lundi, 19 mai 2008
Les lyonnais au 7ème ciel
Le slogan est facile ; le jeu de mots est idiot. Pour une manchette du Progrès, une première page de l’Equipe, passe encore. Passe encore. Titre régional, titre sportif, tous deux amis des piliers de bistrots et de ce genre d’approximations : pourtant, être citoyen, désormais, cela se décline-t-il sur le même ton qu’être supporter ? C’est bien, en effet, sur les panneaux d’affichage municipal électroniques que la phrase tourne en boucle : LES LYONNAIS AU SEPTIEME CIEL ; là où d’habitude sont annoncées les permanences de mairies et autres renseignements : monsieur Collomb, jusqu’à quel point prenez vous vos électeurs, et tous les autres pour des cons ?
Dans le vestiaire de l’OL, samedi soir, à Auxerre, Cris et ses copains répandent comme du foutre le champagne de la victoire par bouteilles entières sur le carreau. Vision inquiétante du mâle heureux, du champion qu’on est, s’il faut en croire la parole sainte de la chanson. Tout à coup, le visage rond et les yeux globuleux du président Aulas, annonçant par la porte entrouverte à tous ses joueurs : « si samedi prochain, vous gagnez la coupe de France, je vous offre une décapotable à tous »… « Je vous offre une décapotable… » Et pourquoi pas une belle petite pute en prime ? Ah, les vraies valeurs du footballeur, les voilà donc, la belle nana et la belle caisse, les bonnes valeurs citoyennes des salariés en milliers d’euros... Et tous, donc, dans ce vestiaire de milliardaires, tous ces héros qui ont propulsé chaque Lyonnaise et chaque lyonnais à parité égale – parait-il - « au septième ciel », tous de se mettre à brailler brailli-braillant et tous en chœur : Président, président…, tout en faisant encore gicler le contenu des bouteilles de champagne tout autour d’eux, et sur le col de la veste de Jean Michel.
Autre image, tout aussi ahurissante, celle d’un pauvre mec d’une trentaine d’années perdu sur les tribunes lensoises de cette dernière journée de championnat, qui tombe en pleurs, oui, vous lisez bien, en pleurs. Parce que, oui, figurez-vous, Lens, un club historique, le club des ch’tis, savez-vous pas, Lens, eh bien Lens est pour de bon relégué « dans l’enfer » de la Ligue 2. Et voilà que, soudain, un petit gamin -six ou sept ans pas plus- ce petit gamin prend ce qui doit être son père et dont la poitrine est tout brisé de sanglots incompréhensibles et horrifiants dans ses bras pour le consoler comme il le peut : un monde à l’envers. Et voilà qu’on comprend comment la passion du foot vient aux pauvres gosses, me direz-vous… Dernière image, pour achever d’horripiler les irréductibles, en prélude de ce qui nous attend avec l’Euro et la putain de liste de Domenech : En Chine, cette fois-ci. En Chine. On compte les morts au fur et à mesure qu’on les découvre, un à un, les morts, une à une, les dépouilles, on les aligne, on les recense, on les couvre, et puis on désinfecte. . Cela en fait de bien beaux reportages, n’est-ce pas monsieur PPDA, n’est-ce pas monsieur Pujadas… Félicitations au membres du gouvernement chinois puisque, au contraire des vilains dirigeants de Birmanie qui refusent l’accès aux occidentaux, sont pour une fois « transparents » : Ah, cette mondialisation des Droits de l’Homme par le sport, les médias et l’économie, un septième ciel, n’est-ce pas ! Et c’est au nom de ce septième ciel que nous devons tous nous réjouir, enfants, femmes et hommes de cette Terre ravagée, surpeuplée, et pourtant joyeusement indifférente, parce que, proclame un speaker dans toutes les langues, sur ces images de désolation : la flamme olympique va passer….
20:26 Publié dans Bouffez du Lyon | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : lyon, championnat, politique, foot, aulas, collomb, domenech |