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lundi, 07 juin 2010

Un dimanche ordinaire

Ce matin, sur la place, sont arrivées une trentaine de personnes. Certaines en maillots bleus. Des hommes, des femmes, entre trente et cinquante ans. Ils ont investi le lieu comme si c’était la cour d’un camping à Palavas les Flots : des glacières, deux barbecue, des sacs, des pliants et leurs foutus jeux de boules. Eux, elles. Comme si c’était chez eux. A une heure de l’après midi, ils ont commencé à enfumer tout le coin avec leur saloperie de fumée puante. Nous avons appelé la police nationale qui nous a dit qu’elle avait d’autres chats à fouetter. Le type au standard m’a donné le numéro de la municipale. Quand j’ai appelé, un répondeur m’a redirigé sur un service, enfin. Une voix.

J’ai expliqué au policier municipal que deux barbecues empuantissaient la place tandis qu’une trentaine de beaufs commençaient à jouer aux boules en gueulant : « on est des champions… On est champions… » Quand ils seraient avinés, ou plutôt abierés, ça allait devenir quoi ? Le type m’a dit qu’une voiture allait passer.

Un peu plus tard, en effet, une voiture de la police municipale est arrivée. Ils sont allés voir les types. Ils leur ont causé quelques instants.

Un peu plus tard, dix minutes à peine, toujours de la fumée. Nouvel appel. Mais cette fois-ci, lorsque la police arrive, c’est pour nous demander de descendre les rejoindre. Nous leur expliquons la situation. Les policiers municipaux nous expliquent qu’ils leur ont demandé d’éteindre leur barbecue, que ça devait prendre un quart d’heure. Ça ne fume plus, à présent. Nous comprenons qu’ils ne veulent pas se déplacer à nouveau pour ça.

Le barbecue en effet est éteint. Ils commencent à jouer aux boules. A hurler à chaque « but ». Gros rires gras. C’est la culture foot, m’a dit un jour quelqu’un. A chaque fois que tu marques, tu gueules. Tu gueules parce que tu jouis. C’est comme ça. Et ça promet.  Pourvu que les autres cons, là-bas, se ramassent au plus vite une bonne branlée. Rama Yade a proféré quelque chose de sensé à propos de cette foutue « culture foot ». Elle a  jugé indécent (il serait temps !) le choix d'un hôtel de luxe pour héberger les Bleus pendant la première phase de la Coupe du monde. Pour une fois qu’un membre de ce gouvernement disait quelque chose de décent, justement, il fallut bien qu’un autre le rabrouât. C’est venu de l’inénarrable Roselyne Bachelot, qui a fait la leçon à sa jeune collègue. Entre temps, vers quinze heures, il a plu. Fort. La place s’est vidée. Ouf. Les beaufs se sont barrés dans un café.

Une heure plus tard, les revoilà. Ils ont gueulé comme des veaux, comme s’ils étaient chez eux sur cette place. Espace public, espace privé… Ils ont gueulé, braillé, vociféré trois bonnes heures. Je préfère n’en rien dire de plus, de ces humains-là. Et de ces humaines, également. Pas un sexe pour racheter l'autre. Quel avenir, pour l'homme... Tous viennent de partir. Laissant des empilements de canettes, des sacs poubelles, des détritus. Il flotte à nouveau. Merci, la pluie. Si les noctambules n’en rajoutent pas tout à l’heure, les employés municipaux se chargeront de déblayer toute cette merde. Eux sont payés. C'est comme ça qu'il faut penser de nos jours. C'est pour ça que je parle d'alcoolisme municipalement organisé, et d'abrutissement étatiquement entretenu. Les employés municipaux, dans l'histoire : des domestiques, rien de plus. Qu'est-ce que vous croyez ? Les citoyens ? Des vieux cons. Un dimanche ordinaire. Vivement l’hiver.

 

 

08:06 Publié dans Des nuits et des jours... | Lien permanent | Commentaires (15) | Tags : société, football, rama yade, nuisance, barbecue, politique | | |

Commentaires

« Vivement l'hiver » , j'ai souvent dit la même chose et pour les mêmes raisons lorsque j'habitais en ville. C'est la confiscation de l'espace public, de l'espace sonore public, (foot, sonorisations commerciales, podiums avec rap, « concerts » de rock en plein air et bientôt, la fête du bruit que certains appellent aussi fête de la musique...

Écrit par : Christian Cottet-Emard | lundi, 07 juin 2010

Est-ce qu'on deviendrait plus tôt un vieux con lorsqu'on habite en ville? J'en parle à l'aise, j'habite sur une montagnette à 4 kilomètres de toute terre habitée, mais je trouve votre hargne surprenante. Surtout que vous en fassiez matière d'un billet sur votre blogue. Il y a tant de textes, de poèmes, d'histoires, dont vous pouvez nous entretenir... Et vous le faites si bien. Je vous lis attentivement. Merci.

Écrit par : Natacha | lundi, 07 juin 2010

@ Chistian Cottet Emard: c'est proprement, en effet, une destruction programmée de l'urbanité, une politique culturelle à la petite semaine. La fête de la musique, sur ce blogue, c'est "la fête de la merde", un billet fétiche que je republie tous les ans.
http://solko.hautetfort.com/archive/2007/06/21/fete-de-la-merde.html

Écrit par : solko | lundi, 07 juin 2010

@ Natacha :
Je crois que la connerie (jeune ou vieille) n'a rien à voir avec ça. Cela nécessiterait un long développement sur les politiques culturelles des villes, bradées depuis pas mal de temps au profit d'un laisser aller ou laisser brailler dans les rues. J'en fais un billet, parce que c'est un sujet central qui touche la vie réelle de trop de gens. La confusion entre l'espace public et privé (vous feriez-vous, vous, un barbecue avec glacières et jeux de boules, gueuleries d'alcoolos sur une place publique ?). De la hargne, oui, contre les pouvoirs publics qui laissent faire, encouragent même, ces évènements défoulatoires et pseudo festifs pour population frustrée, qui toujours dégénèrent. Habiter en ville, ce n'est pas subir la barbarie plus ou moins latente qui s'exprime dans ce genre de manifestations. Et l'intelligence n'a rien à voir avec une tolérance qui devient souvent de la veulerie ou le fait d'admettre n'importe quoi.

Écrit par : solko | lundi, 07 juin 2010

Cher Solko,
La confusion espace public - espace privé atteint des sommets en région parisienne, hélas. Et en effet les pouvoirs publics sont plus que complices, ils en sont souvent les instigateurs.
Que dire ainsi de cette répugnante bouillie sonore dans les gares de la défense, de Ch. de Gaulle Etoile; Vincennes. Curieusement c'est un fléau qui touche davantage les zones cossues, pour une fois la banlieue défavorisée est favorisée.
notez que de pauvres petites villes de provinces sont désormais affublés de saletés de HP déversant durant l'été leur saloperie sonore.

D'ailleurs la confusion entre "son" et "musique" est très patente dans la langue de demain, celle de la publicité : "emmenez le son Bose partout avec vous", lit-on à côté d'une photo d'un casque audio immense comme il s'en porte de plus en plus dans les rues. (Bose, tu l'as dit bouffi, au passage!)

Le baladeur est devenu, sous la poussée de l'iPOD à fils blancs, une marque sociale à arborer fièrement, alors même qu'il devenait réellement bon marché et accessible à tous. Curieuse évolution à méditer, cette "démocratisation" qui marque une volonté de surnivellement, de surenchère...

Et quitte à passer pour un parfait réac (ou vieux con), j'imagine d'ailleurs que l'avènement des liseuses couronne l'anéantissement de la culture humaniste, le déversement de la culture livresque réelle dans un magma "multimédia" masquant la vendition complète de la littérature.

(et après ce sera l'Apocalypse, ah ah...)

Là dessus, je vous salue Solko, et bon courage pour la fête du Son qui approche!!! C'est amusant d'ailleurs, les arts autrefois vecteurs de contestation (voir les primes ambitions du rock) récupérés par les pouvoirs publics dans une grande fête prétendument conviviale - me souviens m'être fait passé à tabac avec des amis, à Brest, un de ces 21 juin de ma jeunesse, bien gentiment éméchés). Tout le monde est poète, tout le monde est musicien; mais nul ne saurait dire où sont encore la poésie et la musique!!!).

Bon je vais préparer un petit slam si vous le voulez bien, le 21 juin approche...

Amitié.

Écrit par : Tanguy | mardi, 08 juin 2010

Concernant la fête de la musique, pourquoi se focaliser sur les aspects négatifs (les mauvais musiciens, les déchets, l'alcool, les passages à tabacs...)?

Découvrir un piano à queue à l'ombre d'un maronnier sur une petite place du 6ème arr., la musique délicate qui s'en échappe, ou une formation de jazz dans une ruelle du 20ème... et voilà qui vous met le coeur en joie... "heureux comme avec une femme".

En route pour la joie.

Écrit par : christian | mardi, 08 juin 2010

Tout à fait d'accord avec Christian. Mais trop souvent, le piano sous l'arbre ou la petite bande jazz ne font pas le poids (en décibels) à côté d'une grosse sono qui fait trembler les murs quelques rues plus loin. Cela me rappelle une affaire scandaleuse. Un concert classique en plein air, dans un parc, avait été complètement perturbé par un « concert » de rock dont le boucan s'entendait à des kilomètres sur toute une vallée ! Bien sûr, on va nous parler de tolérance...

Écrit par : Christian Cottet-Emard | mardi, 08 juin 2010

Y a des bons groupes de rock aussi...
Et puis Christian, c'est justement ça l'intérêt d'une fête : être parfois un peu bousculé dans ses habitudes, ses routines esthétiques...
Evidemment, il ne faut pas que les uns et les autres se marchent sur les pieds... mais, en général, ça se passe bien, et les filles sont jolies.

Écrit par : christian | mardi, 08 juin 2010

@ Christian : Vous savez, les filles sont jolies tout le reste de l'année aussi . Je ne vois pas où est trop l'argument là-dedans, en faveur de ce déchainement qui relève plus de la gestion des masses que de la fête. Et comme il n'y a rien de plus conventionnel que cette fête de la musique, je ne vois pas trop où se trouve ce qui peut nous bousculer dans nos habitudes esthétiques, très franchement. C'est terriblement routinier, répétitif, ringard...

Écrit par : Solko | mardi, 08 juin 2010

@ Tanguy : Eh oui, vous avez fait le tour de la question ! Mais vous avez, il y a des moments où les apparents réacs sont aussi l'avant-garde d'autre chose. Je crois que Rimbaud se foutant de la gueule du kiosque à musique institutionnel du second empire à Charleville dans "a la musique" aurait beaucoup à dire sur la fête de la musique instaurée par Lang en terme de conventionnel et d'académisme.
Amitiés itou

Écrit par : solko | mardi, 08 juin 2010

"Conventionnel","routinier", "répétitif", "ringard"...

Tous ces mots constituent une bonne vieille rengaine que l'on balance à tout va, pour disqualifier quelque chose (vous auriez pu ajouter "petit-bourgeois", etc.) sans trop s'attarder sur ce qu'ils recouvrent vraiment... Vu de haut, de très haut, oui, c'est répétitif (y a des musiciens, une fois par an, qui font de la musique dans la rue), conventionnel (c'est un truc organisé), etc. Mais de ce point de vue, peu de choses échapperaient à votre acrimonie...

Mais à hauteur d'homme, au gré d'une flânerie inspirée, ce que l'on pourra entendre, découvrir, telle année, n'aura rien à voir avec ce que l'on aura entendu l'année précédente...

Evidemment, si l'on reste chez soi en ayant convenu par avance que tout ce qui se passe dehors, c'est du bruit pour agiter la masse...

Peut-être qu'à un moment donné, on peut simplement s'abandonner à la confiance, se laisser aller... Sans pour autant être dupe de la vaste comédie du monde...

Écrit par : christian | mercredi, 09 juin 2010

- Christian :
Je ne me focalise pas, la passage à tabac est disons annexe. La beuverie généralisée moins - je puis vous le dire, j'en étais, j'avais 20 ans mais enfin...
Découvrir un piano à queue dans le bruit parisien ou dans un centre commercial je trouve cela détestable - je connais une personne que "j'apprécie" qui n'est pas d'accord, qui serait plutôt de votre avis.

Je préfère entendre un piano où il se justifie, dans une salle de concert, où le caractère sacré de la musique est encore respecté.

Je ne changerai pas d'avis sur la question, cette fête est une absurdité. Je me refuse d'y perdre mon temps et de la considérer autrement que comme - excusez, le terme est grossier - l'enc... de la jeunesse prétendument contestataire par les pouvoirs publics.

Par ailleurs je ne pense pas que l'art ait une fonction contestataire. Il EST la contestation, celle de l'homme seul - presque à l'égal de la prière. Et toute forme d'action "politique" au sens propre représentant la contestation de l'homme en société.

Vous le dites bien : "s'abandonner à la confiance"... Mais abandonner sa confiance à qui? A quels politiciens????

Je suis à peu près certain qu'un vrai musicien n'a que foutre de cette fête. Comme un vrai écrivain n'a que foutre d'un prix littéraire. (lisez donc "Mes prix" de Thomas Bernhard, c'est parfait sur cette question!). Qu'on puisse s'amuser à une fête de la musique - moi même si j'allais en certains endroits bien accompagné, je ne m'ennuierai pas - cela se conçoit. Mais en quoi cela devrait interdire d'avoir un regard critique sur ces rassemblements institutionnalisés?

Écrit par : Tanguy | mercredi, 09 juin 2010

Il ne me semble pas qu'il y ait là une enc... de la jeunesse par les politiciens... Bien évidemment, Lang se foutait pas mal de la jeunesse quand il a institutionnalisé cette fête (peut-être pas d'ailleurs, allez savoir), en tout cas, il en a tiré un certain bénéfice symbolique, lequel est thésaurisé par la gauche...
Bon, ça c'est entendu...

Mais le fait est qu'indépendamment de ces calculs politiques, cette journée offre quelques opportunités à s'enthousiasmer.
Pour moi, c'est l'essentiel.

Faut-il condamner toute décision politique, toute intervention institutionnelle, sous prétexte qu'elle est issue d'un calcul politique? Les congés payés, c'est quelque chose d'institutionnalisé, c'est mal? (aïe, je vous vois venir... Bien sûr, cela a généré des hordes de plagistes en furie, étalant leur carcasse huilée sur nos belles plages converties pour l'occasion en "bronzoirs" de masse)

p.s. : Le piano à queue dans le centre commercial, j'ai un peu de mal aussi... à vrai dire, j'ai surtout du mal avec le centre commercial...

Écrit par : christian | mercredi, 09 juin 2010

@ Christian : Et vous pensez quoi du salon de l'agriculture ? Au moins, on y fait des affaires... Mais il y a pas des vaches plein les rues....

Écrit par : Solko | jeudi, 10 juin 2010

Tant qu'il y a des jolies filles...

Écrit par : christian | jeudi, 10 juin 2010

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