jeudi, 12 juin 2008
Le cinéma-Grévin
Après Piaf, Sagan. J’ignore ce que ces deux femmes ont fait au Ciel pour mériter tel traitement. Après Marion Cotillard, Sylvie Testud et toute une production s’acharnent donc en parfaits charognards sur l’image de la pauvre Sagan, avec la bénédiction d’un pseudo-monde littéraire à l’agonie. Ce qui a marché pour Edith La-Vie-En-Rose (un césar, un oscar…) se dit-on, pourrait marcher pour Sylvie Bonjour-Tristesse : mais d’où sort-il, d'où nous vient -il, ce mauvais cinéma, cet anti-cinéma, ce cinéma dégueulasse dont l’ambition se borne à des effets de couper-coller hyper-naïfs, symptomatique d’une époque ivre de bling-bling et de pête-au-cul ? L’ « être-comme », le « ressembler » comme base de l’interprétation. Aïe ! aïe ! aïe !… C'est-à-dire l'imitation au lieu de l’interprétation. L’acteur chosifié, englué dans du maquillage comme un pitre dans sa sueur, une guêpe dans une tache de… On se souvient du Mitterand-Bouquet du Promeneur du Champ de Mars qui fut une sorte de préfiguration de ce nouveau cinéma-Grévin. Puis du carrément ridicule Torreton-Jaurès… Et la critique béate ou bien vendue, de s’extasier devant des acteurs starifiés c'est-à-dire lobotomisés au sens propre, acteurs dont le graisseux génie se borne à une prouesse de sosie : que devient le talent dans tout ça ? Et quel peut bien être l’intérêt de tels films (hormis économique) sinon impressionner pour quelques heures des masses de spectateurs eux-aussi lobotomisés (mais pas starifiés) !
Au Célestins de Lyon, Claudia Stavisky propose plus discrètement et plus intelligemment deux spectacles de marionnettes pour la saison prochaine : du 10 au 28 décembre 2007, Les embiernnes recommencent, un spectacle sur Guignol d’Emilie Valentin ( que la municipalité de Montélimar vient scandaleusement de virer de son théâtre du Fust qu’elle occupait avec talent depuis trente ans), L’Opéra de Quat’sous de Brecht, par Johany Bert, du 25 février au 7 mars. Spectacles dont on aura l’occasion de reparler. Car je me dis que face à la boulimie hystérique de l’acteur contemporain, Anatole France avait sans doute raison, qui proclamait, dans La Vie Littéraire : « J’ai vu deux fois les marionnettes de la rue Vivienne et j’y ai pris un grand plaisir. Je leur sais un gré infini de remplacer les acteurs vivants. S’il faut dire toute ma pensée, les acteurs, me gâtent la comédie. J’entends les bons acteurs. Je m’accommoderais encore des autres ! mais ce sont les artistes excellents que décidément je ne puis souffrir. Leur talent est trop grand : il couvre tout. Il n’y a qu’eux. Leur personne efface l’œuvre qu’ils représentent… »
Epoque étrange, n'est-ce pas ? Car au demeurant, de quoi rêvent Torreton, Bouquet, Testud, Cotillard et consorts, tous les sublimes et interchangeables maquillés de la pellicule, sinon d’avoir un jour, comme tous leurs copains politiques, leurs marionnettes aux Guignols de l'in-faux ????
10:28 Publié dans Des pièces de théâtre | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : sagan, cinéma, testud, valentin, célestins, théâtre, littérature |