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vendredi, 31 juillet 2009

Le chêne de Jaslo

Cela se passe dans une petite ville en Pologne, Jaslo dans les Basses-Carpates, au carrefour des rues Kosciuszko et Kollataj. Là vit un chêne, planté depuis soixante-sept ans. Voilà qu’on découvre soudainement que ce chêne est un arbre subversif. En effet, il a été planté là le 20 avril 1942, en l’honneur d’Hitler, le jour de son anniversaire. Un témoin raconte : « J’avais alors 13 ans. J’ai vu des notables allemands planter cet arbre. Il y avait même un orchestre militaire. Ils ont sorti l’arbre d’une malle ornée de svastikas ».

Branle bas de combat.

La mairesse, une certaine Maria Kurowska, [élue du parti Droit et justice] prend le premier rang de la croisade. Il y aurait dans le pays d’autres cadeaux de ce genre, avance-t-elle. « Hitler attachait beaucoup d’importance aux rituels et aux symboles », rappelle l’historien de service, un certain Grzegorz Kucharczyk, membre de la commission d’histoire de l’Allemagne et des relations germano-polonaises de l’Académie des sciences de Pologne. Le monsieur est érudit : il sait que «dans la mythologie germanique, le chêne symbolisait la force. Il y a peu, on a découvert en Allemagne des chênes plantés selon le tracé d’une croix gammée ». Vinzou !

chene-de-jaslo.jpgLa municipalité décide donc d’abattre le chêne, sous le prétexte qu’en 1944, les Allemands ont chassé la population de Jaslo et détruit la ville. Seuls en réchappèrent une partie de la salle de sport et ce chêne là,  le chêne de Hitler.

« On ne peut pas défendre un arbre offert par un homme aussi horrible», argumente Maria Kurowska. Se rend-elle compte à quel point ce qu’elle dit est idiot ? Pas sûr. Moi, franchement, ces gens-là m’effraient plus encore que les gens qu’ils condamnent. Car qui fait l’ange fait la bête. Et je ne suis pas certain que quelqu’un qui confond un arbre et un nazi ne soit pas capable de voter demain pour un dictateur dément.

Je me souviens qu’à l’occasion de la sortie d’un film sur Hitler que je n’ai pas vu, il y a un ou deux ans, un film dont j’ai beaucoup entendu parler, des bien-pensants s’indignaient qu’on pût montrer Hitler comme un brave homme chérissant sa femme et son chien. Bien sûr, le « débat » (si à ce point d’âneries on peut encore appeler cela des débats, même Delarue, dans ses grandes heures, ne fait pas si indigent, Ségolène, peut-être ? Enfin, passons…), le débat a pénétré les classes. Hitler était-il un homme ?

A ma connaissance, oui. J’ai dû expliquer à ces « jeunes » occidentaux qu’Hitler n’était pas un martien, que oui oui, c'était bien un être humain, tout comme eux. Cette petite fable est révélatrice de la difficulté que nos sociétés ouatées ont à penser le mal. Surtout le mal humain (Humm : Vous en connaissez un autre ?NDRL)

Je me suis retrouvé à expliquer à ces élèves que non, bien sûr, l’être humain n’était pas non plus cette créature angélique qu’un rousseauisme mal digéré a fait confondre avec je ne sais quelle beauté céleste et innocente qui aurait tous les droits, et à laquelle ils aiment s'identifier.  Que oui les nazis, bien sûr, bien sûr, étaient bien nés sur la Terre et pas débarqués de la planète Mars, que non, nonon n’avait jamais vu des arbres défiler au pas cadencé, (ni se jeter en hordes sur les autoroutes et les aéroports, au risque de bousiller l’écosystème), mais que des humains faisaient ça ...

Eh bien je me trompais !

Car preuve est faite que si : il y a des arbres méchants, il y a des arbres nazis. Des arbres méchants et nazis au point de devoir être abattus. CQFD.

Pour en revenir, donc,  à la sotte mairesse, une fois que l’arbre sera abattu, elle voudrait planter un autre chêne (un gentil) en mémoire des officiers polonais fusillés en 1940 à Katyn par les Soviétiques. Arbre juste contre arbre injuste, vilain chêne contre bon chêne. Il parait qu’un rabbin du Canada offre depuis l’hospitalité au malheureux chêne discriminé.

A une époque, la Fontaine en aurait fait une fable.

Plus près de nous, Brassens chantait encore les malheurs du Grand Chêne.

Aujourd’hui …

Il y a peut-être une solution : qu'on fusille tous les êtres humains nés un 20 avril, anniversaire de la naissance du grand méchant loup. Car on ne sait jamais : mieux vaut prévenir que guérir.

Un certain Hérode, il y a fort longtemps, pratiquait déjà ce genre de politique préventive. Mais lui, dans l'autre sens.

Qui a dit qu'un arbre ne se connaît pas misérable, mais que l'homme, lui, le plus faible roseau de la nature, était un roseau pensant ?