dimanche, 14 juillet 2013
Son ombre, peut-être
La nouvelle est passée quasiment inaperçue en ce dimanche quatorze juillet : Suzanne Burrier, la doyenne des Français « s’est éteinte », comme on dit pudiquement. A l’âge de 112 ans. Dix de moins que Jeanne Calment, comme quoi ce qu’on nous raconte sur l’allongement de la vie tient de la billevesée.
Au Ventoux, il est interdit de dire qu’on a des soupçons devant la dégaine de celui qui « fait mieux que Lance Armstrong ». Froome et sa tête de E.T. surmoléculé qui sprinte en pleine côte n’émeut pourtant plus personne. S’il porte bien le maillot jaune, faut dire qu’il porte mal la joie. Il remplit un contrat, l’air pincé. C’est tout. Le Tour mérite mieux.
L’Elysée aussi. La cravate de travers sous les quolibets, hué, conspué, Hollande a récolté, l’air pincé, ce qu’il a semé. Puis, devant une pelouse de l’Elysée vide et mal taillée, il a parlé pour ne rien dire, « d’être optimiste », comme Sarkozy naguère, devant Claire Chazal qu’un inconnu avait recouverte d’un sceau d’excréments au sortir de TF1 il y a deux semaines. Drôle de pays. Pendant ce temps, les cigarettes prennent 20 centimes.
En un week-end, Guillaume Pépy, patron de la SNCF, est devenu une star grâce à une éclisse. Il n’empêche. Je ne sais pas ce qui est le plus stupéfiant et horrible à la fois : se retrouver dans un wagon qui est projeté sur un quai, ou sur un quai et se recevoir un wagon en pleine figure. Les cellules de soutien psychologiques, comme les minutes de silence, ne font que masquer l'indicible. En haut lieu, on fait mine de découvrir que les infrastructures des « lignes malades » sont vraiment vétustes. Ce que tout usager normal sait depuis déjà longtemps.
L’héritier(e) de la couronne britannique aura de la classe : pour preuve, malgré tous les journalistes massés devant l’hôpital où sa mère s’apprête à lui donner naissance, malgré l’impatience des sujets de Sa Gracieuse, il a eu le bon goût de ne pas naître le jour de la fête nationale des Frenchies. Dans ses Mémoires, Las Cases rappelle le propos de Napoléon à l’accoucheur de Marie-Louise, archiduchesse d’Autriche, princesse de Hongrie et de Bohème, « qu’il n’avait qu’à se figurer qu’il accouchait une bourgeoise de la rue Saint-Denis ». Kate Middleton, qui n’est que la fille d’une bourgeoise du Berkshire aura droit, elle, à un accouchement de reine. Quant à Line Renaud, elle vient d'accéder au grade de Grand Officier de la légion d'honneur voulue par l'Empereur. Ainsi va le monde.
Pour finir, comme si les gens s'intéressaient encore aux timbres postes, Olivier Ciappa, l'un des auteurs du nouveau timbre choisi par le président de la République vient d'avouer qu'il lui a été inspiré par l'une des fondatrices des Femen, Inna Schevchenko, ce qui ne manque pas de provoquer émois et débats sur les réseaux sociaux. Mariane, une Femen... Ce monde, aussi vide de surprise qu'il est empli d'excès, décidément, ne mérite que la satire. C'est ce que dirait l'illustre neveu de Rameau, s'il errait encore parmi nous ; celui qui riait de tout dans les jardins du Palais Royal et poussait le bois dans les beaux cafés... Son ombre, peut-être...
Gravure de Fernand Siméon pour Le Neveu de Rameau, Jules Meynial Ed
Bibliothèque nationale de France, département Arts du spectacle,
21:13 Publié dans Aventures post-mortem de la langue française | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : inna schevchenko, guillaume pépy, las cases, kate middleton, christopher froome, suzanne burrier |