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vendredi, 18 juin 2010

Waterloo, morne plaine

« Moi je suis un mondain. Je crains Dieu, mais je crains plus l’enfer de la misère. Etre sans le sou, c’est le dernier degré du malheur dans notre ordre social actuel. Je suis de mon temps. J’honore l’argent »  C’est un personnage de La Cousine Bette de Balzac, un salaud pur jus, le bien nommé Crevel qui s’exprime aussi vertement. Oh, ça pourrait tellement être aussi n’importe lequel d’entre nous, non ?  L’actualité de Balzac est saisissante ; si l’actualité de cette œuvre est si saisissante, c’est qu’elle a placé en son centre exact ce qui est au centre exact du monde déliquescent qui est le nôtre depuis deux siècles : écoutons-le, en ce tout début de chapitre XXIX de cette étonnante Cousine Bette, ce Celestin Crevel, génial autant que taré, éternel et à jamais crevé : « C’est le roi Louis-Philippe qui règne, et il ne s’abuse pas là-dessus. Il sait comme nous tous qu’au-dessus de la Charte, il y a la sainte, la vénérée, la solide, l’aimable, la gracieuse, la belle, la noble, la jeune, la toute-puissante pièce de cent sous ».

Au centre de l’œuvre, donc, une compréhension dont Marx et Engels, dans leur correspondance, s’étonnaient eux-mêmes, s’avouant l’un à l’autre tels deux écoliers naïfs qu’ils avaient « plus appris sur l’économie à la lecture des Paysans de Balzac qu'en lisant les économistes et les historiens ». Cette phrase, par exemple, que je retrouve sur l’une de mes fiches thématiques et jaunies qui datent de mes premières lectures de la Comédie Humaine (en des temps pré-informatiques -autant dire préhistoriques-) mais ces fiches écornées (sur lesquelles je reconnais mon écriture d’alors) témoignent que ces temps pas très éloignés de Waterloo ont bel et bien existé : « Une voix lui cria bien : l’intelligence est le levier avec lequel on remue le monde. Mais une autre voix lui cria que le point d’appui de l’intelligence était l’argent. »

On trouve cela dans les Illusions Perdues, bien sûr.

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01:48 Publié dans Des Auteurs | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : balzac, politique, waterloo, littérature, cousine bette, colonel chabert, actualité | | |

vendredi, 27 juin 2008

J'honore l'argent

"Etre sans le sou, c'est le dernier degré du malheur dans notre ordre social. actuel. Je suis de mon temps. J'honore l'argent!" Balzac plaçait cettte réplique dans la bouche de son personnage, le bien nommé Crevel de La cousine Bette. A la même époque, Guizot lançait son slogan déjà sarkoziste à la figure de toute une génération: Enrichissez-vous. Autre citation de Balzac, même roman : "Au-dessus de la charte, il y a la sainte, la vénérée, la solide, l'aimable, la gracieuse, la belle, la noble, la jeune, la toute-puissante pièce de cent sous." Voilà. Dans sa longue liste d'adjectifs, Balzac englobait tous les ordres, de la noblesse au clergé, tous les sexes, tous les âges; réplique du Veau d'or façon Monarchie de Juillet. Qu'en est-il aujourd'hui ? La pièce d'un euro a su tout garder de sa sainteté ; rajoutons qu'elle est aussi sportive, musicale, cinématographique, journalistique, industrielle, européenne et mondialiste, humanitaire, technologique, créative, sexy, parfois grave mais jamais trop. En tout cas, pas dans une poche. Terrible Balzac, cloitré chaque nuit dans sa maison rue Raynouard, griffonant à l'aube, le coeur ivre de café et de dettes : "Une voix lui cria bien : l'intelligence est le levier avec lequel on remue le monde. Mais une autre voix lui cria que le point d'appui de l'intelligence était l'argent."

12:50 Publié dans Lieux communs | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : balzac, cousine bette, société, politique, littérature | | |