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samedi, 08 juin 2013

Spirou au Grand Orient

On ignore à ce jour qui a profané la cathédrale Saint-Pierre de Nantes : croix gammées, statuettes de Femen, figurants de la manif pour tous avec des moustaches d'Hitler…. Il semble que les confusions entretenues par un certain nombre de déclarations récentes, en premier lieu celles de Pierre Bergé, assimilant les opposants au mariage gay à des extrémismes haineux, aient trouvé leur écho chez certains déséquilibrés.

Le préfet de Loire Atlantique a condamné l’acte au nom de la responsabilité de l’Etat dans la protection du patrimoine historique (sic). Le petit Valls, si prompt à monter au créneau, n’a toujours rien dit. Trop occupé sans doute à  « hausser le ton » contre les nombreux maires refusant de marier des gays. 45% des Français, d’après un sondage récent, pense qu’il ferait un excellent premier ministre. Avec sa gueule de Spirou au Grand Orient, c’est vrai qu’il ferait un bon groom. L’entendra-t-on quand même condamner l’acte au 20 heures,d'autant plus que la porte de celle de Limoges a été, pour sa part, taguée de cette inscription : [droit canonique = sharia] ? Rien n'est moins sûr. Le petit groom sait ce qu'il fait. 

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Pour ma part, j’ai compris que les quatre ans que ce pauvre pays doit encore passer sous la direction de ce président pour lequel je me réjouis jour après jour de n’avoir pas voté tant il me semblait faux d’instinct, vont être plus clivants et plus destructeurs que jamais pour le pays, puisque cette équipe n’a qu’une seule arme pour rester au pouvoir : semer la division et divertir des enjeux vitaux, au risque de lui faire courir la pire des violences.

Il va donc falloir, devant les conséquences inéluctables des tentatives de récupération et des faux débats semés par ces gens, devant l’accroissement du chômage et l’amplitude de la crise dont ils sont les complices historiques, devant aussi l'appauvrissement culturel qu'ils incarnent, garder, plus que jamais la tête froide pour rester républicain face à une telle mascarade. Je trouve pour ma part cet état de fait tellement attristant que je ne vois, pour ne pas céder moi-même à un engagement dans une opposition politique qui me répugne autant que me répugne le président Hollande, qu'un engagement dans la littérature. Je ne sais combien de gens liront le roman dans l'écriture duquel je suis plongé depuis février, et qui me procure les joies, les peines, les vertiges et les crampes d'un chantier incessant. Pas beaucoup sans doute. Je peine cependant pour qu'ils se sentent alors lavés de toutes ces turpitudes du présent, et heureux dans leur lecture. C'est comme ça, vous le croirez ou non, que je traverse ces temps délétères.

17:40 | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : france, cathédrale de nantes, spirou, manuel valls, littérature | | |

lundi, 29 août 2011

Notre grand 7

Véritable remue-ménage dans le réseau de transports en commun lyonnais (TCL) ;  « Le bus change, le réseau s’améliore, tout TCL avance,  vous circulez mieux » : fidèle à la rhétorique de l’époque, les communicants parlent d’un « projet  majeur », auquel ils attribuent cinq « progrès » (le tout dernier étant, ça va de soi, une moindre pollution) A la fois anagramme et mot valise, le titre de l’opération (dont les raisons doivent être économiques) est Atoubus. Y aurait-il des oulipiens aux TCL ?

On découvre donc que le réseau lyonnais aura dorénavant des « lignes majeures » (au nombre de 26) et puis d’autres. On attendrait bien sûr mineures. Dites plutôt « complémentaires » et « spécifiques ». Ces dernières baptisées selon leur parcours de noms charmants : « soyeuses » pour les touristes, « zone industrielle » ou «gar’express » pour les banlieusards, « pleine lune » pour les noctambules et  « résago » pour les résidentiels ou les organisateurs de congrès, avec un système de réservation téléphonique à la carte.

A l’époque de « l’abonné de la ligne U », roman de Claude Aveline, puis feuilleton radiophonique, puis téléfilm, on n’était pas l’abonné d’un réseau, mais chacun avait sa ligne, qu’il prenait chaque jour. Tout le monde se connaissait dans le bus de 7h08, chacun avait quasiment sa place comme dans la pension de famille. Chaque autobus formait un univers ambulant avec son chauffeur (à l’avant) et son guichetier (à l’arrière), et lorsque une panne de réveil vous livrait à celui de 7h21, ou pire de 7h 39, vous vous retrouviez carrément en pleine terre étrangère.

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Les lignes possédaient des notoriétés diverses. Le 6, arpentant les pentes de la Croix-Rousse, le 4, explorant les Beaux Quartiers, le 7, cheminant de Perrache aux Brotteaux par le pont Morand jusqu’à Cusset. Tour à tour fiacre, tramway, autobus, le 7 fut la ligne la plus dense et sans doute la plus populaire du réseau de l’époque car elle reliait deux gares, parcourait successivement les rues les plus attrayantes de Lyon puis de Villeurbanne, desservant deux théâtres (Célestins et TNP), la ligne 7 était la plus dense du réseau, la première à être remplacée par un métro. Tancrède de Visan publia en 1934 un recueil de nouvelles, « Perrache-Brotteaux », dans lequel il écrivait : « J’ai réuni ces bagatelles sous le titre symbolique Perrache-Brotteaux. C’est la qualification de notre tram le plus populaire, le mieux achalandé, notre grand 7, celui qui, prenant le départ proche notre antique presqu’ile marécageuse, aboutit avec le temps au quartier neuf de notre cité en longeant la place Bellecour et notre artère principale dénommée comme partout  rue de la République » Il y a dans l’emploi du déterminant possessif quelque chose de monarchique et suranné, une fierté provinciale au chauvinisme ironique qui dit bien la façon d’être ensemble des gens de l’époque. « Entendre un ingénieur OTL parler de la 7 est aussi impressionnant qu’entendre un cheminot parler du Mistral ou un New-Yorkais de l’Empire State Building. », note Jean Arrivetz dans son Histoire des Transports à Lyon, paru en 1965.  Cette époque de l’Abonné de la ligne U était celle de la ligne unique mais aussi le temps de la ligne claire, lorsque ni les albums de Spirou, ni ceux de Tintin n'étaient des pièces de collection. 

08:30 Publié dans Bouffez du Lyon | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : spirou, tintin, l'abonné de la ligne u, tcl, atoubus, lyon, tancrède de visan | | |