Pour remédier à cette situation, il faut insister avec obstination sur la maîtrise du dessin, la connaissance de la lettre, l’histoire des arts graphiques, indispensables pour acquérir les savoirs qui permettront de répondre de façon professionnelle aux objectifs. »

 

Ce n’est pas tous les jours qu’on tombe sur un livre dont on comprend dès le premier contact qu’on est en compagnie d’un livre-testament, et c’est un peu ce qui, par hasard, vient de m’arriver avec celui de Jacques Bracquemond dont je cite quelques lignes. Jacques Bracquemond est mort en 2006.  Le livre sur lequel il a travaillé les dernières années de sa vie est sorti de presse en février 2010. C’est Jean-Luc Desong qui a parachevé l’ouvrage. Voilà une journée déjà que je prends un grand plaisir à feuilleter ses pages, lire au hasard les citations choisies, regarder les lettres de l’une ou l’autre famille qu’il commente. Sa vie durant, Jacques Bracquemond a appris à dessiner à toute sorte d’élèves du lycée d'arts graphiques Initiative à Paris, où il enseignait le trait, la lettre son histoire. Né en 1930, il appartenait à cette génération ambivalente qui s’en va à petits pas depuis que nous sommes entrés dans le millénaire du numérique. Je dis ambivalente, car elle aura été dans bien des domaines « coincée » entre l’exigence dans laquelle ses pères l’avaient façonnée, et ce rêve de facilité qu’elle a nourri pour ses enfants, au fur et à mesure que le progrès technologique lui paraissait une sorte de panacée universelle. Or le testament de Jacques Bracquemond, en ce qui concerne les arts graphiques, est clair : la facilité technologique n’est pas viable sans une véritable exigence intellectuelle en amont.

Or, ce qui est vrai de la typographie l’est de tous les domaines, comme si la typographie était l’allégorie même de la vie. Nous avons déjà payé cher – et nos enfants continueront à le faire, cette naïve croyance dans le progrès dont les gens de cette génération se sont réveillés un peu tard, lorsqu’ils se sont aperçus que la facilité technologique aurait pour corollaire ipso facto une facilité intellectuelle, pour ne pas dire une paresse, en tout cas chez le plus grand nombre, spécialement de jeunes gens. Et qu’il ne pourrait qu’en être ainsi.  

C’est cette inquiétude créative qui me plait dans ce livre, celle-là même qui motive un souci de vulgarisation intelligente et de transmission sensible à toutes les pages, et porté à son acmé jusqu’à la dernière.

 

Jacques Bracquemond, Typographie, la lettre, le mot, la page

Ed Eyrolles, février 2010

02:07 Publié dans Des Auteurs | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : typographie, graphisme, jacques bracquemond, infographie | | |

Commentaires

L'humanité qui devrait avoir mille ans de sagesse retombe en enfance a chaque génération, Chaque jour a apprendre a découvrir c'est ca la vie toujoura aller de l'avant malgré nos souffrances et nos peines sans oublier nos joies.

Écrit par : Clemence | mardi, 24 août 2010

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